Emmanuel Todd peut-il être considéré comme un boomer ? C’est discutable. Né en 1951 il avait 17 ans en 68. Mais si l’on considère que le baby-boom, en France, c’est de 1945 à 1950, Todd est à la limite. Il serait l’aîné, notre aîné, le chef de file de toutes ces générations étouffées par la domination de ces soixante-huitards qui ont pris toutes les places et qui s’y accrochent farouchement encore. Ceci étant, puisque l’on entend sa voix depuis déjà longtemps, je crois que Todd est plutôt le dernier des soixante-huitards. Après lui commence le gâchis intellectuel et le sacrifice des jeunes générations.
On dit que Todd est historien, anthropologue, économiste, démographe. Mais il ne donne pas l’impression de quelqu’un de très intégré au système universitaire français. Il vient du monde anglo-saxon. C’est sans doute la raison pour laquelle il fait preuve de tant d’audace, pour un Français. Certes petit-fils du grand rabbin de Bordeaux, mais Français tout de même. Et en général l’Institution n’apprécie pas qu’un scientifique passe dans les médias. En tous cas je ne crois pas que sa thèse centrale soit très appréciée des universitaires français, ni qu’elle soit bien connue de quiconque, et quoi qu’il en soit bien comprise.
L’idée de Todd, c’est que l’humanité dans son évolution serait passée du stade de l’égalité entre homme et femme à celui de l’inégalité et de la hiérarchie de l’homme sur la femme. Il ne s’agit pas de l’évolution de ces cinquante dernières années. Il s’agit d’un processus qui se déroulerait sur deux ou trois centaines de milliers d’années. L’histoire aurait mal tourné, voici quelque chose comme six ou sept mille ans, avec le communautarisme des débuts de la civilisation, autour du croissant fertile (Irak, Égypte) et de l’Indus. Les Arabes et les Indo-européens, hordes nomades libres, auraient, au contact des premières civilisations, par un choc en retour, développé les premiers systèmes patriarcaux.
Le patriarcat se serait répandu sur toute l’Eurasie, mais il n’aurait pas pu imprégner complètement un Occident resté à l’écart de la civilisation. L’Européen moderne, si l’on met de côté l’aristocratie germanique et les régions que son modèle a pu conquérir, serait pour ainsi dire un arriéré. Nos alter-egos seraient les Papous, à l’autre extrémité du continent. La thèse s’appuie sur une vision historique et géographique. Le centre de la civilisation, le croissant fertile, serait à la pointe de l’évolution avec une inégalité entre homme et femme à son maximum. Mais lorsque l’on s’éloigne de cet épicentre dans l’espace, et lorsque l’on fouille dans les strates géologiques de son passé, l’on finirait par retrouver l’égalité originelle.
En réalité cette thèse s’inscrit dans un domaine de recherche devenu classique. Dès lors que l’on sort du récit de la Genèse, au XIXe siècle, les premiers anthropologues partent de l’hypothèse d’un patriarcat apparu en second lieu dans l’histoire. L’origine matriarcale est chez Bachofen, chez Morgan puis Engels. Il me semble que c’est encore le cas chez Marcel Granet. L’idée de Todd se rattache ainsi à ce courant.
Je trouve l’hypothèse séduisante. Sauf un problème qui tient peut-être à ce que Todd ne s’occupe pas des structures de la parenté. Il est difficile d’imaginer un Cro-Magnon et même un Néandertalien offrant le modèle de la sainte famille : un papa, une maman, un enfant. Les sociétés humaines, aussi loin que l’on puisse remonter dans le passé et aussi loin que l’on soit allé dans les derniers recoins du monde, sont apparues comme organisées en clans et en tribus. Et si l’on fait la comparaison avec les espèces animales, en particulier avec ceux des grands singes qui nous sont les plus proches, il faudrait imaginer un drôle de détour dans l’histoire humaine pour échapper à ces groupes élémentaires. Or, une société clanique repose nécessairement sur la distinction des sexes, et sur leur inégalité, au moins au regard de la structure de parenté.
Il m’avait semblé que Todd avait dans Où en sommes-nous ? (2017) commencé de mettre de l’eau dans le vin de sa thèse. Mais il a tendance, parce que son école ne s’intéresse pas aux structures de la parenté, à imaginer des clans qui au petit bonheur adopteraient un coup le gendre un coup la bru. Je veux bien y réfléchir. Les idées de Todd ont pour intérêt de nous faire réfléchir. Mais il me semble que la prépondérance de la filiation masculine est originelle. Cela est cohérent avec la division des rôles, qui est indéniable. À commencer par le fait que la femme porte l’enfant dans son ventre, pendant neuf mois, puis qu’elle l’allaite. Son bassin est large, tandis que celui de l’homme est étroit, inversement les épaules féminines sont étroites, tandis que celles de l’homme sont larges, etc.
En réalité, l’égalité des sexes et le féminisme sont des virus sociaux qui sont en train de tourner au génocide des peuples ouest-européens. C’est une maladie partie d’Occident qui risque de ravager le monde. Pour comprendre la situation, on ne lira pas seulement le petit-fils du rabbin de Bordeaux et l’on s’instruira aussi par la lecture des ouvrages qui suivent, tous publiés chez Kontre Kulture. On me dira que certains de leurs auteurs sont des fascistes, des nationaux-socialistes et même des révisionnistes. Mais quand la maison brûle on ne demande pas sa religion au pompier.
Vere Gordon Childe, Naissance de la civilisation (1936) :
Michel Clouscard, Traité de l’amour fou (1993) :
Julius Evola, Métaphysique du sexe (1958) :
Maurice Bardèche, Histoire des femmes (1968) :
Alain Soral, Sociologie du dragueur (1996) :
Alain Soral, Comprendre l’Époque (2021) :
Damien Viguier, La Controverse de Ravenne (2021) :
Pierre-Joseph Proudhon, La Pornocratie (1875) :
Lounès Darbois, Sociologie du hardeur (2018) :