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De Platon au Christ : entretien avec Camille Mordelynch

En marge de sa conférence « L’élévation de l’âme chez Platon » donnée à Grenoble le 13 mai 2023, Camille Mordelynch a répondu aux questions de la section grenobloise d’E&R.

* *

E&R Grenoble : Camille Mordelynch, bonjour et merci de venir à notre rencontre à Grenoble. Êtes-vous familière de cette ville ?

Camille Mordelynch : Pas du tout ! Je pense y être passée dans ma prime jeunesse, mais n’en ayant aucun souvenir, je considère donc ma venue à Grenoble comme une première, et vous remercie pour cette invitation.

 

Pour commencer notre entretien, l’actualité nous offre une fournée intéressante [1] : le ministre de l’Éducation nationale et de la Jeunesse, Pap Ndiaye, a justifié ce dimanche 7 mai la suspension pour trois mois de deux professeurs de philosophie, Franklin Nyamsi, qui enseigne à Rouen, et René Chiche, près de Marseille. Tous deux se sont fait connaître sur les réseaux sociaux pour leurs prises de position radicales ayant eu le malheur de déplaire au pouvoir. Nous pensons particulièrement à René Chiche, qui a pris position contre le pass vaccinal [2], et dont Pap Ndiaye qualifie les propos d’« outranciers, complotistes, injurieux d’une très grande violence ». Que vous donne à penser cette actualité, plus particulièrement concernant la liberté d’expression dans le monde enseignant – vous-même étant enseignante de philosophie ?

Écoutez, qu’attendre de plus de la part d’une institution, l’Éducation nationale, qui n’est rien de plus qu’une machine à domestication des esprits (vécu de l’intérieur, cela apparaît clairement), se faisant le relais du narratif dominant (on l’a très bien vu durant le covid). La crise covid arrivant au début de ma carrière d’enseignante, j’effectuais alors une courte période en école primaire où il s’agissait d’imposer le masque à des enfants de six ans toute la journée, y compris durant les récréations, un moment où oxygéner son cerveau était nécessaire. Tout cela, pour moi, s’apparentait à de la maltraitance, et tous les échelons de la hiérarchie, jusqu’au plus bas, imposait le respect de ces règles surréalistes. J’ai par la suite poursuivi en tant qu’enseignante de philosophie en lycée, et ce fut pareil : j’ai pu assister à la collaboration de tout le personnel, imposant le masque à tous quelle que soit l’activité et le lieu. Tout le corps enseignant que je côtoyais s’y soumettait, s’y pliait, jouant le rôle de la collaboration à l’extrême. De mon côté, c’était alors mes débuts dans l’Éducation nationale, et je me suis moi-même soumise quelque peu à ces injonctions, ayant été menacée d’exclusion pour avoir osé porter le masque sous le nez.

 

Étiez-vous alors la seule à remettre en cause le narratif ? Aucune exception dans votre établissement ?

Aucune exception, j’étais bien la seule ! Une soumission complètement homogène, intégrale. Effrayant ! Pour ma part, même si je « respectais » les injonctions de la couche faciale, je répétais systématiquement à mes élèves qu’ils pouvaient retirer leur masque, restant ainsi radicale par le discours. Le problème était que je n’étais pas du tout suivie par mes collègues.

 

Votre formation en philosophie a-t-elle un lien particulier avec cette rébellion ? Que dire des autres enseignants en philosophie ? Eux-mêmes ne partageaient-ils pas votre opinion ?

Oh non, c’était tout aussi désolant. Et c’est là où je me suis dit que l’on confiait l’éducation – ou plutôt l’instruction – de nos enfants à des adultes complètement endoctrinés, qui adhèrent instantanément à l’opinion courante, la doxa, alors même que la philosophie se construit en opposition à celle-ci au profit de la vérité. La leçon de la philosophie est d’apprendre à penser par soi-même et d’arriver à remettre en cause les opinions établies. Dans ce contexte sanitaire, j’ai essayé de faire mon possible, mais j’ai fait malheureusement face à l’inertie complète de mes collègues enseignants.

 

Ce qui nous amène à vous demander quelle place joue – ou plutôt devrait jouer – la philosophie dans l’éducation ?

Ce que j’essaie d’inculquer à mes élèves, c’est qu’aujourd’hui la philosophie est victime d’une dérive théoriciste, c’est-à-dire que l’on en a fait un savoir froid, mort, quelque chose de l’ordre d’une scolastique spéculative, très théorique. À l’origine, la philosophie était d’abord un art de vivre, un savoir-vivre qui devait nous encourager à nous inscrire dans une vie bonne et vertueuse. Je pense que tout l’intérêt de philosophie est là : c’est d’apprendre à mieux vivre, à bien vivre. Je crois qu’il faut réinvestir cet héritage originel de la philosophie qui avait une dimension éminemment pratique.

 

Cela rejoins une thèse connue du prêtre et philosophe Pierre Hadot [3], spécialiste de philosophie antique, à savoir que la philosophie est d’abord un choix de vie, un exercice spirituel qui ensuite se justifie dans un discours.

Tout à fait ! Pierre Hadot a très bien rappelé que la philosophie est une pratique de la sagesse, et il est celui qui a replacé le curseur sur cet aspect oublié, actuellement occulté de cette discipline.

 

Cela nous permet de nous replonger à juste titre dans l’étude de l’héritage socratique, Socrate ayant d’abord donné l’exemple d’un philosophe pratiquant le dialogue sur l’agora avec ses concitoyens, non l’exemple d’un écrivain.

Et c’est précisément pour cela que Socrate n’a rien écrit ! Je vais l’évoquer dans la conférence, ce qui plaisait à Socrate, c’était l’exercice de la pensée comme dynamique et comme dialogue avec ses semblables, à l’image du dialogue de soi avec soi-même, que Socrate n’a fait qu’externaliser finalement. À l’inverse de cette dynamique, de ce mouvement de la pensée, nous avons l’écriture qui est de l’ordre de la fixité, du figé. Socrate reste donc cohérent par son choix exclusif de n’avoir fait que dialoguer.

 

Il y a une école allemande [4] ayant postulé que la majorité de l’enseignement de Platon n’aurait été qu’oral, et qu’alors son œuvre écrite n’aurait été qu’un appendice presque superflu, destiné surtout à la masse.

En effet, on parle alors d’un enseignement ésotérique, accessible seulement à des initiés donc. Aristote, le plus prodigieux élève de Platon, aurait bénéficié de ces cours. Ainsi, il rapporte que l’un des cours oraux que Platon aurait donné s’intitulait « Sur le Bien », abordant ce principe anhypothétique évoqué dans l’analogie de la ligne et le mythe de la caverne (La République). Mais je ne peux en dire davantage, je n’ai pas assez creusé l’affaire. Il y aurait sûrement à enquêter du côté de la spiritualité égyptienne, orphique ou encore pythagoricienne (Platon a, en effet, côtoyé l’école pythagoricienne en Italie, à Crotone).

 

Dans une salle de classe, comment arriver à faire vivre à vos élèves cet exercice philosophique, alors que l’on reste assis, au contact surtout d’écrits, vis-à-vis d’un programme imposé pour une seule année, destiné à remplir des conditions, une grille d’évaluation fournie par l’Éducation nationale ? Comment arrivez-vous malgré tout à faire vivre la philosophie alors qu’on l’a mise en cage ?

