Première partie
Alain Soral – On n’est pas amplifiés, hein. Au son naturel. Je voudrais déjà remercier nos camarades québécois ici présents et Éric [Gareau], qui est la puissance invitante. Et déjà, vous dire une première chose. C’est que, moi, je suis venu non seulement pour vous parler, mais aussi pour découvrir le Québec, puisque j’en rêve beaucoup depuis la fameuse phrase de de Gaulle, « Vive le Québec libre ! », qui était un petit peu un vœu pieux, je crois, mais qui a quand même une petite réalité, j’ai cru comprendre, en me promenant ici depuis quarante-huit heures.
Je suis touché à plusieurs niveaux. D’abord, je suis très ému d’arriver si loin de la France dans une contrée francophone. C’est très émouvant de voir des gens qui finalement défendent la francophonie bien plus que nous-mêmes en France, souvent. C’est très touchant. Deuxièmement, je suis touché de quelque chose dont on avait parlé mais que j’ai vérifié, c’est de la gentillesse des gens. Il y a quelque chose de sain dans la population québécoise francophone qui s’est un peu perdu en France. Une gentillesse, peut-être pour ceux qui sont venus en France, qu’on trouve moins facilement chez les Français. Donc, je suis doublement content d’être là, pour la francophonie et la gentillesse.
Et troisièmement, je viens aussi ici parce que je me dis qu’à terme, comme on en parle souvent avec Piero, si ça se passe trop mal en France pour nous, on sera peut-être obligés d’émigrer. Et comme, moi, je ne suis pas très doué pour les langues, et que je suis profondément patriote, il n’y a pas trente-six endroits où on peut aller, où il y a des populations qui parlent français, qui aiment, je crois, une certaine culture rattachée à la France. Donc, il est possible, je prends un peu des mesures ici, pour voir si je ne viendrai pas bientôt me réfugier parmi vous. Ce qui me permet d’introduire Piero, comme vous le savez.
Puisque moi, je pense qu’ici vous avez à peu près tous lu, ou vous connaissez à peu près tous mon bouquin, Comprendre l’Empire. Oui. Ceux qui ne savent pas du tout ce que j’écris, ils n’ont qu’à lever la main. Non. Tout le monde sait à peu près. Je n’aurais pas besoin de le refaire, c’est ça qui est bien. On va pouvoir plus discuter. Je ne vais pas vous faire une conférence de présentation globale du bouquin que vous avez à peu près tous lu.
Mais ce qui est sûr, c’est que notre relation [avec Piero San Giorgio], c’est « comprendre l’Empire » et donc quelque chose qui nous amène pas loin d’un chaos. Et puis, derrière, nous avons Piero, c’est la deuxième lame du rasoir, c’est « survivre à l’effondrement économique », puisque, moi, je vous annonce, quelque part, la mécanique de l’effondrement. Et une fois qu’on a admis que notre monde allait peut-être pas mal se dégrader dans les mois qui viennent. D’ailleurs on vérifie avec l’actualité que ce sur quoi j’avais pris des paris, ce sur quoi j’avais anticipé – parce qu’il y a toujours une prise de risque et un risque d’erreur –, on voit en ce moment, avec ce qui se passe en ce moment, notamment le fameux sketch de Netanyahou à l’Onu avec la petite bombe et le trait rouge-là, que nous sommes effectivement dans une période qui ressemble effectivement à l’avant-guerre. Je suis même étonné parfois et inquiet d’avoir relativement raison sur mes spéculations.
Donc, effectivement, une fois que tout ça sera parti, on voit bien ce qui peut se passer : la Syrie, l’Iran ; ça peut partir de partout. Mais il va falloir se poser la question – et ça c’est plutôt le domaine de Piero –, une fois que le monde se disloque et part dans tous les sens, comment on fait pour tenir, survivre, sauver ce qui peut être sauvé, sauver ses propres fesses, déjà, sauver aussi la civilisation. Et ça, c’est un peu l’articulation de nos deux travails. C’est analyser le pourquoi, le mécanisme de l’effondrement, et comme on est dans le monde réel – on n’est pas dans le monde virtuel –, une fois qu’on a admis que l’avenir était dangereux, comment effectivement survivre de manière modeste. Parce que c’est ça un peu l’idée. On n’est pas dans l’idée qu’on va « changer le monde », comme à l’époque où on pensait aux « lendemains qui chantent ». Mais c’est un peu que ceux qui ont compris, ceux qui veulent s’en sortir, se débrouillent, effectivement, pour échapper à la catastrophe assez imminente. Et là, ça, c’est plutôt le domaine de spécialités de Piero, et aussi d’ailleurs de notre camarade Éric [Gareau] qui nous a démontré cet après-midi qu’il avait même une certaine avance sur nous. Voilà.
Donc, comment démarrer ?
Piero Sans Giorgio – Pourquoi l’Empire et où il nous amène ?
Conférence d’Alain Soral
Alain Soral – Oui. Ceux qui ont lu le bouquin voient à peu près les grandes lignes. Moi, j’ai commencé mon bouquin à la Révolution français, bon, pour voir les grands principes. Mais je pense que, là, par rapport à la séquence actuelle, on voit bien qu’il y a une période assez prospère qui est la conséquence de la Deuxième Guerre mondiale. C’est-à-dire que pour qu’il y ait eu cette prospérité d’après-guerre, il a fallu un grand cataclysme qui s’est appelé la Deuxième Guerre mondiale, sur lequel je ne vais pas trop m’appesantir. Mais on était dans une séquence, effectivement, qu’on a appelée les « Trente Glorieuses », de 1945 à 1973.
Ce qui est intéressant d’ailleurs, c’est que la fin des Trente Glorieuses correspond au premier choc pétrolier. Donc, on voit déjà qu’il y a un lien avec le pétrole. On voit que le premier choc pétrolier est lié à la guerre du Kippour – pour ceux qui ne font pas le lien – qui pose déjà la question israélienne. On voit que tout ça est déjà accouplé, et qu’à partir de là, on nous parle en permanence de « crise ».
Mais c’est vrai qu’on avait atteint des standards de vie tellement hauts dans notre monde occidental capitaliste avancé, qu’avant qu’on ressente la crise réellement, c’était un peu des mots. C’est vrai que même aujourd’hui, malgré l’aggravation de tout, on est parti de tellement haut par rapport aux sociétés primitives ou aux sociétés du tiers monde, que malgré tout, on a tous des voitures, on continue à manger sans problème. Mais, on voit bien que quand même, ça s’aggrave de plus en plus, le niveau du chômage, etc.
Donc, là, on a bien maintenant, après cette séquence où on a parlé de fin des Trente Glorieuses, de crise à partir de 1973 – deuxième choc pétrolier, 1977, la révolution Thatcher aussi où on a commencé vraiment à mettre en l’air des tas d’acquis sociaux qui étaient liés à cette période de prospérité –, qui était aussi, comme on le sait, une période d’économie mixte où il y avait un peu à la fois de dynamisme économique mais aussi de partage social, un peu.
Parce que là, j’insiste là-dessus. Ces périodes de crise – ça c’est un de mes grands sujets – sont quand même, ne sont pas uniquement, je dirais, des « accidents structurels ». C’est un peu ce qui m’agace parfois chez certains, même théoriciens de la crise, mais libéraux, c’est qu’ils vous disent en gros : c’est uniquement des effets de structures.
Il y a toujours une interaction des structures et des personnes. Il n’y a rien qui soit strictement structurel, et il n’y a rien qui soit strictement lié à l’aventure individuelle. Il y a toujours ce qu’on appelle en philosophie la combinaison du sujet et de la structure. C’est-à-dire que la structure conditionne le sujet. Mais le sujet rétroagit sur la structure.
Et cette crise est effectivement une crise d’usure d’un processus, c’est-à-dire crise de surproduction – on le voit en ce moment – mais aussi, un rapport de force politique. C’est là-dessus que je voulais venir.
C’est-à-dire que si j’analyse la situation, après l’énorme bain de sang de la Deuxième Guerre mondiale, les acteurs sociaux – c’est-à-dire on va dire, là, je reprends les catégories marxistes qui sont assez valables –, c’est-à-dire le rapport Capital-Travail – étaient plutôt à un moment de conciliation et de discussion parce qu’après une énorme période de violence, les êtres humains, étant ce qu’ils sont, sont à nouveau aptes au dialogue.
D’ailleurs, je le dis aujourd’hui. Pour que les être humains discutent à nouveau et soient dans une logique de partage, il faudra qu’il y ait, à mon avis, un grand cataclysme. Tant que ce cataclysme n’a pas eu lieu, les gens, même si on leur explique qu’il faut négocier et discuter, ils veulent de la violence. Malheureusement, c’est un peu comme dans les histoires de bistro. On se paye un coup à boire après la bagarre, jamais avant. C’est un peu une fatalité.
Et pour revenir à ça, il y a eu les Trente Glorieuses et il y a eu cette période un peu euphorique d’après-guerre parce qu’il y a eu toutes les destructions de la guerre. Mais aussi parce que les gens en présence dans les rapports sociaux, c’est-à-dire les gens incarnant le Capital et les gens incarnant le Travail, se rappelaient du pourquoi de la guerre, c’est-à-dire qui était.
La période que nous vivons en ce moment ressemble beaucoup à la période d’avant-guerre, c’est-à-dire à une période où justement le consensus social est abimé et où chacun tire de son côté, le Capitale et le Travail. Ce qui produit d’énormes violences sociales. Et les violences sociales génèrent des réactions politiques qui peuvent être le communisme, le fascisme, etc. Ça ne vient pas de nulle part. On le voit bien.
Et nous sommes en ce moment, je le dis, dans une période qui ressemble beaucoup à la période d’avant la guerre de 14-18, entre 1910 et 1914, et encore plus aux années trente. Avec d’ailleurs les mêmes marqueurs : je ne vais pas m’appesantir là-dessus, mais une certaine montée d’antisémitisme, par exemple, en ce moment, même si c’est un terme impropre ; des tensions internationales de plus en plus violentes. On voit bien que nous sommes dans une période, je le dis depuis déjà, moi, un certain temps, et ça devient de plus en plus vrai, nous sommes dans une période d’avant-guerre.
Et dans une période d’avant-guerre, j’insiste là-dessus, pas seulement pour des raisons structurelles d’usure du capitalisme avancé, mais aussi parce que comme ça fait plus de soixante ans qu’il n’y a pas eu de conflits majeurs chez les Occidentaux. J’insiste aussi là-dessus. Il y a eu des guerres en permanence depuis l’après-guerre, mais elles ont toujours été déléguées. On les a toujours fait faire par les autres : Corée, Viêt Nam, petites guerres un peu dans les pays, en Amérique latine, larvées, etc. Mais là, on voit que ça se rapproche de nous et de chez nous. Et cette période, disons, qui a permis la réconciliation, c’est-à-dire les gens d’après-guerre qui ont su que si ça s’était si mal passé entre 1940 et 1945, c’est parce qu’ils avaient commis beaucoup d’erreurs avant-guerre. Malheureusement, aujourd’hui, les mêmes personnes refont les mêmes erreurs, parce que simplement, je crois que soixante-deux ans sans guerre et sans violence, les gens se permettent certaines choses. Je ne pense pas que Netanyahou se permettrait ce qu’il se permet en ce moment si on était au lendemain de la Deuxième Guerre mondial. Or, là, il y a une vraie question anthropologique.
C’est qu’effectivement, quand il n’y a pas eu de guerres pendant cinquante ans, il y a des gens qui la souhaitent, il y a des gens qui ont oublié la violence que ça produisait. Et ça génère des attitudes, notamment dans les rapports sociaux et macrosociaux, de prises de risques maximums. On voit qu’en ce moment, on est dans cette période-là.
Donc, il y a à la fois le structurel et aussi les psychologies. C’est-à-dire que beaucoup de gens, aujourd’hui, c’est étonnant, sont prêts, enfin au niveau des dirigeants, des États, je ne parle pas des petites gens, semblent moins effrayés par la violence qu’il y a quelques années, car on voit très bien aujourd’hui que ce qui se passe en Syrie est déjà – je le faisais remarquer –, déjà une guerre mondiale en microscopique. Car en Syrie, pour ceux qui s’intéressent, il y a déjà, non seulement les Syriens, mais il y a aussi les Turcs, il y a des Jordaniens, il y a des Américains, il y a des Anglais, il y a des Français. De l’autre côté il y a des Pasdaran, il y a des Iraniens, il y a des Russes. On est déjà dans quelque chose qui ressemble à une répétition générale d’un conflit qui est aussi, je le fais remarquer, qu’on nous présente comme un conflit du monde chrétien face au monde musulman.
En général, c’est des faux chrétiens, c’est-à-dire des évangélistes américains, des néoconservateurs, qui sont pour moi des faux chrétiens. Les vrais chrétiens, c’est nous, ce sont les catholiques, je dirais. Et des faux musulmans, c’est-à-dire des gens qu’on appelle les « salafistes » – je sais bien que c’est un mauvais terme mais j’emploie les termes tels qu’ils fonctionnent en Occident –, mais c’est-à-dire des extrémistes musulmans financés par le Qatar sur une ligne wahhabite et qui travaillent en réalité pour ce que j’appelle l’Empire.
C’est-à-dire qu’aujourd’hui, on pousse des faux musulmans et des faux chrétiens à se battre comme une avant-garde, pour entraîner un conflit généralisé du monde chrétien et du monde musulman, qui en fait, quand on élargit, n’est pas le monde chrétien mais le monde judéo-chrétien, et qui en dernière instance, on le voit en ce moment par les publicités qu’il y a dans les métros new-yorkais : on vous dit, face à la barbarie, choisis la civilisation, défends Israël.
Donc, on voir bien qu’à chaque fois, on a cette question qui revient, Israël, qui est quand même la question, et la question de Jérusalem.
On pousse les chrétiens et les musulmans à se battre avec une double manipulation de chrétiens et de musulmans. Et derrière, ce qui est intéressant, on le voit déjà en Syrie – et, là, ça renvoie dans l’eschatologie monothéiste à la question de Gog et Magog –, on a en réalité les Russes face aux Américains, déjà. Et c’est ça le contexte général.
C’est-à-dire qu’on a une crise économique aggravée de surproduction, une crise bancaire que chacun a pu identifier s’il a lu mon bouquin, à cause de la stratégie mise en place d’ailleurs par Friedman, comme le reconnaît d’ailleurs aujourd’hui, Michel Rocard. Notre problème aujourd’hui vient de Friedman, c’est-à-dire un découplage total du dollar de toute production de richesses réelles et de tout référent, et qui a financé progressivement une fuite en avant guerrière des Américains pour maintenir par le militaire ce qu’ils ne pouvaient plus maintenir par leur suprématie économique. Et finalement qui est une fuite en avant d’escroquerie bancaire américaine, évidemment dont le noyau dur est Wall Street, qui fait que progressivement, on passe de la Pax Americana qui était la situation de l’immédiate après-guerre où l’Empire américain stabilisait le monde dans le but de faire ce qui fonctionne bien, c’est-à-dire du commerce pacifique. Et que depuis, finalement, les années soixante-dix, progressivement, par le faux dollar et par la fuite en avant militaire, ils sont devenus la grande force de déstabilisation du monde et de perturbation de l’économie saine. Je l’explique d’ailleurs souvent.
Nous sommes à la fois dans une monde libéral sur le plan philosophique, c’est-à-dire dans un monde qui étend la logique marchande à tout, c’est-à-dire d’abord aux marchandises, puis aux produits culturels, puis aux enfants à travers l’adoption, puis aux organes, etc., etc. Donc, on est dans ce qu’on appelle l’extension de la logique libérale qui est que tout est marchandise, qui est quelque chose de profondément antispiritualiste et qui choque profondément les musulmans et aussi les chrétiens authentiques, qui est quelque chose que j’appelle moi, de satanique.
Mais on est aussi dans une séquence totalement antilibérale sur le plan économique. C’est-à-dire où en fait une oligarchie en réalité militaire empêche le libre commerce et le libéralisme économique par la violence politico-militaire. Parce qu’en fait, ils sont battus sur le terrain économique.
