Les chiffres du nombre de demandeurs d’emplois pour le deuxième trimestre 2016 ont enfin donné à voir l’inversion de la courbe du chômage annoncée par l’exécutif français depuis la fin de l’année 2012, sans pour autant que la situation économique se soit en aucune manière améliorée dans l’hexagone. La croissance reste en effet exsangue avec 0,5 points de croissance au premier trimestre et 0 au deuxième quand la plupart des économistes s’accordent à dire que l’économie française ne crée des emplois qu’au-delà de 1,5 points…
Pour expliquer ce décalage à première vue incompréhensible entre sa « vision » de décembre 2012 et les statistiques du deuxième trimestre 2016, le président François Hollande aura cette explication surréaliste, extraite du livre Conversations privées avec le président, sorti ce jeudi : « Je n’ai pas eu de bol ! »
Cette réduction de la problématique de l’emploi à une question de « bol » renvoie, deux décennies après la métaphore de l’ouragan utilisée par le président François Mitterrand, à l’impuissance politique organisée en matière de politique industrielle et économique dans un environnement mondialisé caractérisé par la perte d’autonomie nationale.
Cette perte d’autonomie et de pouvoir d’action national sur les questions centrales de la politique industrielle ou des politiques monétaires et budgétaires se traduit dans les faits par une politique du maquillage qui fonctionne comme substitut à l’action publique. Ainsi, le détail des chiffres publiés par l’INSEE pour le deuxième trimestre, montre, à côté d’une réduction de 0,3 point du nombre de chômeurs de catégorie A, soit une baisse de 74 000 demandeurs d’emplois, une augmentation significative des demandeurs d’emplois non comptabilisés.
Selon l’INSEE :
« En France métropolitaine, parmi les personnes inactives au sens du BIT, 1,5 million souhaitent un emploi sans être comptées comme chômeurs au sens du BIT : elles constituent le halo autour du chômage. Au deuxième trimestre 2016, leur nombre augmente de 29 000 par rapport au trimestre précédent, et de 43 000 sur un an. »
Ce « halo », au sens du BIT, désigne les personnes classées comme inactives, soit parce qu’elles ne sont pas disponibles rapidement pour travailler (deux semaines), soit parce qu’elles ne recherchent pas activement un emploi.
On voit que soustrait de l’augmentation des demandeurs d’emplois classés comme « inactifs », la baisse officielle du nombre des « chômeurs » se réduit à 45 000.
Autre information publiée par l’INSEE mais non reprise par la presse nationale, le « sous-emploi », c’est à dire les personnes travaillant à temps partiel, mais souhaitant travailler plus sans y parvenir, a lui aussi augmenté de 0,3 points, ce qui n’est, là encore, pas le signe d’une économie qui crée des emplois. Enfin, dernier indice qui indique manifestement un trucage des statistiques gouvernementales, le taux d’activité global a diminué de 0,1% sur la période…
Dans ces conditions, la décrue inexplicable, et inexpliquée, du chômage officiel au deuxième trimestre ne pouvait venir que d’un maquillage statistique et c’est le journal Le Canard Enchaîné qui fournissait la preuve de la manipulation au début du mois d’août en révélant une publication interne à Pôle Emploi appelant à placer 500 000 chômeurs de plus en formation, c’est-à-dire à les faire basculer de la catégorie A, qui sert au calcul statistique officiel, à la catégorie D. Cette offensive statistique spectaculaire, qui consiste à faire changer les chômeurs officiels de nomenclature afin de les faire « disparaître », a nécessité le déblocage d’un budget exceptionnel de 1 milliards d’euros. Un maquillage très onéreux pour les contribuables.
L’annonce de la baisse du chômage officiel par l’INSEE a pourtant été reprise par l’ensemble de la presse nationale, sans aucun recul critique. La lecture des titres des grands quotidiens révèle même une tonalité presque euphorique. Ainsi, le journal Le Monde claironne : « Le taux de chômage sous les 10 % pour la première fois depuis quatre ans ». Le Figaro titre quant à lui sur un « Fort recul du taux de chômage au deuxième trimestre ».
Il faut ensuite fouiller dans le corps de l’article pour trouver une explication à cette baisse, quand il en est fait mention. Le Monde parle ainsi de « Surprise » sans avancer aucune explication. Le Figaro évoque bien quant à lui le plan de « formation » de 500 000 chômeurs, mais en toute fin d’article… Plus nuancé, Libération met un « bémol » à la publication des chiffres de l’INSEE, évoquant l’augmentation du « halo du chômage ». Aucune dénonciation là non plus, de la politique de maquillage statistique de l’exécutif qui avait pourtant été annoncée en grande pompe et détaillée par le gouvernement français en janvier 2016.
Il paraît ainsi incompréhensible que la grande presse nationale ne puisse pas faire le lien entre le changement de catégorie statistique des bénéficiaires du plan de formation gouvernemental et la baisse du chômage officiel, à moins bien sûr qu’elle ne le veuille pas. Nous nous heurtons ainsi une fois encore aux limites du système de subventionnement public des organes de presse écrite, qui produit dans les faits une nomenklatura médiatique servile et complaisante, se comportant dans sa chasse aux subventions publiques comme une auxiliaire du pouvoir politique.
C’est ainsi en toute impunité que l’exécutif peut se livrer sur le plan intérieur comme géopolitique, à une politique du maquillage et du mensonge destinée à masquer son impuissance au niveau économique ainsi que ses errements géostratégiques. Le soutien aux djihadistes d’Al-Nosra en Syrie fut maquillé en aide aux « rebelles modérés », dont la véritable nature avait été révélée à l’occasion des raids aériens des forces armées russes. Cette politique de soutien aux groupes djihadistes contre le régime syrien a contribué à la montée en puissance de l’État islamique et du terrorisme international. Après les premières vagues d’attentats de 2015 sur le sol français, l’exécutif dissimulera sa responsabilité derrière le mensonge de « loups solitaires » « auto-radicalisés » via Internet, qui sert également de paravent à l’incompétence meurtrière des services de renseignement. Il n’est dès lors pas étonnant que le gouvernement, assuré de la docilité des médias subventionnés, ait attaqué de manière si virulente les médias indépendants opérant sur Internet, et les « théories du complot » accusés de véhiculer des « discours de haine » ou encore de propager « l’antisémitisme », du fait qu’ils ont été les seuls vecteurs de la démystification de cette politique du mensonge.
Un peu plus d’un mois après l’attentat de Nice, l’impuissance du gouvernement à assurer la sécurité de ses citoyens et la contradiction entre le but affiché publiquement de lutter contre le terrorisme et son soutien au groupe Al-Nosra en Syrie, se matérialise une nouvelle fois sous la forme du maquillage et du mensonge à travers la polémique stérile sur le burkini, comme si lutter contre les signes visibles d’une certaine forme de radicalisation allait permettre de faire oublier les échecs répétés des services de renseignement ou encore la responsabilité de la politique étrangère française. Parce qu’il est condamné à l’impuissance sur le plan intérieur et victime de ses propres incohérences criminelles sur le plan géopolitique, ce gouvernement est ainsi passé maître dans l’art de maquiller les faits, de manipuler l’opinion publique et d’allumer des contre feux.