En décidant de dissoudre l’Assemblée nationale au soir des élections européennes ce 9 juin 2024, Macron ouvre la voie à une recomposition du paysage politique français. Une recomposition en germe depuis longtemps, dont le point saillant est la possible arrivée à la « gouvernance » du parti fondé par Jean-Marie Le Pen il y a plus de 50 ans, sur fond de sa « normalisation ». Mais le point d’intérêt, ce n’est pas tant le résultat des élections législatives à venir (qui accoucheront probablement d’une majorité disparate et peu claire) que la bascule politique qui a déjà eu lieu.
Les juifs changent d’antisémite.
Si l’arrivée au pouvoir de l’« extrême droite » a par le passé maintes fois été agitée comme un épouvantail (2002, 2017, 2022…), deux faits politiques nouveaux viennent la rendre aujourd’hui plus probable que jamais.
D’abord par la transgression de l’interdit édicté par le B’nai B’rith et appliqué par Chirac et ses successeurs depuis 1988 : pas d’alliance à droite. L’alliance du RN et des LR, si elle se confirme, est bien une digue « républicaine » qui saute.
Ensuite, par le retournement désormais explicite du lobby sioniste français, viscéralement anti-lepéniste jusqu’il y a peu et désormais farouchement opposé à La France insoumise, dont il a fait son nouvel épouvantail antisémite.
La réaction de l’académicien Alain Finkielkraut est à cet égard on ne peut plus illustrative : celui-ci se verrait « contraint » de voter RN pour faire barrage à l’antisémitisme.
À cet égard, le conflit israélo-palestinien apparaît désormais comme la véritable ligne de fracture droite-gauche dans la France de 2024.
Un peuple doublement trahi
Chausser les lunettes marxistes (les seules qui font apercevoir le réel) oblige à comprendre le succès électoral du RN comme une formidable poussée populaire. Le fort taux d’abstention souvent brandi par ses adversaires ne signifiant rien d’autre que les électeurs du RN sont la partie du peuple ayant la plus forte « conscience de classe ».
Une poussée populaire que la gauche bourgeoise s’empresse de venir contrer avec son nouveau Front populaire… sans et même contre le peuple. Un appel à voter pour le PS façon Hollande, soit celui duquel est sorti… Emmanuel Macron !
Déjà la petite bourgeoisie réactionnaire urbaine se déchaîne dans les rues métropolitaines, comme à chaque fois que Macron n’est pas assuré de remporter une élection. Y a-t-il meilleure définition, illustration plus cinglante du fascisme, que ces hordes petites bourgeoises, ethniquement homogènes, amnésiques et braillardes qui viennent exulter dans la violence leur détestation du peuple et de ses idées et réclamer à grands coups de pillage le retour de l’ordre macroniste (pour qui elles ont voté très majoritairement même si certains ont des pudeurs et ne couchent pas dès le premier tour) ?
Mais double trahison, car la direction du RN, elle-même acquise aux diktats de la classe dominante s’empresse de faire une alliance avec la droite bourgeoise ultralibérale, parfaitement représentée par Éric Ciotti, à l’encontre de qui une simple photo dispense à peu près d’arguments.
Macron casse le joujou avant de filer
Après avoir accompli à peu près tout ce pour quoi il avait été mis en place, Macron met donc fin au « en même temps » qui lui aura permis d’être cette météorite néo-libérale qui s’est abattue sur la France depuis bientôt dix ans.
Il remet le pays comme il l’a trouvé politiquement avec la recomposition d’une stérile opposition droite-gauche. Une droite et une gauche qui ont entretemps été intégralement purgées de tous leurs éléments souverainistes et mis sous contrôle de forces pro-européennes, atlanto-sionistes et sur les rails de la guerre.
Mélenchon, quoi qu’on en pense, aura été le dernier homme politique à gauche sur une ligne souverainiste, qu’il s’agissait donc de cornériser. D’où Glucksmann.
Une droite et une gauche dont le liant semble désormais être le LGBTisme, défendu théoriquement comme émancipation progressiste à gauche et empiriquement pratiqué à droite.
La seule véritable stratégie révolutionnaire possible étant inéluctablement repoussée : à savoir le passage au service du peuple (le monde du travail) qui vote RN de la petite bourgeoisie intellectuelle (sociale et pro palestinienne) qui est chez LFI.
Une ligne prophétisée par Alain Soral dès 2008.