Et ça, ça nous renvoie aujourd’hui à la fonction des États-Unis qui finalement est battu économiquement mais a comme domaine de domination et de prééminence le militaire, et qui en fait joue systématiquement le militaire pour lutter contre ses rivaux économiques. C’est plus discret avec la zone Europe. Mais on le voit notamment par l’affaire libyenne et en ce moment par ce qui se passe au Moyen-Orient. En réalité, on a déjà les Américains qui par le militaire essaye de bloquer la suprématie économique des Chinois parce qu’ils n’ont plus les moyens de s’y opposer sur le terrain de la libre concurrence économique. Donc, on est bien dans un monde à la fois totalement libéral sur le plan idéologique, mais totalement antilibéral sur le plan économique. Et on voit bien d’ailleurs que les États-Unis sont au cœur de ce dispositif, puisqu’ils sont à la fois totalement dans la logique de la marchandisation intégrale, et en même temps totalement dans une logique de domination du monde marchant par la violence militaire et la violence militaire.
Et pour ceux qui n’auraient pas compris – enfin, je pense qu’ici, on est entre initiés –, chaque fois que quelqu’un, un chef d’État, que ce soit Saddam Hussein ou Kadhafi, a essayé d’échapper à la domination du dollar qui est la logique de l’argent dette, c’est-à-dire qui est une logique d’endettement – Paul Grignon qui, je crois, est quelqu’un de chez vous a fait de très bonnes vidéos sur la logique de l’argent dette –, chaque fois qu’un pays essaye d’échapper à la logique de la dette, c’est-à-dire à l’obligation d’emprunter des faux dollars, comme vient de le refaire la Tunisie discrètement. On met un régime islamique en place et immédiatement, la Tunisie qui était sortie de la dette depuis 2007, réemprunte 500 millions de dollars de fausse monnaie américaine de Wall Street dont elle n’a pas besoin, mais pour l’enchaîner, etc. Donc, on voit que chaque fois qu’un chef d’État comme Kadhafi, qui était un des sept pays qui n’avaient pas de dettes, ou l’Iran, qui est un des sept pays qui a des fonds souverains et qui n’a pas de dettes, ne se soumet pas à la logique de la dette, c’est-à-dire n’emprunte pas des dollars pour devoir des intérêts au système américain qui est le couplage du complexe militaro-industriel et de Wall Street, c’est-à-dire des banquiers avec des hommes armés derrière eux pour que vous signiez là où il faut signer, chaque fois que le mec désobéit, au nom des « droits de l’homme » – la mécanique est toujours la même –, on vient lui péter la gueule et lui piquer son argent. Avec une mécanique très simple. C’est-à-dire qu’on renverse son régime au nom des « crimes contre l’humanité » qu’il aurait fait alors qu’en général, il se défend plus ou moins d’agressions. On lui gèle ses avoirs bancaires dans un système bancaire mondialisé et unifié, contrôlé par Wall Street, les Américains. On lui gèle ses avoirs bancaires et on les transfère au mouvement révolutionnaire soi-disant légitime, c’est-à-dire aux copains des banquiers américano-anglais.
C’est ce qu’ils sont en train de faire en partie avec l’argent d’Assad. C’est ce qu’ils ont fait avec l’argent de Kadhafi. Ce qui veut dire, en fait, aussi, que ce système bancaire financier en crise et qui a énormément perdu d’argent par les subprimes, etc., fait aussi de la piraterie bancaire en permanence. C’est-à-dire qu’ils vont voler l’argent des pays bien gérés, en réalité, et qui n’ont pas de dettes. Il y a aussi cette dimension, notamment dans l’affaire iranienne. C’est qu’à un moment donné, il s’agira aussi pour des banquiers avec des militaires derrière eux, d’aller piquer partout où ils peuvent, non seulement les marchés, les matières premières sur lesquelles on peut faire de l’argent, mais aussi les réserves bancaires des pays insoumis.
Et c’est toute cette compréhension globale qu’il faut avoir, que j’appelle moi l’« Empire », et qui permet de comprendre les enjeux actuels, la géopolitique mondiale, avec toujours le prétexte des « droits de l’homme » qui est l’American way of life, en réalité, toujours ce qu’on appelle la promesse du Mayflower, c’est-à-dire qui est le messianisme proprement protestant américain. C’est-à-dire d’imposer au monde entier la vision du monde libérale chrétienne qui fonde le protestantisme typiquement américain, et qui n’est pas le luthérianisme originel ou même le calviniste au sens strict. C’est vraiment un produit spécifique. Exactement comme il y a le catholicisme gallican qui est un produit spécifiquement français. Ça aussi, souvent, j’insiste.
La France est catholique. Le catholicisme est totalement consubstantiel à la France ; la France fille aimée de l’Église. Le catholicisme n’est pas la religion seulement de Jésus-Christ. C’est par une série de médiations quelque chose de totalement lié à l’humanisme français que j’appelle, moi, l’helléno-christianisme, avec la médiation romaine, etc., etc. Il faut apprendre en fait à. Là, je vais un peu vite, mais pour ceux qui ont du mal à suivre, il faut lire le bouquin. Tout est dans le bouquin. Il faut comprendre ces médiations.
Quand je parle d’union aujourd’hui judéo-protestante contre une union possible parce qu’elle est dans les écritures et parce qu’elle est logique, même si elle sera très difficile à effectuer, que j’appelle, moi, catholico-musulmane, ça correspond, effectivement, à deux visions du monde articulées où, effectivement, ce sont des échafaudages idéologiques.
C’est-à-dire souvent les gens me reprochent en disant : pour comprendre l’idéologie protestante américaine, [il faut] aller lire Luther ou Calvin. Non ! Il faut écouter ce que dit George Bush. Il faut écouter ce que disent les télévangélistes américains. Il faut regarder les alliances. Et ce qui est sûr, c’est que dans cet empilement de logiques et d’explications, on a bien aujourd’hui, aussi, un monde judéo-protestant qui se définit par deux religions qui ont réadmis l’usure officiellement, face à un monde qui, finalement, est le monde qui résistait à l’usure ou qui avait honte de l’usure, et qui est le monde catholique et le monde musulman. Même si derrière, effectivement, tout ça est détourné. On le sait, etc. Mais c’est quand même important parce que c’est finalement un monde qui a soumis la religion à la logique de la prédation économique, et des mondes qui ont encore du mal à assumer totalement le monde de la prédation économique parce que leur religion garde encore cette dimension critique. Et c’est ce que j’explique.
Ce n’est pas pour rien que Paris n’était que la sixième place boursière d’Europe par rapport, par exemple, à Londres. Parce qu’en fait, il est plus difficile. Et pour ça il suffit de lire la littérature française et notamment, Bernanos, Mauriac. Finalement, un bourgeois catholique est quelqu’un qui souffre. Il y a une contradiction interne. Un bourgeois protestant, non. C’est tout à fait possible d’être un bourgeois protestant. Un « bourgeois catholique », ça sera toujours compliqué. C’est pour ça que, moi, je m’intéresse beaucoup aux processus économiques, à la géopolitique, mais aussi aux vraies idéologies qui sont les religions.
Les religions sont, qu’on croit ou pas, des systèmes de valeurs. Ce sont des hiérarchies de valeurs.
Et moi, je crois à la convergence de la vision catholique et musulmane parce qu’il y a quand même cette gêne par rapport au prêt à intérêt, à l’usure, que c’est haram, l’usure. Et c’est haram pour les musulmans et pour les catholiques. Alors que dans le monde protestant et juif, c’est au contraire. On accumule de la richesse pour la plus grande gloire de Dieu.
Piero San Giorgio – C’est péché.
Alain Soral – Et c’est même ce que Dieu vous demande de faire quand vous faites votre Bar Mitzvah. C’est un projet de réussite. C’est qu’est-ce que je vais faire dans ma vie pour réussir dans le monde tel qu’il est, dans le monde économique. Donc, c’est toujours un projet de réussite économique. Ce que d’ailleurs je ne critique pas spécialement. Mais il faut l’établir.
Et donc, quand on articule toutes ces visions, on a bien, effectivement, un monde que j’appelle judéo-protestant, que j’appelle thalassocratique, c’est-à-dire le monde de la mer, c’est-à-dire le monde de l’Angleterre et des États-Unis, la mer – pas la maman, l’eau – face à ce qu’on appelle le nomos de la terre chez les géopoliticiens, c’est-à-dire le monde de l’Europe, dont le nœud, d’ailleurs, on le sait, est au niveau de la Caspienne. Donc, on a bien cette lutte du monde thalassocratique contre ce monde continental, cette lutte du monde judéo-protestant contre ce monde catholico-musulman, qu’on voit très bien d’ailleurs, aujourd’hui.
C’est pour ça que je m’intéresse beaucoup à Nasrallah, à ce qui se passe au laboratoire qu’est le Liban. Comme chacun sait, je suis allé rencontrer Nasrallah, à l’époque. Enfin, je n’ai pas pu le voir parce qu’il était dans un bunker, caché quelque part. Et j’ai vu son numéro deux et rencontré le général Aoun.
C’est que les Libanais qui ont subi entre 1975 et 1990 une destruction totale de leur pays par des manipulations sionistes où on a armé des milices musulmanes et des milices chrétiennes via les Gemayel, les maronites, ils ont vu ce que c’était de se faire piéger dans un conflit de civilisations ethnico-religieux qui a détruit le pays et qui a fait du Liban, qui était une place bancaire, un pays prospère, et un pays rival d’Israël, et en plus un pays multiconfessionnel moderne, quelque chose qui a été détruit par ce qu’on appelle la « balkanisation », c’est-à-dire monter les communautés les unes contre les autres, etc.
Et ce n’est pas pour rien si c’est au Liban, qu’à un moment donné, le général Aoun et Nasrallah se sont mis à travailler ensemble parce qu’ils ont analysé ce piège. Parce qu’on comprend toujours mieux quand on a fait quinze ans de bêtises et que ces bêtises vous sont entièrement tombées sur la gueule ; on finit par devenir un peu intelligent.
C’est ce que j’appelle, moi, les « idéologies fonctionnelles ». C’est qu’à un moment donné, l’homme étant un animal pratique, quand il fait des choses qui lui provoquent des douleurs terribles pendant quinze ans, au bout d’un moment, c’est comme le chien de Pavlov, ils finit par moins les faire.
Et quand vous parlez à des Libanais, ils savent exactement ce qui est arrivé à leur pays, qui a mis de l’huile sur le feu, qui a joué sur les tensions. Parce que c’est toujours pareil. Je le dis bien. Les sionistes ne fabriquent rien, mais ils savent pertinemment, dans une logique de diviser pour régner, analyser les lignes de fracture et les points de fragilité. Et au lieu de jouer la paix dans une logique effectivement chrétienne ou sainement coranique, ils sont toujours en train de mettre de l’huile sur le feu pour se dire que c’est là que ça peut péter. Comme un dynamiteur sait mettre la charge dans la faille de la roche pour la faire péter.
Nous vivons ça en ce moment en France, pour ceux qui s’intéressent à la France. On a organisé en France une immigration de peuplement maghrébine et musulmane. On a d’abord dit que c’était des « chances pour la France » et on les a appelés les immigrés. Et puis à un moment donné, quand on a rempli le pays, on les a éduqués contre les Français de souche qu’on a désignés comme systématiquement collabos, racistes, etc. À un moment donné, nos maîtres qui ne sont pas très contents que je vienne parler en ce moment chez vous ont retourné les alliances. C’est-à-dire qu’au lieu de traiter le Français de raciste parce qu’il n’est pas très content de voir des immigrés dont il n’avait pas vraiment besoin puisque le regroupement familial se fait après 1975, c’est-à-dire au moment où nous n’avons plus besoin d’immigration pour le travail. Donc, on fait venir des gens, on les éduque dans l’hostilité, on humilie les natifs, et puis à un moment donné, on inverse les alliances. C’est ce qui se passe depuis la loi sur le foulard, qui fait d’ailleurs qu’il faut toujours faire très attention quand vos privilèges, vous les devez à une certaine communauté. Parce qu’en général, ça finit toujours par se retourner.
C’est quelque chose qu’il faut bien maîtriser au niveau moral et politique. Quand vous devez vos privilèges à une certaine communauté, en général, ça veut dire que c’est très dangereux.
Parce que depuis la première loi sur le foulard, comme je l’avais déjà écrit, à l’époque – j’avais écrit « Ce que cache le foulard » –, je savais par une réflexion profonde et par des gens qui me l’avaient dit, notamment le professeur Schwartzenberg ; il m’avait dit la communauté organisée puissante a décidé de retourner ses alliances et va jouer maintenant le Français de souche contre l’immigré qui ne sera plus un immigré, une « chance pour la France », mais un « dangereux musulman délinquant ». Et nous le vivons en ce moment pleinement, tous les jours, en France. Et ce qui veut dire que c’est un laboratoire intéressant par rapport à ma démonstration.
Nous sommes en France dans une crise violente sociale qui normalement devrait s’analyser en termes de rapport de classes, et qui devrait produire une solidarité des pauvres chômeurs et des pauvres exploités contre leurs élites traîtres sur le plan, et géopolitique, et capitalistique, puisqu’on voit bien que toutes les élites françaises sont des agents américains et des agents sionistes. J’espère que vous le savez. Ils sont tous sionistes et proaméricains, et à gauche, et à droite. Eh ben, au lieu que se produise une solidarité, eh ben grâce à l’ethnicisation et grâce à ce travail qui a été fait sur le peuple de France par une immigration forcée, aujourd’hui, on horizontalise les crises. Ce qui est la stratégie systématique de défense de l’oligarchie en danger. C’est-à-dire qu’au lieu que les pauvres se fédèrent ensemble, et qui sont en banlieue – en banlieues, il y a les pauvres blancs et les pauvres d’origine immigrée de confession musulmane –, au lieu qu’ils se fédèrent contre leur bourgeoisie traître dominante et qui les met au chômage, eh ben, on les fait se taper sur la gueule les uns les autres par le conflit de civilisations et la guerre de religion.
Et en France, tout ça est fait en ce moment, scientifiquement, en permanence. L’affaire Merah [Tueries de Toulouse et Montauban, mars 2012] a été une des articulations clés de cette affaire-là. Et ça, c’est l’analyse globale du piège qui nous est tendu.
Une crise économico-sociale violente de plus en plus ingérable qui devrait normalement déboucher sur une lutte des classes entre pauvres exploités et riches exploiteurs, les riches étant d’ailleurs des prédateurs nomades souvent pratiquement plus français. Attali dit bien qu’il faut considérer les nations comme des hôtels, qu’il est fier de ne vivre que dans des aéroports. Tout ça s’articule assez facilement. Et ces gens-là qui savent qu’ils sont les responsables de la crise.
Ceux qui ont vu ma dernière vidéo, il y a la fameuse plaisanterie d’Attali du marchand de pantalons à une jambe pour Christian. C’est-à-dire que c’est une plaisanterie qui dit tout. Ces gens-là disent tout en privé. Le type, il a le chapeau sur la tête, il dit : voilà, Moshe fait un pantalon a un euro, il le vend à machin. Alors, il y a une liste de noms hébraïques ; il y en a quinze. Et au bout, à quarante-neuf dollars, c’est-à-dire celui qui s’est fait baiser quarante-huit fois, à peu près, c’est Christian, c’est-à-dire le crétin de chrétien qui, lui, achète à quarante-neuf dollars le pantalon à une jambe, qui appelle et qui dit : mais tu m’as vendu un pantalon à une jambe dont je ne peux rien fait !? Et l’autre lui dit : mais tu es idiot, ce n’est pas fait pour porter, c’est fait pour acheter, c’est pour vendre, c’est pour acheter, c’est pour vendre. Et Attali est tout fier de dire : voilà, là, vous avez tout compris à l’économie actuelle.
