Dans la guerre médiatique, les images servent toujours de canalisateur. Chaque action géopolitique est presque toujours précédée d’images particulièrement choquantes, élevées au rang de symboles pour justifier des décisions politiques controversées.
L’attaque chimique du « massacre de la Ghouta »
En août 2013, des allégations surgissent dans les médias sur de supposées attaques au gaz sarin sur la région de Ghouta en Syrie, non loin de la capitale, Damas, après la fuite de plusieurs vidéos évoquant l’attaque.
À aucun moment, les détails sur l’attaque présumée n’ont été clarifiées et l’éventail du nombre de victimes reste extrêmement large, entre 300 et 1800 avec une moyenne établie approximativement à 600 morts, notamment par Médecins sans Frontières.
Cependant très vite, l’Occident impute la responsabilité de cette présumée attaque chimique à l’armée gouvernementale syrienne, ce que le président Bachar el-Assad dément fermement, rejetant la responsabilité sur l’opposition islamiste dite « modérée », soutenue par les États-Unis.
En Europe, l’opinion s’agite. Si la présomption de l’attaque constitue un véritable casus belli pour une intervention militaire limitée contre Damas, le Parlement britannique rejette la véracité des vidéos particulièrement choquantes, censées montrer les moments suivant l’attaque, ayant fuité sur la toile, ajoutant qu’elles « ne constituent pas une raison valable pour le déclenchement immédiat d’une guerre ».
Le Premier ministre britannique David Cameron tentait, de son côté, de convaincre des députés sceptiques de la nécessité d’intervenir en Syrie. Mais en vain.
Le 30 août, à l’issue du vote, le leader du Labour de l’époque, Ed Miliband, avait notamment déclaré à la BBC : « Les britanniques sont profondément préoccupés par les attaques d’armes chimiques en Syrie, mais ils veulent aussi que nous tirions les leçons de ce qui s’est passé en Irak », revenant ainsi sur la présence d’armes chimiques dans ce pays, qui avait mené à une intervention du Royaume-Uni sur le terrain et qui, après enquête, s’était avérée fausse.
Par ailleurs, le récent référendum sur le Brexit, qui a provoqué dans la foulée la démission de David Cameron, a brisé le plan d’une éventuelle intervention britannique en Syrie.
La mort d’Aylan Kurdi et la porte ouverte aux réfugiés
En août 2015, une photo particulièrement choquante fait le tour du monde. Celle d’Aylan Kurdi, un petit garçon syrien retrouvé mort, échoué sur une plage turque.
Immédiatement, partout en occident, la photo semble « éveiller les consciences », plusieurs pays européens décidant notamment d’ouvrir leurs frontières pour accueillir les réfugiés fuyant vers l’Europe. En tête, l’Allemagne, qui, par la politique dite de la « porte ouverte », déclare être prête à accueillir un million de réfugiés d’ici la fin de l’année 2015.
Un an plus, le pays est submergé par une vague migratoire difficilement contrôlable. En un an, près de 1,5 millions de réfugiés sont arrivés en Allemagne. Les centres d’hébergement sont surchargés, des incidents entre population locale et nouveaux arrivants, mais aussi entre migrants, éclatent régulièrement.
Pour Angela Merkel, c’est le retour de bâton et le plongeon dans les sondages. Selon un sondage publié par Bloomberg, en août 2016, la côte de popularité de la chancelière s’élève à seulement 47%, soit une baisse de 12% par rapport au mois de juillet.
Dans le même temps, les partis anti-immigration fond un bon dans les sondages. Tandis qu’il était crédité à environ 4% en 2013, le parti populiste AfD (Alternative pour l’Allemagne) représentait en mai 2016 15% des intentions de vote.
« Le petit garçon en cendres » d’Alep pour justifier une diabolisation de l’armée syrienne et des forces russes
Une photo d’un petit garçon assis étourdi, ensanglanté et couvert de cendres à l’arrière d’une ambulance après avoir survécu à un raid aérien à Alep a mis en évidence le désespoir de la guerre civile syrienne et de la lutte pour le contrôle de la ville.
L’enfant, identifié comme étant âgé de cinq ans et prénommé Omran Daqneesh, a été blessé le 17 août au soir lors de frappes aériennes militaires sur le quartier rebelle de Qaterji.
Le territoire en question est connu pour être un bastion de « rebelles » se livrant à des activités terroristes (Jaysh al-Islam, Front al-Nosra...) et soutenus par Washington, qui y voit un allié contre Daech et un appui dans son bras de fer avec le gouvernement syrien du président Bachar el-Assad. Moscou, quant à elle, combat ces groupuscules et effectue des frappes aériennes sur ses points stratégiques.
Au vu du contexte, le fait que le petit garçon ait été blessé dans des frappes aériennes commence déjà à déchaîner les passions sur Internet, qui voit émettre une déferlante de commentaires antirusses et antigouvernement.
Pendant ce temps, d’autres horreurs passées sous silence
Pourtant, la situation en Syrie reste chaotique de tous les côtés. L’explosion des armes à feu, des attentats, de la torture, des décapitations et exactions publiques perpétrées par Daech, mais également par les groupes de rebelles continuent de faire la une des médias au quotidien. Une vidéo postée sur les réseaux sociaux en juillet dernier par le groupe Nour al-Din al-Zinki, qui n’avait pas hésité à égorger vif un petit enfant palestinien, en témoigne.
Dans le même temps, la mort de milliers de personnes au sein de la communauté alaouite, fidèle au président Assad, semble passée sous silence. Selon le Syrian center for Policy Research, une ONG travaillant notamment avec l’agence des Nations unies pour les réfugiés, près de 470 000 personnes ont trouvé la mort dans les combats et bombardements en Syrie, parmi lesquels un nombre très important d’enfants.
Rappel
Gaza, 16 juillet 2014 :