Il existe maintenant, en Occident, un nombre plus grand qu’on ne croit
d’hommes qui commencent à prendre conscience de ce qui manque à leur
civilisation ;
s’ils en sont réduits à des aspirations imprécises et à des recherches
trop souvent stériles, si même il leur arrive de s’égarer complètement, c’est parce
qu’ils manquent de données réelles auxquelles rien ne peut suppléer, et parce qu’il
n’y a aucune organisation qui puisse leur fournir la direction doctrinale nécessaire.
Nous ne parlons pas en cela, bien entendu, de ceux qui ont pu trouver cette
direction dans les traditions orientales, et qui sont ainsi, intellectuellement, en dehors
du monde occidental ; ceux là, qui ne peuvent d’ailleurs représenter qu’un cas
d’exception, ne sauraient aucunement être partie intégrante d’une élite occidentale ;
ils sont en réalité un prolongement des élites orientales, qui pourrait devenir un trait
d’union entre celles-ci et l’élite occidentale le jour où cette dernière serait arrivée à se
constituer ; mais elle ne peut, par définition en quelque sorte, être constituée que par
une initiative proprement occidentale, et c’est là que réside toute la difficulté.
Cette initiative n’est possible que de deux façons : ou l’Occident en trouvera les moyens en
lui-même, par un retour direct à sa propre tradition, retour qui serait comme un réveil
spontané de possibilités latentes ; ou certains éléments occidentaux accompliront ce
travail de restauration à l’aide d’une certaine connaissance des doctrines orientales,
connaissance qui cependant ne pourra être absolument immédiate pour eux,
puisqu’ils doivent demeurer occidentaux, mais qui pourra être obtenue par une sorte
d’influence au second degré, s’exerçant à travers des intermédiaires tels que ceux
auxquels nous faisions allusion tout à l’heure.
La première de ces deux hypothèses est fort peu vraisemblable, car elle implique l’existence, en Occident, d’un point au moins où l’esprit traditionnel se serait conservé intégralement, et nous avons dit que, en dépit de certaines affirmations, cette existence nous paraît extrêmement douteuse ; c’est donc la seconde hypothèse qu’il convient d’examiner de plus près.
Dans ce cas, il y aurait avantage, bien que cela ne soit pas d’une nécessité absolue, à ce que l’élite en formation pût prendre un point d’appui dans une organisation occidentale ayant déjà une existence effective ;
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