Je suis désolé, mais quelqu’un qui vous vend à quarante-neuf dollars des pantalons à une jambe, normalement, on doit se réunir tous, et on doit le pendre à un arbre parce que c’est le responsable de la crise. Or, aujourd’hui, ce sont nos maîtres. Et ces gens-là vous disent : le problème, c’est le musulman.
Ce qui ne veut pas dire d’ailleurs qu’il n’y a pas de problèmes avec l’Islam, un Islam qui arrive en terre catholique, avec des gens socialement dominés, issus de pays anciennement colonisés. On a additionné un nombre de facteurs explosifs en France qui demande une énorme intelligence, un énorme sens moral pour pouvoir passer au-dessus de cette crise. Et je pense d’ailleurs qu’on n’y arrivera pas. D’où le rôle de Piero pour nous dire après où il faut aller se cacher, parce que je pense même moi, qu’à un moment donné, je pourrais même plus faire le médiateur. À un moment donné, ça sera trop dangereux. J’aurais intérêt à me barrer, aussi.
Mais en tout cas, on a mis en place pratiquement machiavéliquement une situation super-explosive qui fait, effectivement, qu’au lieu que des gens exploités par une élite identifiable qui est d’ailleurs composite. Attention, moi, je parle des ses noyaux durs, mais c’est la coalition des oligarchies.
Si on veut d’ailleurs dire c’est quoi l’oligarchie : c’est effectivement, le système bancaire, mais c’est aussi le complexe militaro-industriel, le complexe pharmaco-chimique, le complexe agroalimentaire. En dernière instance, tous ces gens-là sont ensemble : il y a des Juifs, des protestants, quelques aristocrates catholiques encore. Et voilà, ce sont la coalition des prédateurs. Mais moi, ce que je dis, c’est que leur idéologie, en dernière instance, renvoie à l’Ancien Testament. Et aussi leur eschatologie, c’est-à-dire leur projet. Leur vision renvoie à cette idée d’accomplir le projet biblique. Qu’est-ce qui rassemble Netanyahou et les bushistes ? C’est qu’ils ont cette même vision. Ils pensent à l’Armageddon. Donc, c’est ce qui me permet, moi, de produire ces catégories, et de dire qu’il y a des noyaux durs en dernière instance aussi communautaires et idéologiques.
Et donc, on est bien dans une crise bancaire et de surproduction aggravée qui désigne clairement des responsables qui eux-mêmes savent que s’ils ne font pas quelque chose pour dévier la colère sur un bouc émissaire, c’est eux qui vont finir par se faire attraper. Et qui, comme ils sont très prévoyants et intelligents – car on peut tout leur reprocher mais surtout pas de les prendre pour des imbéciles –, effectivement, ils ont mis en place un système de ce qu’on appelle de déviation de colères, la théorie du bouc émissaire, et d’horizontalisation des violences qu’ils sont en train de créer, à la fois à l’échelle nationale française.
Je ne sais pas comment c’est chez vous. Vous y échappez un peu. Mais en France, on est en train de monter le Français de souche contre le Français d’origine immigrée avec la question des banlieues, etc., etc., qui en plus a une légitimité. C’est-à-dire qu’il y a. C’est instrumentalisé, mais il y a une colère populaire française, il y a une délinquance qui a été énormément favorisée pendant des années.
N’oubliez pas que des groupes comme NTM, « Nique Ta mère », c’est-à-dire la mienne, ont été aidés, culturellement et économiquement par Jack Lang et le ministère de la Culture, à l’époque. On a poussé ces gens-là à la voyoucratie. On a systématiquement aidé les rappeurs qui insultaient les Français de souche et la police, etc., et systématiquement mis sur la touche ceux qui faisaient des chansons sur la Palestine. Il faut le savoir : le rôle de Skyrock, etc., à qui appartiennent ces réseaux, etc.
Je crois qu’il y a le même constat à faire sur le rap américain. Quand on regarde qui finançait le rap américain. On trouve très peu de Noirs américains derrière. Et c’est toujours le même genre d’instrumentalisations.
Et nous sommes à peu près là. C’est-à-dire qu’au niveau français, on nous amène à une guerre civile entre Français de souche et Français d’origine immigrée de confession musulmane avec des, pareil, des faux salafistes.
J’ai bien étudié la question, moi. Souvent ces petits groupes de salafistes français sont des paumés – à juste titre – qui sont manipulés par un type qui a été converti en prison et qui, en fait, est tenu par la police, et qui est un délinquant sur le modèle de ce que faisaient les services algériens avec le GIA, pour ceux qui connaissent, à l’époque de la guerre civile algérienne des années quatre-vingt-dix. Donc, on a bien un système pour faire monter les colères et les provocations.
Avec de l’autre coté tous les intellectuels français qui passent encore dans les médias, que ce soit de gauche ou de droite, qui sont aujourd’hui antimusulmans. Le truc, c’est : l’islam qui est problème ; et donc anti-immigrés, puisque le musulman, c’est l’immigré. Donc, tout ça a déjà été admis par la population française, que l’immigré était le problème et que le musulman était le problème et qu’il va falloir régler le problème. On a déjà vendu tout ça. Et c’est fait à gauche au nom de la laïcité, de la défense de la laïcité contre l’obscurantisme religieux. Et là on montre toujours : un, l’islam ; deux, le catholicisme ; jamais le judaïsme. Vous verrez. Alors que c’est la matrice de tous les monothéismes et que tout ce qu’on peut reprocher à l’islam est dans le Lévitique, pour ceux qui [inaudible] les religions. Donc, c’est bien fait comme ça. On montre d’abord l’islam, après le catholique, avec toujours le truc de taper sur les curés, etc. C’est le vieux fond de commerce de Charlie Hebdo.
Et de l’autre côté, à droite. Donc, à gauche, ça fait Charlie Hebdo. Et à droite, on a effectivement Finkielkraut, Zemmour qui eux tendent la main à la vieille extrême droite française comme ils le font partout en Europe, en Hollande, en Belgique avec le Vlaams Belang, en Angleterre. C’est-à-dire qu’on a un travail à gauche et un travail à droite pour faire l’union sacrée des bourgeoisies judéo-chrétiennes, en gros, ou des vieux libéraux libertaires qui sont toujours les libertaires au service du libéral, c’est-à-dire la lutte contre les interdits religieux et la morale au nom de l’idéologie transgressive – et là vous avez Charlie Hebdo, vous aurez peut-être Cohn-Bendit demain, mais il est assez malin pour l’instant pour se tenir un peu en retrait –, donc, cette espèce de coalition gauche-droite pour montrer effectivement du doigt le problème. Et ça, c’est la situation française.
Et on a la même au niveau mondial avec, en ce moment, très précisément, l’opération syrienne où il y a la même malhonnêteté. C’est qu’à la fois, nos maîtres nous disent que le gros problème au monde, c’est le salafisme, c’est-à-dire l’islam radical. Mais partout, ils essayent de lui faire prendre le pouvoir, notamment par exemple en Syrie où c’est un régime en réalité laïque, multiconfessionnel, pour ceux qui connaissent la Syrie. Même s’il y a une minorité alaouite qui a le pouvoir, c’est un pouvoir partagé comme dans tous les pays arabes, car dans cet Orient « complexe et compliqué », comme disait de Gaulle, ce sont toujours des consensus. Il ne faut pas oublier que derrière la mosquée, il y a toujours le souk, et qu’en fait l’islam est un empire de commerce, il ne faut pas oublier, majoritairement. Ça fonctionne aussi là-dessus. Et que vous avez toujours dans le souk les Juifs, les chrétiens et les musulmans, qui commercent ensemble.
Et que c’est depuis le sionisme qu’il y a des problèmes, alors qu’en réalité, ça fonctionnait depuis des siècles et des siècles.
Donc, vous avez bien aujourd’hui des idéologues qui vous disent que le gros problème, c’est l’islam radical, mais qui, que ce soit en Libye ou en Syrie, font tout pour que cet islam radical prenne le pouvoir politique dans des pays arabes qui étaient encore des pays issus de la décolonisation, qui étaient des pays plutôt laïques avec droits des femmes, protection des minorités chrétiennes. Et on essaye de foutre en l’air ces régimes. C’est pour ça que, moi, je dis à un moment donné, que c’est forcément un projet sioniste, parce que ce n’est même pas l’intérêt des chrétiens. Ce n’est l’intérêt que des sionistes. Notamment en Syrie, c’est une évidence.
Et donc, on a bien ce mensonge. On vous dit que le vrai danger, c’est l’islam radical. Et on aide partout l’islam radical à s’implanter au Moyen-Orient, à prendre le pouvoir. Parce que là aussi, on pourrait en discuter : c’est un moyen de détourner les colères, de contrôler, etc., etc. Et on voit que derrière cet islam radical, quand on remonte, on a l’argent du Qatar, l’idéologie saoudienne. Et comme vous le savez, le Qatar est une base américaine, est un pays qui n’existe pas. L’Arabie saoudite est une création anglo-américaine qui renvoie aux accords de Quincy pour ceux qui savent bien. Et les Saoudiens et les Américains sont la main dans la main sur la question du pétrodollar, puisque les Saoudiens n’existent que grâce aux Américains, et le dollar n’existe plus que grâce au pétrodollar. Donc, on voit bien que tout ça – là, je vais vite –, que tout ça est très articulé. Et on a donc ce mensonge : le danger, c’est l’islam radical, mais on essaye de le faire s’implanter partout.
Systématiquement qui est victime de cet islam radical ?
Les populations pauvres de ces pays-là qui sont en général. Les gens ont fait la Révolution de jasmin en Tunisie et en Égypte pour des raisons sociales. Pour l’instant, ils ont rien vu venir sur le plan social. Mais on leur a juste donné une petite illusion culturelle de réislamisation, qui est aussi un moyen de contrôle de la vie quotidienne des gens pour ne pas qu’ils se révoltent, à travers la mosquée. C’est en général, on leur botte le cul. C’est de la milice réactionnaire, il ne faut pas oublier, de ce point de vue-là.
Donc, on a bien cette logique-là : islamisation radicale en même temps qu’on dit que c’est la danger, pour créer, effectivement, au niveau mondial, cette guerre des chrétiens contre les musulmans, qui en dernière instance, qu’on appelle judéo-chrétiens contre monde barbare – c’est comme ça que ça nous est présenté aujourd’hui même à New York – et qui à la fin, quand on articule tout, voit finalement les deux grands empires occidentaux qui sont les Russes et les Américains se retrouver finalement face à face avec.
Là, c’est le dernier étage de ma fusée explicative, mais celle où je prends le plus de risque sur la spéculation : c’est que ça, c’est le projet sioniste final, c’est ce qu’on appelle la « parabole des coqs » chez le rabbin Rav Ron Chaya. C’est-à-dire, effectivement, qu’on pousse dans une Troisième Guerre mondiale les Américains et les Russes à travers des alliances à s’épuiser dans une guerre pour le contrôle de la Caspienne et du Moyen-Orient. Et que de cette guerre mondiale épuisante, qui peut déboucher sur 500 millions de morts, sortira une Pax Judaica et qui déterminera dans une espèce d’Onu d’après-guerre où tout le monde voudra se réconcilier à tout prix, qui décrètera Jérusalem « capitale du monde pacifié », ce qui est le vœu d’Attali.
Et on fera de cette région, pour éviter l’embrasement, une région sous contrôle effectivement de la puissance victorieuse, et occidentale, et judéo-chrétienne, qui sera comme par hasard, la puissance israélienne qui donc annexera discrètement au nom de la « paix mondiale », ce qui lui permettra de faire le Grand Israël, c’est-à-dire un territoire de l’Euphrate au Nil, et qui est le seul Israël viable sur le plan, viable en tant que pays autonome et non pas en tant que pays qui vit uniquement des aides américaines, puisqu’ils auront à la fois le contrôle de l’eau, du pétrole, ils seront au carrefour de toutes les ventes d’énergie.
C’est pour ça aussi qu’il y a des enjeux très forts en ce moment, des pipelines, etc., qui sont creusés et qui demandent la chute de certains régimes, pour pouvoir aller jusqu’à Haïfa, etc.
Quand vous étudiez, vous verrez que tout s’articule : le religieux, l’économique, le géopolitique. C’est une belle construction. Et ça, c’est le projet final, à mon avis : c’est Jérusalem, capitale du monde ; le Grand Israël qui sera le lieu, finalement, après l’effondrement des États-Unis et de la Russie, exactement comme la France et l’Allemagne se sont épuisées dans des guerres pour donner le leadership mondial aux États-Unis puisque la France et l’Allemagne, c’était l’Europe. Donc, on aura finalement, à une échelle supérieure. La Deuxième Guerre mondiale, c’était la France et l’Allemagne qui à travers deux guerres mondiales, les deux peuples, les deux grands peuples d’Europe qui s’annulent réciproquement. On aura les deux grandes civilisations occidentalo-chrétiennes – n’oubliez pas que ce sont deux civilisations occidentales et chrétiennes, de Blancs occidentaux et chrétiens – qui s’épuiseront dans une lutte, et qui amènera finalement Jérusalem capitale du monde, le Grand Israël que, et les laïques juifs, et les religieux, appellent de leurs vœux. Ils le disent de la même manière. Et pour demain. La prière pour le Machia’h, c’était le 25 septembre [prière internationale pour le Machia’h du 23 septembre 2012]. On est en plein dedans. Ce n’est pas dans quinze ans, dans vingt ans. C’est maintenant. Et les types qui osent employer des mots comme l’Armageddon, etc.
On voit bien qu’aujourd’hui, on a une convergence du politique et du religieux qui est très, très, très, très présente et très, très, très, très, très, très évidente. Et donc, ça serait ça, disons, l’objectif final. Ça serait cette Troisième Guerre mondiale qui amènerait à cette domination.
Et là, je fais une petite parenthèse pour éviter de me faire trop emmerder par certaines. C’est que serait sacrifié dans cette logique-là aussi l’Israël tel que nous le connaissons. Car en fait, on voit bien qu’Israël est une construction artificielle dont finalement le gros problème, c’est le peuple israélien, le petit peuple israélien qui est un handicap pour le projet sioniste final. Parce qu’on le voit en ce moment, il y a des antagonismes de classes profonds, il y a des tensions entre religieux et laïques. C’est un pays profondément invivable pour des tas de raisons, parce que c’est un pays artificiel. Et ce qu’il faut bien comprendre d’ailleurs, c’est que deux Israéliens sur trois sont contre la guerre contre l’Iran. Les militaires aussi, c’est-à-dire ceux qui savent comment ça va se passer. Mais ceux qui veulent cette guerre sont les élites comme Netanyahou qui, je le rappelle, est un avocat américain.
C’est-à-dire qu’en réalité, Israël, en dernière instance, est un peu comme une équipe de foot pour un oligarque russe. Voyez. C’est une vitrine. Mais en réalité, on peut la sacrifier du moment que Jérusalem devient la capitale du monde et qu’Israël est une sorte de Commonwealth, c’est-à-dire le lieu de là où est piloté le reste des succursales. Mais finalement, ce qui est inutile et résiduel, à la fin, c’est le petit peuple israélien.
Il fallait la fiction d’un « Israël socialiste », au départ, avec les kibboutz qui étaient des vitrines et qui d’ailleurs sont inutiles et ont disparus. Mais à la fin, on peut imaginer même dans le projet fou de Netanyahou et des élites, je dirais, « apocalyptiques » qui sont aux États-Unis, que même dans ce projet soit sacrifié l’immense majorité du peuple israélien. Ce n’est pas un problème du moment que le projet final est accompli, c’est-à-dire le Grand Israël, qui n’a pas besoin d’une population d’une certaine manière, puisque ça sera un pays de. Ça sera en fait, je dirais, comme un paradis fiscal. Vous voyez. Et c’est ça qu’il faut comprendre. C’est qu’en dernière instance, on peut même imaginer avoir comme allié dans ce combat [le petit peuple israélien], dont le but n’est pas de la rigolade. C’est d’éviter la Troisième Guerre mondiale. C’est pour ça que je prends certains risques aujourd’hui. C’est que je ne suis pas en train de parler de choses anecdotiques. Nous sommes face à un danger de Troisième Guerre mondiale.