L’expression est parfaite. Honnêtement, on a tout fait, j’ai l’impression, pour dégoûter les élèves de la philosophie. On a un rapport extrêmement quantitatif au savoir philosophique, on nous propose un programme complètement indigeste : dix-sept notions de philosophie au programme en terminale ! C’est énorme ! Ces notions vont de la liberté au bonheur en passant par la justice, et chacune pourrait être méditée séparément tout au long d’une vie. D’autant plus que nos jeunes élèves n’ont plus qu’une sous-culture.

 

Quelle vision avez-vous de cette jeunesse quant à sa santé spirituelle ? Comment se présentent les âmes de ces jeunes gens ?

Dramatiquement. J’assiste à une grande souffrance de la part des jeunes. Ils sont dans un non-sens complet, et l’on ressent très nettement qu’ils n’ont pas les armes pour le conceptualiser ou le penser. Ils sont en quelque sorte dans une douleur endémique, ils ne savent pas où ils vont, ils ne savent pas d’où ils viennent, ils n’ont plus de repères, les familles ont été déconstruites. Ils ont vécu la période covid qui les a complètement atomisés, ils vivent à travers les réseaux sociaux – donc au travers d’un univers factice –, complètement déconnectés de la réalité, ils n’ont plus aucun rapport avec la spiritualité : quand on leur parle d’âme – même si l’on a une notion au programme intitulée « religion » – cela éveille quelques réactions, mais disons que, globalement, c’est très pauvre. J’ai vraiment l’impression qu’ils sont livrés au néant du non-sens.

 

Face à ces quelques réactions, faites-vous face à des gens amorphes, ou alors à du mépris vis- à-vis de la religion, de l’âme ? Comment cela se passe-t-il ?

Il y a une léthargie qui est assez curieuse. Même quand on leur présente des thèses un peu subversives, ou des débats philosophiques qui normalement devraient interpeler leur intelligence, eh bien on fait face à très peu de réaction. Ce qui montre une certaine forme d’engourdissement de la pensée qui s’est généralisé.

 

Le constat que vous dressez ressemble à s’y méprendre à celui d’un philosophe américain du XXe siècle, Allan Bloom, dans son essai intitulé The Closing of the American Mind, paru en 1987. Le sujet était la décadence spirituelle des jeunes universitaires états-uniens à laquelle il assistait de ses yeux. Selon Bloom, on aurait réussi non pas seulement à désarmer les âmes, mais même à les faire disparaître du champ conceptuel. En voici une citation : « Dans l’état actuel des choses, les étudiants disposent d’images puissantes de ce qu’est un corps parfait et ils ne cessent de viser à sa réalisation concrète. Mais, dépourvus de toute orientation littéraire, ils n’ont plus la moindre image d’une âme parfaite et, de ce fait, la leur ne l’est pas. Ils n’imaginent même pas que l’on puisse imaginer une chose pareille. » (Traduction issue de l’édition parue aux Belles Lettres en 2018 sous le titre L’Âme désarmée)

C’est juste. Il y a une vie intérieure chez les jeunes français d’aujourd’hui qui est très pauvre. Quand on leur présente ne serait-ce que des concepts comme l’âme, même la compréhension lexicale leur manque. Pour reprendre le terme de « désarmée », je le trouve très juste, car ils sont précisément sans les outils conceptuels, intellectuels, pour réfléchir sur leur non-sens existentiel, pour en identifier les causes et, à terme, en sortir. Je les trouve donc effectivement désarmés et désœuvrés. Platon parlait de prendre soin de son âme, mais il devient compliqué d’appliquer cela lorsque l’on n’est même plus coutumier de son vocabulaire, que l’on a perdu ne serait-ce que la volonté de cultiver une richesse intérieure, une vie intérieure qui puisse y accueillir l’âme.

 

Pouvons-nous faire un lien avec le manque « d’orientation littéraire » dont parle Bloom ? Quel est votre rapport avec les méthodes de lecture, l’étude des textes, et l’importance par là même des langues à découvrir pour mieux les saisir ? Nous pensons à l’adage connu de la linguistique : traduttore, traditore, « traduire, c’est trahir ».

Plusieurs choses à dire. Premièrement, la lecture pour ces jeunes est devenue un exercice complexe. De par l’effet des nouvelles technologies en réalité – parce-que, comme le dit le philosophe Matthew Crawford [5], les nouvelles technologies ont eu pour conséquence une « crise de l’attention » [6]] –, on a perdu nos capacités d’attention, de concentration en raison de l’hyperstimulation que l’on connaît sur les réseaux sociaux. Quand on fait défiler à une vitesse folle les contenus d’Instagram ou de TikTok, on a systématiquement des bruits, des images, des sons, des couleurs qui nous parviennent. Eh bien se retrouver après devant une page de livre fixe, figée, inerte, rend très compliquée la tâche consistant à focaliser sa pensée dessus. Tout cela est de l’ordre de l’exercice quasi inexistant dans leur quotidien, inintéressant et rendu, selon certains des témoignages que je reçois, difficile pour ceux qui s’y essaient. Je ne leur en tiens pas rigueur dans la mesure où moi-même cela m’impacte aussi ; je sens que l’exercice de la lecture est devenu aussi plus difficile qu’il ne l’était auparavant. Je n’accable pas cette jeunesse parce-que tout a été fait, tout cet abrutissement a été orchestré, l’Éducation nationale, l’école, n’a jamais été un lieu où on leur a transmis l’amour du savoir, où on les a encouragés à la réflexion par eux-mêmes, à construire leur pensée, etc. Je ne leur en veux donc même pas, parce qu’ils sont en réalité les produits d’un système, les produits d’une époque, et en tant qu’enseignante je ne peux qu’en être désolée.

 

Nous pourrions poursuivre la réflexion ainsi : vu qu’ils ne lisent pas leur propre langue, être au contact souvent du grec, du latin quand on étudie la philosophie (ne parlons pas de l’hébreu ou de l’arabe), doit leur être totalement étranger, inaccessible ?

Absolument ! Encore une fois, je ne peux leur tenir rigueur : je n’ai pas une grande différence d’âge avec eux – une décennie – et je suis très loin moi-même d’avoir une grande maîtrise du grec. Je reconnais aujourd’hui la nécessité de travailler avec les textes originaux, de remonter à la langue originale d’un auteur. Comme vous disiez, traduire, c’est trahir ; en traduisant, on perd du sens initial. Pour nous, en philosophie, il est extrêmement précieux de pouvoir se reporter à la langue de l’auteur, à la substance même de sa pensée. Mais je le répète, tout cela est devenu compliqué pour tous, et moi la première j’essaie d’y remédier concernant le latin et le grec. Quand on place les jeunes devant un texte de philosophie, on en est réduit à de la traduction du français au français. On fait un travail de traduction franco-français, on se retrouve à devoir expliquer du vocabulaire courant plutôt que savant, nous en sommes là, voilà l’état d’urgence !

 

On a l’impression d’une stagnation depuis l’enfance, et que chaque étape du cursus scolaire – primaire, collège, lycée – n’arrive à leur faire advenir une connaissance un peu plus fine de leur langue.

