Le chef de la diplomatie hongroise Peter Szijjarto revient pour RT sur le scandale autour de la fermeture de la CEU, une université de Budapest financée par George Soros, la crise migratoire et les tensions avec l’Union européenne.
RT : La politique migratoire est depuis longtemps une pomme de discorde entre Budapest et Bruxelles. Vous affirmez qu’il s’agit là d’une compétence de base de l’État ; Bruxelles estime qu’il doit y avoir une certaine répartition des charges. À votre avis, peut-il y avoir un compromis à ce sujet, même un compromis symbolique ? Car chacun tente ici de mettre l’autre au pied du mur.
Peter Szijjarto : Nous avons été très clairs à ce sujet : aucun immigré illégal n’est autorisé à accéder au territoire hongrois. Quelle que soit la pression que les médias internationaux, l’UE ou n’importe quelle institution européenne puissent exercer sur nous, nous ne laisserons personne entrer sur le sol hongrois illégalement. C’est le premier point.
Second point : en ce qui concerne la répartition des charges, nous avons dépensé énormément d’argent pour nous doter des moyens de protéger notre frontière, qui est la frontière extérieure de la zone Schengen. La zone Schengen est dotée de règles très claires, qui indiquent que tous les pays situés à la frontière extérieure sont obligés – je souligne : obligés – de s’assurer que leur frontière puisse être traversée seulement aux postes de douane officiels et aux heures d’ouverture. Nous nous conformons à ces demandes, et ensuite on nous critique…
Ce ne sont pas que des critiques. Il y a quelques semaines, le Parlement européen a condamné ce qu’il appelé une détérioration de l’État de droit en Hongrie…
…ce qui est fou !
…et la possibilité d’application de l’article 7, ce qui en théorie peut vous priver des droits de vote, a été évoquée. Je suis sûre que vous ne croyez pas que cela puisse se produire…
Non, bien sûr que non.
Pourquoi ?
Car cela demande l’unanimité, et le ministre polonais des Affaires étrangères a clairement fait comprendre qu’ils ne soutenaient aucune sorte d’intimidation d’un État membre avec ce genre de procédures. Quand la Pologne a été ainsi menacée il y a un temps, la Hongrie a fait clairement comprendre que nous n’allions voter pour aucune sorte de sanctions contre la Pologne. C’est une sorte de soutien mutuel, ouvert, dans cette situation. En outre, quelques autres ministres des Affaires étrangères d’États européens sont venus me voir et m’ont dit clairement qu’ils n’allaient pas soutenir ce genre de mécanisme.
Alors que le débat continue, le problème migratoire subsiste ; il y a déjà plus d’un million de réfugiés ou de migrants dans l’Union européenne. À votre avis, comment ce problème doit-il être résolu ? Qui doit les prendre en charge ? Devraient-ils rester dans les endroits où ils se trouvent à l’heure actuelle ?
La loi européenne doit être appliquée. Et la loi européenne décrit sans ambiguïté qui a le droit de rester en Europe et qui n’a pas ce droit. Pour cette raison, je crois que la plus grave erreur que l’Union européenne a commise était de laisser 1,5 million de personnes entrer en Europe sans identification, sans savoir qui étaient vraiment ces gens, quels sont leurs projets, quelles sont leurs intentions, leur origine. C’était une énorme erreur. Maintenant on en voit les conséquence : nous sommes face à une menace terroriste plus grave que jamais.
Autre question d’actualité : la controverse autour de l’Université d’Europe centrale. Beaucoup de gens sont descendus dans la rue pour protester contre sa fermeture. Pensez-vous qu’un compromis soit possible dans ce cas particulier ?
Je pense que le plus important ici, ce sont les faits. Il y a 27 universités étrangères en Hongrie, dont une seule est conforme au règlement – c’est une université américaine, pas la CEU, mais une autre. Ce qu’on demande de la part des universités, sont, à mon avis, deux choses très simples. Premièrement, il faut être conforme au règlement. Deuxièmement, pour les universités basées en dehors de l’Union européenne, un accord gouvernemental est nécessaire. C’est ce que nous voulons. Et pendant des semaines nous n’avons même pas eu un négociateur désigné par les États-Unis ou l’État de New York. Maintenant, il y en a un, donc cela dépend d’eux – nous sommes ouverts, nous voulons trouver un accord, cela dépend d’eux : peuvent-ils se conformer à nos exigences ou non ? J’espère qu’ils le peuvent, car ils disent d’eux-mêmes que ce sont de très bonnes universités...
Mais vous savez – et je pense que beaucoup de gens soutiendraient cette affirmation – qu’il s’agit effectivement de très bonnes institutions qui ont contribué à faire de Budapest l’une des capitales européennes de l’éducation...
Nous avons d’autres très bonnes universités, vous pouvez en être sûre.
Oui, mais dans quelle mesure cette dispute porte-t-elle vraiment sur le règlement, et en dans quelle mesure s’agit-il de George Soros, qui s’est montré méprisant vis-à-vis de votre gouvernement ?
C’est l’université elle-même et quelques organisations politiques qui ont fait de ce débat un débat sur George Soros. Nous traitons ce problème comme une question technique. Toutes les autres universités ont traité ce problème ainsi : nous allons avoir des accords avec la Chine, la Thaïlande, la Malaisie... elles considèrent ceci comme une question technique. Si la CEU s’était montrée disposée tout de suite après l’application du règlement, nous aurions peut-être trouvé un bon accord. J’espère que ce sera le cas. Nous sommes ouverts et bienveillants. J’espère qu’ils le sont aussi.
George Soros a récemment fait un discours à Bruxelles dans lequel il a accusé le président hongrois Viktor Orban de tentatives de l’ériger en ennemi. Faisant pratiquement la même chose, il a dit que Viktor Orbán transformait la Hongrie en un État mafieux – je suis sûre que vous n’êtes pas d’accord avec ceci, mais je suis obligée de demander votre opinion...
Oui, vous pouvez être sûre que je ne suis pas d’accord avec ceci. C’est assez habituel de voir George Soros être en désaccord avec ce que fait le gouvernement hongrois. Il n’aime pas l’actuel gouvernement hongrois et a l’intention de nous pousser dehors. C’est pour cette raison qu’il finance des organisations qui s’opposent au gouvernement. Mais ce n’est pas George Soros ni les ONG, surtout celles financées depuis l’étranger, qui doivent prendre des décisions sur l’avenir de l’Europe : qui doit diriger l’Europe... excusez-moi, la Hongrie ? C’est le peuple hongrois. Le peuple hongrois prendra sa propre décision et nous entendons que tout le monde respecte la décision du peuple hongrois.