Et cette guerre aura lieu ou pas en fonction de la manière dont nous réagissons à des provocations et à des stimulations qui sont essentiellement émotionnelles. Je le dis.
Le jour, en France, où ils voudront que la guerre civile démarre, ils mettront sur YouTube un jeune salafiste de banlieue style Mohammed Merah, qui égorgera au couteau de cuisine un retraité français en pantoufles charentaises qui s’appellera Lefèvre. Voilà. Et quand on verra ça, le lendemain, même moi, je ne pourrais plus rien dire. Ça va partir dans tous les sens. Et ça, ça se fait quand on veut. C’est très facile à faire.
Et donc, cette guerre sera évitée ou pas en fonction des réactions affectives et morales que nous serons capables d’avoir. Ce qui demande, effectivement, une certaine culture, un certain équilibre intérieur. Je pense que – je le dis honnêtement – qu’on n’y arrivera pas, mais qu’il est quand même nécessaire de faire ce travail.
Moi, je pense que les puissances opposées sont très fortes. C’est pour ça que moi – je vais finir là-dessus –, moi, je fais mon travail. Je dis : je pense que, voilà quel est le piège ; comprendre l’Empire, c’est aussi comprendre le piège dans lequel il ne faut pas tomber, c’est comprendre quels sont nos ennemis – pour reprendre les termes de Carl Schmitt – quels sont nos ennemis principaux, nos ennemis secondaires. Moi, c’est ce que je dis. Je ne suis pas baboucholâtre et je n’aime pas spécialement les musulmans. Ce n’est pas ça. C’est que je vois qu’il y a des pièges qui nous sont tendus et qu’il est urgent de ne pas tomber dans certains pièges, et de ne pas confondre quelqu’un avec qui on n’a pas forcément beaucoup de sympathie mais qui n’est pas le problème majeur, avec les problèmes majeurs. Voyez. C’est une question de hiérarchisation des problèmes pour agir intelligemment.
Parce qu’en fonction de cette réaction plus ou moins intelligente il y a, je dis bien, un chaos : Première Guerre mondial, 20 millions de morts, Deuxième Guerre mondiale, 50 millions de morts. C’était de la rigolade par rapport à ce qui nous attend, où si vous regardez bien comment ça va démarrer. Israël attaque l’Iran. Le Pakistan a dit qu’il se mettait du côté de l’Iran. La Syrie doit tomber, évidemment, parce que ça marche ensemble. Donc, les Russes rentrent là-dedans. La France se met directement à attaquer l’Iran. Vous avez vu Fabius, l’hystérie, etc. Le Pakistan est lié, donc, l’Inde est liée aussi. La Chine, évidemment, est partie prenante parce que ça lui coupe ses approvisionnements énergétiques. Les États-Unis sont impliqués. Immédiatement les États-Unis attaquent aussi le Venezuela parce qu’ils vont en profiter pour botter le cul de Chávez et remettre, et bloquer le cul des coalitions d’Amérique latine qui sont en train de leur échapper. Donc, là, on sera dans une vraie guerre mondiale.
En fait, il n’y en a jamais eu de « guerre mondiale ». Celle-là va être vraiment mondiale. C’est-à-dire qu’à part peut-être l’Islande et peut-être certains pays scandinaves, vous pouvez regarder la liste des pays qui très, très vite, dans une logique de dominos, seront impliqués. On est dans une guerre avec les armements qui existent, etc., à 500 millions de morts.
Donc, c’est pour ça qu’il est urgent de bien comprendre le problème, urgent d’être raisonnable. Mais comme je pense que, malheureusement, pour des raisons de domination médiatique, de puissance militaire américaine, d’abrutissement des masses, etc., etc., malgré les efforts que je fais et qu’on fait, on ne va peut-être pas y arriver, au cas où on n’y arriverait pas, je passe la parole à Piero : c’est comment survivre quand même. Voilà. Voilà.
(Applaudissements)
Questions du public
La morale des un pour cent
Alain Soral – Qu’est-ce qui nous reste comme temps ? Parce que je pense qu’il y a des gens qui ont envie de poser des questions, de dialoguer. On a encore du temps ? Je pense que les gens, quand ils ont entendu deux personnes parler pendant longtemps, ils ont envie de participer.
Piero San Giorgio – Ou se pendre puisque c’est tellement des mauvaises nouvelles.
Alain Soral – Donc. Voilà, oui.
Public (a) – J’aimerais avoir votre avis, Monsieur Soral, sur la consécration de notre Premier ministre à New York.
Alain Soral – Je dois vous dire que je ne suis pas très au courant, là, parce que comme je suis en mouvement, il faut plutôt que vous me disiez qu’est-ce qui s’est passé.
Public (a) – Il ne s’est pas présenté à l’Onu. Il a plutôt, comment dire, critiqué Ahmadinejad et l’Onu. Et par contre, il a accepté un trophée, un honneur, comme étant le chef d’État de l’année, par Henry Kissinger.
Alain Soral – Ah oui !
Public (a) – Et un rabbin d’origine dont j’ai oublié le nom.
Piero San Giorgio – Une consécration !
Alain Soral – Oui, ben, on voit en ce moment, quand même, que ces catégories que j’ai produites et qui me valent certains ennuis sont quand même assez valides quand on voit ce qui se joue justement aux Nations unies. Et moi, ce qui me choque beaucoup d’ailleurs, c’est quand on voit – bon, je pense qu’ici tout le monde n’est pas au courant –, c’est qu’il y a une telle malhonnêteté aujourd’hui au niveau de nos élites dirigeantes, puisqu’en fait, c’est les gens qui sont censés nous représenter qui nous représentent aussi mal, qu’ils sont capables – bon, ça, c’est une petite remarque – de complètement trafiquer les traductions des discours d’Ahmadinejad pour lui faire dire autre chose que ce qu’il dit. Parce qu’en fait, quand on écoute les vrais discours d’Ahmadinejad, on ne peut qu’être d’accord.
Et ce qui est incroyable, c’est quand j’écoute Ahmadinejad, je vois un homme de paix totalement raisonnable qui dit des choses que je cosigne à cent pour cent. Et quand je vois Netanyahou arriver avec son petit dessin avec sa bombe, je dis : c’est un crétin, un fou dangereux, et il nous prend pour des imbéciles. C’est incroyable ! On n’oserait même pas faire ça dans un exposé de CM2. Je ne sais pas comment ça marche ici [inaudible].
Ça veut vraiment dire que ça va très, très mal et que ça se voit terriblement. Et c’est parce que ça va très, très mal et que ça se voit terriblement, que je pense que la solution de ces gens-là, c’est de nous coller la guerre le plus vite possible. J’en suis vraiment persuadé. Netanyahou veut la guerre à tout prix, puisque s’il n’y a pas la guerre rapidement, ça va mal finir pour lui. C’est ça.
Et je ne réponds pas à votre question. Mais c’est un peu ça le contexte actuel. C’est que vous avez un chef d’État aujourd’hui qui vous déshonore complètement, qui reçoit un prix qui n’a aucun sens, remis par des mains totalement illégitimes et ultra-minoritaires.
Parce que j’insiste quand même pour faire remarquer que quoi qu’on pense de la communauté juive, ça représente, je pense, chez vous, moins de un pour cent de la population. Chez nous, moins de un pour cent. Et c’est moins de un pour cent de la population qui dicte la conduire à quatre-vingt-dix-neuf des autres. Et souvent on se dit : au nom de quelle supériorité morale ?
Moi, à un moment donné, je me suis posé la question. Je suis allé lire l’Ancien Testament, et j’ai vu que c’était une apologie de la purification ethnique au nom de la supériorité raciale. Y’a pas de quoi s’extasier. Ce n’est pas Jésus-Christ, ce n’est pas les Évangiles. C’est Isaïe. Il faut lire, c’est : « Et tu soumettras les Nations ». C’est : tu tueras les hommes, tu violeras les femmes, et tu réduiras les gosses en esclavage. Enfin, je veux dire, ce n’est pas joli, joli.
On comprend d’ailleurs que les lecteurs de l’Ancien Testament aient pu effectivement faire ce qu’ils ont fait aux Indiens ou aux Palestiniens parce qu’effectivement, c’est un projet ultraviolent. Donc, j’ai regardé ce livre-là.
J’ai regardé un deuxième livre qui s’appelait le Talmud en lisant l’introduction du grand rabbin de Jérusalem Steinsaltz, etc. Et ce n’était pas joli, joli non plus ce qui était évoqué dedans.
Donc, ce qui est bizarre aujourd’hui, c’est qu’on a une population hyper minoritaire partout où elle est qui nous donne des leçons morales et des leçons tout court, alors qu’elle-même, quand on regarde sur quelles valeurs elle se fonde, ce n’est ni le Christ, ni le prophète Mahomet – Mohammed, excusez-moi, Mahomet, c’est irrespectueux, je le sais –, y’a pas de quoi la ramener. Et on est dans un monde, aujourd’hui, où tout est un peu à l’envers. C’est bizarre.
Et effectivement, je ne connaissais pas très bien le sujet parce que, là, je suis en mouvement, en ce moment. Mais effectivement, ça fait un peu. Nous, on a eu la même chose à un moment donné, quand Ahmadinejad était venu, et qu’on avait monsieur Prasquier, je crois, le président du Crif, qui avait fait comme ça – il avait tapé dans ses mains –, et tous les diplomates occidentaux s’étaient levés comme les enfants d’une classe et étaient sortis pour montrer leur désapprobation. C’est incroyablement humiliant pour quelqu’un qui appartient à une Nation qui a mille cinq cents ans d’histoire de voir qu’on obéit à un petit cardiologue polonais qui donne des ordres à des chefs d’État et à des Nations entières. Effectivement, ça va mal. Voilà, je vais m’arrêter là-dessus.
On le voit. Aujourd’hui, très peu de gens peuvent dire : Soral raconte n’importe quoi. Il y a dix ans, peut-être. Les gens se disent aujourd’hui : c’est inquiétant parce que ce qu’il dit est de plus en plus crédible. Et d’ailleurs, les gens en face se disent : il n’est pas question de lui porter la contradiction par l’argumentaire ou le logos. C’est : on va lui faire fermer sa gueule en l’agressant physiquement ; on va le faire interdire de conférence. On ne vous porte plus la contradiction aujourd’hui. On vous menace physiquement. On vous fait taire. On vous diffame. On ment sur ce que vous êtes. On dit : ne lisez pas ses livres. Et les gens parfois disent : mais c’est marrant, je n’osais pas lire vos livres parce qu’on m’avait dit que c’était sale. J’ai lu, je ne vois rien à redire de ce que je vois dedans ; je suis même d’accord.
Donc, on voit, aujourd’hui, qu’on est face à des gens très peu nombreux, qui n’ont pas de leçons de morale à nous donner en fonction de leurs fondamentaux, et qui pour lutter contre nous ne font essentiellement que mentir et manipuler.
La question, c’est : combien de temps on va se laisser faire et où cela va-t-il nous mener ?
Voilà tout ce que j’ai à dire sur ce sujet-là.
Le retour des États-Unis à l’indépendance énergétique ?
Public (b) – Ça serait une question pour les deux. À propos d’une vidéo qui a récemment été faite par Hervé Juvin où est ce qu’il parlait d’un retour des États-Unis à l’indépendance énergétique. Et depuis quelque temps, on entend de plus en plus parler de ça. Qu’est-ce que vous en pensez de ça ? C’est un gros coup de pub ou bien à cause du gaz de schiste ?
(…)
Alain Soral – En fait, pour synthétiser, on a eu pendant très longtemps une énergie très peu chère et très efficace qui a permis le développement. Aujourd’hui, rien ne remplace cette énergie si peu chère et si efficace, même le pétrole lui-même quand il coûte beaucoup trop cher à extraire. Et en fait, pour des raisons politiques et économiques, on n’a pas anticipé sur ce moment où il faudrait trouver autre chose. Et quoi qu’il arrive, on va tomber dans une période, dans un certain nombre d’années, où on va plonger, parce qu’il n’y a pas l’énergie alternative d’efficacité égale à coûts aussi faibles. Et ça, tous les experts sont d’accord.
C’est pour ça que de dire qu’il y a du pétrole autant qu’on en veut, c’est vrai. Mais comme il coûte pratiquement plus cher à extraire que l’énergie qu’il produit, c’est à la fois vrai et faux. Voyez ce que je veux dire. Parce que c’est comme ça qu’il faut calculer. Et tous les experts mondiaux savent aujourd’hui, qu’on arrive, à un moment donné, à la fin en fait de ce qu’ils appellent l’« épopée industrielle » qui a été permise par cette énergie qui est le pétrole incroyablement pas cher et incroyablement efficace. On n’a rien qui dans les dix-vingt années qui arrivent remplace à égalité ce truc-là. On n’a que des énergies beaucoup plus chères – l’éolien n’a strictement rien à voir comme efficacité –, beaucoup plus chères, beaucoup plus dangereuses, beaucoup moins transportables. L’électricité, c’est beaucoup plus dur à transporter. L’atome, c’est incroyablement compliqué.
Donc, on va forcément être dans une séquence historique d’un certain temps où on n’aura pas l’équivalent. Et que ça, ça va avoir un coût social et civilisationnel très grand. Alors, après, il y a du baratin, [inaudible]. Mais ça, c’est une certitude.
Et effectivement, si on avait voulu éviter ça, il fallait, il y a trente ans déjà, qu’on décide de faire des transitions énergétiques, de la recherche, d’aller vers les énergies libres – ça existe –, etc. Mais ça demandait une volonté politique qui s’attaquait au lobby tout-puissant énergétique qui eux n’avaient aucun intérêt à se tirer une balle dans le pied, avec toujours cette logique du profit immédiat qui est « après moi, le déluge » et « tant que je gagne, je rejoue ». Et en fait, on est face à une irresponsabilité civilisationnelle due au système libéral qui a ses avantages et ses inconvénients.
C’est que le système libéral fonctionne, comme l’a dit Max Weber, sur ce qu’on appelle le compte d’exploitation annuel. C’est-à-dire que c’est le court terme systématique. Vous ne pouvez jamais faire quoi que ce soit dans le système libéral. Vous pouvez lever de l’argent et faire des tas de choses, mais vous ne pouvez pas dire : investissez dans mon entreprise, ça sera rentable dans quarante ans, ou ça va sauver l’humanité dans cinquante ans. Il faut que ce soit rentable dans le court terme.
Et aujourd’hui, on a une domination de l’économique sur le politique, et donc du court terme systématique qui fait qu’on n’a pas, bien qu’on ait été capable de le prévoir, on n’a pas pu anticiper ce problème de la transition énergétique parce que pour ça, il aurait fallu, en fait, un régime socialiste mondial, c’est-à-dire où on dit : le profit est secondaire et la priorité des politiques au pouvoir, c’est le salut de l’humanité à long terme. Or, ce n’est pas la réalité. Et cette réalité-là fait qu’effectivement, nous sommes face à un problème insurmontable : c’est la disparition demain de l’énergie pas chère et incroyablement efficace. Et ça, c’est une certitude. Et ça va avoir un coût social et donc civilisationnel. Et donc, effectivement de tous les problèmes dont on a parlé qui sont incontournables.
Et tout le reste, effectivement, c’est un peu du baratin, parce que ce n’est pas que l’énergie soit encore disponible, c’est : est-ce qu’elle est disponible au même coût d’extraction en produisant le même multiplicateur. Parce que l’idée, c’est combien ça dépense d’énergie d’extraire, et combien derrière, on produit d’énergie. Et c’est ce ratio-là qui est introuvable, ni par l’éolien, ni par l’atomique, ni par quoi que ce soit. Et les filières dont on peut parler d’énergie libre, les travaux de Tesla, etc., l’ionosphère, tout ça, peut-être, ça existe. Mais, il aurait fallu déjà s’y mettre. Il n’y a pas le consensus politico-philosophique pour que ce soit. Comme si on appuyait sur une manivelle et qu’on change. On passe du groupe électrogène, je ne sais pas quoi. Et d’un seul coup, la lumière s’est éteinte une seconde. Et puis c’est tout. On n’a pas ce truc-là.
