Alors que la révolte gagne de nombreux pays dans le monde et qu’elle gronde depuis des mois en France, il semblerait bien que l’étincelle transformant la colère sourde en vague emportant Macron et le gouvernement soit belle et bien sur le point d’arriver.
Le détonateur ? Le projet de loi Macron-Delevoye sur les retraites, publié dans un contexte de colère sociale, d’exaspération populaire, combiné au mépris inégalé d’une oligarchie dont l’arrogance n’a d’égale que la violence dont elle fait preuve pour se maintenir.
Le projet Delevoye-Macron sur les retraites n’est bien évidemment pas le premier texte que les Macron, Philippe, Castaner et leurs marionnettistes mettent en place pour détruire un peu plus nos, droits, nos libertés, notre dignité…. au profit de quelques puissants oligarques mondialistes.
Loi Macron-El Khomri, privatisations à tout va, loi de transformation de la fonction publique, loi anti-casseurs, réforme de l’assurance-chômage… On ne compte plus les dispositifs et projets fous, destinés à asservir encore un peu plus les salariés, les travailleurs, les fonctionnaires, les petits entrepreneurs, les chômeurs, les précaires… les Français tout simplement.
Mais que l’on se rassure, les larmes et la misère que nous réserve Macron font les beaux jours des milliardaires du CAC 40, de puissants capitalistes situés à Bruxelles, à Washington ou ailleurs… Les richesses entassées dans les paradis fiscaux n’étant que le reflet de l’enfer qu’est devenu le quotidien de bon nombre de travailleurs.
Le projet Delevoye-Macron sur les retraites : une arme au profit du capital
Craignant un revers électoral au printemps dernier, la présentation du projet de loi sur les retraites par J-P Delevoye a été reportée à l’été dernier. Pendant que les Français qui le pouvaient bouchonnaient sur les routes des vacances, Macron nous mettaient en marche vers la misère pour tous (ou presque). Sans rentrer dans les détails d’un projet volontairement flou, ce sujet mérite qu’on s’y attarde puisqu’il suggère un changement de paradigme essentiel qui fait de la lutte contre la réforme des retraites, la mère de toutes les batailles.
Depuis 1993, nous avons assisté à diverses modifications et aménagements du système de retraite. Mais cette fois, en passant à une « retraite par points », c’est toute l’architecture de notre système de retraites qui est modifiée. Notre système devenant essentiellement contributif (alignement des pensions sur les cotisations versées), donc individualiste, reléguant la solidarité à une portion congrue. Or les retraites ne sont pas un privilège, une prestation d’assistance mais un droit que se sont constitués les travailleurs. Cette réforme visant à supprimer les différents systèmes de retraites existants, à introduire la répartition dans une logique de capitalisation, à instaurer un régime où « chaque jour travaillé permettra d’acheter des points » est finalement dans la logique libérale de Macron : ce sera désormais le chacun pour soi. Après tout, que lui importe que « ceux qui ne sont rien », « les fainéants », « les illettrés » aillent plus tard crever dehors puisqu’ils ne sont pas « des premiers de cordée ».
L’âge légal serait maintenu à 62 ans, mais l’âge pivot étant fixé à 64 ans, il y aura fatalement une décote pour toute personne partant avant cet âge.
Le gouvernement et les médias mainstream justifient cela en rabâchant le même argument trompeur : puisque l’espérance de vie augmente, il faut travailler plus longtemps.
Or, il faut bien distinguer « espérance de vie » et « espérance de vie en bonne santé ». En France, en 2017, espérance de vie est de 85 ans pour les femmes et de 79 ans pour les hommes ; l’espérance de vie en bonne santé, cependant, est bien inférieure : 62 ans pour les hommes et 64 ans pour les femmes.
Sans compter que les retraités ne sont pas égaux face à l’espérance de vie. Plus on est riche, plus on a de chance de vivre longtemps. Les 5 % les plus riches ont une espérance de vie supérieure de 13 ans aux 5 % les plus pauvres.
Pour Macron, la plupart des Français seront donc bon pour travailler tant que leur organisme le permettra… Et lorsqu’ils ne serviront plus à rien, ils pourront aller crever (de toutes façon, ils n’auront pas les moyens de se soigner…). Jacques Attali est en train de réaliser son idéal : « Je rêve d’une société où il n’y aurait pas de retraite ».
