Pour éviter tout malentendu, il faut d’abord lire le programme frontiste : tout ou presque y est écrit. Il faut ensuite acter que si le parti a évolué, Jean-Marie Le Pen en reste, outre le président d’honneur, un élu européen et régional, qui s’exprime et n’entend pas prendre sa retraite.
Par Jean-Yves Camus
Commençons par Israël.
Le projet du FN, à la rubrique « politique étrangère », énonce la nécessité de la « restauration d’une politique arabe de la France », qui « passe d’abord par la restauration de notre politique d’équilibre au Proche-Orient ». Traduction : le FN « soutient la formation d’un État palestinien », mais estime « qu’Israël doit être assuré d’une existence indiscutable et d’une sécurité garantie ». Deux peuples, deux États donc, sans précisions sur le tracé des frontières et le statut de Jérusalem.
Par contre le FN trace une « ligne rouge » :
« La France ne discutera ni ne négociera avec aucun gouvernement pratiquant ou soutenant des groupes pratiquant le terrorisme, quelle que soit la cible (Europe, Etats-Unis, Israël, Russie…). »
Formule habile : on ne négocie ni avec l’Iran ni avec la Syrie, qui sont des États, mais quid du Hamas et du Hezbollah, qui n’en sont pas ?
De plus, tout le monde n’est pas sur la même longueur d’onde au FN : le député européen Aymeric Chauprade a publié le 11 août 2014 un texte qui contenait une phrase-clé :
« À moins donc qu’il ne soit gouverné par un antisémitisme obsessionnel, un patriote français ne peut chercher à former, contre Israël, et avec l’extrême gauche pro-palestinienne, la racaille de banlieue et les islamistes une alliance à la fois contre-nature et sans issue politique. »
Chauprade, alors conseiller international de Marine Le Pen, avait une légitimité pour le dire, lui qui a de solides amitiés arabes et n’est jamais allé en Israël. C’en était sans doute trop pour certains des conseillers officieux de la présidente frontiste qui, venus du GUD notamment, poussent le soi-disant antisionisme si loin qu’ils préfèrent la ligne islamophile d’Alain Soral. Et de fait, ils ont gagné : depuis janvier dernier, Chauprade n’est plus chargé des questions internationales.