Donc, on est forcément face à une crise effectivement qui débouche aussi sur la guerre, puisque cette énergie très peu chère et très puissante disponible, il en reste de moins en moins, et il y a beaucoup qui la veulent. D’où aussi la logique de guerre pour celui qui va se l’accaparer et empêcher les autres de l’avoir. Et effectivement, les Américains aujourd’hui, ils disent : c’est pour nous, on va empêcher les Chinois de l’avoir, les Indiens de l’avoir. Pour ça, on a le militaire et le baratin médiatique. Ça marche toujours ensemble, le militaire et le baratin médiatique. Donc, on parle de « démocratie ». On va piquer toutes les réserves, on bloque la croissance chinoise, etc.
Et on est dans cette séquence-là, effectivement, qui est une séquence, si on la prend par tous les bouts, qui est catastrophique. On n’est pas dans une période d’intelligence et de planification au calme. On est dans une période. Qu’on la prenne par tous les bouts, eschatologiquement, énergétiquement, bancairement, géopolitiquement, civilisationnellement, religieusement, on est dans une période catastrophique.
Vers un possible réenchantement spirituel à la faveur du chaos
Piero San Giorgio – Le seul truc, pas lié mais lié, c’est qu’en fait, ce qu’on vous raconte là, c’est hyper déprimant.
Public (c)– Oui.
Piero San Giorgio – N’est-ce pas ! C’est hyper.
Alain Soral – Ou pas, ou pas, parce que c’est l’aventure aussi.
Piero San Giorgio – Voilà, c’est anxiogène, c’est angoissant. Et peut-être, bon, parce que c’est tard, avec le décalage horaire, mais en fait, moi, chaque fois que je relie mon livre pour les traductions – bientôt il ressort aux États-Unis, etc. –, moi, je trouve qu’en fait, il sort, il y a beaucoup de choses extrêmement positives et intéressantes pour l’avenir. Parce qu’en réalité, il ne s’agit pas de « survivre », bien que le titre, c’est Survivre. Notre projet qu’on peut construire, ce n’est pas du tout la survie : c’est une vie meilleure. Parce que si on arrive à construire cette autonomie dans la durée, par définition, c’est un mode de vie beaucoup plus simple. Par définition, c’est donc un mode de vie avec moins de contraintes consuméristes, moins de contraintes de travail.
Alain Soral – C’est aussi un réenchantement spirituel possible.
Piero San Giorgio – Exactement.
Alain Soral – Parce que de toute façon, il faudra bien compenser ceci par cela. La fin du pétrole, c’est aussi la fin du plastique.
Piero San Giorgio – Ouais !
Alain Soral – Et de la civilisation du plastique. Ce qui veut dire aussi. Le plastique, c’est un matériau ignoble. Enfin, ignoble ça veut dire, « sans noblesse ». Qu’est-ce que c’est qu’un matériau noble ? Le bois. Pourquoi c’est assez joli quand on se balade ici ? Parce que tout est fait avec du bois, et qu’une petite maison même de pauvres canadiens en bois, c’est beaucoup plus joli qu’une espèce de HLM en méthacrylate et de PVC, etc. Donc, il y a aussi cet aspect, pari sur une transformation violente. Il y a aussi, effectivement. De toute façon, on voit bien, on a tous conscience qu’on est à la fin d’un cycle, là, d’une société qui est usée par tous les bouts. Donc, on sait que quelque chose de violent et de brutal nous attend. Mais c’est aussi quelque chose de spectaculaire, quelque chose d’imaginatif.
Piero San Giorgio – Et transitoire.
Alain Soral – Et c’est une aventure. Alors qu’à la limite. Moi, la période la plus dure que j’ai vécue, c’est de 1985 à 2005. C’était ce qu’on appelait « la fin de l’histoire » de Fukuyama. C’était ce qu’il y avait de pire pour quelqu’un qui a une âme, c’était de vous dire, en gros, c’était ça : le monde est pacifié, c’est la Pax Americana généralisée, et le destin pour tous, ça sera piscine et barbecue. Et donc, plus besoin de Dieu, plus besoin de projets, etc. Moi, c’était ma période de plus grande dépression.
Aujourd’hui, il y a danger, mais il y a aussi excitation, il y a aussi projet, il y a aussi espoir, etc., etc. On est effectivement dans ce que les religieux appellent la « fin des temps », mais qui est aussi, si on n’est pas religieux, ce qu’on appelle le saut qualitatif chez Hegel, c’est-à-dire le moment où effectivement on va changer. On est à la fin d’un cycle et on est obligé de passer à quelque chose d’autre et de nouveau. Et l’autre et le nouveau, c’est angoissant, c’est inquiétant. Mais pour les gens qui ont la moelle, qui ont la volonté, qui ont les capacités, qui ont su anticiper, c’est aussi très intéressant, très excitant.
Donc, on n’est pas obligés d’être déprimés, nécessairement. Surtout que nous on est là, on a un coup d’avance. Donc, peut-être qu’on va faire partie de ceux qui vont bien s’en sortir.
Consolider le front de la foi catholico-musulmane
Public (d) – Je pense que la dernière intervention était vraiment bien vue, parce je pense que c’est un consensus qu’on doit tous avoir. Il y a un petit effet d’excitation. J’ai bien compris, j’ai bien aimé. Moi, je voudrais intervenir un peu sur. Premièrement, avec Égalité et Réconciliation, moi, en tant que chrétien pratiquant qui a la foi, j’ai découvert avec le Sheikh Imran Hosein, j’ai découvert l’islam. Puis, pendant votre première intervention, vous avez parlé un peu d’une espèce de rapport de synergie, en fait. C’est comme si on avance sur le même front moral, l’islam et le catholicisme. Moi, ça m’interpelle beaucoup ça. Puis j’essaye de communiquer ça dans mes proches, dans les milieux catholiques, dans ma famille, en premier lieu. Mes parents sont très ouverts. Et puis d’ailleurs, ils vont souvent sur le site d’Égalité et Réconciliation. Mon père est né en 1931. Donc, c’est vraiment une autre génération. Pour lui, c’est très difficile de sortir de ses empreintes de ce que c’est pour lui l’Islam, de ce que ça représente. C’est comme un peu l’« ennemi de l’Occident ».
Moi, j’aimerais avoir votre avis sur qu’est-ce que ça pourrait être la petite goutte pour que la compréhension que j’ai maintenant, sur quelle base de dialogue on peut se poser, que ça soit efficace, qu’on peut aider à une certaine réconciliation, et aussi de faire comprendre aux gens que l’ennemi, ce n’est pas nécessairement l’Islam. Et pour les gens qui partagent le même système de valeurs que moi, soit par atavisme parce qu’on est dans une société chrétienne mais qui a perdu la foi, peu importe, on partage un peu les mêmes valeurs, de quelle façon on peut leur faire comprendre que ? Moi, d’ailleurs, j’ai connu Salim, ici. On a eu des discussions ensemble. J’ai été frappé de voir jusqu’à quel point, même au niveau presque mystique, on arrive aux mêmes définitions.
Alain Soral – Oui. Je vais répondre. Il y a deux voies. Il y a la lecture puisque les trois quarts des gens parlent d’Islam et même d’ailleurs du catholicisme ; les gens ne connaissent rien de ces sujets-là. C’est-à-dire que, moi, par exemple, même quand je parle avec des chrétiens, ils ne savent même pas la différence entre l’Ancien Testament et le Nouveau, entre les Évangiles et le Torah. On est dans une méconnaissance totale.
Sur l’Islam, les trois quarts des gens disent : « les musulmans », comme si c’était un monde unifié, alors qu’en réalité, dans le sunnisme, je crois qu’il y a soixante-treize sectes différentes. Ils n’y connaissent rien. Et donc, le premier ennemi, c’est l’inculture. L’inculture dans laquelle s’engouffrent l’idéologie dominante et la propagande.
Donc, moi, déjà, c’est. Moi, j’ai lu le Coran. Je le lis par petits bouts. C’est un peu fastidieux, c’est très répétitif, je le dis. Pour quelqu’un qui vient comme moi d’un monde laïque helléno-chrétien, etc., c’est un peu rébarbatif. Mais je ne vois rien dedans de mauvais. C’est un livre de morale et d’équité. Il n’y a rien de malsain.
Quand je lis l’Introduction au Talmud, c’est profondément maléfique. De dire : tu peux voler du moment que tu ne te fais pas prendre, etc.
Il n’y a rien de tout ça dans le Coran. Le Coran est un livre de lois pour que la société fonctionne sur des bases morales. C’est-à-dire que c’est profondément quelque chose de sain. Mais pour ça, il faut le lire. Tu vois. Donc, moi je dis que la première voie, c’est la culture.
Et puis aussi de découvrir que des grands penseurs français du siècle dernier, Massignon, Corbin, etc., les gens de droite, d’une certaine droite du XIXème siècle, étaient très intéressés par l’Islam. Et que l’Islam ne se résume pas au délinquant de banlieues des banlieues françaises qui s’est réislamisé il y a trois mois alors qu’avant, il vendait du shit. Parce qu’on nous montre que des conneries. Donc, il y a la culture.
Et le deuxième truc pour ceux qui n’aiment pas les livres et se cultiver : il y a le voyage. Il y a voyager dans les pays musulmans et rencontrer des êtres humains musulmans. Et voir que ce sont des êtres humains qui vivent comme des êtres humains. Ce ne sont pas des extraterrestres ! Parce qu’il y a des gens qui pensent que les musulmans sont des extraterrestres, alors qu’ils ont des femmes, des enfants… ils aiment. On voit le rapport du papa avec sa fille. C’est un papa avec sa petite fille. On voit de la tendresse, on voit des êtres humains. On voit aussi du mensonge, on voit de la lâcheté, on voit de tout. Il ne faut pas ni idéaliser, ni diaboliser.
Donc, il y a la lecture et le voyage. C’est-à-dire se cultiver et rencontrer des gens.
Moi, je viens ici au Québec. Je m’intéresse un peu à l’histoire de la France et de ce qui s’est passé, etc., Et puis je me dis : oui, voilà, les Français à un moment donné sont arrivés en Amérique, etc. Il y a eu l’épopée. Et puis à un moment donné, je viens là. Et puis je rencontre des êtres réels. Et puis c’est ces deux choses qui s’articulent, la culture livresque et la rencontre des gens. Moi, je ne peux rien dire d’autre.
Il faut admettre qu’on ne sait rien – on ne sait rien – et dire voilà : est-ce que vous avez lu quelque chose qui a à voir avec l’islam, notamment le Coran ? On vous dira : non, bien évidemment. Ben, lisez-le. Vous verrez que c’est, il n’y a rien de monstrueux dedans. C’est plutôt un livre de saine morale et d’équilibre. Le Dieu est systématiquement très miséricordieux. Donc, il est miséricordieux. Miséricorde, ça a beaucoup à voir avec l’idée chrétienne, l’idée catholique. C’est un Dieu de miséricorde, le Dieu des musulmans. Ce n’est pas qu’un Dieu d’« égorgement », contrairement à ce qu’on dit. C’est le mensonge et la manipulation.
Et puis la rencontre des musulmans. Là, moi, par exemple, toutes les réunions que j’ai faites, systématiquement – et c’est pour ça que je mérite peut-être d’être sauvé –, ça consistait à mettre dans des salles où, moi, je parlais après, un tiers de gens qui venaient du Front national, c’est-à-dire de l’extrême droite – ce qu’on appelle l’« extrême droite » –, un tiers de gens qui venaient de l’extrême gauche, et un tiers de gens qui venaient de l’immigration, c’est-à-dire des musulmans. Et je vous dis, je le fais depuis 2006, je crois : il n’y a jamais eu une bagarre ; c’est magique pratiquement, jamais une bagarre. Parce qu’en fait, d’un seul coup, les gens disent : oui, mais toi, toi, t’es bien comme mec, mais les musulmans… ; oui mais toi, le mec du Front national, toi, t’es un mec super, mais les fachos du Front national. Qui nous a monté les uns contre les autres ? Sur quoi fonctionnons-nous ?
Nous fonctionnons sur des mensonges médiatiques, sur des manipulations. Et en réalité, le meilleur moyen de désamorcer tout ça, c’est la rencontre de l’autre réel et la lecture des textes réels, d’aller lire. Et quand on fait ce travail-là qui demande un effort d’humilité, un effort, la réponse, elle est donnée elle-même. D’un seul coup, on n’a plus aucune raison de se « casser la gueule ». On n’a plus rien à se reprocher.
Mais c’est ça tout le problème : c’est que nos ennemis nous empêche de faire ça, ils nous empêchent de nous cultiver, ils nous empêchent de nous rencontrer. Ils vous disent : on s’occupe de tout.
Je le dis toujours : que ce soit dans le business ou dans la réalité, limitez les intermédiaires, évitez l’intermédiaire. Il y a des peuples qui sont par définition des peuples d’intermédiaires. C’est-à-dire qu’ils se mettent entrer toi et moi et ils te disent : nous, les judéo-chrétiens… Et puis après : oui, cousin, nous qui avons vécu ensemble au Maghreb, etc. Voyez. Limitez les intermédiaires. C’est le maître-mot. Parlons-nous directement.
Et quand on se parle directement, on se rend compte qu’il y a beaucoup moins de problèmes. Et c’est valable d’ailleurs pour tout dans la société humaine. Du moment où les gens se mettent à se parler, ils ont beaucoup moins de choses à se reprocher, finalement. Ils se trompaient l’un sur l’autre. On leur avait dit que. On m’avait dit que t’avais dit que.
Et la réponse, c’est ça. Lire, puisque finalement, les religions se déterminent par des écrits. Est-ce qu’ils ont été dictés par Dieu ou pas ? Et est-ce que. Si je suis laïque, je peux dire, peut-être, que le Coran n’a pas été dicté par Dieu à Mohammed, mais c’est Mohammed qui l’a écrit. Eh ben, je m’en fous. Je lis quand même ce qu’il y a dedans. Je dis simplement : est-ce que ce qu’il y a dedans est honteux, scandaleux ou pas ?
Non. C’est un code de morale, c’est pour que les gens se tiennent bien. Et ce sont que des valeurs saines et positives que toutes les civilisations partagent en réalité. C’est-à-dire que ça rejoint toutes les valeurs saines : on respecte ses parents, on ne ment pas, on ne vole pas. C’est comme le Décalogue, à part que le Décalogue, ce qu’on ne dit pas, c’est : « tu ne convoiteras la femme de l’autre », mais c’est toujours communautaire ; « tu ne voleras pas celui de ta communauté », mais les autres tu peux !
Et pourquoi l’islam n’est pas quelque chose qui me gène ? Parce que c’est une religion universelle. Ce n’est pas une religion raciale et ce n’est pas une religion communautaire. C’est-à-dire que tout le monde peut être un bon musulman.
D’ailleurs, moi, je ne suis pas musulman. Je suis catholique. Mais à un moment donné, il y a des musulmans qui me disent : mais pourquoi, tu n’es pas un musulman ? Je dis : ben, je n’ai pas besoin. Dieu, déjà, me considère comme un bon musulman. Ce qui compte, c’est les actes. Je n’ai pas besoin de me convertir, de faire le guignol, etc.
Et je dis qu’un bon chrétien, quand il est avec un bon musulman, ils sont obligés de s’entendre puisque leurs valeurs morales sont les mêmes. Alors que par contre, y’a certaines religions où c’est beaucoup plus discutable. Enfin, certaines interprétations de certaines religions.
Et la réponse, elle est là. Lisez les textes sacrés avant d’avoir une opinion. Personne ne le fait. Et rencontrez les vraies populations, voyagez, rencontrez. Et après, vous verrez qu’il y a beaucoup moins de problèmes.