Oui, les fondamentaux de la langue française ne sont pas possédés. Dans les copies de philosophie, chaque phrase est truffée d’un inimaginable nombre d’erreurs. J’en ai parlé avec mes collègues enseignant le français, voici leur témoignage : en première, lorsque les élèves passent le bac de français, ils en sont venus à renoncer à corriger les fautes d’orthographe ! Et lorsque, ensuite, je dois corriger les copies philosophiques de six ou sept pages de ces mêmes élèves, il est évident que je suis obligée moi-même d’en faire abstraction. Ils n’ont donc même pas la maîtrise de la langue française, et quand on pense à la solidarité qui existe entre la langue et la pensée, on se rend bien compte de l’impact que cette déficience a sur leur pensée : le déficit de la pensée est d’abord un déficit de la langue. Les lacunes se sont entassées année après année jusqu’en terminale, et cela me semble difficile d’en faire quoi que ce soit pour le baccalauréat. Alors, quand on arrive à leur insuffler un peu d’intérêt pour la philosophie, ce que je m’efforce de faire, que j’aime faire car c’est un métier que j’aime, quand on arrive à susciter un tant soit peu d’intérêt et de curiosité pour la philosophie, j’estime qu’on a tout gagné, voilà. Quand j’ai des élèves qui me disent qu’ils ont adoré la philosophie, que les cours leur ont permis un épanouissement, je me dis : j’ai tout gagné. Mais évidemment...

 

Évidemment, c’est le minimum auquel vous devez prétendre pour préserver une psychologie à peu près saine, pour faire survivre votre âme à vous.

(Rires) C’est cela oui ! Nous n’avons pas d’ambitions démesurées dans ce cas-là.

 

Nous nous rapprochons d’un point central : la notion de travail. Il y a effectivement une bienveillance à avoir – et bien présente dans la philosophie –, mais on voit que le niveau baisse, que l’on se retrouve à devoir revoir ses exigences aussi à la baisse, de n’exiger plus que le minimum pour arriver à survivre soi-même à leur contact. Mais que dire du rapport que ces jeunes entretiennent avec le travail ?

Leur travail se limite à de la performance académique. Ce qui va les intéresser ce sont les notes – sans efforts –, et le système les pousse à une logique concurrentielle, mais encore une fois toujours en restant à la surface des choses, et sans jamais leur fournir le véritable moteur. Ils en arrivent à n’évoluer que dans un monde de l’ordre du résultat uniquement quantitatif, et dont le moteur est de pouvoir arriver sur Parcoursup (dont la logique est abominable [7]) et prétendre aux écoles qu’ils désirent, donc à se maintenir dans le cursus. Ils ne s’inscrivent aucunement dans une perspective où ils voudraient fournir des efforts pour s’élever dans la connaissance, pour gagner en richesse intérieure ou quoi que ce soit de cet ordre. C’est une logique simplement comptable des résultats, et qui de plus essaie de se dispenser de trop d’efforts. Je me retrouve en permanence dans des situations de négociation avec des élèves qui réclament une notation moins sévère, plus laxiste et généreuse. Par ailleurs, l’on constate une forme d’autocensure chez les professeurs qui poussent à ne pas donner ce que l’on pense honnêtement devoir être la note de l’élève, quand bien même elle vaudrait un deux sur vingt par exemple. On ne peut se le permettre car l’on sait que derrière l’on doit faire face à la protestation de l’élève, de la famille, et le manque de soutien de l’ensemble du corps enseignant. Face à cela, nous nous sentons tenus de devoir tolérer les mauvais comportements, et verser dans l’euphémisme à leur sujet quand on doit en faire une appréciation : « Un tel doit progresser dans son attitude » alors qu’il mériterait qu’on lui signale simplement que son attitude est inacceptable.

 

En prenant un peu de hauteur sur cette notion de travail, nous pourrions faire le lien avec votre propre travail, votre propre ouvrage, Le Christ contre l’Avoir paru en 2020 aux Éditions des livres noirs, disponible chez Kontre Kulture : ce renoncement au travail n’est-il pas aussi un renoncement au sacrifice, caractéristique christique ?

Oui, mais sans aller jusqu’aux racines christiques, l’on est dans une société qui a gommé l’idée du moindre effort, une société du confort matériel qui, par le recours à des produits fournit par le Capital, voudrait palier, remédier à toute souffrance, à tout manque qui nous obligerait à devoir précisément fournir par nous-même des efforts pour dépasser cet état de souffrance. Par exemple, face à la dépression, sont vendus des antidépresseurs afin de ne surtout pas avoir à solliciter l’exploitation de notre propre potentiel, au lieu de marcher on va nous vendre une trottinette électrique, etc. De la même manière l’effort de la marche est éliminé par la trottinette électrique. Nous sommes en présence du capitalisme de la séduction [8] théorisé par Michel Clouscard : le capitalisme séduit en essayant de nous épargner, de nous tenir à l’écart du moindre effort, du moindre sacrifice, et en cela évidemment de nous-mêmes.

 

On nous a fait la réflexion que vous devriez parler plutôt du Christ que de Platon, et c’est pourquoi nous vous posons cette question du lien entre christianisme et sacrifice. Mais, bien qu’étant une caractéristique évidente du christianisme, le sacrifice semble aussi être une caractéristique majeure de la philosophie grecque : Socrate, tout comme Jésus, est mort au nom d’une révélation [9] et par amour des siens [10].

Exactement, tous deux sont morts pour l’amour, pour la vérité, tous deux sont martyrs. Socrate est mort pour que vive la philosophie, le Christ est mort pour que vive l’Amour universel. Chacun est mort pour un absolu.

 

Par votre propre expérience du retour au christianisme et celui de l’enseignement de la philosophie, comment voyez-vous le rapport entre le christianisme et la religion grecque ?

Je les articule ainsi : le platonisme – et en général, la philosophie grecque – est une préfiguration du christianisme. Je me positionne de manière similaire à Simone Weil à ce sujet, à savoir que l’on pense une vérité absolue, et par-là même une vérité anhistorique, et qu’elle aurait été approchée différemment dans l’histoire de la pensée, d’abord par Platon, et ensuite au plus près par le Christ. Il est évident qu’il y a une filiation entre la philosophie platonicienne et le christianisme. Platon est sûrement celui qui a théorisé au mieux, le plus merveilleusement cette notion d’âme et de son retour au monde des essences après la mort. Je crois qu’on a là une âme qui se tourne vers l’absolu et que l’on retrouvera dans le christianisme.

 

Ne pourrait-on pas dire que le Christ accomplit ce qui tourmentait les philosophes, à savoir une réconciliation entre la chair et l’esprit ? Cet Esprit qui s’est fait Chair ?

