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Nicolas de Staël ou la lumière de Provence

Il peignait, et puis il est mort. L’amour est passé par là...

« C’est tout à fait étonnant ce qui se passe ici dans le style moche baigné d’éclat inoubliable, mais que veux-tu le soleil c’est toujours comme cela, il fera des dentelles rares avec n’importe quelle serpillière, il suffit d’un peu de bleu et de beaucoup de blanc. » (Lettre du 4 juin 1952)

Décembre 1954, donc. Amoureux à mort de celle qui refuse de changer de vie pour lui, pour eux, il écrit à leur confidente, les amours tristes sont toujours reflétées par le miroir déformant et compatissant des intermédiaires :

« J’ai besoin de cette fille pour m’abîmer, je n’en ai pas besoin pour peindre et c’est grâce à elle que je travaille tant malgré tout. Que comprendre là-dedans. »

La « fille » s’appelle Jeanne Polge, mariée avec enfants. Elle aime les bleuets et va et vient. Elle lui a été présentée en 1952, avec sa famille, par son ami René Char qui l’a attiré dans le Vaucluse, où il habite désormais. Elle est devenue son modèle, son amante. Elle est partie en voyage avec lui, des amis et sa seconde femme, Françoise. Il lui écrit des lettres d’amour éperdues. Paris, janvier 1954 :

« Merci de regarder si longuement notre joie sur la mer. Merci de me déchirer mon amour. Je t’aime à hurler. Je t’aime à mourir. Je t’aime à voir la complexité la plus infernale, limpide dans ton amour. Je t’aime à aimer ton amour comme je t’aime. Je t’aime dans le risque, dans la paix d’un instant, de tout mon sang, de toutes mes larmes, de toute ma folie, de toi, de moi, je t’aime dans chaque poussière qui touche ton cœur. »

Quelque chose dans cette histoire nourrit « mon inévitable besoin de tout casser ». Staël et Char se brouillent à cause de cette passion obsédante. Le poète, qui trempe son personnage dans un bain d’égoïsme minéral et libertin, n’y joue pas un beau rôle. Il ne pouvait ni admettre, ni probablement comprendre, le tourbillon du peintre. « J’ai besoin de cette fille pour m’abîmer… »

Toute critique d’art, de l’art de Staël, pourrait s’arrêter sur ces mots. Ils résument la contradiction dans laquelle l’homme et l’artiste se sont soutenus, entretenus, défaits. Ce lieu obscur où la psychologie s’unit au métier et fond dedans. Nul, comme Staël dans ses lettres, n’a parlé d’un tel élan, au jour le jour, de sa vie et son œuvre à l’enclume, en fusion.

 

 

 

Né à Saint-Pétersbourg en 1914, Staël est élevé après 1921 en Belgique, chez les Fricero, des tuteurs qu’il aime et qui s’occupent de quelques héritiers russes blancs, dont les enfants du général Wrangel. Ses parents meurent en 1921 et 1922. L’orphelin écrit souvent à ses tuteurs, seconds parents, lors de ses premiers voyages en Espagne, au Maroc, en Algérie. Il a 20 ans, il dessine, demande du fric pour survivre, raconte ce qu’il voit.

En Catalogne, il découvre l’art roman ; ça nous éclaire déjà sur le peintre qu’il deviendra, ce vertical Vulcain iconique, lumineux et puissant : « Je donnerai tout Michel-Ange pour le calvaire du musée de Vich. » À Suances, en Cantabrie, il semble voir ce qu’il peindra vingt ans après, à l’époque où les faiseurs d’étiquettes parleront de « retour au sujet » :

« Un ciel immense. Les nuages esquissent quatre fantastiques chevaux qui se cabrent sur la mer. Le sable, et c’est tout. »

Il aime la mer, pas la montagne – 19 août 1951 :

« Plus on monte, plus tout se complique et c’est impossible, je n’ai jamais assez de ciel en montagne. »

[...]