Le problème, c’est l’intermédiaire qui monte tout le monde contre tout le monde, la méconnaissance, la peur de celui qu’on ne connaît pas, parce que la méconnaissance génère la peur, parce qu’on a toujours peur à priori de ce qui est étrange. Et pour surmonter la peur, c’est le dialogue et la proximité. C’est valable quand vous marchez dans une rue sombre la nuit. Comme ça. Et à un moment donné, on se croise : « Bonsoir. » Petits sourires. Ouf ! ça va mieux. Et c’est tout. C’est une règle universelle mais malheureusement, aujourd’hui, on en est là.
Pour revenir à ce qu’on disait tout à l’heure. Les discours d’Ahmadinejad, on nous ment sur ce qu’il dit réellement. Et quand on voit la vraie traduction, il dit que des choses absolument saines, universelles. Il n’y a rien d’immoral dans ce qu’il dit. C’est plutôt un homme de paix, etc. Voilà la réponse : lecture, rencontre.
Piero San Giorgio – J’ajoute juste une chose. C’est que c’est une discussion qui concerne la moitié de la planète. L’autre moitié de la planète, Chinois, Hindous, ils ne sont pas dans cette discussion-là.
Alain Soral – Ils ne sont pas dans notre aire géographique non plus.
Piero San Giorgio – Exactement. Mais par la globalisation, ils comptent. Et ils comptent de plus en plus. Donc, c’est aussi intéressant d’aller rencontrer. Moi, un des trucs qui m’a ouvert les yeux ces dernières années, c’est d’avoir investi du temps pour aller faire un voyage en Chine. Très intéressant de voir leur manière de réfléchir. Eux, les conflits au Moyen-Orient, palestinien, israélien, tout ça : rien à foutre. Eux, je veux dire, si ça ne s’effondre pas économiquement avant, eux, ils vont nous mettre d’accord avec d’autres philosophies et d’autres vues. Donc, c’est aussi intéressant de s’intéresser à comment réfléchit l’Orient, l’Extrême-Orient. C’est l’autre moitié.
Alain Soral – Bon, en dernière instance, tous les systèmes de gestion des populations, que ce soit en général par le sacré, sont toujours quand même des systèmes de morale fonctionnelle qui permet à un grand nombre de gens de vivre ensemble, par le respect de certaines valeurs évidentes : essayer de ne pas mentir, essayer de ne pas voler, essayer de ne pas tuer. Et ça c’est assez universel, je suis désolé.
Quelqu’un de bien élevé et de moralement bien constitué, puisqu’il est bien élevé, peut voyager partout sans rencontrer trop de problèmes, à priori. C’est quand même la règle.
Le problème c’est. Aujourd’hui, on a quand même des gens. Si je prends, par exemple, l’idéologie de Wall Street où c’est des gens dont tout le système de valeurs est basé sur la haine, le mépris, la prédation, le mensonge, etc., et qui sont capables pour gagner un peu plus d’argent alors qu’ils sont déjà richissimes, de condamner à mort par la spéculation sur les matières premières alimentaires, 500 millions de gens dans le tiers monde en en ayant rien à foutre parce que deux rails de coke derrière leur permet d’oublier, même si à la fin de leur vie, ils tombent en dépression. Enfin, on ne sait pas d’ailleurs.
Ces idéologies ultralibérales aujourd’hui ne sont pas viables. Elles ne sont viables que sur des séquences très, très courtes. Et même le monde libéral – il ne faut pas oublier – est une séquence historique de deux siècles et demi qui est déjà en train, comme une combustion hyper rapide ou un moteur de Formule 1 qui tourne à très haut régime et qui a quelques milliers de kilomètres, quelques heures de fonctionnement possibles. On est quand même en train d’insulter des civilisations comme l’Islam.
J’insiste sur l’Islam parce une c’est le problème en ce moment. C’est là que l’ennemi met le doigt. Si on essayait de faire péter le système par les catholiques, j’insisterais sur le catholicisme. Je parle beaucoup de l’Islam parce que c’est. Le piège est là.
Mais on insulte une civilisation qui quand même perdure depuis le septième siècle après Jésus-Christ, au nom d’une civilisation des droits de l’homme qui elle, en deux siècles et demi, a produit plus de meurtres sur la Terre, de cataclysmes, qu’aucune autre civilisation avant elle. N’oubliez pas que les deux guerres mondiales ont été faites par des Blancs chrétiens européens, entre eux. On n’a en réalité aucune leçon de paix, d’amour et d’équilibre à donner à personne. Parce que le maître-mot, c’est ça.
Toutes les sociétés traditionnelles fonctionnent sur l’équilibre. Nous, notre société est fondée fondamentalement sur le déséquilibre. La croissance, c’est une fuite en avant. C’est un système de déséquilibre permanent. Et en fait, c’est très dangereux et ce n’est pas pérenne.
Or, en réalité, toutes les sociétés traditionnelles, ou d’avant, sont basées sur des équilibres. Et c’est ce qui est gênant d’ailleurs dans le Coran, quelque part, par rapport à l’idéologie libérale, c’est que c’est un truc d’équilibre. C’est-à-dire qu’il faut se calmer, il faut en rabattre un peu, il faut être modeste, il faut avoir le sens de la durée, etc. Et c’est vrai que pour un jeune qui veut en croquer, on lui dit : calme-toi, arrête-toi, ne fais pas ci, ne fais pas ça. Et c’est vrai qu’à la fois, il y a un côté frustrant, mais en même temps, c’est ce qui te sauve sur le long terme. Si on prend la durée d’une vie, tu es sûr de finir à peu près correctement. Alors que l’autre, au bout, il y a l’accident de voiture, la crise cardiaque, etc. Et c’est aussi tout ça. Aujourd’hui, au nom de quoi donnons-nous des – je parle des Occidentaux – donnons-nous des leçons au monde entier ?
Au nom d’un système de fuite en avant hyper productif sur le plan matériel mais qui produit des dégâts collatéraux monstrueux, et qui est une fuite en avant forcément mortifère. On sait que ça ne peut pas durer très longtemps. Et c’est ça aussi cette inversion de valeurs.
C’est quand tu vois Netanyahou qui est un Américain, quelque part, un libéral américain avocat d’affaires, – c’est un avocat d’affaires libéral américain –, il donne des leçons à un type comme Ahmadinejad qui porte sur son dos la sagesse de trois mille ans de civilisation perse plus d’un islam chiite, etc., etc. C’est complètement absurde d’un point de vue de l’intelligence. Il y en a un qui est dans la sagesse, et l’autre qui se dans l’hystérie. Or, c’est l’hystérique qui traite d’hystérique le sage. Et malheureusement, nous sommes pris en otage dans cette histoire-là. Et à un moment donné, la question est là. Nous avons en ce moment un fauteur de guerre hystérique qui prétend incarner la sagesse des Nations au nom de l’Onu face à un homme qui incarne deux sagesses, c’est-à-dire la sagesse perse et la sagesse musulmane – chiite certes, mais bon, c’est un autre débat –, et qu’on traite de fou. Et qu’on traite de fou. Ça va très mal.
Et c’est quand même à nous de dire, à un moment donné : je suis désolé, au nom de mon libre arbitre, de mon intelligence et de mon honnêteté, cet homme-là m’inquiète beaucoup moins que cet homme-là qui agite un petit dessin avec une bombe – je veux dire, on est dans le grotesque –, avec un petit trait de feutre rouge, et qui est un type qui a dû être condamné plusieurs fois pour escroqueries – je n’en sais rien… –, alors que l’autre est un ingénieur, issu du petit peuple, etc., etc., avec ses petites chaussettes, etc. Enfin voilà.
Et propager la bonne parole, c’est dire ça aux gens à côté de vous, quand ils regardent la télé. Parce que quand on arrive à faire le petit temps de la pédagogie, personne ne vous dit : non, non, je choisis Netanyahou en conscience contre Ahmadinejad – je prends exprès un truc extrême – ; ah ! si j’avais su que effectivement, celui-là a l’air beaucoup moins inquiétant que celui-là.
L’Iran ne menace pas le monde. L’Iran n’est pas expansionniste. Aucun problème ne vient d’Iran. C’est un pays qui n’a pas de dettes, c’est un pays qui n’a pas d’autres projets que d’essayer de. Il essaye juste de survivre à un projet d’extermination, de soumission, etc.
Alors qu’en réalité, on voit bien que depuis soixante-deux ans, cette espèce de tumeur effectivement étrange qui s’appelle le sionisme est un facteur de déséquilibre systématique ; depuis soixante-quatre ans, je crois. Et ça, c’est la réalité objective. C’est tout.
Le mouvement, la vie, le risque
Public (e) – J’aimerais vous poser une question concernant la Base Autonome Durable. Je m’interroge sur la part du temps qu’il faut lui consacrer. En fait, je crois qu’il n’y a pas de règles fixes à ce niveau-là. Mais par exemple, dans votre cas personnel, est-ce que vous pouvez témoigner de la contradiction, du paradoxe qui existe dans cette transition ou dans cette préparation à la construction d’une Base Autonome Durable et en même temps, une existence qui n’est pas celle de quelqu’un qui vit dans sa Base.
(…)
Alain Soral – De toute façon, il y a un moment où on se met en mouvement. Quand on se met en mouvement.
Piero San Giorgio – Le monde change.
Alain Soral – L’horizon se déplace et les perspectives évoluent. Donc, le danger c’est – qui est le principe de l’angoisse –, c’est-à-dire d’être immobile et de spéculer à vide. En réalité, à un moment donné. Moi, à un moment donné, je me suis mis en mouvement par les risques que j’ai pris, les livres que j’ai écrits. À un moment donné, on est d’ailleurs pris dans une dynamique. Je ne serais pas là ce soir si, etc., etc. Et ça change tout.
Parce que le problème, c’est que tant qu’on ne se met pas en mouvement, et qu’on attend, et qu’on reste dans le virtuel et l’abstrait. Parce qu’on est quand même dans un monde d’universalisme abstrait généralisé. C’est-à-dire que tout doit être livré totalement ou pas du tout. Et on cherche toujours les solutions absolues ou sinon on ne bouge pas. Avec cette idée d’ailleurs qu’on doit sauver tout le monde ou personne, etc.
En réalité, tout ça, ce sont des fausses catégories et qui sont une espèce de cancer d’un processus historique qui a commencé sans doute avec Montaigne. On est dans ce qu’on appelle l’universalisme abstrait absolu, alors que tout dans le monde, tout est topique et relatif. C’est-à-dire qu’effectivement, si vous commencez à faire un pas dans une certaine direction, c’est aussi bien sûr une prise de risques. Il y a toujours effectivement. On ne peut pas gagner systématiquement. Il y a toujours. On lâche d’un côté pour prendre de l’autre, avec une prise de risques, etc. Le principe de l’escalade : on lâche une prise, on en prend une autre. Et il y a des gens qui veulent aussi, pareil, l’assurance absolue du risque zéro, qui est aussi une des escroqueries qu’on nous vend. C’est : je veux bien changer, mais je ne veux rien perdre et je veux tout gagner.
Tout ça, en fait, ce sont des idées, une idéologie qu’on nous a vendue dans laquelle on est totalement, qui est totalement, qui n’a aucune réalité, en fait, qui est totalement abstraite et délirante. Et c’est en fait, aussi, tout ça. C’est-à-dire qu’effectivement, c’est ton histoire aussi [à Piero San Giorgio].
Moi, d’ailleurs, en ce moment, je suis aussi dans cette approche-là. On est en train d’essayer d’acheter un village en France, un village abandonné, pour effectivement expérimenter au niveau d’Égalité et Réconciliation tout ça. Parce qu’aussi, on a envie d’aventure. Il faut dire qu’on essaye d’échapper à la solitude et à la dépression. Donc, c’est une aventure collective. On réinvestit le peu d’argent qu’on a aussi, parce qu’on se dit, effectivement, d’acheter de la pierre et de la terre, c’est mieux qu’un plan épargne logement ou qu’une assurance-vie. Donc, effectivement, on est dans cette espèce de prise de risques, aventure, fuite en avant, avec le risque de se casser la gueule, etc., mais qui s’appelle aussi la vie, quelque part, et qui fait qu’à un moment donné, des gens qui étaient bloqués dans la vieille Europe figée du XVII, XVIIème siècle sont partis, qu’ils aient été Irlandais, parfois Bretons, etc., sont partis en Amérique en risquant de tout perdre aussi, d’être noyés dans un bateau, mais aussi, en accomplissant, malgré tout, ce qui est aussi votre vie, qui s’appelle le « rêve américain » d’une certaine manière ; vous êtes aussi l’Amérique. Effectivement, que ça s’appelle la vie, la vie, qui est prise de risques, un pari sur l’avenir, risquer de perdre pour gagner, etc.
Et qu’effectivement, ça paraît évident, mais, aujourd’hui, tout ce qu’on nous propose, c’est. Les débats politiques aujourd’hui, c’est sur les points de retraite, etc.
Moi, j’ai reçu un papier récemment où on me demande de remplir tous les boulots que j’ai fait dans ma vie, pour savoir combien je vais toucher de retraite à la fin. J’ai jeté le truc. Et on m’a fait un rappel. Je l’ai jeté aussi parce que je ne veux pas passer des semaines à remplir des papiers sur : j’ai travaillé de telle année à. En plus, moi, j’ai bougé dans tous les sens. J’ai travaillé de telle année à telle année, je touchais tant, etc.
Cette proposition de vie m’insupporte. Et moi, j’estime qu’à soixante-cinq ans soit je serais mort, soit j’aurais trouvé une autre solution. Je ne veux pas attendre. Alors, évidemment, je ne le conseille pas à tout le monde. Mais je me dis que je ne veux pas passer des semaines à remplir des papiers pour savoir qu’à soixante-cinq ans, je toucherai tant par moi. Si c’est ça mon destin, c’est une vie ratée. Et je prends le risque, effectivement, de jeter le papier, de ne pas avoir de retraite. Je pense que de toute façon, qu’on ne la touchera peut-être pas. De toute façon, ça n’existera plus. Je l’ai toujours pensé. C’est pour ça que je n’ai jamais cotisé. Parce que je dis : on ne la touchera jamais. Et j’ai de plus en plus raison. Je dis : je prends une autre option de vie, Égalité et Réconciliation, Kontre Kulture, monter de l’économie alternative, etc., etc.
Et je crois que là, effectivement, c’est la discussion générale. C’est ça. C’est qu’à un moment donné, vous êtes presque dans une logique de pionniers. À un moment donné, vous brûlez un peu vos vaisseaux, vous allez de l’avant. Et là, effectivement, les réponses vous sont données par le fait de vous mettre en mouvement. Tant que vous n’êtes pas en mouvement et que vous posez des questions pour savoir qu’est-ce que je gagne, qu’est-ce que je perds, qu’est-ce que je fois faire, etc., etc., ça ne sert à rien. En réalité, à un moment donné, il faut bouger. Et quand on bouge, c’est effectivement, on lâche d’un coté, on prend de l’autre.
Et après, il y a le hasard des rencontres. Il y a le fait que quand on se met en risque et en mouvement, il vous arrive des choses, bonnes ou mauvaises. Et qu’effectivement, pour rencontrer des choses et vivre des choses, il faut se mettre en mouvement. C’est le principe. Et qu’effectivement, quand on reste immobile et qu’on attend, on veut tout sans prendre aucun risque, etc. L’immobilité génère en général l’angoisse, l’apathie, la dépression, etc.
Mais qu’on est quand même aujourd’hui dans ces sociétés de crise extrême où en réalité – on vous parle de croissance et de société de fuite en avant –, en réalité, vous êtes entièrement bloqués dans vos perspectives de carrière, bloqués de a à z. Toute la société aujourd’hui est bloquée, en réalité bloquante. Bloqué dans votre voiture. On l’a vu l’autre jour quand on a voulu arrivé jusqu’ici en partant de Montréal. On a quand même passé un certain temps bloqué. Et ça aussi, c’est des démarches d’esprit. C’est que.
