Cet article date du 17 octobre 2016, mais il prend une résonance nouvelle en 2017, pendant le cinquantenaire de la première guerre israélo-arabe, et au moment où le pouvoir de Mohammed VI fait face à plusieurs menaces, intérieures et extérieures : les événements récents du Rif, et le retrait du 51e sommet africain de la CEDAO consécutif à une présence israélienne indésirable, selon le monarque marocain.
Les autorités de Tel Aviv tenaient-elles à montrer que le Maroc est un ami d’Israël et doit le rester ? Coûte que coûte ? Quelle est aujourd’hui la marge de manœuvre du souverain ? Peut-il pratiquer une politique « arabe » avec toutes les déstabilisations en cours ? On rappelle que le Sahel, le Maghreb et le Proche-Orient sont en état de guerre intestine quasi-permanente, sans même compter le conflit israélo-arabe.
C’est justement ce dernier qui a fait l’objet de cette communication... qui a dû mettre Mohammed VI dans l’embarras devant les nations arabes, même si le fils n’est pas responsable des décisions ou des « péchés » du père... L’officialisation ou la médiatisation de la nouvelle qui veut que les Marocains aient fourni des informations capitales aux Israéliens pour vaincre la coalition arabe de 1967 peut aussi sentir la manipulation, les Israéliens ayant toujours entretenu des « oreilles » chez leurs adversaires...
Les révélations d’anciens généraux israéliens sur les liens entre le Maroc et leur pays se succèdent. Cette fois, c’est au tour de Shlomo Gazit, ex-chef du renseignement militaire, de revenir sur l’appui de Hassan II au Mossad à l’occasion de la tenue d’un sommet de la Ligue arabe en septembre 1965 à Casablanca.
Après Meit Amir, le chef du Mossad (1963-1968), c’est un autre haut cadre du renseignement israélien qui évoque le soutien de Hassan II à ses services. Le général Shlomo Gazit avance, dans des déclarations au quotidien Yedioth Ahronoth, que l’appui du monarque a été déterminant pour l’armée israélienne pendant la guerre des Six Jours, du 5 au 10 juin 1967.
Dans son témoignage, l’ancien chef du renseignement militaire souligne que le royaume a permis aux Israéliens de suivre minute par minute le sommet de la Ligue arabe de 1965, tenu du 13 au 18 septembre à Casablanca, consacré exclusivement à l’examen des conditions de préparation des armées arabes dans la perspective d’une nouvelle confrontation avec Israël. La réunion était réservée aux chefs d’États, aux chefs des renseignements et aux généraux des armées.
Casablanca a contribué à la victoire d’Israël dans la guerre des Six Jours
Grâce à ces informations, Tel-Aviv avait pu se rendre compte de la faiblesse des armées de ses « voisins ». « Cette rencontre a non seulement révélé que les rangs arabes étaient divisés – d’importantes disputes ont éclaté, par exemple, entre le président égyptien Gamal Abdel Nasser et le roi Hussein de Jordanie – mais aussi que les pays arabes étaient mal préparés à la guerre », raconte Shlomo Gazit.
Deux ans après cette opération, qualifiée par le chef du Mossad de l’époque comme « l’une des gloires suprêmes du renseignement israélien », le Premier ministre Levi Eshkol (21 juin 1963-26 février 1969) donnait l’ordre à son aviation de bombarder les aéroports égyptiens et jordaniens. Une opération couronnée de succès pour la partie israélienne ; presque tous les avions de chasse de l’Égypte avaient été détruits. Ces raids rapides avaient également balisé le terrain aux corps de blindés, leur permettant d’occuper d’un seul coup la Bande de Gaza, le Sinaï, le Golan et Jérusalem-Est.
L’appui du Maroc, dont fait état le général Shlomo Gazit, n’a pas été sans contrepartie. Un mois après le sommet de la Ligue arabe à Casablanca, des agents du Mossad étaient impliqués dans l’opération d’enlèvement de Mehdi Ben Barka. Ils avaient suivi les déplacements de l’opposant de Hassan II, mission rendue possible grâce à la présence d’une antenne du Mossad sur le territoire français, depuis cinq années, avec la bénédiction de Charles de Gaulle.
C’est justement ce bureau qui avait permis de piéger Ben Barka avec le projet de film historique d’une part ; de faciliter aux agents des services secrets marocains l’entrée en France avec de faux passeports d’autre part. Dans cette opération, l’aide israélienne au Maroc avait été autorisée par le Premier ministre, Levi Eshkol et le chef du Mossad, Meit Amir.