Je dirais que Platon a eu, c’est vrai, un certain problème avec le corps, mais à nuancer : il y a certes chez lui une primauté de l’âme sur le corps, mais jamais sans oublier de dire que le corps est le véhicule de l’âme, et donc qu’il n’est pas superflu ni affaire de le nier. C’est un temple qui accueille notre âme. Pour Platon, nous portons le divin en nous en tant que notre âme a déjà côtoyé ce fameux Monde intelligible et elle en garde le souvenir en cette vie ici-bas. C’est en cela que je vois une forme de préfiguration chez Platon de ce qui culminera dans le christianisme et qui est l’incarnation, nous invitant à penser que la transcendance n’est plus brutale et verticale, comme dans l’Ancien Testament, mais qu’elle peut se rendre transparente à l’immanence. Platon anticipe donc le Christ, et j’y vois une réconciliation entre le plan matériel et le plan immatériel divin, entre la chair et la spiritualité. Même si chez saint Augustin, il y a une forte dépréciation du corps, elle n’est pas tellement présente dans le message du Christ, et ce par le fait même de la Résurrection qui est aussi charnelle : pensons à saint Thomas qui apporte cette dimension tactile, sensible au miracle de la Résurrection du Christ [11], le rendant corporel et non pas seulement spéculatif, pas seulement spirituel. Disons donc que le christianisme voit dans sa construction a posteriori du Nouveau Testament une exacerbation du rejet du corps, voire de l’eros, ce que je crois peu en accord avec le message du Christ, et nous ramenant à ce qui déjà faisait débat chez Platon. Platon est en effet pris dans cette tension entre, d’un côté, un besoin pour l’âme de se détourner des sollicitations corporelles, de s’extraire des sens par la raison afin de s’élever, mais d’un autre côté et dans un même temps lorsque Platon parle du contact de l’âme avec les idées et l’Idée de Bien, il le fait par l’usage du vocabulaire de la sensation. La contemplation à laquelle veut nous conduire Platon est un mot référent à la sensation, tout comme le mot idea (ἰδέα) en grec signifie « apparence ». C’est cela qui est intéressant : en allant davantage dans la subtilité dans la philosophie platonicienne, on se rend compte qu’il n’y a pas de scission sèche entre le corps et l’âme.

 

Elles doivent donc s’articuler et se réconcilier du mieux qu’elles peuvent ?

Oui, de la même manière que chez le Christ il n’y a pas de dénonciation violente du corps. Je pense que cela vient après, durant la construction du christianisme.

 

Et donc lire et comprendre le Christ, lire et comprendre Platon nous amène à les voir s’éclairer l’un l’autre, et par là même nous permet de mieux nous comprendre en tant qu’helléno-chrétiens ?

J’en suis convaincu. Je reconnais que Nietzsche avait raison en écrivant que le platonisme anticipe le christianisme. Simone Weil de même l’avait très bien vu aussi – d’une manière plus intelligente d’ailleurs. Pour moi, il y a une Vérité absolue, unique, entière, qui culminera dans le christianisme, mais que Platon avait approximée. Dire que le christianisme est une synthèse du néoplatonisme ou simplement du platonisme fait écho dans ma pensée d’une manière flagrante.

 

Vous recommanderiez donc la lecture de Platon aux militants d’Égalité & Réconciliation qui cherchent à réconcilier le plus de choses possibles dans l’identité française ?

Je recommande mille fois la lecture de Platon, et à tout le monde ! C’est indispensable. Indispensable pour comprendre la pensée occidentale, car l’on peut voir qu’effectivement la philosophie depuis Platon n’a plus été que notes de bas de page de son œuvre [12]]. Par la lecture de Platon, on retrouvera aussi en germe la dimension mystique du christianisme, et l’on gagnera en compréhension concernant le message chrétien.

 

Pour conclure cet entretien édifiant, une question plus légère : quelles sont vos lectures du moment ?

(Rire) Je ne sais même plus ce que j’ai lu dernièrement qui ne soit pas en rapport avec le professionnel, que cela soit pour les conférences, les émissions ou mes cours. Je lis et relis constamment de la philosophie en rapport avec cela, comme récemment l’Émile de Rousseau, Le Banquet et le Phèdre de Platon. Je n’ai pas beaucoup de lectures de divertissement. Je peux simplement dire que ma dernière véritable lecture marquante a été Simone Weil, une énorme claque philosophique pour moi, juste incroyable.

 

Merci infiniment Camille pour cet échange, l’on vous souhaite une bonne conférence sur la place de l’Éros et du Logos dans la quête spirituelle platonicienne, et vous resterez toujours la bienvenue sur Grenoble.

Volontiers, merci !

 

Ne manquez pas la prochaine conférence de Camille Mordelynch

Informations importantes

Entrée : 10 euros (5 euros pour les adhérents E&R)

Réservations et renseignements : normandie@e-r.fr (Indiquez nom, prénom et numéro de téléphone)

Possibilité de récupérer sur place des livres Kontre Kulture commandés par mail (Passez la commande avant le 20 mai)

Le lieu exact vous sera communiqué la veille de l’événement

 

Notes

[1] https://www.lemonde.fr/societe/arti... de-philosophie-pour-des-propos-d-une-tres-grande-violence_6172434_3224.html

[2] « Ceux qui ont conçu et qui approuvent le #PasseVaccinal sont des monstres. Ceux qui le combattent sont des justes. Voila pourquoi, quoi que fassent les premiers, les seconds ont déjà gagné. » (René Chiche, 29 décembre 2021)

[3] https://fr.wikipedia.org/wiki/Pierr... - L’ouvrage en question est Qu’est-ce que la philosophie antique, Gallimard, 1995

[4] L’école de Tübingen, dont le principal (et seul à notre connaissance) ouvrage en rapportant les théories en français est celui de Marie-Dominique Richard, intitulé L’Enseignement oral de Platon et paru en 1986 aux éditions du Cerf. Il est à noter que la sphère italienne a produit un immense travail aussi au sujet de la tradition orale et indirecte de la philosophie de Platon, avec comme représentant par exemple Giovanni Reale. Pour en savoir plus : https://www.persee.fr/doc/phlou_003...

[5] https://fr.wikipedia.org/wiki/Matth...

[6] Notion issue de son livre Contact : pourquoi nous avons perdu le monde, et comment le retrouver [« The World Beyond Your Head : On Becoming an Individual in an Age of Distraction », 2015

[7] https://www.egaliteetreconciliation... discriminations-positives-68688.html

[8] Le Capitalisme de la séduction : critique de la social-démocratie libertaire, essai paru en 1981.

[9] Nombreuses références à l’appui dans l’Apologie de Socrate (en vente chez Kontre Kulture) : « Je suis au service du dieu » (23b) ; « Le dieu m’a assigné pour tâche de vivre en philosophant » (28e) ; « J’obéirai au dieu plutôt qu’à vous » (29d)

[10] Ibid. : « Je suis à la disposition du pauvre comme du riche, sans distinction » (33a) ; « Aussi me suis-je engagé [...] sur cette voie où, à chacun de vous en particulier, je rendrais service, le plus grand des services [...] en essayant de convaincre chacun d’entre vous de ne pas se préoccuper de ses affaires personnelles avant de se préoccuper, pour lui-même, de la façon de devenir le meilleur possible et le plus sensé possible » (36c)

[11] Évangile selon Saint Jean, XX, 24-29 (Page 290 de l’édition Kontre Kulture du Nouveau Testament parue en 2014, traduction de l’abbé Augustin Crampon parue en 1904)

[12] Réflexion du philosophe britannique Alfred North Whitehead dans Process and Reality, paru en 1929 [Traduction française : Procès et Réalité, Gallimard, 1995

Retrouvez Camille Mordelynch sur E&R !