Piero San Giorgio – Ce n’est pas une vie, ça.
Alain Soral – C’est à nouveau être capable de prendre des risques, de faire son baluchon, de dire à sa femme et ses gosses : je crois qu’on va essayer autre chose, etc., etc. Et il y a un risque, évidemment. Il y a un risque. Et effectivement, quand je dis ça, je prends le risque, effectivement, de vous pousser sur des chemins qui peuvent peut-être vous mettre en danger. Mais comme je pense que ce qui nous attend dans l’immobilité est bien pire, au moins, je dirais : prendre des risques parce qu’on a pris des risques et des risques de vivre quelque chose, c’est mieux. Tenter quelque chose même si on échoue, c’est mieux que de dépérir en ne tentant rien. Et on est dans cette logique-là qui, moi, est ma logique personnelle. On en parlait aujourd’hui [à Piero San Giorgio]. J’ai cinquante-quatre ans, j’ai une vie intéressante, risquée. Et finalement, quel était mon avenir si je m’étais soumis aux injonctions, aux menaces, etc. ?
Je serais un publicitaire dans la cocaïne, divorcé, dépressif, qui est déjà obsolète parce qu’à cinquante-quatre ans, vous ne valez plus rien sur le marché du travail, de la modernité, etc. Donc, finalement, moi, j’ai pris beaucoup, beaucoup de risques, et je ne le regrette pas. Parce que même si demain j’ai une mort violente – ce qui est possible –, je ne regrette strictement rien parce que ce soir, je suis avec vous, j’ai une vie intéressante. Il y a du respect aussi dans le regard des gens avec qui je parle. Ce qui aussi très difficile aujourd’hui, de mériter le respect des autres. Il n’y a pas de raison. On est souvent très peu respectable. Et d’ailleurs, nos élites ne le sont absolument pas.
Ça aussi. On est dans une période, c’est quand même incroyable, où plus on monte dans la hiérarchie sociale, moins les gens sont respectables. On a envie de ne respecter personne.
Je veux dire, moi, mon président de la République s’appelle François Hollande. On dirait un chat coupé d’un mètre soixante-cinq. Je veux dire. Je me souviens qu’il y a eu de Gaulle, je me souviens qu’il y a eu le Grand Condé sous l’Ancien Régime. Il y a quelque chose qui va mal. Je n’ai pas envie de respecter les animateurs de télévision, je n’ai pas envie de respecter nos dirigeants. Qui respectons-nous aujourd’hui ?
C’est ça la question et c’est ça. Je pense que vous avez vous-mêmes les réponses, puisque vous êtes là.
Élections présidentielles de 2012 : si Marine Le Pen avait été élue
Public (f) – Sur le plan politique, justement pour revenir sur le plan politique plus que sur la BAD, qu’est-ce que ça aurait changé si Marine Le Pen avait été élue ?
Alain Soral – Moi, je n’espérais pas qu’elle soit élue. Je pensais que c’était impossible. Mais j’espérais qu’elle soit au deuxième tour, parce que ça aurait fait pas mal éclater le mensonge gauche-droite, puisqu’en fait, elle était le candidat social au deuxième tour. Elle aurait été face au candidat de gauche, c’est-à-dire le candidat du patronat et de la réaction. Et j’espérais ce laboratoire. Enfin, j’espérais ce moment un peu de vérité pour accélérer le dépérissement du mensonge politique. Parce que moi – là-dessus les travaux de Chouard se rejoignent –, je pense que la démocratie représentative est en réalité le contraire de la démocratie, puisque les représentant ne vous représentent qu’au moment où vous votez pour eux. Et après, ils vous trahissent. Ce qui est vérifiable systématiquement. Puisque les Français sont contre la Constitution européenne, et les députés l’ont validée alors qu’ils ont été mandatés. Donc, ils l’ont validé à plus de 88 %, alors que les Français sont à 56 % contre.
Donc, en réalité, moi, ce qui m’intéressait dans Marine Le Pen, c’était – c’est mon côté punk –, c’est que ça foutait la merde. Et moi, je suis pour, effectivement, d’une certaine manière, casser les catégories qui nous sont imposées actuellement et accélérer le discrédit, le dépérissement du mensonge politique. Et pour ça, le Front national, pour moi, est un outil. C’est un des rares outils performants qu’on a. C’est que ça fout la merde, etc. Alors qu’on voit bien que le piège total, mortifère, c’est l’alternance permanence gauche-droite. Les gens se sont fait baisser par Sarközy, ils disent : oh ben, on va revoter à gauche. Ils ont Hollande. Après, il y aura Copé. Je peux vous écrire le scénario jusqu’à la fin des temps. Et qu’à un moment donné, il faut casser ce truc de bonnet blanc, blanc bonnet, la « gauche de droite », la « droite de gauche ». C’est le vrai fascisme, si on veut employer des mots d’adolescents – parce que ça ne veut rien dire. Mais le vrai fascisme, pour moi, c’est celui-là. C’est cette autoalternance mensongère où derrière se tient la Banque, etc.
Et moi, j’ai remis à sa place récemment Emmanuel Todd qui finalement, appelait à voter Hollande en disant que ça serait le « hollandisme révolutionnaire ». Il savait très bien qu’il mentait. Il a fallu quinze jours pour qu’on voit, effectivement, que Hollande ne fait rien de plus que Sarközy, rien de moins. Il ne fait rien. Ce sont des animateurs qui sont là comme des épouvantails pour prendre les patates, les tomates dans la gueule pour que les banquiers puissent travailler tranquilles.
Parce que même critiquer les hommes politiques aujourd’hui, c’est facile. En réalité, ils n’ont aucun pouvoir. Ils ne touchent pas tellement d’argent, finalement – on leur a même réduit leurs émoluments de trente pour cent – pour prendre les crachats du peuple à la gueule, à la place des autres. Sarközy, il a tenu cinq ans, il s’est fait dégagé. On a même oublié qu’il avait été président. En fait, c’était un animateur de noces et banquets. Voyez. C’est un guignol. Il n’a rien fait. Et là, on a Hollande qui est là. Et on se demande comment il va tenir cinq ans. C’est vertigineux. Ça fait déjà cinq mois qu’il est là, il a déjà renoncé à tout, trahi tout. On a payé ça, machin. Alors, PSA [Peugeot Société Anonyme, PSA Peugeot Citroën], il ne peut rien faire. Mais par contre, l’adoption d’enfants par les homosexuels, ça, il se bat. Parce que c’est ça la gauche. Voyez.
Enfin, voilà, tout ça est une mascarade évidente. Et on se dit : le pauvre, je n’aimerais pas être à la place de François Hollande. Je ne vais même pas l’accabler. Il a un boulot qui est très, très dangereux, même pour lui. Parce qu’à un moment donné, il peut même se faire tuer par un fou en allant serrer des mains sur un marché. Parce qu’en plus, leur boulot, c’est quand même, c’est des représentants de commerce. Ils font du terrain. C’est des boulots minables.
Et moi, ce qui m’intéresse, à la limite, un petit peu, avec le Front national, c’est que c’était le truc qui accélérait l’explosion de tout ça. Et moi, je vous dis franchement aujourd’hui, ça ne m’intéresse même plus le Front national, parce que Marine a été intégrée au système. Elle a son petit segment de marché qui est l’anti-Islam.
[Image figée, problème technique]
(…)
… économique, sociale, etc. Et elle n’a fait que 17,8 [résultats au premier tour des élections présidentielles françaises de 2012]. Ce qui prouve que la machine de manipulation médiatico-politique est incroyablement puissante, et que finalement, le votant est un couillon – je suis désolé –, et que ça ne peut pas passer par là. C’est une évidence. Et moi, l’exemple que je prenais, c’était la deuxième élection de Eltsine.
Eltsine était à deux pour cent dans les soudages, après son premier mandat. Il a liquidé la Russie et ramené l’espérance de vie à cinquante-deux ans. Et avec de l’argent américain, des putes, des Go-Go girls et des shows vulgaires à l’américaine, il a été réélu. Et quand on sait qu’on peut faire réélire Eltsine, on peut faire. En fait, le système de domination peut faire à peu près n’importe quoi. Il a pu faire croire qu’Obama était un espoir pour l’Amérique, lui donner le prix Nobel de la paix pour aller aggraver les guerres coloniales du projet néoconservateur. On sait tout ça, parce qu’on est entre nous. On est chez les initiés. On sait.
Je pense qu’il n’y a aucun espoir, en gros, dans la politique conventionnelle. Et peut-être même que l’abstention totale et les abandonner. Parce que finalement, ils ont très peur de la baisse des pourcentages de votes. Aujourd’hui, on a finalement. À un moment donné, qu’une élection se fasse avec trente pour cent des gens, c’est peut-être presque la vraie subversion politique. C’est peut-être totalement abandonner la politique politicienne. C’est un débat. Mais je crois que la mascarade électorale, c’est presque finalement leur donner caution, d’une certaine manière, leur dire : le peuple s’intéresse encore à vous, vous avez encore une certaine. Il faudrait les délégitimer encore plus, moi, je pense. Il faudrait accélérer ce truc-là.
Parce que, moi, ce qui m’inquiète, c’est qu’après Hollande, on ait Copé, par exemple. Voyez. Ou même Bayrou, qu’ils vont nous ressortir à un moment donné, si ça va trop mal. C’est comme une écurie avec des chevaux. En fonction du temps, du [terrain lourd], etc., nos maîtres ont à peu près tout ce qu’il faut en réserve. Ils ont même Mélenchon au cas où, qui est un atlantiste franc-maçon de l’OCI [Organisation communiste internationaliste], deux fois sénateurs socialiste, qui a voté « oui » à Maastricht. C’est-à-dire que le mec.
Un homme politique, aujourd’hui, de haut niveau, c’est un type qui a passé un certain nombre de tests de soumission, de mensonge. C’est un type dont on est sûr que c’est une ordure absolue. Sinon, il a sauté avant. Même Jospin qui n’était pas assez, ou Rocard, il n’est pas arrivé en haut. C’est-à-dire que les types qui arrivent à la présidentielle, c’est un processus de sélection où on est sûr que le mec est un menteur, un lâche, un humilié, qui s’est soumis, etc. C’est un test de disqualification humaine, en réalité. Sinon, le type ne peut pas arriver jusque là.
Public (g) – DSK [Dominique Strauss-Kahn].
Alain Soral – Comment ?
Public (g) – DSK.
Alain Soral – Ben, DSK il y a eu le miracle de Nafissatou [Diallo], qui est une petite Jeanne d’Arc.
Public (h) – Il a trop réussi le test, lui.
(Rires)
Alain Soral – Normalement, il devait être notre président. Il devrait être notre président, normalement. Je crois que c’est ça. Mais je pense que c’est pareil chez vous, aussi.
Un homme politique de premier plan qui sait sourire à la télé, faire son numéro, etc., vous pouvez être sûr que c’est une ordure sympathique, au mieux. C’est Jacques Chirac, c’est Bernard Tapie. C’est un menteur professionnel, un type qui n’en a rien à foutre, etc. C’est-à-dire que c’est le contraire de ce qu’il faut. Parce que sinon, ça serait Jesse Jackson. Jesse Jackson n’a pas pu devenir Obama, parce qu’à un moment donné, il a critiqué Israël. Voyez. Les mecs, ils sont. C’est un système de sélection pour que quand vous arrivez en finale, vous êtes une ordure. C’est sûr. C’est-à-dire que vos maîtres savent que vous allez jusqu’au bout faire le sale boulot, que vous êtes une pute, un menteur. Enfin, je le dis. Et Obama, c’est la preuve parfaite. Le mec, il est arrivé avec le discours de.
Public – Du Caire.
Alain Soral – Du Caire. Et il a dit : je me battrai pour qu’il y ait un État palestinien. Et à la fin, il a dit : jusqu’au bout, il n’y en aura pas, je vous le garantis, etc. C’est-à-dire que le mec a menti sur tous ces. Et là, maintenant, on le met en concurrence avec une espèce de mormon, mords-moi-le-mormon-là, pour qu’on trouve presque Obama moins pire que l’autre. C’est-à-dire que c’est vraiment un système de manipulation abject. Comment il s’appelle l’autre ? Je n’ai même plus…
Public – Ron Paul, Mitt Romney.
Alain Soral – Non, parce que Ron Paul, c’est encore un peu un être humain.
Public – Mitt Romney.
Alain Soral – Il n’a pas pu aller en finale, Ron Paul. Il est encore trop. Il n’a pas assez trahi. Il aurait fallu qu’il trahisse beaucoup plus. Et là, on a une espèce d’élection avec une super-ordure et un super-connard. Je veux dire : allons à la pèche. Je ne sais pas, enfin, surtout ne votons pas. Et il y a toujours le jeu, à la fin, c’est : quand même, il faut quand même voter pour le moins pire ; je vais quand même y aller. Non. Je ne crois plus du tout à ça.
Et je vous dis, même Marine Le Pen, je la laisse à son commerce. On voit qu’il y a le père, la fille, et maintenant la nièce. C’est une PME familiale. Je ne les critiquerai jamais parce que pour moi, ce sont les plus sympathiques et les moins pires de tous les politiques que j’ai rencontrés. Ils ont le mérite de dire deux ou trois trucs, quand même. Mais, voilà, la vie est ailleurs. Vous voyez ce que je veux dire. La vraie politique est sans doute ailleurs.
Piero San Giorgio – Potager.
Public (i) – Oui, mais là, on parle de la France, c’est notre pays. Mais ici, c’est la même chose.
Alain Soral – C’est la même chose, bien sûr.
Public (i) – On vient d’en perdre un pour [inaudible], une.
Alain Soral – Bien sûr, c’est la même chose.
Public (i) – Exactement la même chose.
Alain Soral – C’est l’Occident, c’est le système.
Public (j) – Il y a quand même des choses qu’il faut comprendre, qui sont assez différentes, ici. Parce qu’ici, on est dans le cadre d’une Nation qui n’a jamais détenu le pouvoir politique pour elle-même.
Alain Soral – Oui.
Public (j) – Alors, c’est une Nation annexée au sein du Canada. Et puis, par conséquent, dans le Canada, on poursuit le travail d’annexion de la Nation québécoise par l’assimilation.
Alain Soral – Donc, vous pouvez encore voter pour des indépendantistes.
Public (j) – Il y a encore une campagne de haine et de propagande dans la presse anglophone.
Alain Soral – Alors, peut-être qu’il y a des candidats indépendantistes sur lesquels vous pouvez voter.
Public (j) – Oui, dans la presse anglophone. Il y en a même soutenue parfois même par la presse francophone, contre la Nation québécoise. Alors, donc, il y a un contexte national un peu différent.
Alain Soral – Mais je ne connais pas très bien. Moi, je suis français. Peut-être qu’il faut voter quand il y a des élections, pour le, ben, je ne sais pas, ceux qui veulent, ouais, un Québec libre, sans doute.
Révoltes et révolutions populaires contre réseaux de pouvoir constitués
Public (k) – Qu’est-ce que vous avez pensé du phénomène de la « Révolution tranquille » [1960-1966], ici ? Parce que c’est un peu le grand événement qui détermine tout ce qui s’est passé au Québec.
Alain Soral – Je ne connais pas assez bien. Moi, je suis venu ici pour découvrir le pays, rencontrer des gens. À la limite, vous, vous pouvez me dire ce que c’est que le Québec. Moi, je peux vous dire ce que c’est que la France, le mondialisme. Mais je ne vais pas.
D’abord, ça aussi, ça fait partie des règles. Je ne vais pas vous expliquer ce que c’est que le Québec. De même que je ne vais pas expliquer ce que c’est que la Syrie à un Syrien. J’essaye de comprendre un contexte mondial.
