Ça fait 20 ans que les gouvernement libéraux essayent de réformer le régime des retraites, arguant qu’il y a trop de niches (mais pas trop de riches) et de faveurs fiscales. Premiers visés, les cheminots, qui ont comme les militaires un régime un peu spécial, comprendre avantageux. Mais les cheminots ne l’entendent pas de cette oreille et ils sont encore très organisés en syndicats, des syndicats qui s’opposent frontalement au gouvernement. Même la CFDT est du côté des travailleurs, c’est dire !
Mais il ne s’agit pas que de trains, il y a aussi l’hôpital, l’école, les pompiers, les policiers, bref, tout le service public s’agite et veut faire entendre sa voix dans ce qui se prépare. Et que prépare le duo Philippe-Macron ?
Edouard Philippe a été clair ce matin : il faudra travailler plus longtemps pour redresser les comptes des régimes de #retraite. Une question sensible qui sera abordée à Matignon avec les leaders syndicaux lundi et mardi prochains https://t.co/Nl4rPlUF9D
— Valérie Mazuir (@EchosPolitique) November 21, 2019
C’est la lutte des classes : le Premier ministre, qui travaille pour les puissances économiques et financières, veut sauver le profit et donc faire travailler les Français plus longtemps, sous prétexte de déficit de la Sécu, l’élément de langage habituel destiné à faire culpabiliser les travailleurs. En gros, si vous voulez toucher une retraite (presque) décente, il vous faudra ajouter deux ou trois ans de boulot à vos 41 ou 43 années de labeur. On a vu le résultat en Angleterre, les rois du chômage en dessous des 5 %, le pays de cocagne où des octogénaires aux retraites squelettiques sont obligés de faire vigiles ou gardiens de musée.
Les infirmières se suicident
Les policiers se suicident
Les paysans se suicident
Les profs se suicident
Les cheminots se suicident
Les chômeurs se suicident
Les étudiants se suicidentOUF !!! les Ultra-Riches se portent bien.....https://t.co/uDb5JUdZeM
— DécérébréEnMarche ! (@DecerebreLREM) November 21, 2019
Après de telles annonces, qui sonnent comme une déclaration de guerre au peuple, c’est le branle-bas de combat sur le navire syndical. Les organisations de travailleurs sortent les canons, les sacs de poudre et les boulets. Mais on sait aussi que ces mobilisations, si elles ne sont pas suivies par le privé, ne font pas avancer les choses : tout le travail sournois de ces gouvernements successifs néolibéraux consistant à réduire la part du public dans le budget de l’État, d’éteindre les syndicats sous les subventions et de limiter la réponse sociale en l’étouffant par exemple sous une propagande médiatique inepte.
Il y aura donc des manifs, après le 5 décembre, des trains qui restent en gare, des profs absents, mais cela ne changera pas grand-chose, d’autant que les syndicats n’ont pas soutenu massivement les Gilets jaunes, sauf pour récupérer le mouvement et le gauchiser sur la fin.
Mais les mentalités évoluent : Sud Rail propose un petit changement dans les blocages...
[À diffuser] ⚠️⚠️
Usagers. Nous avons écouté vos remarques.
SUD Rail propose la grève par la gratuité pour ne plus vous gêner et écope d'un refus de la Sncf et du gouvernement.
Ce qu'ils veulent c'est vous bloquer pour vous diviser par la colère. https://t.co/avJV8Z7Z5O— Sud Rail (@SudRailCentraux) November 20, 2019
Effectivement, l’axe du gouvernement c’est la division entre les Français qui cotisent peu et ceux qui cotissent beaucoup, entre les nantis et les autres, les vrais et les faux nantis ; bref, il s’agit de casser la solidarité nationale, de casser une solidification éventuelle du mouvement social, et une convergence possible avec les ultras des Gilets jaunes, qui sont devenus des antilibéraux radicaux.
Élu avec 66 % des voix en 2017 sur une manipulation de l’opinion – qui montre là ses limites cognitives –, le président Macron a contre lui les trois-quarts des Français, qui se rendent compte dans leur quotidien des nuisances du libéralisme sur les services publics, c’est-à-dire le patrimoine de ceux qui n’en ont pas.
Une phrase. Trois mensonges. https://t.co/ORoZMvs2NN— gaccio bruno (@GaccioB) November 21, 2019
Une minorité de Français, ceux qui ont gagné dans la mondialisation, croit encore les salades du gouvernement. Pour le reste, c’est le rejet :
J’ai allumé la radio.@EPhilippePM : « ... Dans un grande démocratie comme la France ... »
J’ai éteint la radio.#le79inter @franceinter— RobertMitchum (@JnMitchum) November 21, 2019
Les syndicats tirent leurs dernières cartouches au moment où, sur un an et 52 samedis, une mobilisation naturelle des Français a montré sa puissance et sa volonté. Les syndicats, eux, ne donneront jamais l’ordre de marcher sur Matignon ou l’Élysée, et c’est la limite de leur pouvoir. La « démocratie » est un régime qui interdit son propre renversement. Pourtant, il y en a qui ont pris le pouvoir par des coups d’État, en France, sous la Ve République : par exemple Sarkozy en 2005-2006, qui a joué sur le curseur de l’insécurité. Il avait la hiérarchie policière dans la poche, qui a quelque peu levé le pied sur la répression, histoire de faire monter la peur...
Pour savoir ce que le peuple français va perdre face aux forces de l’oligarchie, voici le grand entretien complet du Premier ministre représentant les forces néolibérales intéressées par la destruction des services publics, chez le duo soumis et complice Demorand & Salamé avant la revue de presse d’Askolovitch... Parlons peu, mais parlons vrai.
« On va devoir travailler plus longtemps, je crois d’ailleurs que les Français le savent... »
Parce que c’est les journalistes de collaboration qui le serinent dans les médias mainstream du matin au soir !
Conclusion et morale
Les Gilets jaunes étaient et sont motivés pour renverser le régime libéral (expression plus juste que régime démocratique) mais ils ne sont pas encore suffisamment organisés ; les syndicats sont organisés mais n’ont aucune intention de renverser un régime qui les finance en partie (à 70 % puisque les cotisations des salariés encartés ne dépassent pas 30 % du budget des syndicats).
On rappelle qu’à la naissance des syndicats, il y a un peu plus de 130 ans (en 1884 Waldeck-Rousseau autorise leur création et en 1895 le premier vrai syndicat révolutionnaire est créé), l’objectif, à l’époque, est bien de renverser un gouvernement bourgeois qui travaille contre les... travailleurs.
On le voit, en un siècle, les syndicats ont changé leur arme d’épaule, ils ont été retournés par le Système. D’où l’avenir d’une mobilisation à la Gilets jaunes. Ce n’est qu’un début...