En cette année du cinquantenaire de la révolution, quel avenir pour le régime castriste et pour l’île de Cuba ? Quels défis attendent Raùl Castro et les Cubains en cette année 2009 ?
L’année 2009 sera très probablement un moment charnière dans l’histoire de ce pays qui constitue un des derniers vestiges de la guerre froide. A l’instar de tous les pays, Cuba n’échappe pas à la crise qui frappe l’ensemble de la planète. Les économies sont perturbées tant par l’incertitude qui règne sur les marchés financiers que par la remise en cause de certains accords commerciaux. Cuba ne fait pas figure d’exception et se retrouve aussi victime de cette situation très largement causée par les gourous de Wall Street.
A cela vient s’ajouter, les dévastations causées par les trois ouragans Ike, Gustav et Paloma qui ont très durement touché l’île en 2008. Mais ce qui conditionnera encore plus l’avenir de l’île sera (comme toujours) les rapports entretenus avec "l’ennemi yankee". Du côté de la Havane, on espère que l’arrivée de Barack Obama à la Maison-Blanche modifiera quelque peu les relations américano-cubaines.
Nouveaux espoirs
Pourquoi une telle espérance après tant de désillusions ? La raison en est fort simple : pour la première fois depuis très longtemps, la communauté cubano-américaine, forte de 1,5 million de personnes, et très présente dans des Etats comme la Floride, n’a pas eu un poids décisif lors de la dernière élection présidentielle. Généralement très anti-castriste, et très à droite, les mouvements cubains n’ont pas réussi à imposer leur marque en novembre dernier, ce qui permettra sans-doute à Obama d’avoir une marge de manœuvre un peu plus grande que ses prédécesseurs sur cette épineuse question.
Que pourrait faire Obama ? Mettre fin à l’embargo qui fut la source de tant de souffrances pour les Cubains ? Il n’en a pas les moyens.
La levée de l’embargo relève du Congrès. On imagine donc fort mal le législateur américain faire preuve de clémence envers celui que ses plus farouches adversaires surnomment "l’Ubu cubain".
En revanche, Obama pourra peut-être revenir sur deux dispositions très controversées prises par l’administration Bush. Dispositions qui ont eu pour effet de gêner aussi bien les Cubains de l’île que ceux vivant aux Etats-Unis.
Ces derniers ont été contraints d’accepter la limitation de leur voyage vers Cuba à un seul tous les trois ans (contre un an auparavant). Et les envois de leurs devises ont vu leurs plafonds considérablement réduits et les destinataires limités aux proches parents directs (conjoints, enfants, parents, grands-parents, petits-enfants), et ce, au mépris des liens affectifs et de solidarité et du libre choix de subvenir aux besoins de la famille élargie, "à la cubaine", ce qui inclut les parents éloignés, amis, voisins, collègues de travail.
Mais le véritable "espoir" des Cubains réside peut-être dans les pressions que pourrait exercer le lobby américain de l’or noir pour assouplir les restrictions à l’encontre de Cuba dans le seul but de faciliter l’exploitation et les recherches pétrolières dans le Golfe du Mexique.
C’est ce type de considérations économiques qui avaient déjà permis un allégement des sanctions dans le cadre de l’agro-alimentaire et des produits pharmaceutiques. Mais si aucun changement n’a lieu, Cuba pourra compter sur ses "alliés". La Chine, la Russie, la Bolivie (dans une moindre mesure) mais surtout le Venezuela du président "bolivarien" Hugo Chavez. Ce dernier livre environ 100.000 barils de brut quotidiens en échange de l’envoi de médecins cubains.
Le régime ne commet plus l’erreur qui faillit lui coûter si cher en 1991 à la chute de l’Union soviétique, à savoir : ne baser sa santé économique que sur un seul partenaire. D’où la multiplication des accords avec les pays d’Amérique du Sud notamment.
Il faut aussi noter la bonne entente entre la patrie du Lider Maximo (qui vit sa "retraite médicale" dans un lieu tenu secret) et le Brésil de Lula.
Les deux sociétés d’Etat brésilienne et cubaine Petrobras et Cupet ont passé un contrat concernant la zone économique cubaine du Golfe du Mexique.
Selon ce contrat à risque, la société brésilienne pourra prospecter pendant sept ans une zone de 1.600 km2, d’une profondeur de 500 à 1.600 mètres, avait précisé en octobre dernier à la presse Miriam Guaraciaba, porte-parole de Petrobras.
Des investissements de 8 millions de dollars sont prévus dans un premier temps, selon Mme Guaraciaba qui avait ajouté que Petrobras disposerait d’un contrat d’exploitation commun avec Cupet (Cubapetroleo) de 25 ans si du pétrole était trouvé.
Les autorités cubaines estiment à 21 milliards de barils les réserves de pétrole non prouvées dans la zone économique du Golfe du Mexique où plusieurs sociétés étrangères font déjà de l’exploration, mais sans résultat jusqu’ici.
Problèmes sociaux
Toutefois, Cuba n’est pas à l’abri de troubles sociaux si ses dirigeants ne mettent pas tout en œuvre pour régler un certain nombre de problèmes qui s’avèrent de plus en plus dramatiques pour les habitants de l’île.
L’absence de solutions pour résoudre la crise du logement devient très préoccupante. Cette pénurie touche tout particulièrement la jeunesse.
Plusieurs générations sont contraintes de vivre sous le même toit faute de propositions satisfaisantes et suffisantes.
L’autre souci majeur : des salaires bien trop faibles dans de nombreux secteurs. C’est un motif de mécontentement majeur chez les Cubains, le régime va être contraint d’y répondre le plus rapidement possible. Enfin, subsiste toujours le fameux problème des "deux monnaies". Problème datant de la fin de la guerre froide et qui a contribué à dynamiter la société cubaine. Le "peso faible" concerne essentiellement les activités économiques intérieures alors que le "peso fort" (convertible) est essentiellement utilisé dans les opérations économiques tournées vers l’extérieur : le tourisme, les biotechnologies etc...
Cuba possède cependant des atouts majeurs qui lui permettront très probablement de sortir la tête haute de la tourmente : son système éducatif (quoique un peu en déclin depuis quelques années), la Santé, les biotechnologies, le rhum, les cigares, le cobalt ou encore le nickel...
Mais aussi et peut-être surtout, Cuba, contrairement aux pays du Pacte de Varsovie, a choisi le chemin du communisme. Celui-ci ne lui a pas été imposé par les chars soviétiques. Il est le fruit d’une révolution populaire et nationale qui a renversé le dictateur Batista. D’où la non-disparition du régime castriste en 1991 à la chute du "grand frère". D’où la lutte contre l’impérialisme américain encore très largement partagée par la population cubaine.
Des idées qui doivent faire frémir des "démocrates impeccables" tels Bernard-Henri Lévy, André Glucksmann ou Ivan Rioufol.
Raison de plus pour soutenir les Cubains et souhaiter un joyeux anniversaire à leur révolution.
Article paru dans le numéro de février 2009 de B.I (ex-Balkans Infos)