Payer un institut de sondages pour découvrir un tel truisme, ça a un nom, que nous ne dirons pas ici.
Tout le monde sait que la pauvreté non choisie produit des difficultés dans tous les compartiments du jeu, dont celui de l’alimentation. Les deux autres difficultés sont le logement et le boulot. Les problèmes politiques viennent ensuite, même s’ils sont étroitement liés aux précédents.
Les pauvres bouffent mal. Allez dans n’importe quel hypermarché, et regardez ce que les pauvres foutent dans leur caddy : ça sent pas la connaissance des produits, de la diététique, de la santé en général. Or, ce qui fait la différence, entre deux pauvres, c’est la connaissance : les uns ne comprennent rien à ce qu’il leur arrive, les autres si, ou partiellement. Ce sont les seconds qui peuvent s’améliorer, ou améliorer leurs conditions de vie, pas les premiers. Sauf s’ils gagnent au Loto, mais auquel cas ils restent cons.
Les pauvres mangent mal, et pas forcément peu : quand on n’a pas le sou, on s’achète de la quantité. Un, ça rassure, deux, ça remplit le ventre. Donc plus c’est sucré, gluténisé, salé, plus c’est bon, pour le pauvre ignorant. C’est le syndrome tiers-monde : en route pour le diabète.
Mais il y a des pauvres qui mangent mal et peu. On pense aux vieux, plus ou moins abandonnés par la Nation. Quand on vit seul, à 80 piges, on n’a pas forcément l’envie de se faire un petit gueuleton. On mange sa tranche de jambon, on saute des repas, on vit frugalement. Il y a heureusement de plus en plus d’aides à domicile, d’accompagnants, mais beaucoup de vieux la sautent, comme diraient les anciens.
Les pauvres non ignorants, qui s’intéressent à leur santé, s’intéressent évidemment de près à l’alimentation : eux, vous ne les retrouverez pas chez Carrefour avec des pizzas de 50 cm de diamètre dans leur charrette. Eux, leur truc, c’est généralement le marché, les produits frais, pas forcément chers, et parfois pas du tout, mais avec de la cuisine derrière. Cela suppose de faire la cuisine, et Jamie Olivier dans ses grandes années, avant d’être lifté par les Américains, proposait une cuisine de pauvre attirante et facile.
Le coup de manger 5 fruits et légumes par jour c’est bien, mais un slogan ne suffit pas à changer les choses. Les choses se changent par le bas, par soi-même, par la connaissance, et par le haut via la politique. Faire de la politique c’est aussi aider les autres, sauf dans les partis qui pratiquent la traîtrise sociale.
Donc les conseils du Docteur E&R, et pas du Dr Feelgood qu’est ce bon vieux Michel Cymes, le porte-parole de Buzyn qui est elle-même la porte-parole des lobbies de la politique et de l’industrie (hum hum), c’est de s’intéresser à l’alimentation, aux aliments, à leur valeur, et de trouver un équilibre entre sa bourse et sa santé. C’est tout à fait possible. Cent millions de Brésiliens survivent avec du riz et des haricots noirs.
Mais il ne faut pas renoncer pour autant à changer les choses par la politique, l’engagement personnel. C’est un double combat, mais réellement efficace. Ce que fait le Secours populaire est très bien, mais alerter les dirigeants de ce pays, qui se foutent de la pauvreté comme de leur première trahison, ça sert à rien. C’est à nous de faire le boulot.
Les Français les plus pauvres ont du mal à manger sainement et suffisamment,
selon le baromètre du Secours populaire
« Mangez cinq fruits et légumes par jour ». Si le slogan des autorités sanitaires françaises n’est pas facile à suivre pour un certain nombre de Français, il reste lettre morte pour les plus pauvres, comme le révèle le 12e baromètre annuel du Secours populaire sur la pauvreté, dévoilé mardi 11 septembre, soit deux jours avant la présentation du plan pauvreté par le gouvernement.
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Les plus démunis peinent à manger équilibré
À la question « rencontrez-vous des difficultés financières » pour « consommer des fruits et légumes frais tous les jours », un quart des sondés répondent « oui ». Cette proportion monte à 31% pour les femmes. « Elles sont souvent le chef des familles monoparentales », explique à franceinfo Richard Béninger, secrétaire national du Secours populaire.
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Pour ces Français, consommer du poisson et de la viande au moins une fois par semaine est également très difficile. Quand les revenus se situent entre 1 200 et 2 000 euros, ils sont 25% à ne pas manger de la viande une fois par semaine et 35% du poisson. En deçà de 1 200 euros, ils sont 36% et 46% dans ce cas de figure.
Près de la moitié des Français les plus pauvres (48%) ont, par ailleurs, du mal à se procurer une alimentation saine leur permettant de faire trois repas par jour. « Il y a des conséquences qualitatives, les gens ne se nourrissent pas correctement, mais aussi quantitatives, ils sautent parfois un repas », observe Richard Béninger, soulignant que les jeunes et les étudiants sont particulièrement concernés.
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Plus globalement, le Secours populaire s’alarme du sentiment de paupérisation au sein de la population, qui gagne du terrain à chaque baromètre. Cette année, près de 60% des personnes interrogées indiquent qu’il leur est déjà arrivé de se dire qu’elles étaient sur le point de basculer dans la pauvreté, soit 2 points de plus qu’en 2017. Et 81% pensent que leurs enfants seront plus exposés à la pauvreté.