Le Forum économique international qui s’ouvre aujourd’hui à Saint-Pétersbourg attire une attention particulière en Allemagne, écrit jeudi 22 mai le quotidien Nezavissimaïa gazeta.
Les entrepreneurs allemands sont, bien sûr, préoccupés par le maintien de leur large partenariat avec la Russie dans le contexte de la crise en Ukraine et la menace d’un élargissement des sanctions occidentales. La tribune de Saint-Pétersbourg offre la possibilité d’en parler.
Presque 200 groupes parmi les plus grands d’Allemagne seront représentés au forum par le Comité économique allemand pour l’Europe de l’est et son président Eckhard Cordes.
L’administration Obama a quant à elle interdit aux dirigeants de compagnies américaines d’assister à ce forum. Et compte tenu de la profondeur du partenariat commercial russo-allemand, Washington a également fait pression sur les sociétés allemandes. Selon la revue Bild, "on a fait comprendre aux entreprises allemandes que leur participation pourrait avoir un impact négatif sur leurs affaires aux USA".
Berlin souligne que le gouvernement fédéral n’a pas exercé de pression sur les compagnies pour les forcer à renoncer au forum de Saint-Pétersbourg en raison de la crise ukrainienne. Mais les dirigeants du Comité économique allemand pour l’Europe de l’est ont été convoqués lundi à la chancellerie fédérale pour un briefing.
Selon le porte-parole du comité Andreas Metz, la chancelière n’a pas participé à l’entretien : il s’agissait d’une séance d’information avec ses conseillers pour les affaires étrangères et l’économie.
D’après le porte-parole du gouvernement, les conseillers ont présenté aux entrepreneurs la position du gouvernement fédéral par rapport à la crise ukrainienne et les liens entre les deux pays en politique étrangère. "Le choix leur a été laissé de participer ou non au forum de Saint-Pétersbourg et aucune recommandation n’a été faite.
Mais il est difficile pour les entrepreneurs de faire un choix quand la chancelière dit que "les bonnes relations sont dans notre intérêt", que le ministre de l’Economie Sigmar Gabriel menace de durcir les sanctions et que les Américains les mettent en garde contre des pertes commerciales.
Au final, la plupart des directeurs des plus grandes entreprises, par exemple énergétiques ou automobiles, se sont abstenues de participer personnellement au forum. Mais ces sociétés y sont présentes".
Bien que le président d’E.ON, Johannes Teyssen ait renoncé à participer au forum, il y envoie par exemple deux membres de la direction – Leonhard Birnbaum et Jorgen Kildahl. Siegfried Russwurm, lui, représentera le groupe Siemens. D’autres grandes entreprises ont agi de la même manière, sans parler des moyennes.
Le réalisme, l’initiative et la prévoyance n’ont pas disparu dans le monde des affaires allemand. Cordes rappelle que le Comité économique allemand pour l’Europe de l’est profite traditionnellement du forum pour approfondir la coopération économique étroite entre les entreprises des deux pays.
Il met en garde contre les conséquences négatives des sanctions contre la Russie, tout en soulignant la nécessité de maintenir les contacts entre des sociétés russes et allemandes. Le président du groupe Metro pense également que le dialogue doit être développé.
Cet état d’esprit est révélateur. Selon Jürgen Fitschen, président de la Fédération des banques privées allemandes (BDB), ce serait "une grave erreur de renoncer à tout ce que l’économie allemande a construit par un long travail en commun avec la Russie".