Roberto Saviano est cet écrivain italien auteur du livre Gomorra, à l’origine de la série du même nom. Une vision brutale de l’Italie du Sud d’aujourd’hui, où la guerre des gangs met aux prises la jeune génération à l’ancienne.
On assiste à la pénétration – à la faveur de la pauvreté endémique – de la pieuvre mafieuse au cœur d’une gigantesque cité de Naples, les habitants étant placés devant un choix cornélien : participer directement au crime et à son économie, ou s’en faire les complices muets et terrorisés.
Le résumé de la saison 1 :
Les critiques de la saison 2 :
La fiction à la Saviano n’est pas éloignée du réel. En avril 2013, Élise Lucet lançait ce reportage sur les quartiers populaires de Naples dans son journal télévisé.
D’une manière plus globale, la dénonciation de la mafia par Saviano s’arrête à la mafia napolitaine, voire italienne. Il n’est pas question pour lui de dénoncer d’autres mafias, autrement plus puissantes, au rayon d’action international et basées sur une appartenance communautaire très exclusive. Roberto Saviano est en effet membre de la communauté juive, sa mère s’appelant Miriam Haftar. Les critiques contre le travail de Saviano insistent sur le fait qu’il a pour conséquence majeure d’assimiler l’Italie à la mafia. Une image négative qui blanchirait en quelque sorte le lobby sioniste.
Ils n’en viennent pas encore aux mains, mais les mots font mal. Le romancier Roberto Saviano et le maire de Naples, Luigi De Magistris se sont gentiment étrillés sur les réseaux. Suite à la fusillade survenue ce 4 janvier dans la ville, blessant une jeune fille de 10 ans, le journaliste et écrivain a lourdement chargé le maire. Déclenchant une controverse qui secoue le pays.
- La cité interdite, star du film de Saviano
« À Naples, on parle du tourisme et des fêtes sur les places, comme d’une solution à tous les maux, avec un maire qui administre depuis six ans la ville et on dit que tout semble alors réglé. Ce n’est pas la faute du maire, si des mineurs s’entretuent, mais il en ira de sa responsabilité s’il affirme que le décrochage scolaire est une plaie fermée, alors qu’un mineur sur trois, dans des quartiers à risques, ne va pas à l’école », attaquait Saviano dans un post Facebook.
Et d’ajouter : « Le tourisme ne guérit pas le mal-être, ce n’est pas la réponse aux problèmes de la ville. La Camorra contrôle les dérives, pas la police municipale – organe de protection qui découle directement de la ville. »
La fusillade du 4 janvier est en effet à mettre sur le compte de la mafia : il s’agit d’un raid organisé contre un groupe de Sénégalais, vivant à Naples, et qui a refusé de s’acquitter du pizzo, l’argent de la protection – ou celui du racket, c’est au choix.
Évidemment, ce n’est pas le premier échange de politesses entre l’écrivain et le maire : depuis longtemps, les deux hommes s’affrontent, Saviano dénonçant l’absence de réaction des autorités napolitaines, devant la mafia locale. Et cette fois encore, De Magistris n’a pas mâché ses mots.
- Arrestation de 24 mafieux à l’été 2016
« Tu fais ton beurre sur le dos de Naples »
« Cher Saviano : chaque fois qu’un crime survient à Naples, tes paroles tombent réglées comme une horloge, cette invective qui dit qu’à Naples rien ne change. Étant donné que les problèmes sont nombreux dans notre ville, comment fais-tu pour savoir quels sont les changements à Naples ? Saviano, tu ne peux pas savoir : la vérité est que tu ne veux pas parler de ce qui évolue. Tu es une marque qui tourne si une certaine narration se met en place : tu fais ton beurre sur le dos de Naples et des Napolitains. »
Évidemment, pour le Maire, il est simple de faire ainsi allusion aux ouvrages publiés sur la mafia napolitaine, dont Saviano s’est fait avec le temps le pourfendeur. Or, si les choses venaient à changer en profondeur, l’écrivain perdrait toute son aura, son intérêt – et ses revenus. Et d’inviter Saviano, en bon intellectuel, à mieux étudier l’ensemble de la ville, « avant de parler et d’écrire ».
Il conclut : « Cher Saviano, ne spécule pas davantage sur notre peau. Salis-toi les mains, en te plongeant dans de véritables faits. »
Il est vrai que toute la carrière de Saviano s’est bâtie sur la dénonciation de la Camorra, avec son fameux livre Gomorra. Et depuis, sa carrière s’est orchestrée tant autour des dangers et risques encourus – les représailles mafieuses – que son expertise politique. Celui qui est depuis longtemps surnommé Il morto che cammina (le mort qui marche, sous-entendant que la mafia le laisse vivre pour l’instant, car il est déjà mort), ne serait, dans la bouche du maire, qu’un profiteur en somme.
La poussière, sous le tapis, c’est plus commode
Et réponse du berger à la bergère : « Le problème, ce ne sont pas les assassins qui surgissent, c’est moi qui en parle. Parce que lui [le maire, NdR] n’aime pas les banlieues, il n’apprécie pas d’en parler, et la ville semble alors ramenée au salon de sa maison, où la poussière est cachée sous le tapis. »