Il est une loi capitaliste qui se retourne contre les pays capitalistes et leur fiscalité : plus on est gros, moins on paye d’impôts. C’est le cas d’Amazon qui s’appuie sur un chantage à l’emploi efficace en France.
« C’est “en déduisant les embauches d’Amazon et des vendeurs tiers (12 337 emplois créés) aux suppressions d’emplois dans le commerce physique à cause des activités du site d’achat (20 239 emplois perdus)”, que Mounir Mahjoubi aboutit à ce chiffre de 7900 emplois perdus en France. Une formule résume cette constatation, “pour un emploi créé chez Amazon”, le commerce de proximité a perdu 2,2 emplois. » (franceinfo)
Sauf qu’on apprend que les emplois créés par Amazon sur le sol national en ont détruit le double dans la petite distribution... Vous allez nous dire, qu’est-ce qu’il lui prend à Mounir Mahjoubi de soudain s’énerver contre le géant de la distribution mondiale, alors que même le socialiste Arnaud Montebourg avait cédé en 2012 aux alléchants emplois créés par la plateforme dans sa région de Saône-et-Loire ?
C’est que le gouvernement met la pression sur la société de Jeff Bezos, l’homme le plus riche du monde récemment remarié à une bimbo cougar, pour récupérer un peu de ce fric que les Américains, comme Google, Apple ou Facebook, ont du mal à lâcher sur le sol national...
Si Amazon, la plateforme de commerce en ligne qui livre ses produits partout en 24 ou 48 heures crée de l’emploi, elle en détruit aussi. Mais les Français sont tellement habitués à cette destruction cachée (par les médias) de l’emploi local que ça passe comme une lettre à la poste, depuis que la grande distribution des années 70 a lancé le mouvement. On s’émerveillait alors du modèle français qui s’est ensuite exporté partout dans le monde, saturant la périphérie des grandes conurbations d’hypermarchés gigantesques aux prix prétendument écrasés.
On se rend compte 40 ans plus tard qu’il n’en est rien, que ces hypers proposent quelques produits d’appel pas chers (arrachés à des producteurs au volume) pour marger sur tout le reste. D’ailleurs, le consommateur l’a compris puisqu’il abandonne petit à petit ces temples de la surconsommation qui ont fait tant saliver les Français sortis de la pénurie des années 50. Aujourd’hui, les Français redécouvrent le marché local, le commerce de proximité, le supermarché qui fait gaffe aux prix, paupérisation libérale oblige.
Le plus étonnant dans ce réveil tardif de l’ex-secrétaire d’État au numérique, c’est ce souci soudain du Français moyen, de l’électeur aussi, puisque Mounir a des visées sur Paris en 2020 (il s’est désisté début juillet en faveur de la candidature de Cédric Villani). Mahjoubi nous refait le coup de Montebourg qui aura eu au moins l’avantage d’essayer de sauver une région...
« Arnaud Montebourg, présent lors de l’annonce, a souhaité, avec cette implantation, "effacer la brûlure des 3000 emplois disparus" suite au départ de Kodak de Chalon-sur-Saône. "Les territoires qui ont subi des blessures, des dégâts peuvent se redresser et rencontrer, avec le soutien de l’État, le succès", a-t-il jugé. Le ministre, qui fut député de Saône-et-Loire de 1997 à 2012, y a également vu un message national : "La France est un pays qui a des atouts considérables, c’est le moment de se redresser ensemble !", a conclu le ministre alors que de plus en plus d’entreprises françaises sont aujourd’hui menacées par des plans sociaux. » (Le JDD)
« 500 emplois directs sont créés », lançait alors le 25 juin 2012 sur France 2 un Pujadas euphorique qui ne dira pas combien sont détruits, l’effet d’annonce devant consacrer une victoire française, alors que c’est la multinationale américaine qui vient y gagner gros !
Pour ce qui concerne Mahjoubi et la Macronie, prôner le nationalisme économique et dénationaliser à tout-va de l’autre côté, en revendant les meilleurs morceaux de l’économie à l’étranger, c’est quelque peu paradoxal.
« Dans son étude, Mounir Mahjoubi met en cause la "productivité élevée" chez Amazon où un seul salarié "supporte un chiffre d’affaires d’environ 600 000 euros", contre "270 000 euros" pour un salarié d’une boutique. Cette compétitivité d’Amazon est due "à des pratiques managériales contestées", dénonce-t-il. "Les hommes et les femmes des centres logistiques (de la plateforme) travaillent à un rythme effréné et minuté", avec "des tâches répétitives et physiquement pénibles". Cette logique sera poussée jusqu’au bout par Amazon, qui considère ses salariés "comme des robots". La société "les remplacera demain par des machines autonomes", ce qui pourrait augmenter davantage la productivité de la plateforme et aboutir à détruire plus d’emplois dans les commerces traditionnels, redoute Mounir Mahjoubi. »
Le député de Paris redécouvre les vertus de la préférence nationale et évoque le pouvoir politique du consommateur, tout en se gardant d’appeler au boycott du monstre américain :
« "Consommer est aussi un acte citoyen et politique", rappelle l’ex-secrétaire d’État au Numérique, pour qui "les internautes doivent cliquer en connaissance de cause. Leurs achats pèsent sur l’emploi national", explique-t-il. "Les Français doivent penser aux PME françaises pour leurs achats", car "elles sont foncièrement plus humaines". »
Une campagne électorale, ça vous change en homme. Et ça vous change un libéral en souverainiste !
« Le pire qu’on peut faire à Noël, c’est offrir des cadeaux made in China chez une entreprise américaine qui ne paie pas ses impôts en France »