Certes, c’est le patron du renseignement intérieur, et à ce titre il a le droit de garder le secret sur ses informations. Mais l’article du JDD nous apprend juste que cet énarque extrait du Berry aime à jouer « au centre », qu’il n’est « pas politisé », et qu’il joue « libéro » au foot, le poste principal de la défense. On n’en saura pas plus sur sa politique sécuritaire ou antiterroriste.
Depuis les attentats, les dirigeants des différentes cellules de renseignement, qu’il soit militaire, policier ou encore plus secret, se sont succédé à grande vitesse. À chaque fois, la presse nous vend un homme de confiance absolue, un roc qui cumule toutes les compétences et qui fera don de sa personne à la Nation.
Pourtant, quand on s’intéresse de près aux attentats de 2015-2016, un étrange fumet monte aux naseaux : les hommes qui sont passés à l’acte ont quasiment tous été surveillés ou fichés par nos services, ce qui n’a, in fine, servi à rien. Et on ne compte plus les liens avec des services étrangers...
Alors, comme à chaque fois, on nous revend le coup des « failles », le coup de l’amélioration des services, en insistant sur le manque « de moyens et d’effectifs » pour en arriver à une énième « réorganisation » – tout cela figure dans le rapport Fenech –, et tout recommence.
Il ne s’agit pas de désinformation, mais de sous-information.
Ancien préfet de police à Marseille, Laurent Nunez a été nommé à la tête de la DGSI, le service en charge de la lutte antiterroriste.
Recevant la Légion d’honneur, en 2011 à Bayonne, il s’en était presque excusé : « Avant moi, les médailles acquises dans ma famille, l’ont été sur le front ». Sur le front, Laurent Nunez y est à son tour. Ce préfet de 53 ans vient de prendre la tête de la DGSI, la Direction générale de la sécurité intérieure, en charge de la lutte antiterroriste. En arrivant dans son nouveau bureau sous haute protection de Levallois, il a accroché trois cadres. Le premier aligne les quatre médailles de son grand-père maternel, Joseph, revenu du front de 14 et de Verdun. Le second est une lettre encadrée, celle annonçant la mort d’un de ses oncles, dans les Vosges, à l’été 44. Les deux tableaux voisinent avec une affiche de corrida témoigne qui, elle aussi, de son passé familial.
Les Nunez ont quitté l’Andalousie à la fin du XIXe pour s’installer en Algérie, dans la région d’Oran. Les parents de Laurent Nunez se sont connus sur le sol algérien français et sont arrivés en métropole en 1962. Où s’installer ? Une tante, Antoinette, veuve d’un policier, habitait Bourges, près de ses enfants, hébergés à l’orphelinat de la police. Va donc pour Bourges. « Mes parents ont atterri dans un immeuble des quartiers nord. Ils n’ont jamais quitté la ville. J’ai grandi là… » Laurent Nunez, sa sœur jumelle et son frère cadet ont eu une « enfance modeste et heureuse », élevés par « des parents tolérants », une mère institutrice et un père devenu architecte.
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« Je suis sorti de l’ENA en 1999, un an après l’assassinat du préfet Érignac, et dans ma promo, l’Intérieur a été très demandé ». Laurent Nunez est d’abord affecté dans les entrailles de l’administration, au sein du service du ministère chargé de gérer les carrières du corps préfectoral. « Je ne me suis fait aucun ennemi pendant trois ans ! », sourit-il à l’évocation de ce job tout en subtilité.
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En coulisses, depuis la salle de commandement, celui qui est l’ombre du préfet de police, gère les manifs pour tous, Charlie Hebdo, la marche du 11 janvier. Un sans-faute. « J’avais en Laurent Nunez une confiance absolue », confie Bernard Boucaut, qui salue son « sens de l’organisation et du management » et souligne « son intelligence des situations ».
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Après l’élection d’Emmanuel Macron, lui qui assure « ne pas être marqué politiquement », est d’abord pressenti pour diriger la police nationale. Puis un jour de mai, le ministre de l’Intérieur, Gérard Collomb, l’appelle, mais lui propose… la DGSI. « J’ai une feuille de route, admet Nunez : travailler en bonne intelligence avec les autres services de renseignement ». Il va donc devoir faire équipe avec Bernard Émié, directeur de la DGSE, et Pierre de Bousquet de Florian, qui pilote depuis l’Élysée le Centre national de contre-terrorisme. « Le travail collectif ne m’effraye pas », avertit Nunez...