Un articulet de Causeur du 9 juillet 2019, signé Cyril Bennasar, lance les hostilités : il n’y aurait aucun lien entre les « trois rabbins israéliens qui ont remercié Dieu d’avoir vengé un autodafé de Talmuds » sur le parvis de Notre-Dame il y a 777 ans et l’incendie du monument chrétien quasi millénaire du 15 avril 2019, en pleine Semaine sainte. Personne n’a dit qu’ils avaient mis le feu, mais il y a congruence, comme dirait Kepel.
Il n’y a pas de complot mais une fusion d’intérêts qui a conduit à l’incendie de l’édifice symbole. Sur E&R, nous avons évoqué non pas les responsables (l’enquête le dira, ou pas), mais ceux qui ont trouvé intérêt à cet incendie extraordinaire, historique, eschatologique. L’émission exceptionnelle à tous points de vue Pourquoi tant de haine ? du 22 mai 2019 consacrée à cet événement littéralement incroyable a éclairci de nombreux points, tous factuels, pour les non initiés.
Il est alors plus facile pour un auteur (« menuisier », dit le site d’Élisabeth Lévy) d’accuser Soral d’être un « monomaniaque » de l’antisémitisme plutôt que de répondre sur le fond et les faits. Car les faits sont là : on ne peut en aucun cas mettre le feu à des milliers de tonnes de poutres de chêne pétrifiées de 800 ans d’âge avec un simple mégot oublié. Cette version désormais officielle ne tient pas la route et prend 66 millions de Français et un milliard sept cents millions de fidèles (2,4 milliards selon d’autres sources) pour des ânes.
Causeur, qui se fait pourtant le chantre du nouveau nationalisme français, fortement teinté de sionisme – et la Lévy ne s’en cache pas, elle au moins officie à visage découvert –, ne peut pas officiellement trouver intérêt à cet incendie. D’ailleurs une couverture précédente fustigeait les actes antichrétiens, mais sous l’angle « chrétiens et juifs contre les musulmans »... Certes, il y a des gauchistes dans la rédaction, ou d’ex-gauchistes, mais il y a aussi des chrétiens, même si le rédacteur en chef, Marc Cohen, autrefois taxé de rouge-brun, en tout cas ex-communiste, est de confession juive. Il nous parle ici de la sagesse de la Kabbale :
Toutes les croyances étant respectables, la plus farfelue comme la plus dangereuse, nous ne commenterons pas. Mais pour Causeur, que nous lisons régulièrement (dans sa version payante) il y a deux sortes de chrétiens : les bons, et les mauvais. Le bon chrétien est siono-compatible, le mauvais est siono-incompatible. C’est pour cela qu’on retrouve dans l’actionnariat du journal doublé du site un mélange étonnant de chrétiens et de sionistes. D’autres diraient de néoconservateurs ou neocons à l’américaine, dont on sait qu’ils sont des chrétiens sionistes assez radicaux, si l’on permet l’expression chrétien sioniste, qui semble être un oxymore de belle catégorie. Ce sont eux (il y a aussi beaucoup d’ex-trotskistes au départ !) qui sont idéologiquement à l’origine de la destruction du Proche-Orient depuis la fin des années 80, profitant du retrait de l’URSS sur la scène mondiale. Un boulevard que les Américains, qui fondaient leur politique extérieure sur les intérêts israéliens (relire Le Lobby pro-israélien et la politique étrangère américaine), ont immédiatement utilisé.
30 ans plus tard, l’Irak et la Syrie sont « retournés à l’âge de pierre », pour reprendre une des expressions favorites des faucons du Pentagone. Ces massacres contemporains ne perturbent pas les porte-drapeaux français du sionisme et ne comptent pas comme massacres : c’est l’Empire qui décide de l’application du terme génocide, comme de celle du terme terroriste.