On est donc en face d’un système profondément injuste puisque surcote et décote ne tiennent pas compte des différences d’espérance de vie et de la capacité à rester en emploi.
Dans tous les cas, l’âge légal devient un leurre, si la pension servie à ce moment ne permet pas de boucler les fins de mois.
Le mode de calcul serait quant à lui profondément modifié. Pour la fonction publique, le calcul était fait sur les 6 meilleurs mois. Pour le privé c’était sur les 25 meilleures années (jusqu’en 1993, c’était sur les 10 meilleures années). Ce passage de 10 à 25 ans avait déjà bien fait baisser le montant des retraites dans le privé.
Désormais, le mode de calcul se fera sur l’ensemble de la carrière, Ainsi, toute période non travaillée (chômage, congé maladie, congé parental…) ou travaillée avec un salaire bas (à temps partiel, ou au smic en débutant) entraînera mécaniquement une baisse de sa pension.
Aujourd’hui, le taux de remplacement (rapport entre le dernier salaire et la première pension de retraite) est de 75 % (que ce soit dans le privé ou dans le public). Avec un calcul sur l’ensemble de la carrière et non sur les 6 derniers mois ou les 25 dernières années, on obtient de fortes baisses et il n’est pas rare d’avoir un taux de remplacement qui passe à 55 %. Ce seront donc des centaines d’euros en moins chaque mois !
Marlène Schiappa, d’habitude si prompte à prendre la parole pour nous faire croire qu’elle se soucie de l’égalité homme-femme, est étrangement silencieuse. Il n’est pas besoin d’être voyant pour deviner que les femmes (qui s’arrêtent souvent pour élever les enfants, qui recourent plus souvent aux temps partiels…) seront encore plus pénalisées. Quant aux pensions de réversion désormais soumises à conditions de ressources… ce sera la double peine. Après tout, pour ce gouvernement, qu’importe de faire plonger davantage de veuves dans la précarité et sous le seuil de pauvreté.
Un autre aspect essentiel de ce projet est le passage d’un système qui fonctionne par annuités, à un système basé sur une accumulation de points. Le système actuel garantit un taux de remplacement défini et chacun peut aisément calculer la pension qu’il recevra plus tard. Avec le système par points, chaque salarié cumule des points et ce ne sera qu’au moment de la retraite que le montant de la pension pourra être calculé (en multipliant le nombre de points acquis pas la valeur de celui-ci). Or, personne ne peut garantir la valeur de ce point puisqu’elle sera ajustée chaque année de manière à équilibrer les finances, en fonction de la situation économique
L’économiste Henri Sterdyniak explique clairement le système :
« L’objectif réel de la réforme des retraites qu’Emmanuel Macron et son gouvernement veulent imposer est de garantir la stabilité (voire la baisse) de la part des retraites dans le PIB, de passer du système actuel fournissant certaines garanties aux salariés en termes de taux de remplacement et d’âge de départ à la retraite, à un système flexible permettant d’utiliser les retraites comme variable d’ajustement des finances publiques ».
D’un tel système, il est aisé de voir que, fatalement, les retraites ne peuvent que chuter, annonçant pour la très grande majorité des travailleurs une précarité massive.
La raison réelle de cette inversion philosophique du système est de permettre, pour ceux qui en auront les capacités, d’encourager la capitalisation. Les fonds de pension guettent et se frottent les mains en imaginant déjà les juteux bénéfices qu’ils pourront faire sur le « marché des retraites ».
Également, la flexibilité, le chômage, la précarité, l’arrivée tardive dans le monde du travail obligeront de nombreux salariés à prendre des assurances complémentaires. Petit à petit, les retraites seront privatisées ce qui ne pourra qu’augmenter les inégalités.
Dans un pays où les seules entreprises du CAC 40 engrangent chaque année des dizaines de milliards d’euros de bénéfices, où le CICE qui a coûté des milliards aux Français est un chèque en blanc aux grands patrons, où les plus grandes fortunes voient leurs fortunes personnelles augmenter le plus vite au monde, où la fraude fiscale des grands groupes se compte en dizaines de milliards d’euros chaque année, il n’y a pas de problème de financement des retraites. Derrières ces dividendes, ces stock-options, ce sont des vies brisées par des licenciements et davantage de souffrance au travail. Le problème du financement est donc essentiellement un problème de partage des richesses créées. Il y a juste un seul problème, et ce problème c’est le capitalisme.
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