Extrait du livre Les Guerres secrètes du Mossad d’Yvonnick Denoël (2012) :
« L’affaire Ben Barka va marquer à plusieurs titres un tournant dans les relations franco-israéliennes. L’enlèvement, puis l’assassinat de l’opposant marocain Mehdi Ben Barka en plein cœur de Paris ouvre une crise sérieuse entre les alliés. On l’a vu, depuis l’arrivée d’Hassan II sur le trône du Maroc en 1961, le Mossad bénéficie d’une relation privilégiée avec les services marocains, qui va jusqu’à assurer pour eux des stages de formation.
En 1965, le général Oufkir, ministre de l’Intérieur et patron des services marocains, rencontre Meir Amit et sollicite l’aide du Mossad pour éliminer Ben Barka, condamné par contumace pour complot contre le roi. Ben Barka est attiré à Paris par un agent du Mossad sous prétexte de rencontrer un producteur et un réalisateur intéressés par un documentaire. À la sortie de la brasserie Lipp, il est enlevé avec l’aide d’agents du SDECE. Il est détenu dans une villa appartenant à une figure du milieu puis tué en présence d’Oufkir. Son corps n’a jamais été retrouvé.
Le scandale est énorme et oblige à ouvrir une enquête qui aboutira à la purge de certains éléments pro-OAS du SDECE. Les services français restent discrets sur la participation du Mossad à l’opération, mais n’en pensent pas moins. À Tel Aviv, Isser Harel qui a été remplacé par Meir Amit à la tête du Mossad, mais qui s’est remis en selle comme conseiller du Premier ministre, ouvre une controverse contre son successeur pour avoir compromis le service dans une sordide opération et mis en péril la relation privilégiée avec les Français. Menaçant de faire un scandale, Meir Amit, pourtant mis en cause par une commission d’enquête confidentielle, parviendra à sauver son poste tandis que Harel prendra la porte l’année suivante. »
Extrait du film J’ai vu tuer Ben Barka (Serge Le Péron, 2005) :
L’enterrement sans fin de Mehdi Ben Barka
À qui profite le silence ? 44 ans après l’assassinat politique de Mehdi Ben Barka, l’obstruction franco-marocaine de l’enquête judiciaire continue. Décryptage du scandale, depuis la raison d’État qui a conduit au kidnapping, en plein Paris, du leader internationaliste au maintien d’un véritable secret d’États sur les commanditaires du crime.
Une partie de poker menteur. L’objectif ? Gagner du temps. Vendredi 2 octobre, le parquet de Paris a finalement demandé la suspension des mandats d’arrêts internationaux lancés la veille par Interpol et signés deux ans auparavant par le juge d’instruction Patrick Ramaël. Les personnes recherchées : quatre Marocains, dont deux officiers haut gradés, suspectés d’avoir participé à l’enlèvement, le 29 octobre 1965, au cœur de Paris, de l’opposant Mehdi Ben Barka. Prétexte invoqué par le ministère public : Interpol aurait requis des « précisions » supplémentaires pour appliquer les mandats d’arrêt. Une nouvelle péripétie, qualifiée de « mascarade » par Bechir Ben Barka.
Le fils en quête de vérité est indigné par le revirement, en à peine 24 heures, de la place Vendôme. Il est vrai que le ministère de la Justice, sous tutelle du pouvoir politique, sait comment verrouiller et temporiser. Dans la pratique, pour être exécutable, un mandat d’arrêt international impliquant la France a besoin de son feu vert. Disposant depuis deux ans des mandats, la Chancellerie les avait transmis au ministère de l’Intérieur, qui les a remis par la suite à Interpol pour les besoins d’une diffusion internationale. Heureuse coïncidence : mardi dernier, Brice Hortefeux, ministre de l’Intérieur, revenait précisément de Rabat où il s’est entretenu avec son homologue marocain.
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