Ça chauffe... Alors que les loyalistes n’en reviennent peut-être pas encore tout à fait de pouvoir enfin reprendre leur dû et que les Russes ont enfin haussé le ton vis-à-vis des Turcs, le sultan doit se demander dans quelle galère il s’est embarqué. Comme le résume un bon observateur, la journée fut « trépidante » en Syrie :
prise de possession totale de la M5 [une autoroute stratégique, NDLR] jusqu’à Alep
hélicoptère syrien abattu par les Turco-barbus
position turque à nouveau bombardée, près de Qaminas
attaque barbue sur Nayrab qui se termine en fiasco
bombardements russes sur Idlib
N’en jetez plus !
La M5 est donc dans la poche, même s’il reste à la sécuriser et à créer une zone tampon autour d’elle. L’imMonde en fait une jaunisse...
Cette autoroute, qui échappait aux loyalistes depuis huit longues années, a une histoire très spéciale. On se rappelle que c’est dans cette zone que, en août 2016, une mêlée acharnée avait eu lieu :
Combats absolument féroces à Alep ! Les loyalistes avancent lentement, sûrement, lentement encore, tandis que les djihadistes, qui à défaut d’être modérés ont un talent militaire certain, se défendent avec l’énergie du désespoir.
Depuis que la seule voie de communication, la fameuse route Al Castello, passant par le nord-ouest est bloquée, les « rebelles » se lancent vague après vague contre les positions assez fines de l’armée au sud de la ville :
Et c’est sanglant... Des centaines de djihadistes ont été tués, près d’un millier selon le ministère russe de la Défense, dont une trentaine de commandants. Côté gouvernemental, les pertes sont moins importantes mais tout de même conséquentes, sans que l’on puisse établir un chiffre précis. On se bat rue par rue, bâtiment par bâtiment tandis que l’aviation russe bombarde sans répit. Au prix de combats acharnés, l’armée syrienne a repris les quelques positions perdues ces derniers jours au sud de la ville, ce qui semble porter un coup au moral des takfiris, condamnés à tout recommencer.
Car s’ils n’arrivent pas à percer l’encerclement au sud, c’en est fini de leur présence à Alep. Au nord, la poigne loyaliste se referme inexorablement et l’armée avance même dans le camp d’Handarat. La route Castello est maintenant occupée sur des kilomètres et les incessantes attaques djihadistes fin juillet s’y sont toutes cassé les dents (avec des centaines de morts laissés sur le terrain). C’est désormais le sud ou la défaite.
Que de chemin parcouru depuis...
Après avoir établi un périmètre autour de cette route stratégique, dans quelle direction les loyalistes iront-ils pousser la chansonnette ? Du côté de la plaine d’Anadan (1) afin de sécuriser Alep de manière définitive ? En direction de la M4, autre autoroute stratégique (2) qui relie Alep à Lattaquié, comme le suggère une source au sein de l’armée ? Certains parlent même de couper la voie d’approvisionnement entre Idlib et la Turquie (3).
C’est là qu’entre en compte le jeu des puissances. Erdoğan passe son temps à chouiner depuis le début de l’opération, mais ce qui fonctionne habituellement avec les euronouilles semble tomber dans l’oreille d’un sourd du côté russe. Plusieurs fois embobiné par l’évidente mauvaise foi turque qui n’a respecté aucun des engagements pris lors des cessez-le-feu précédents, l’ours a dû se dire que cette fois, il y en avait plus qu’assez. Quant aux Syriens, ils viennent une nouvelle fois de bombarder un poste turc !
À peine le sultan, qui prononcera demain un discours annoncé important sur la Syrie, a-t-il le temps d’avertir Damas que ses soldats sont à nouveau matraqués. Deux, et peut-être même trois fois en deux jours, qui dit mieux ? Ankara ne sait plus comment prendre la chose et alterne menaces et demandes éperdues (s’il vous plaît, dites à vos alliés syriens d’arrêter de bombarder nos postes). Le Kremlin répond placidement : « Faites en sorte que toute attaque contre les forces russes ou syriennes cessent ». Dialogue de sourd pendant que les Sukhoïs vaporisent les barbus...
Erdoğan menace de frapper les forces syriennes partout en Syrie
Le président turc Recep Tayyip Erdoğan a menacé, en cas de nouvelle attaque contre ses forces armées, de frapper les troupes syriennes partout en Syrie tout en adressant une critique à l’égard de la Russie, l’accusant de massacres.
« Je déclare que nous frapperons le régime partout », a déclaré le président turc lors d’un discours à Ankara, en cas de nouvelle attaque contre les forces turques présentes dans la province d’Idlib. « Le régime et les forces russes [...] qui les soutiennent attaquent sans arrêt les civils, commettent des massacres et versent le sang », a-t-il en outre ajouté.
La réponse du Kremlin ne s’est pas fait attendre. Selon la présidence russe, Ankara ne respecte pas les accords russo-turcs pour un cessez-le-feu en Syrie et ne fait rien pour neutraliser les terroristes dans la région rebelle d’Idlib, a accusé le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov. Évoquant les accords de Sotchi conclus en octobre dernier, il a expliqué que la Turquie avait l’obligation de neutraliser les groupes terroristes mais que « tous ces groupes bombardent les troupes syriennes et mènent des actions agressives contre les installations militaires russes ».
Poutine et Erdoğan veulent sauvegarder leurs accords de désescalade en Syrie
Le président turc s’est par ailleurs entretenu par téléphone avec son homologue russe Vladimir Poutine. Le communiqué, qui précise que le coup de téléphone a eu lieu à l’initiative d’Ankara, rapporte que les deux présidents ont poursuivi leurs discussions sur différents aspects du règlement de la crise syrienne, dans le contexte de l’aggravation de la situation dans la zone de désescalade d’Idlib. Ils ont également dit souhaiter la mise en œuvre complète des accords de désescalade russo-turc en Syrie, selon un communiqué publié par le Kremlin.
Des combats violents et meurtriers entre forces du gouvernement syrien et militaires turcs ont éclaté depuis début février dans la province d’Idlib, où Ankara soutient les groupes rebelles et dispose de positions militaires qu’elle a récemment renforcées.
En face, Damas affirme sa volonté de poursuivre sa progression pour reprendre la dernière région qui échappe à son contrôle et où elle a lancé une offensive avec l’aide des raids aériens de son allié russe.
L’Union européenne met en garde contre un affrontement entre forces turques et russes
Le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell a mis en garde contre un affrontement entre forces turques et russes en Syrie et a pressé les Européens de se doter de moyens pour peser sur le règlement du conflit.
« Nous assistons à des affrontements entre le régime syrien et les forces turques, sans compter le risque de voir les militaires turcs et russes s’affronter », a-t-il souligné lors d’un discours prononcé le 11 février au Parlement européen dont le texte a été publié le lendemain par ses services.
« Ces tensions pourraient à leur tour déclencher un conflit régional plus large », a-t-il averti. « Le cessez-le-feu convenu entre Ankara et Moscou doit être appliqué », a-t-il plaidé.
Source : francais.rt.com