Pendant une dizaine d’années, Staël va vivre à Paris dans la misère puis la pauvreté. Engagé dans la Légion étrangère en 1939, père de deux enfants, il cherche et se cherche à l’ombre de Courbet, Cézanne, Braque, Vélasquez : il se définit par le regard qu’il porte sur eux. Ses lettres de la fin y reviennent. Vélasquez, revu au Prado à l’automne 1954 :

« Tellement de génie qu’il ne le montre même pas, disant tout simplement au monde je n’ai que du talent mais j’en ai sérieusement. Quelle joie ! Quelle joie ! Solide, calme, inébranlablement enraciné, peintre des peintres à égale distance des rois et des nains, à égale distance de lui-même et des autres. Maniant le miracle à chaque touche, sans hésiter en hésitant, immense de simplicité, de sobriété, sans cesse au maximum de la couleur, toutes réserves à lui, hors de lui et là sur la toile. »

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  • #2263191
    Le 22 août 2019 à 01:53 par sundance
    Nicolas de Staël ou la lumière de Provence

    Mon grand oncle, le frère de mon grand père maternel était un grand peintre avec des œuvres au Vatican et il passa sa vie à enseigner la peinture, il critiquait l’art contemporain avec beaucoup d’intelligence, si quelqu’un veux lire ce qu’il dit à ce sujet : http://1.bp.blogspot.com/_eWuTsA06U...

     

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    • #2263303
      Le Août 2019 à 10:00 par anonyme
      Nicolas de Staël ou la lumière de Provence

      On ne peut pas appeler ’’art’’ contemporain l’expression picturale de ce siècle perdu pour cet art (ce qui n’était pas encore arrivé aux hommes) cette escroquerie, ce scandale révoltant commit par des décorateurs, des esthéticiens (quand elle est esthétique ce qui n’est même pas toujours le cas) qui ont oublié qu’une œuvre d’art est belle si elle a aussi du Sens, ce que ce qu’ils commettent n’a pas puisqu’ils doivent titrer ce qu’ils barbouillent pour tenter de lui en donner un (ce qui s’appelle faire de la littérature) L’énorme subvention publique qui les alimente dit assez dans quelle abjecte tyrannie elle prend sa source. Quand on dit que c’est juste de la merde on a tout dit.

       
  • #2263262
    Le 22 août 2019 à 08:02 par Socrade
    Nicolas de Staël ou la lumière de Provence

    Le scénar typique pour un film psycul à la française.

     

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    • #2263290
      Le Août 2019 à 09:41 par Palm Beach Post : "Cult !"
      Nicolas de Staël ou la lumière de Provence

      Oui, c’est vraiment un chieur, le mec...

      Par contre, niveau "psycul" qui dépote :
      La Vénus à la fourrure, film dramatique français coécrit et réalisé par Roman Polanski, sorti en 2013, adapté de la pièce de David Ives, elle-même inspirée du roman érotique de Sacher-Masoch.

      1 seul lieu (un théâtre), et seulement 2 acteurs.
      Mathieu Amalric terrible en bobo pétri de certitudes.
      Emmanuelle Seigner, toujours top.
      C’est hilarant, pas bête du tout, et c’est pas plus mal d’avoir lu le Sacher-Masoch avant.

       
  • #2263295
    Le 22 août 2019 à 09:46 par kantor
    Nicolas de Staël ou la lumière de Provence

    " J’ai besoin de cette fille pour m’abîmer..." Comme cette déclaration claque au vent, comme cette déclaration est susceptible de séduire plus d’un ados ou esprit immature et comme cette déclaration est débile,puante,avilissante,décadente...
    Il aurait pu aussi pour s’abîmer, s’aliéner ou peut être par chance cicatriser, aller faire le manœuvre sur des chantiers...

