Monsieur Nabli,
Vous vous êtes récemment fendu d’un article à charge contre Messieurs Alain Soral et Dieudonné M’bala M’bala, couple sulfureux dont l’influence grandissante auprès de la jeunesse française semble vous alarmer grandement. Ce « binôme dramatique » jouerait la « carte du nihilisme » pour tourner en dérision et faire haïr une oligarchie dont vous convenez pourtant qu’elle est « détestable ».
Ils seraient des « éducateurs » inculquant « effrontément » la désobéissance dans une société que vous dites cependant « basée sur l’autocontrôle, l’autocensure et l’obéissance généralisée ».
Vous justifiez donc l’action de ces deux dissidents mais critiquez les moyens utilisés pour la réaliser, n’est-ce pas ? Alors de quel « nihilisme » s’agit-il ?
De l’emploi avisé de moyens technologiques en marge du réseau médiatique mainstream à des fins, selon vous, commerciales et publicitaires...
Stratèges de la technique postmoderne, techniciens de la communication, nos deux compères masqueraient le néant de leur pensée par une virtuosité dans l’usage marchand d’un discours se réduisant à sa seule valeur d’exposition.
Ineptie.
En effet, l’unique moyen pour messieurs Soral et M’bala M’bala de réaliser leur ambition pédagogique, étant donné les conditions imposées par le pouvoir, est de maîtriser les outils restant à leur disposition.
En l’occurrence, Internet et un peu d’argent pour payer les employés, les frais d’édition et les procès intentés par les petits vassaux de cette oligarchie que vous feignez de fustiger.
Ensuite, le nihil de la pensée soralienne :
Afin de dissimuler ses contradictions internes, Alain Soral userait malignement de ses talents rhétoriques avec pour méthode la rationalité dialectique, expression typique du « ressentiment plébéien ».
En effet, nous apprenons sous votre plume virtuelle que « son entreprise relève d’une psychologie primaire des intentions, présupposant l’existence d’une intention maléfique : derrière chaque évènement se cache un pouvoir mystificateur, un esprit malfaisant ou un génie… un démon (juif), une grande puissance (l’Amérique) ».
Cette « mentalité primitive » servirait à dévier le ressentiment de la plèbe...
Dans ce cas Monsieur Nabli, pourriez-vous nous expliquer à quel endroit la souffrance et la colère légitime des peuples devrait-elle se déverser ?
Oui, vous le pouvez... Et avec une chutzpah remarquable !
« Pensée unique et théorie du complot forment la matrice discursive grâce à laquelle deux fictions, « le pouvoir » et « la résistance », subsistent. »
D’ailleurs, la seconde entretient « la chimère d’une élite manipulant le monde et donne ainsi au “pouvoir” une capacité – la prise de décision – qu’il n’a pas, une existence qu’il a perdu au profit du hasard, de l’incertitude et de l’indétermination qui gouvernent le monde ».
Nous y voilà : « Il n’y a désormais plus de sens, ni de grande référence comme “le Pouvoir”. »
Démontrez-vous là comment, une fois le ressentiment dialectique évacué, la pensée libérée de ses contradictions se déploie ?
Dormez braves gens, le pouvoir mondial n’est nulle part !
Mais soyez prudent, il pourrait bien se constituer grâce aux « complotistes » qui lui donnent vie par leur mentalité préhistorique !
Où l’on voit clairement que votre discours, dépouillé de ses références pédantes et de sa gymnastique talmudique, n’a pour but que d’enfumer cette plèbe que vous méprisez du haut de votre autorité imaginaire.
N’importe quel paysan de l’esprit peut flairer le service commandé dans le fat torchon que vous avez commis pour Mediapart.
En besogneux commis universitaire d’un pouvoir qui n’existe pas, vous vous exposez en plus au ridicule en proposant une déconstruction de la définition soralienne de l’Empire.
Quel est votre argument ? Comme pour le reste, l’Empire n’existe pas !
Il n’est, depuis les temps modernes, que « le cadre intensif d’une société de type démocratique où règne une égalité juridique naturellement déréglée ».
« Dès lors, déjouer le complot consiste à dénouer l’ordre du réel (la nation et ses singularités) de l’ordre du virtuel (le gouvernement mondial)... »
Vous feignez d’ignorer qu’au-dessus de la hiérarchie des nations concurrentes, il existe des superstructures oligarchiques qui définissent cette hiérarchie.
Le problème, Monsieur Nabli, c’est que vos techniques nous sont désormais connues.
Brouiller le message réel en surchargeant le discours de référents culturels est un procédé qui n’obtiendra de la part de vos lecteurs potentiels qu’un abandon précoce ou une indigestion.
Dénoncer la critique raisonnée du pouvoir au nom de son inexistence est une pirouette qui trahit le fait que c’est au nom de celui-ci que vous attaquez la Dissidence.
Enfin, flatter avec fourberie le comique pour isoler le penseur est une méthode si cousue de fil blanc que vous aurez beaucoup de mal à convaincre quiconque que c’est la probité intellectuelle qui vous a commandé ce brûlot.
Pour finir, je vous dirai que je comprends l’inquiétude du parti socialiste, qui voit son électorat musulman lui échapper.
Que le patriotisme social puisse réconcilier les communautés qu’ils s’évertuent à diviser est un danger réel pour vos employeurs.
Malheureusement, en dépit de votre érudition portative et de votre science du pilpoul, ce type d’opération est devenu trop visible aux yeux des dissidents. Et je crains pour vous que l’influence grandissante de l’homme que voulez abattre n’aiguise toujours plus l’instinct de ceux que votre article pompeux essaie de tromper.
Max Lévy