 






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20 Commentaires

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  • #3182603
    Le 24 mai 2023 à 20:14 par Paul82
    De Platon au Christ : entretien avec Camille Mordelynch

    Témoignage touchant parce que juste.

    J’ai connu une gilet jaune vacataire dans un lycée (Elise si tu me lis, je te passe le bonjour), une jeune femme très courageuse. Durant le covidisme, là où ses collègues titulaires ont fermé leur gueule et obéi sans se poser de question (ou pas plus que ca), elle a été la seule à l’ouvrir, elle qui n’est que vacataire (donc peut se faire jeter demain). Oui le corps enseignant est un robot.

    Quant aux élèves qui bossent pour les notes, et peu de culture générale, c’était le cas à mon époque il y a 20 ans. Et ca n’a pas du s’améliorer....

    Et la philosophie grecque qui préfigure le christianisme, c’est d’une évidence. D’où cette discussion "Jérusalem ou Athène" qui n’a aucun sens, ou alors on enc*le les mouches !

     

    Répondre à ce message

    • #3184361
      Le Mai 2023 à 18:06 par Guillaume
      De Platon au Christ : entretien avec Camille Mordelynch

      " la philosophie grecque qui préfigure le christianisme, c’est d’une évidence."

      Ha bon ? C’est pas l’Ancien Testament ?
      Blague à part, votre phrase est trop abrupte.

      Dire que Platon préfigure le Christ, non.
      Le Christ s’est il jamais revendiqué de Platon ? Le connaissait il ? Et s’il l’avait connu, l’aurait il reconnu comme son prédécesseur ?

      Le Christ ne s’est jamais connu qu’un seul prédécesseur, et c’est Jean le Baptiste.

      Lla vérité c’est que le Christ n’a pas laissé de corps doctrinal. On a fait des conciles pour cela. La construction de la doctrine catholique s’achève au IXeme siècle, quand le pape Léon le Grand déclare clôt le coffre de la foi.

      C’est lors des conciles que se sont glissés des éléments "grecs", qu’on trouvait compatibles.

      Le reste est juste abusif.

       
    • #3185113
      Le Mai 2023 à 09:49 par Guillaume
      De Platon au Christ : entretien avec Camille Mordelynch

      Il y a une influence gnostique dans le canon, ça oui, cela ela vient de Platon.
      Mais cette influence a toujours été combattue, notamment par Saint Thomas et l’inquisition.
      Et cette influence, qui donne les hérésies ( déviations du dogme ) ne préfigure rien idu tout.
      Ce sont des brouillages parasités.

       
  • #3182639
    Le 24 mai 2023 à 21:53 par Clemens
    De Platon au Christ : entretien avec Camille Mordelynch

    Il est évident qu’il y a une filiation entre la philosophie platonicienne et le christianisme. Platon est sûrement celui qui a théorisé au mieux, le plus merveilleusement cette notion d’âme et de son retour au monde des essences après la mort.



    Il y a un texte très passionnant de Jacques Derrida, exceptionnel même : La pharmacie de Platon (1968), qui montre comment tous les dérivés du mot pharmakos sont présents dans l’oeuvre de Platon sauf pharmakos lui-même. Or pharmakos, cela signifie en grec : Bouc-Emissaire, c’est-à-dire : Agneau de Dieu, Christ... Platon tourne autour du pharmakos mais ne peut jamais le regarder en face... Et c’est pour cela qu’il était absent à l’heure de la mort de Socrate, parce que Socrate est mort précisément comme un pharmakos, un bouc-émissaire et donc un Christ. La date de la mort de Socrate, mort en « ennemi du peuple », est elle-même une date christique : la date à laquelle les Athéniens envoyaient des otages en tribut à la Crète... Le tirage au sort de ces otages « rachetait » la vie des Athéniens, comme le sacrifice de l’Agneau égorgé rachète la vie des pécheurs.

    Il n’y a aucune « filiation » entre le platonisme et le christianisme, c’est même tout le contraire. Le christianisme s’efforce de dévoiler ce que Platon s’efforçait de dissimuler. C’est le côté bourgeois, conservateur, bien-pensant et patricien de Platon que la mort de Socrate scandalise et que le christianisme fait complètement voler en éclats. Et d’où l’extrême méfiance, pour ne pas dire l’hostilité, de « l’Eglise primitive » vis-à-vis du platonisme et de la philosophie grecque en général.

    PS : Eh oui, Derrida n’a pas écrit que des conneries.

    PPS : Sinon, on se tape un peu de « l’oralité » de Platon vu qu’il fut un artiste génial en plus d’être un philosophe, comme le furent aussi par exemple saint Augustin ou Nietzsche. On sait que l’oeuvre d’Aristote qui nous est parvenue est le produit de notes de cours prises par ses élèves, mais Platon est l’écrivain génial, l’auteur génial de ses textes. Il y a des penseurs qui écrivent mal (Kant, Hegel, Marx) et des penseurs qui sont en plus artistes (Platon, saint Augustin, Pascal, Descartes, Nietzsche). De manière générale, les penseurs “de gauche” écrivent mal, et les penseurs “de droite” écrivent merveilleusement...

     

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    • #3184367
      Le Mai 2023 à 18:21 par Guillaume
      De Platon au Christ : entretien avec Camille Mordelynch

      Oui, René Girard a aussi glosé sur le pharmakos.

      Et je suis d’accord, rattacher Platon au Christ parce qu’il aurait théorisé l’incarnation c’est vraiment abusif.

      Platon serait plus a rapprocher des cultes à mystères ou de la franc-maçonnerie.

       
  • #3182653
    Le 24 mai 2023 à 22:50 par Clemens
    De Platon au Christ : entretien avec Camille Mordelynch

    Même si chez saint Augustin, il y a une forte dépréciation du corps,



    Ce n’est pas vrai, lire La Cité de Dieu :

    « que les platoniciens cessent donc de montrer le corps à l’âme comme un supplice » (Cité de Dieu, livre XII, chapitre 24)

    « ce n’est point la chair corruptible qui a rendu l’âme pécheresse, mais l’âme pécheresse qui a rendu l’âme corruptible » (XIV, 28)

    Le mot « chair » ne signifie pas « corps » chez saint Augustin, mais narcissisme, amour de soi, préférence de la créature pour elle-même au détriment de son Créateur :

    « Deux amours ont donc bâti deux cités : l’amour de soi jusqu’au mépris de Dieu, la cité de la terre ; l’amour de Dieu jusqu’au mépris de soi, la cité de Dieu. » (XIV, 28)

    Saint Augustin fait une immense rupture avec la philosophie grecque païenne en affirmant la bonté du temps : que le temps est créé par Dieu et que, en tant que créature de Dieu, il est bon. La rupture est là, elle réhabilite tout le monde corporel, existentiel, « bassement » humain que l’élitisme de la philosophie grecque condamnait et expulsait.

    Il y a un devoir du professeur de philosophie d’approfondir les textes, de les affronter directement et d’en racler le fond. On ne peut pas enseigner la philosophie en répétant des manuels écrits par d’autres. Il faut souffrir, se noyer, toucher le fond.



