Mais les jeunes criminels de ce temps-là... On ne les frappait pas quand ils étaient petits, et on ne les fouettait pas pour leurs crimes. Non, le processus était le suivant. Premier délit, un avertissement. On grondait, si vous voulez, sans même juger, souvent. Après quelques délits, l’emprisonnement, cette sentence pouvant être suspendue par une mise en liberté surveillée. Un jeune criminel pouvait être arrêté plusieurs fois avant d’être puni. Et dans ce cas, on l’enfermait en prison, simplement, avec d’autres jeunes criminels qui ne pouvaient que lui apporter d’autres idées criminelles.
Il aurait pu continuer ainsi durant des années, tandis que ses crimes croissaient en nombre et en atrocité pour n’être punis que par la prison. Mais, tout à coup, légalement, le jour de son dix-huitième anniversaire, le cycle était interrompu. Le "jeune délinquant" devenu criminel adulte pouvait en quelques semaines se retrouver dans une cellule de condamné à mort (il est américain, n’oubliez pas).
Vous ! (à nouveau il pointait son moignon sur moi) Supposez que vous vous soyez contenté de gronder votre chien, sans jamais le punir, supposons que vous l’ayez simplement enfermé de temps en temps dans une cabane pour le laisser revenir plus tard en l’avertissant de ne jamais recommencer. Jusqu’à ce que vous vous aperceviez qu’il est devenu un grand et vieux chien, toujours aussi sale. Qu’auriez-vous fait, alors ? Vous auriez pris un fusil pour l’abattre ? Qu’en pensez-vous ?
Eh bien... c’est la façon la plus incroyable d’élever un chien dont j’aie jamais entendu parler !
Tout à fait d’accord. Ou un enfant. Et qui est coupable ?
Moi, je pense.
Exact. Et j’en suis sûr.
Monsieur Dubois, dit alors une fille, pourquoi ? Pourquoi ne pas donner de fessées aux petits enfants et quelques bons coups de lanière aux plus grands quand ils le méritent... je veux dire pour de très vilaines choses.
J’ignore pourquoi ils ne faisaient pas cela au XXème siècle, dit M. Dubois d’un ton sinistre. Sans doute ses pseudo-scientifiques qui se donnaient le titre de "psycho-pédiatres" ou "d’assistants sociaux" méprisaient-ils les anciennes méthodes qui avaient fait leurs preuves. Sans doute les jugeaient-ils trop simple pour inculquer le respect humain et les vertus sociales à de jeunes esprits. Après tout, n’importe qui pouvait y parvenir en usant de patience et de fermeté, comme pour un petit chien. Je me suis parfois demandé s’ils n’avaient pas épousé la cause du désordre...