     

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  • #2263305
    Le 22 août 2019 à 10:02 par anonyme
    Nicolas de Staël ou la lumière de Provence

    Celui qui s’extasie devant quelque chose qui n’a aucun sens est juste un con.

     

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  • #2263318
    Le 22 août 2019 à 10:45 par paramesh
    Nicolas de Staël ou la lumière de Provence

    De Stael n’est pas mort d’amour mais de ne plus pouvoir avancer. Il aura passé sa vie à collectionner les amours passionnelles et ce n’est pas son dernier amour qui qui a été fatal (il se serait alors flingué bien avant , entre autres à la mort de Jeannine). Nicolas de Staël est peut être le seul peintre contemporain digne de marquer l’histoire justement parce qu’il a su toujours avancer, quitte à opérer un retournement complet, une involution, retourner à la figuration après avoir exploré les méandres de l’abstraction et en avoir compris les limites (Picasso, Matisse ou Braque eux n’ont jamais dépassé la figuration et les peintres qui ont tenté l’abstraction s’y sont perdu bel et bien sans espoir de retour) . il est ensuite arrivé aux limites techniques de la figuration artistique mais sans retrouver sa spiritualité originelle (l’art est sacré à l’origine) d’où son suicide devant l’absurdité conceptuelle de croire à l’art pour l’art. le suicide de Nicolas De Stael est sa réponse en pied de nez à la phrase de son marchand Rosenberg : « Pour moi, un tableau est beau quand il se vend ».
    de Staël refuse l’idée progressiste de l’art mettant l’abstraction comme une avancée de l’esthétique, l’abstraction ne débouchant que sur l’art conceptuel (abstraction totale de l’esthétique qui se réduit alors à un pur discours, la réalité se soumettant au discours)
    De Stael tente le retour au figuratif et le réussit tellement bien techniquement qu’il en aperçoit la limite ontologique : son manque d’ ontologie justement.
    Maintenant, techniquement de Staël arrive à l’aboutissement ultime de la recherche sur la couleur que la nouvelle figuration (profane) avait entreprise depuis les impressionistes , il dépasse le pointillisme scientifique et la symbolique nabi (ou fauve) pour arriver à l’essence ontologique de la couleur débarrassée du parasitisme de sa complémentaire (la lumière est tellement crue en Provence (en plein soleil) que les ombres perdent leur dominante complémentaire. le premier peintre à l’avoir entrevu est Cézanne d’où les ombres "sales" de sa première période (la complémentaire d’une couleur est la couleur qui lui est opposée dans le cercle chromatique (la complémentaire du jaune étant le violet, un citron aura une ombre à dominante violette si la lumière n’est pas trop violente)
    La série des cathédrales de Monet est un parfait exemple du jeu de l’évolution des complémentaires dans les ombres des façades au cours d’une journée.

     

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  • #2263429
    Le 22 août 2019 à 14:28 par Damien
    Nicolas de Staël ou la lumière de Provence

    Les technocrates pharisien ont renommés Provence : "PACA" parce qu’ils la fantasment par les toiles de pseudo artistes venu d’ailleurs. A des années lumiére du labeur de mes ancêtre qui ont su donner des couleurs à nul autres pareil dans un pays de cocagne. Les laborieux, les vrais artistes ont gagné l’immortalité par leur travail anonyme car il savaient que leurs œuvres les dépassés, un aristocrate rentier lui c’est fait un nom grâce à des bouses heureusement aussi effémére que lui.

     

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  • #2263437
    Le 22 août 2019 à 14:34 par Bruno
    Nicolas de Staël ou la lumière de Provence

    En fait, les tableaux se regardent de loin, pas de près, c’est pour ça que c’est aussi moche par moment. Ensuite, ce que vise ce peintre c’est le choc, la sensation, il faut que chaque toile tape dans l’oeil du spectateur, en bien ou mal, peu importe, ce qui est important c’est la réaction engendrée, pour lui tout le reste est vain et n’est pas de l’art.