    Disons donc que le christianisme voit dans sa construction a posteriori du Nouveau Testament une exacerbation du rejet du corps, voire de l’eros



    Contre la philosophie païenne grecque, le christianisme affirme à la fois la bonté inamissible du corps et le courage de l’âme prête à la mort pour défendre l’innocence de l’innocent. Le sacrifice est payé au prix fort, la mort est une vraie perte, il ne s’agit pas d’une « libération du corps » mais d’un sacrifice couteux : le corps est bon, la vie est précieuse, la mort est horrible, mais pourtant, on préférera la justice et le martyr aux trente deniers de Judas...

    Vraiment il faut travailler les textes, virilement, dans l’effort et la sécheresse, jusqu’au fond de la pensée de l’auteur. Le « logos » est viril, il va jusqu’au bout, jusqu’au fond des choses, il ne fait rien à moitié, c’est un extrémiste, un « pur et dur ». On lit et relit dix fois, cent fois le texte tant qu’on n’en a pas touché le fond. Et encore, cent fois de plus pour vérifier qu’on n’a rien laissé échapper... Un « philosophe », c’est juste un type qui ne compte pas le nombre de fois qu’il relit un texte.

     

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    • #3182670
      Le Mai 2023 à 00:15 par Clemens
      De Platon au Christ : entretien avec Camille Mordelynch

      Erratum :

      « ce n’est point la chair corruptible qui a rendu l’âme pécheresse, mais l’âme pécheresse qui a rendu la chair corruptible » (Cité de Dieu, XIV, 3)

       
    • #3182885
      Le Mai 2023 à 11:40 par sang roi
      De Platon au Christ : entretien avec Camille Mordelynch

      La « bonté du temps » oui, en tant que Père de l’Église, l’âge apporte la sagesse - en ça il ne diffère pas des philosophes antiques -, mais sous-entend-il à condition de se tourner vers Dieu, car dans la vie pratique, le temps apporte plutôt les rides et l’extinction du désir, mais le but de l’Église étant de rassembler le troupeau en son sein...

      Et justement, à force de vouloir sa soumission totale à Dieu, elle en est venue à parler du "péché de la chair" et instituer sa mortification certes non païenne mais un peu maso - parce que quand ER pose la question c’est bien celle de la place du corps ET du désir charnel je pense ? Or il paraîtrait, mais je n’ai pas vérifié, que dans l’Évangile de Philippe, le Christ aurait dit, pour commencer :

      « L’amour ne se prive de rien et ne prend rien. »

      et aussi - attention ça va piquer :

      « Faites l’expérience d’une étreinte pure, elle possède une grande puissance. Le mystère qui unit deux êtres est grand, sans cette alliance le monde n’existerait pas. L’étreinte selon le monde est déjà un mystère, combien plus l’étreinte qui incarne l’alliance cachée. Ce n’est pas une réalité seulement charnelle. Il y a du silence dans cette étreinte. Elle n’est pas obscure, elle est lumière. »

      Par ailleurs, vous remarquerez qu’aujourd’hui dans ce monde à l’envers que c’est le contraire : il faut forniquer à tout-va sans même la considération de l’Autre et que ça serait ça le Bonheur.

      Pour ma part, je ne choisis aucun dogme de ces deux paradigmes, je cherche, et je dirais plutôt avec Pacôme Thiellement, pour l’instant : "Après le Démiurge et le Diable, le Temps est le troisième ennemi des amoureux, et c’est le pire des trois."

       
    • #3183629
      Le Mai 2023 à 14:01 par Clemens
      De Platon au Christ : entretien avec Camille Mordelynch

      @ sang roi



      La « bonté du temps » oui, en tant que Père de l’Église, l’âge apporte la sagesse - en ça il ne diffère pas des philosophes antiques -, mais sous-entend-il à condition de se tourner vers Dieu...



      Ce n’est pas une proposition morale que fait saint Augustin, mais métaphysique : le temps est bon pour toutes les créatures, qu’elles soient saintes ou pécheresses.

      « avant le monde, il ne pouvait exister aucun temps passé »

      « le monde a été créé non dans le temps mais avec le temps » (Cité de Dieu, XI, 6)

      Dans la pensée platonicienne, ce qui « sublunaire » - soumis à la génération et à la corruption, ne peut être vraiment bon. Le seul Bien est au-delà du temps, du mouvement et de l’être. Le monde physique, existe à peine, il est fantomatique, illusoire. C’est sous l’influence d’Aristote que Platon, sur la fin de sa vie, a tempéré son idéalisme : dans le Parménide, le jeune Platon ne pensait même pas qu’il pût exister d’idées des « choux » et des choses trop bassement matérielles.

      Mais pour saint Augustin, le monde, le temps, le mouvement sont tous des créatures et à ce titre sont bons. On est loin de l’idéalisme platonicien ou éléatique, des efforts de Zénon pour nier le mouvement et tout ce qui est « sublunaire ».

      C’est aussi pour cela que saint Augustin défend et justifie contre Platon la tristesse éprouvée à la mort d’un être cher. Platon refusait les larmes mais saint Augustin, qui avait perdu son fils, affirme que la mort est une vraie perte (elle n’est pas la simple libération du corps qui serait un tombeau selon le mot d’esprit de Platon jouant sur soma - le corps et sêma - le tombeau) et qu’il est légitime d’en souffrir et de pleurer.

      Tout ce qui est créé est bon ; le temps, le mouvement, le corps sont créés : ils sont bons. Il y a là une rupture radicale du christianisme avec la pensée grecque.

      Et bien sûr, il y a eu un « platonisme chrétien », lire le monumental Plato Christianus d’Endre von Ivanka, mais justement :

      « Dans tous les cas, le platonisme n’est jamais un modèle et une inspiration sans être aussi un danger à affronter. Les penseurs chrétiens n’acclimateront donc jamais des motifs platoniciens sans procéder à leur radicale réinterprétation. Le mirage d’une hellénisation du christianisme le cède ainsi à la restitution du travail critique par lequel les Pères produisirent plusieurs concepts fondamentaux de la pensée occidentale. » (4e de couverture de la traduction française aux PUF)

       
    • #3183654
      Le Mai 2023 à 14:42 par Clemens
      De Platon au Christ : entretien avec Camille Mordelynch

      Et justement, à force de vouloir sa soumission totale à Dieu, elle en est venue à parler du "péché de la chair" et instituer sa mortification certes non païenne mais un peu maso - parce que quand ER pose la question c’est bien celle de la place du corps ET du désir charnel je pense ?



      Déjà, il y a un usage métonymique du mot « chair » dans la christianisme, c’est à la fois le corps comme dans « ce n’est point la chair corruptible qui a rendu l’âme pécheresse, mais l’âme pécheresse qui a rendu la chair corruptible » et le narcissisme de la créature comme dans « l’amour de soi jusqu’au mépris de Dieu ».

      Mais les penseurs chrétiens n’ont pas l’âme moins virile que les penseurs grecs, ils vivent mal la faiblesse de la volonté humaine face aux tentations matérielles, face à la force de l’animalité. La peur panique qui fait craindre la mort, et pousse à des comportements lâches, humiliant pour l’âme bien née (voir le roman Lord Jim de Joseph Conrad), les penseurs chrétiens la craignent autant que les Grecs.

