Le site d’inspiration libérale Contrepoints a sorti une étude comparée sur les universités françaises et européennes, dont on ne sort pas vraiment vainqueurs. C’est même un désastre.
Si on est d’accord sur le constat du désastre socialiste en la matière (absence de toute sélection, disparition programmée du mérite, sureffectifs et sous-équipement des établissements supérieurs), on ne peut pas mettre toutes les universités en concurrence les unes avec les autres.
Si c’est la méthode anglo-saxonne (« 13 indicateurs dont la qualité pédagogique, l’excellence de la recherche, le nombre de citations dans les revues iniversitaires, le niveau d’internationalisation et le degré de relation avec l’industrie et l’innovation », ces deux derniers points n’étant pas le fort de l’université française), on a des chances de mal figurer dans leur classement.
Hormis cette petite pique anglophobe, il reste qu’on ne peut comparer les 23 000 étudiants de la fac de Rennes 2 dont est issue la photo de l’article (avec son réservoir d’antifa en « socio ») avec les 21 000 « privilégiés » d’Oxford, toutes les universités françaises ne se résumant pas à l’exemple rennais.
Mais il faut bien avouer que l’exigence n’est pas la même, celle des universités anglo-saxonnes se rapprochant plus du niveau de nos grandes écoles que de celui de nos universités. Avec des effectifs moins réduits, des moyens moins importants et des principes d’incitation au travail moins respectés, sans oublier une organisation à la limite de l’indécence, l’université française moyenne fait pâle figure à côté de sa consœur britannique, pour ne prendre que celle-là.
La solution n’est donc pas la mise en concurrence forcenée sur le modèle ultralibéral, mais peut-être un retour sur l’abaissement programmé du niveau du bac, qui fait que 50% des étudiants loupent d’une manière ou d’une autre leur 1ère année de fac... et la possibilité pour les directions d’établissements de dire stop aux entrants « automatiques » pas suffisamment qualifiés.
Dans ce fameux classement du Times Higher Education, on découvre seulement 4 universités françaises parmi les 100 premières en Europe. La première française est 12e et il s’agit de l’ENS, qui est à vrai dire plus une grande école qu’une université. Les Britanniques raflant quasiment la moitié du total !
1 University of Oxford – Royaume-Uni
2 University of Cambridge – Royaume-Uni
3 Imperial College London – Royaume-Uni
4 ETH Zurich – Swiss Federal Institute of Technology Zurich – Suisse
5 University College London (UCL) – Royaume-Uni
6 London School of Economics and Political Science (LSE) – Royaume-Uni
7 University of Edinburgh – Royaume-Uni
8 King’s College London – Royaume-Uni
9 Karolinska Institute – Suède
10 LMU Munich – Allemagne
11 École Polytechnique Fédérale de Lausanne (EPFL) – Suisse
12 KU Leuven – Belgique
13 Heidelberg University – Allemagne
14 Wageningen University and Research Center – Pays-Bas
15 Humboldt University of Berlin – Allemagne
16 Technical University of Munich – Allemagne
17 École Normale Supérieure – France
18 University of Manchester – Royaume-Uni
19 University of Amsterdam – Pays-Bas
20 Utrecht University – Pays-Bas
On ne va pas mettre tout le classement, mais après l’ENS (Normale sup), on voit poindre l’École polytechnique à la 43e place, ce qui est un peu bizarre. Toute notre élite sort pourtant de là et occupe la plupart des postes de commandement du privé et du public. C’est à n’y rien comprendre... Vient ensuite l’université Pierre et Marie Curie à la 51e position, puis la dernière, enfin la 4e, Paris Sud à la 96e place.
L’argument libéral avancé par Contrepoints n’est pas irréel non plus. En sortant le tableau des niveaux de dépenses publiques et privées par établissement, une sorte de loi apparaît : en gros, plus l’université en question est autonome d’un point de vue financier, plus elle figure haut dans le classement précédent (le top 20 ou 100). Cela fonctionne avec le Royaume-Uni, où les universités sont financées en moyenne à 50/50 par le public et le privé, mais pas en Allemagne, dont le rapport public/privé se rapproche de celui de la France.
La solution de Contrepoints se résume ainsi :
Pour que les universités françaises soient mieux classées à l’international, il faudrait les rendre libres, autonomes et prêtes pour la concurrence
La où Contrepoints a raison, c’est, au-delà de l’indépendance financière à accroître vis-à-vis de l’État (mais cela veut dire faire entrer les grandes entreprises dans l’université et ça les profs, majoritairement de gauche, ne le veulent pas), c’est sur le gigantisme du CNRS, devenu un véritable mammouth qui n’avance plus vraiment, et qui bouffe trop d’énergie pour simplement se tenir debout.
On résume, on grossit le trait, mais l’idée d’éclater ce mammouth au profit des universités permettrait à ces dernières de s’étoffer en matière de recherche, ce qui leur fait défaut par rapport à leurs cousines européennes.