     

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  • #2263514
    Le 22 août 2019 à 16:29 par Rémi O. Lobry
    Nicolas de Staël ou la lumière de Provence

    On devrait parler des galleries d’art qui faisaient beaucoup d’argent grâce aux oeuvres des peintres qui, eux, crevaient dans la misère.

    Maintenant c’est différent, comme le dit le Taulier (1), c’est du faux argent qui achète du faux art.

    (1) Alain Soral

     

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  • #2264163
    Le 23 août 2019 à 22:20 par talon
    Nicolas de Staël ou la lumière de Provence

    @LG
    Ce n’est pas singer la création, c’est lui ôter sa peau morte
    mais la création doit rester le référent, puisqu’elle est faite pour lui.
    En passant, votre comparaison entre poésie et peinture n’était pas bonne, il eut fallu dire : comme si la poésie se mettait à versifier sans chercher à produire du sens, juste pour la musicalité des mots. Ce serait ça, le travers de la poésie nihiliste et auto-contemplée (oh mais, tiens, c’est justement l’écueil dans lequel la contemporanéité l’a fait tomber depuis l’impasse mallarméenne ! tiens, tiens…)
    Bref
    Vous ne voyez en la peinture qu’un procédé. Et avec vous, l’art contemporain tente de réduire la peinture à un moment de la peinture. Vous oubliez totalement la piété, voilà pourquoi vous perdez de vue la finalité. Aussi la discussion avec vous ne peut pas aboutir, et il est inutile de tartiner plus longtemps.
    Le monologue de la peinture avec elle-même est bien une régression dans l’intention, et une perte du désir de peindre.
    Ce qui était marginal et très secondaire est devenu sujet : 3 siècles après, vous nous déclarez plein d’enthousiasme que le pauvre fil insignifiant de la dentellière de Vermeer a réussi à absorber toutes les intentions de Pollock…
    Comment ne voyez-vous pas que l’infini découvert avec l’abstraction n’était que de l’infiniment petit, dans lequel on découvre une nouvelle poupée à l’intérieur de la précédente. Mais il faut sans doute que beaucoup s’amusent, alors…vive les poupées !

     

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  • #2264164
    Le 23 août 2019 à 22:21 par talon
    Nicolas de Staël ou la lumière de Provence

    las de Staël ou la lumière de Provence par tetar 1er
    Ce n’est pas singer la création, c’est lui ôter sa peau morte
    mais la création doit rester le référent de l’art, puisqu’elle est faite pour lui.
    En passant, votre comparaison entre poésie et peinture n’était pas bonne, il eut fallu dire : comme si la poésie se mettait à versifier sans chercher à produire du sens, juste pour la musicalité des mots. Ce serait ça, le travers de la poésie nihiliste et auto-contemplée (oh mais, tiens, c’est justement l’écueil dans lequel la contemporanéité l’a fait tomber depuis l’impasse mallarméenne ! tiens, tiens…)
    Bref
    Vous ne voyez en la peinture qu’un procédé. Et avec vous, l’art contemporain tente de réduire la peinture à un moment de la peinture. Vous oubliez totalement la piété, voilà pourquoi vous perdez de vue la finalité. Aussi la discussion avec vous ne peut pas aboutir, et il est inutile de tartiner plus longtemps.
    Le monologue de la peinture avec elle-même est bien une régression dans l’intention, et une perte du désir de peindre.
    Ce qui était marginal et très secondaire est devenu sujet : 3 siècles après, vous nous déclarez plein d’enthousiasme que le pauvre fil insignifiant de la dentellière de Vermeer a réussi à absorber toutes les intentions de Pollock…
    Comment ne voyez-vous pas que l’infini découvert avec l’abstraction n’était que de l’infiniment petit, dans lequel on découvre une nouvelle poupée à l’intérieur de la précédente. Mais il faut sans doute que beaucoup s’amusent, alors…vive les poupées !

     

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