      Il n’y a ici pas de « masochisme », c’est un contresens complet, une méconnaissance de ce qu’est un homme viril. Le « sexe faible » est celui qui ne sait pas résister à la tentation, mais l’homme grec ou chrétien répugne à se laisser mener par ses passions animales, il veut la souveraineté de sa volonté.

      Certains prennent les passions en frontal - douches froides, bains de ronces et discipline, d’autres rusent avec elles, comme saint Thomas d’Aquin qui faisait l’analogie de l’autorité politique sur le peuple avec celle de l’âme sur le corps : le politique doit obtenir le consentement du peuple comme l’âme ne peut lutter frontalement contre les passions et doit composer avec elles. Quel que soit le moyen, ce sont les mêmes fins : souveraineté, liberté, virilité...

      Et puis le cul n’est un enjeu que pour les femmes et les puceaux. Un homme qui a eu plusieurs femmes, des belles et des moins belles, sait bien ce que vaut le cul en lui-même. L’enjeu viril, politique d’ailleurs, c’est le mariage et la descendance.

       
  • #3182663
    Le 24 mai 2023 à 23:41 par Lone Star
    De Platon au Christ : entretien avec Camille Mordelynch

    Ici, aux Etats-Unis, c’est bien pire : il n’y a jamais eu de philosophie au lycée, point barre. C’est une immense lacune du système éducatif des adolescents…qui deviennent des adultes, gros lards et grossiers, vantards malades d’une vertu de cupidité, bien sûr.

    Le seul accès à ces belles et bonnes idées est si l’on étudie les langues classiques, offertes pratiquement uniquement dans les écoles privées.

    C’est à en pleurer.

     

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  • #3182675
    Le 25 mai 2023 à 01:48 par zimir
    De Platon au Christ : entretien avec Camille Mordelynch

    Avec Saint Augustin tout d’un coup l’église s’est concentrée sur l’égoïsme sexuel, et non la dépendance à la richesse des créanciers.
    Après tout, si les dirigeants de l’Église chrétienne, les archevêques et les évêques, devaient tous provenir de familles riches, vous auriez à peine osé les critiquer de leur propre richesse.
    Cela n’est possible que si l’on dépouille l’origine du christianisme romain, le contexte économique et social qui avait été non seulement l’origine mais qui a guidé le christianisme primitif.
    Et pourtant ce détournement des origines c’est ce qui a été fait par probablement le saint le plus diabolique du christianisme – bien qu’il soit difficile de dire qui est le plus pervers entre Augustin d’Hippone et Cyrille d’Alexandrie.
    Alexandrie avait une très grande population hétérogène, et Cyrille organisa de grandes purges pour tuer, quiconque savait lire le livre.
    La seule chose que les chrétiens romains détestaient, c’était les gens qui savaient lire. Si vous saviez lire, vous liriez la Bible. Si vous lisiez la Bible, vous sauriez qu’il y a eu un conflit entre Rome et les chrétiens.
    La personne la plus célèbre que Cyrille a fait exécutée était Hypatie, une femme qui était mathématicienne.
    Tout d’abord, Cyrille avait été un consul à Éphèse appelant l’armée romaine à tuer tous ses adversaires. Un détournement du christianisme par Cyrille.
    Les chrétiens d’Afrique du Nord, beaucoup d’entre eux ont refusé de remettre les livres sacrés, ont été tués.
    Augustin est arrivé au pouvoir ecclésiastique, et il a parrainé les pro-Romains de Cyrille. Il y a eu une guerre civile qui a duré décennie après décennie, empêchant les propriétaires romains locaux d’endetter la population, de les asservir. Augustin a appelé les Romains à enlever les églises d’Afrique du nord et à lui remettre.
    Donc, essentiellement, Augustin a exproprié les églises chrétiennes et en a fait son propre christianisme déviant.
    Qu’on ne peut appeler christianisme, mais de l’augustinisme – dans une vague de violence.

     

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  • #3182686
    Le 25 mai 2023 à 04:38 par Surnom
    De Platon au Christ : entretien avec Camille Mordelynch

    Faire de Platon un précurseur de Jésus, ça tient de la pirouette intellectuelle.
    Mais bon, si le roman peut plaire, pourquoi pas.
    Mais qu’on ne s’étonne pas de la désertion des églises.
    Platon donne matière à la réflexion, celle ci devra être salvatrice, autrement à quoi bon.
    Jésus par sa parole a mis l’amour d’autrui comme une doctrine, évidemment l’épée est aussi de mise, et nous a démontré combien les marchands du temple seront une plaie pour l’humanité.
    J’en arrive à me dire, certains patoniticiens avec d’autres écoles ont dezingué le christianisme à leur manière, et comme pour un rattrapage, ils commencent à parler de similitudes entre la philosophie et les religions.
    Du coup, deux personnes différentes avec un discours diamétralement opposés.

     

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  • #3183710
    Le 26 mai 2023 à 16:42 par Clemens
    De Platon au Christ : entretien avec Camille Mordelynch

    C’est un temple qui accueille notre âme.



    Platon ne dit pas cela (être philosophe, c’est aussi citer correctement les penseurs), il dit et répète que le corps est le « tombeau » de l’âme (Gorgias 493a, Cratyle 400c, Phèdre 250c). C’est Jésus qui dit que le corps est le temple de l’âme : « Détruisez ce temple, et en trois jours je le relèverai. » (Jean 2, 19), pas Platon.

    L’idée chrétienne de la résurrection des corps est la plus anti-platonicienne qu’on puisse concevoir.

    Et c’est parce que le christianisme affirme la bonté du corps que la vie éternelle est selon lui une vie avec le corps. Bonté de la création et résurrection du corps vont ensemble.

    Mais pourtant l’instinct mystique de Platon ne l’empêche pas de mieux parler du corps et de la vie sensible que la plupart des matérialistes contemporains. La moindre page de Platon reste plus méditerranéenne, bercée du chant des cigales, parfumée par les îles ioniennes, plus sensuelle que n’importe lequel des textes d’un triste Feuerbach et des barbus allemands du XIXe siècle...

    Platon porte en lui, malgré lui, toute la sensualité méditerranéenne, et s’il doute de la bonté du monde, le christianisme balaie ce doute et affirme la bonté de la création, comme saint Augustin embrasse le christianisme après avoir été successivement gnostique (le monde est mauvais et création d’un dieu mauvais) puis platonicien.

