Le seul mot que je trouve pour qualifier cette attaque est « idiote ». Je me réfère à la dernière tentative de changement de régime, par la CIA, contre le président philippin Rodrigo Duterte. La soi-disant attaque terroriste d’EI dans l’île méridionale de Mindanao, une île essentiellement musulmane dans un archipel de 100 millions de personnes essentiellement chrétiennes, a débuté littéralement en plein milieu de la rencontre entre le président Duterte et le président russe Vladimir Poutine à Moscou. Cette rencontre s’est tenue dans la foulée de la participation de Duterte au premier forum de la nouvelle Route de la soie qui s’est déroulé à Pékin, le 15 mai dernier. La colonie étasunienne, depuis 1898, s’éloigne visiblement du maitre Washington.
Le siège terroriste de la ville de Marawi est manifestement une tentative désespérée de la part de Washington pour renverser le très populaire (80 % de popularité dans les sondages) Duterte, qui a gagné avec succès la présidence en juin dernier contre Mar Roxas, le candidat soutenu par les États-Unis, un ancien banquier de Wall Street, éduqué aux États-Unis. Depuis son entrée en fonction, Duterte a pris des mesures audacieuses et courageuses pour rediriger l’ancienne colonie américaine vers une alliance eurasienne, avec la Chine et la Russie comme principaux partenaires. À Pékin, en octobre de l’année dernière, Duterte avait déjà rencontré Xi Jinping et signé de nombreux accords commerciaux. En n’hésitant pas à suivre une politique en complète opposition avec celle de son prédécesseur pro américain Benigno Aquino III, Duterte a accepté de résoudre le conflit de la mer de Chine méridionale, entre les Philippines et la Chine, par le biais de discussions diplomatiques pacifiques, et, comme il l’a dit, « chercher à se séparer des États-Unis ».
Depuis lors, Duterte a également cherché des liens plus étroits avec la Russie, dans un effort supplémentaire pour sortir de facto son pays du joug américain. Cela n’est pas bien vu par une strate du soi-disant État profond de Washington, la CIA et leurs sinistres amis. Si les États-Unis perdaient les Philippines, cela constituerait une perte géopolitique dévastatrice pour la stratégie de confinement militaire étasunienne contre la Chine et la Russie dans le Pacifique. Dévastateur.
Les attaques et le siège récents à Mindanao ont été réalisés par le groupe terroriste Maute et les organisations terroristes criminelles d’Abu Sayyaf, tous deux liés nominalement à la fausse opération islamique EI créée par les États-Unis, un projet terroriste de la CIA mis sur pied avec des fonds saoudiens, remontant à Oussama Ben Laden, al-Qaïda et l’Opération Cyclone, dans les années 1980, contre les Soviétiques en Afghanistan.
Le pivot eurasien de Duterte
Il n’est pas surprenant pour quiconque suit de près l’évolution des dialogues entre Duterte et les dirigeants chinois, et maintenant russes, que la CIA cherche à déstabiliser Duterte à ce moment critique. Elle se cache simplement derrière les jupes noires de leur drogués psychopathes, Maute et Abu Sayyaf, tous deux liés à EI, créés par la CIA et le Mossad et financés par l’Arabie saoudite.
À Moscou, en dépit d’avoir interrompu ses entretiens avec Poutine pour rentrer à la maison et faire face à la crise terroriste à Mindanao, le chef philippin et ses ministres de la Défense et des Affaires étrangères ont réussi à signer un certain nombre d’accords importants avec la Russie. Il s’agissait notamment de 10 accords majeurs visant à approfondir les relations bilatérales de défense, stratégiques et économiques. Les deux pays ont signé un accord sur la coopération en matière de défense, un cadre juridique pour les échanges militaires, la formation, le partage des renseignements. Les Philippines et la Russie ont également signé un accord d’échange de renseignements pour renforcer la coopération antiterroriste. Cela ne plaît pas du tout à Washington.
Certainement pas un manant
Les médias traditionnels occidentaux sont ravis de décrire le politicien vétéran Duterte, âgé de 71 ans, comme un manant de la campagne, un « pire que paysan » tout juste capable de déclarations vulgaires, comme lorsque, après sa prise de fonction, il a traité l’ambassadeur des États-Unis à Manille de « fils de pute homosexuel » pour avoir critiqué sa guerre contre les gros trafiquants de drogue qui affligent le pays. Que Duterte ait été correct ou pas, il a clairement gagné la sympathie de millions de ses compatriotes pour avoir le courage de s’opposer au pouvoir américain.
Après avoir observé attentivement Duterte et son choix de conseillers proches, depuis maintenant près d’un an, j’en suis arrivé à la conclusion que Duterte n’est certainement pas un manant. Au contraire, c’est un acteur politique judicieux qui est déterminé à sortir son pays du statut de servitude coloniale qu’il subit depuis la première colonisation espagnole, en 1565.