Causeur, nous disions, est financé par un conglomérat d’hommes d’affaires de droite ou d’extrême droite, généralement sionistes. Derrière le grand investisseur dans la net-économie Gérard Pencioletti, ex-propriétaire du journal Minute et actionnaire principal du titre de géopolitique Conflits, on retrouve des noms connus : Anne Méaux, la faiseuse d’image du paysage politique, Xavier Niel, le milliardaire qui rachète tout ce qui bouge en matière de presse et qui paralyse les pure players à potentiel critique en prenant des participations dedans (voir l’épisode Bakchich).
Malgré toutes ces fées oligarchiques, Causeur reste déficitaire. Heureusement, les actionnaires remettent au pot : le site ne dépasse pas les 10 000 visiteurs uniques par jour et le titre papier les 9 000 ventes par mois. Mais qu’à cela ne tienne, la voix nationale-sioniste est entendue puisque la Lévy est partout. Elle disparaît ici, virée d’une radio privée, elle réapparaît là, sur une autre radio privée. La chroniqueuse ne manque pas de chroniques et on l’a vue récemment chez Sud Radio morigéner le pauvre Étienne Chouard, après son jugement par les procureurs judéo-bolcheviques – c’est une image, voyons – Robert & Enthoven .
Quand on a besoin d’une illustration informationnelle sur E&R, on sonne sur le bouton « F&D » : on a retrouvé une interview de la Lévy donnée à Pierre Assouline dans Actualité juive le 8 septembre 2014...
Vous adressez-vous spécialement aux Juifs ?
Si on admet que les Juifs ont apporté au monde la Torah, l’humour et le sens de la polémique, on essaie de cocher deux cases sur trois. Causeur, bien sûr, n’est pas un « média juif ». Du point de vue « ethnico-religieux », notre rédaction est parfaitement cashère – c’est-à-dire « diverse »… Il ne s’adresse pas spécifiquement aux juifs. Savoir s’il leur parle… je n’en sais rien, c’est à vous de me le dire ! Je pense que oui, d’une certaine façon. Alain Finkielkraut, n’écrit pas seulement loin s’en faut, sur « les questions juives ». Ce mois-ci, il nous a fait le cadeau d’un texte admirable sur Péguy. Mais pour beaucoup de juifs, il est une « voix juive », ils se sentent en quelque sorte représentés par lui, comme ils se sont sentis honorés par son élection à l’Académie. Et il est très présent dans nos colonnes, puisque nous reproduisons tous les mois « L’esprit de l’escalier », notre dialogue dominical sur RCJ.
Je suis moi-même issue d’une famille plutôt religieuse, mon associé, Gil Mihaely, est israélien. Tout cela est notoire, et nos ennemis ont quelques raisons de nous dénoncer comme un foyer de propagation sioniste. Pour autant, nous ne sommes pas des militants et encore moins des porte-parole : si Causeur parle aux juifs, et j’espère qu’il le fait, ce n’est pas toujours pour leur dire ce qu’ils veulent entendre… ni pour encourager la « parano juive » (contre laquelle je ne prétends nullement être immunisée d’ailleurs car je sais que les paranoïaques ont des ennemis)…
En 2011, on apprend que Causeur est cofinancé par Charles Beigbeder et Thierry Wilhelm, actionnaire du magazine Politis, du pure player Mediapart et du magazine Terra Eco ! Si l’argent n’a pas d’odeur, cela prouve qu’il n’a pas non plus de couleur politique ! On appréciera aussi le petit coup de pouce de la Société française des ressources humaines (SFRH) à Causeur qui a bénéficié d’un prêt de locaux et du fonds d’aide à la presse en ligne, que E&R ne touche évidemment pas. Faut pas pousser mémé !
On retrouve le nom du frère de Frédéric Beigbeder dans l’actionnariat de L’Incorrect, le nouveau magazine de droite nationale (sioniste) qui devait tout casser. Pour l’instant, ça ne casse pas encore la baraque, les ventes ne dépassent pas les 8 000 exemplaires en kiosques. Un miracle va peut-être sauver ce titre : on y a vu récemment un article pleurnichardo-commercial sur Anne Frank, ce qui va peut-être ramener de la pub.
Roh, qu’on est mauvais esprit !