     

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  • #3183795
    Le 26 mai 2023 à 19:15 par Ouin ouin
    De Platon au Christ : entretien avec Camille Mordelynch

    Le problème de Socrate était de trouver un moyen d’avoir un gouvernement qui ne serve pas les riches agissant de manière socialement destructrice. Étant donné que son élève Platon était un aristocrate et que les étudiants de Platon à l’Académie étaient également des aristocrates, comment peut-on avoir un gouvernement dirigé par des rois-philosophes ?
    La solution de Socrate n’était pas pratique à l’époque : les gouvernants ne devaient avoir ni argent ni biens. Mais tous les gouvernements étaient fondés sur une évaluation de la propriété, donc sa proposition pour des rois-philosophes sans richesses était utopique. Et comme Platon et d’autres aristocrates grecs, ils désapprouvaient les annulations de dettes, accusant celles-ci d’être promues par des dirigeants populistes cherchant à devenir des tyrans.
    Et donc en définitive ces belles constructions théoriques, en grimpant l’échelle de saint Jean Climaque, nous amènent certes aux nuées merveilleuses et poï ?
    Dans le Livre 8 de La République, Socrate condamne les oligarchies comme étant caractérisées par une insatiable avidité [ἀπληστία, aplêstia] pour l’argent et leur reproche notamment de permettre une polarisation entre les super-riches [ὑπέρπλουτοι, hyper-ploutoi] et les pauvres [πένητες, penêtes], rendus totalement démunis [ἄποροι, aporoi].
    Le socle de la cité idéale.
    Or le christianisme des origines s’est élevé contre l’oligarchie romaine, une réponse réelle a une situation réelle, pour pouvoir arracher le christianisme de ses origines, il faut au préalable, l’avoir désosser à coup de citée de Dieu.
    Toutefois quelques textes nous sont parvenus Luc :
    Il se rendit à Nazareth, où il avait été élevé, et, selon sa coutume, il entra dans la synagogue le jour du sabbat. Il se leva pour faire la lecture,
    17 et on lui remit le livre du prophète Ésaïe. L’ayant déroulé, il trouva l’endroit où il était écrit :
    18 L’Esprit du Seigneur est sur moi, Parce qu’il m’a oint pour annoncer une bonne nouvelle aux pauvres ; Il m’a envoyé pour guérir ceux qui ont le coeur brisé,
    19 Pour proclamer aux captifs la délivrance, Et aux aveugles le recouvrement de la vue, Pour renvoyer libres les opprimés, Pour publier une année de grâce du Seigneur. (le jubilé l’ardoise effacée)...Aujourd’hui cette parole de l’Écriture, que vous venez d’entendre, est accomplie.

     

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    • #3183900
      Le Mai 2023 à 00:37 par Clemens
      De Platon au Christ : entretien avec Camille Mordelynch

      Or le christianisme des origines s’est élevé contre l’oligarchie romaine, une réponse réelle a une situation réelle



      Non, ça c’est des conneries, le christianisme n’est pas un projet politique, et surtout pas un projet démocratique. Le rapport de Jésus à la plèbe, à la foule, est assez constant : la populace veut le lyncher, et il n’en réchappe à chaque fois que par miracle... Vous avez cité saint Luc, un très beau passage, dont voici la suite :

      20 Ensuite, il roula le livre, le remit au serviteur et s’assit. Tous ceux qui se trouvaient dans la synagogue avaient les regards fixés sur lui.
      21 Alors il commença à leur dire : « Aujourd’hui cette parole de l’Ecriture, que vous venez d’entendre, est accomplie. »
      22 Tous lui rendaient témoignage
      ...
      28 Ils furent tous remplis de colère dans la synagogue, lorsqu’ils entendirent ces paroles.
      29 Ils se levèrent, le chassèrent de la ville et le menèrent jusqu’à un escarpement de la montagne sur laquelle leur ville était construite, afin de le précipiter dans le vide.
      30 Mais Jésus passa au milieu d’eux et s’en alla.

      Les mêmes qui lui rendaient témoignage veulent le jeter du haut d’une falaise dans la minute qui suit... Les prolos ne sont pas plus saints que les bourges, ça c’est des mythes, des histoires de bonnes femmes.

      Et quant aux prolos modernes, ils ont balancé tout ce qui avait rendu beaux leurs pères : le baptême, le mariage, l’Angélus, les funérailles, les processions et les fêtes patronales, la messe de minuit, les vieux prénoms français, le repas dominical, les nappes monogrammées héritées des grand-mères, les habits du dimanche, les robes et les gilets, ils ont balancé tout cela en échange d’un caddie de supermarché rempli de sodas et de burgers surgelés... ils ne sont plus que bassement matérialistes, avidement, ils n’ont plus que le fric dans la tête, il n’y a plus rien pour les sauver de la bassesse et de la laideur. Et ils n’ont même pas l’idée de se plaindre que leurs impôts servent aujourd’hui à financer l’OTAN et commencer la troisième guerre mondiale...

      Donc le « catholicisme de gauche », ce que ça peut valoir aujourd’hui... rien. Ce n’est pas l’Eglise qui remplit les caddies, ils le comprennent bien, c’est Leclerc, Auchan, c’est le grand capital, et c’est la seule chose qui compte pour les prolos : le caddie.

       
    • #3183963

      Clem
      Les Romains s’en battaient le jonc des religions, ils les adoptaient sans aucune difficultés, pourvu, qu’elles n’entravaient pas le business !

       
    • #3184152
      Le Mai 2023 à 12:16 par Clemens
      De Platon au Christ : entretien avec Camille Mordelynch

      @Zimir

      Déjà, Rome interdisait officiellement les sacrifices humains, ce qui « opprimait » les cultes de la moitié des peuples de l’Empire. L’interdiction était certes d’autant plus mollement respectée que les provinces étaient plus éloignées de la capitale impériale, ainsi on a vu des préfets impuissants s’allier à des évêques de l’Eglise primitive contre le populo local qui réclamait de brûler une adolescente ou de jeter un gamin du haut d’une falaise. Les Romains n’avaient pas le droit d’adopter n’importe quelle religion ou en tout cas de pratiquer n’importe quel culte.

      Ensuite Rome a eu une fondation divine, Romulus était un dieu, et la question de la fondation et de la re-fondation était une question importante pour les Romains, le succès de l’Empire étant lié à la piété envers les dieux de Rome, il y a d’excellentes études sur ce sujet. Rome avait sa religion, à laquelle s’est ajouté le culte de l’empereur, une religion traditionnelle, publique ou privée. Le culte de l’empereur ne tolérait d’ailleurs pas l’impiété et ceux qui refusaient de rendre ce culte impérial furent persécutés et exécutés en masse. A partir de Théodose Ier, la religion officielle de l’Empire est devenue le christianisme nicéen.

      Dire que les Romains se foutaient des religions et qu’ils ne pensaient qu’au commerce est probablement une simplification abusive et peut-être même une grossière caricature.

       
  • #3184102
    Le 27 mai 2023 à 10:57 par Toutatis
    De Platon au Christ : entretien avec Camille Mordelynch

    Étranges tous ces gens qui se disent chrétiens et qui veulent absolument rattacher le Christ et son enseignement à quelqu’un ou à quelque chose qui l’aurait précédé.
    C’est oublier une chose ! Il a dit : "Avant qu’Abraham fût, Je suis."
    Le Christ précède tout, Il est l’origine de tout et n’a besoin d’aucune référence. C’est Lui La Référence.

    Toutatis

     

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  • #3185256
    Le 29 mai 2023 à 14:22 par Heisenberg
    De Platon au Christ : entretien avec Camille Mordelynch

    Entretien très enrichissant. Je salue l’engagement et l’enthousiasme de cette jeune femme. J’espère qu’elle les conservera tout au long de sa vie.

    Je la rejoins sur l’appauvrissement mental des élèves. J’ai aussi l’impression de retrouver la même chose dans toute la société.

    Que Dieu la protège ainsi que l’équipe d’Egalité Et Réconciliation.

     

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