Moi, le Québec m’intéresse parce que c’est francophone et que c’est aussi un peu, une petite enclave qui résiste contre une domination anglo-saxonne globale. Je n’idéalise pas non plus. Parce qu’on m’a dit : n’idéalise pas, c’est très communautariste. Il y a des féministes, les plus puissantes du monde. Ce n’est pas si bien que ça. Mais c’est quand même pas mal. Donc, moi, je viens là pour découvrir. Je n’ai pas envie de vous expliquer ce que c’est que le Québec. Je ne suis pas magicien. C’est à vous de m’expliquer plutôt vos spécificités, les mouvements politiques, etc. Et je suis là pour apprendre, aussi.
Piero San Giorgio – Il y a en tout cas une chose sur les mouvements des, on va dire, Occupy Wall Street et les mouvements étudiants qu’on a pu voir à la télévision depuis l’Europe après ce qui s’est passé chez vous. Il y a une chose qui à la fois est intéressante et en même temps me dérage, c’est qu’on voit une mouvance de jeunes qui clairement sont insatisfaits d’un système. Ils vont dans la rue, ils font des choses. C’est intéressant. Mais en même temps, ils sont avec leur iPhone, ils sont avec leur ordinateur. Très bien, très bien. Et leurs revendications, c’est souvent, ce n’est pas de changer forcément le monde. C’est aussi souvent : ben voilà, on veut payer un petit peu moins cher, etc. Je ne suis pas 100 % – de l’extérieur donc, très modestement, je n’ai pas tous les tenants et les aboutissants –, je n’ai pas le sentiment qu’il y ait une vraie force physique pour un vrai changement. C’est pour ça que je suis toujours très septique. Je suis totalement d’accord.
Alain Soral – Et puis,
c’est très, très noyauté. C’est Facho-Watch. Dès que vous
avez des mouvements de rue de jeunes, il y a les cadres trotskystes
qui sont des pros de la manipulation. Les Indignés, c’était ça.
Nous [Égalité et Réconciliation], on a été chassés physiquement des Indignés, à Bastille. C’est entièrement pris en main par des petits trotskards avec des talkies-walkies qui quand vous regardez les médiations, sont reliés directement, par certaines médiations hollandaises, à la CIA. Enfin, etc.
Ces mouvements de colère un peu spontanés des jeunes, malheureusement très enthousiastes et très naïfs, le système sait pertinemment comment les prendre en charge, tranquillement.
Piero San Giorgio – Ouais.
Alain Soral – On a eu Mai 68 en France, qui était la première révolution colorée du monde moderne. C’est nous qui avons inauguré ce système. Et on voit ce que ça nous a donné. Tous les pires salopards, aujourd’hui, qui ont fait les pires choses sont issus de Mai 68, chez nous.
Et c’est pour ça que quand on est jeune, il faut s’amuser. Donc, moi, je pense que quand on est jeune, il y a des trucs. Il y va. On peut draguer des filles, il y a un peu…, c’est marrant. Mais globalement, avec du recul, je sais qu’en général, ça ne donnera rien. Et puis on voit très bien.
À Wall Street, à un moment donné, il y a les jeunes en bas. C’est bien. Les 99 % contre les 1 %. Ils ont bien compris. C’est clair. Et ils passent en bas de Wall Street. Et les autres en haut, qu’est-ce qu’ils font ? Ils sont un peu inquiets quand même. Qu’est-ce qu’ils font ? Ils font un énorme don à la police de New York qui devient une milice privée pour les sécuriser. Puis, c’est tout.
Malheureusement, on voit ce qui se passe en ce moment au Portugal, en Grèce, etc. Ça n’empêche rien du processus de mise au pas.
Notamment la Grèce, c’est très typique. C’est d’une violence incroyable. Eh ben, n’empêche que tout s’accomplit malgré tout, malgré les manifs, les colères. Alors on dévie. Il y a Aube dorée, on dit que c’est des nazis. On ethnicise le problème avec les clandestins, machin, etc. Et globalement, si vous regardez le rouleau compresseur.
Piero San Giorgio – Il avance.
Alain Soral – Ça avance, et les lois passent, les salaires sont réduits, on privatise l’espace public, etc., etc. Ça se passe la même chose en Espagne, la même chose en Italie. Et c’est ça qui est très inquiétant. C’est que le truc avance.
Alors, à un moment donné, effectivement, est-ce que de se barrer à la campagne et monter de Bases Autonomes Durables, ce n’est peut-être pas finalement plus politiquement plus intelligent ?
Moi, je pose la question. Je vois à chaque fois, la stérilisation des mouvements spontanés de contestation sur des techniques relativement classiques qui remontent quand même au XIXème siècle. Ça remonte aux premières révoltes des gens trahis par les processus révolutionnaires inaugurés par la Révolution française. Ces trucs de rue, les manifs, etc., c’est 1830, 1848, 1871, etc., etc. C’est quand même comme les boîtes de nuit ou le rock ’n’ roll qui commence à dater. C’est des. On est quand même toujours sur le truc : on est en colère, on manifeste. Et je dis : les manifs pour les retraites en France, c’est des pauvres qui défilent pour rien devant des pauvres, alors que tout est déjà négocié au dessus de leurs têtes par les syndicats qui les ont déjà tous trahis, parce qu’ils ont déjà ratifié toutes les chartes européennes. C’est du théâtre. Et vous pouvez le vérifier. Alors, les gens sont dans la rue. Tuut ! Gnagnagna, machin, truc. Et puis derrière, c’est plié.
Piero San Giorgio – Potager !
Alain Soral – Ça fait un peu de désordre. Et malheureusement, depuis des années et des années, le truc de la contestation dans la rue, le machin, etc., ça n’a, excusez-moi de vous le dire, ça n’a jamais marché. Depuis 1830, ça n’a jamais marché. À un moment donné, de toute façon, si ça devient trop truc, on fait tirer l’armée dessus.
Piero San Giorgio – Même en Suisse.
Alain Soral – La gauche le fait très bien. C’est systématiquement la gauche qui fait tirer sur les mineurs, etc. On noyaute, on subvertit. À un moment donné, il y avait les grèves des camionneurs, avec Tintin. On nous sort des leadeurs en marge des syndicats. Alors, on le fait passer à la télé, etc. Tout ça finit en eau de boudin. La législation sur la déréglementation et la dérégulation du transport routier s’est effectuée totalement. Je pense que c’est pareil chez vous.
Quand vous regardez sur la longue distance, à chaque fois, ça fait un peu de cirque, un peu de théâtre, un peu d’espoir pour certaines. Deux-trois petits malins qui montent en grade et qui trouvent des places. Et globalement, tout passe. C’est quand même ça qui.
Et je me dis, finalement, celui qui s’est dit : je me retire du jeu, et je, voilà. On peut me dire : ouais, t’es un traître, t’es machin, etc. Sur une culture politique, moi, j’ai commencé à me bouger à dix-sept ans dans l’extrême gauche. Ben, finalement, celui qui est sorti complètement du truc, je ne peux pas lui donner tort. Parce que l’autre soit il a fait tout ça pour rien, soit c’est devenu un socialiste traître intégral parce qu’il est monté en grade dans le syndicalisme, et c’est devenu Thibault, chez nous, de la CGT, qui est un traître absolu. Je ne vois pas d’exemple, je ne sais si vous voulez m’en donner, où les mouvements populaires de révolte sociale, etc., auraient gagné. Je ne vois pas d’exemple, en réalité.
Piero San Giorgio – Et l’élément aggravant aujourd’hui, c’est la courbe démographique de notre population –j’imagine que vous avez les mêmes phénomènes ici au Québec – qui est vieillissante. Et les gens de soixante ans ne vont pas dans la rue faire la révolution. Et ça n’améliore pas le problème, pour peu qu’une révolution change quoi que ce soit. À un moment donné, une révolution, ça ne vous donnera pas quinze milliards de litres de pétrole supplémentaires.
Alain Soral – Et puis l’étudiant, aussi, est un étudiant. Il fait de la contestation parce qu’il est étudiant. Ça fait partie de son cycle.
Piero San Giorgio – Son rite de passage.
Alain Soral – Et puis dès qu’il passe à l’âge adulte et à l’emploi. Moi, je me rappelle, aux Jeunesses communistes révolutionnaires. Au niveau du Parti communiste, il y a les Jeunesses communistes. C’est très, très, un vivier incroyablement de talents, de jeunes pleins d’espoir et tout. Et ça correspond aux universitaires. Dès qu’ils ont leur diplôme, il n’y en a pas un sur vingt qui passe au Parti communiste tout court. Et ceux qui passent au Parti communiste, ce sont les plus mauvais ou ceux qui ont un plan de carrière. Et les autres, ils rentrent dans la vie sociale. Et avec leurs diplômes, eh ben, ils veulent devenir cadres, en réalité, ils veulent toucher des gros salaires. Et il n’en reste rien. C’est ça le problème.
Moi, tout ce qui est fait par des profs et des étudiants, je m’en méfie terriblement. J’ai un peu ce côté-là. Ça fait un rite culturel, comme ça, sans. Et je pense que le pouvoir le sait. Les Indignés, je pense que le pouvoir en a rien à foutre. Le vieux Hessel, c’est pareil, là. Je ne crois pas à tout ça.
Alors après, je ne dis pas qu’il ne faut pas y aller, parce que c’est sympa. On rencontre des gens, on peut draguer. Bon, c’est mieux que d’être devant la télé. Mais de penser que de ça sortira la révolution ou une transformation sociale de fond, ça n’est jamais arrivé.
Public (l) – Je pense que, peut-être, une petite chose quand même qu’on peut observer. C’est pas juste les effets secondaires. Parce que moi, je suis le premier, quand j’ai vu toutes les révolutions qu’il y avait dans la rue, quand j’entendais les discussions au bureau, je disais : vous pensez vraiment que. On sait que c’est vraiment une mentalité de gauchistes et souvent des. Bref, tout ce que je viens d’entendre ce que vous avez dit.
Alain Soral – Oui, parce que c’est encadré, toujours.
Public (l) – Mais, il y a quand même une différence avec Mai 68 où là, il y avait vraiment comme toute l’idéologie, la libération des mœurs, etc. Là, ce n’était pas le point focal de ce qui se passait. Et puis on est dans un moment où au Québec, en tout cas, toutes les notions de l’arnaque bancaire et puis de tous les trucs sur le mondialisme, toute l’étendue, que ça soit même parfois de la même race. Moi, je suis surpris d’en entendre un peu partout.
Alain Soral – Oui, oui.
Piero San Giorgio – Et puis ça se voit.
Public (l) – Ce rassemblement de personnes-là qu’il y a eu, ça a fait un brassage. Ça a peut-être aidé à faire monter le niveau. Je ne veux pas idéaliser. Il y a quand même un espoir.
Alain Soral – Non, non, mais ce n’est pas pour rien que je vends des livres, et que les gens écoutent ce que je fais, et qu’Égalité et Réconciliation. Partout où je voyage, maintenant, il y a des gens qui me. À l’aéroport, à Berlin, les gens suivent ce qu’on fait, etc.
Piero San Giorgio – Et ce n’est pas pour rien qu’on essaye de nous empêcher de le faire.
Alain Soral – Mais ça ne débouche pour l’instant sur rien.
Alain Soral – Pour l’instant ça ne débouche pas sur un renversement de pouvoir. C’est ça le problème. Le rapport de force est incroyablement disproportionné.
Public – Et puis, il y a la télé là-dedans.
Alain Soral – Oui. Et puis la police, et puis l’armée, et les médias. Le résultat pratique c’est que demain, le B’nai B’rith avait réussi à nous retirer la salle de la conférence. Et puis c’est tout.
Public – Malgré vos cent milliers de « like » Facebook et les avatars de militants de toutes espèces. Ça ne change pas.
Alain Soral – Oui, bien sûr. Parce que là, c’est un sujet qu’on n’a pas abordé. C’est dans mon bouquin, vous le verrez. Le pouvoir, c’est les réseaux. Or, des milliers de gens en colère qui gueulent « ouais, gnagnagna », après, c’est : dissolution [de la manif] ; ils vont boire un coup ; ils rentrent chez eux. C’est zéro.
Les réseaux, c’est quoi ? C’est les réseaux constitués. Les franc-maçonneries, les machins, etc., les vrais réseaux de solidarité. Ça peut être aussi des grandes écoles, les gens qui toute leur vie [restent connectés entre eux], machin, etc. Les Skull & Bones, machin. Il n’y a, en réalité, que les réseaux. Dans le temps aussi, les religions étaient des réseaux. Un clergé, c’est un réseau. Et en fait, c’est des luttes de réseaux contre réseaux. Des réseaux en détruisent d’autres.
L’affaire Dreyfus, c’est une lutte de réseau à réseau. C’est le réseau qu’on n’a pas le droit de nommer qui achève de détruire le réseau catholique et militaire – ce qui est la même chose –, c’est-à-dire la noblesse catholique qui est le noyau dur de l’armée française et qui est un pouvoir encore à l’époque. Aujourd’hui, l’armée n’a plus aucun pouvoir en France. Mais à l’époque, c’était encore un pouvoir. Et on voit bien qu’en réalité, [c’est] les réseaux.
Et des gens qui défilent sur des slogans avant de rentrer chez eux, qu’ils soient d’ailleurs syndiqués ou pas, ce n’est pas des réseaux. Des réseaux, c’est des gens qui ont une culture commune, un objectif commun, qui se réunissent – d’ailleurs c’est toujours plus ou moins occulte –, et qui sont des pouvoirs.
Le B’nai B’rith est le réseau le plus puissant du monde. C’est 600 000 franc-maçons juifs. Je le dis ouvertement. C’est le plus puissant réseau du monde. Il n’y a pas d’équivalent. Et eux, ils peuvent donner des ordres à n’importe quel chef d’État du monde, y compris. Obama ne tient pas cinq minutes face à une injonction du B’nai B’rith. C’est tout.
Mais le B’nai B’rith, ça ne se fait pas comme ça. Parce que pour faire 600 000 types qui font partie d’une même franc-maçonnerie qui cumule la logique maçonnique, plus la logique juive, et qui sont que des élites. Ce n’est pas des paumés. C’est de gens qui sont en haut et qui sont de tous les pays développés du monde. C’est d’un seul coup une puissance incroyable. Et vous pouvez mettre des millions de chômeurs en colère en face, ça ne pèse rien malheureusement. Si, ça peut donner un mouvement insurrectionnel avec un peu de morts, etc., du feu, des destructions. On voit bien. Les Grecs, ils sont capables de foutre un peu le feu.
Piero San Giorgio – [inaudible] ça va être utile.
Alain Soral – Mais derrière, le lendemain, il y a dissolution. Et ça redevient des individus en souffrance.
Piero San Giorgio – Ou des terroristes.
Alain Soral – Et les réseaux, eux, continuent de fonctionner à la même température, très calmement, discrètement, etc. Et à un moment donné, quel est le réseau alternatif ?
Moi, en ce moment, je le dis humblement : Égalité et Réconciliation, c’est un réseau. C’est quelques milliers de gens qui partagent les mêmes idées, qui sont un peu connectés et qui essayent d’avoir de la solidarité économique, parce qu’en général, le réseau, c’est partage de savoir et partage d’avantages sociaux, etc., etc., économiques.
En fait, presque le message politique aujourd’hui, c’est : il faut créer des contre-réseaux. Mais créer des contre-réseaux, ça ne sa fait pas face à des trucs qui existent de puis des siècles ou des millénaires. Il y a des gens qui font du réseau depuis deux mille cinq cents ans. Ce n’est pas : tiens ! dans trois mois, on fait du réseau, etc.
Adolf Hitler a monté l’Ordre Noir de la SS. Ils ont essayé de faire du réseau, en quelques années, en s’appuyant sur la mythologie germanique, machin, etc. Ils ont obtenu des résultats, en valeur absolue, assez remarquables. Mais n’empêche que ça a fait une espèce de petit moment dans l’histoire étrange et très difficile à analyser, entre 1933 et 1945. Et ça a fini en catastrophe. Et voilà. Parce qu’ils étaient face à du réseau beaucoup plus puissant.
On est toujours en dernière instance dans des luttes de réseau à réseau. Et un réseau, ça ne se décrète pas. On peut créer, faire un concert, par exemple, avec cent mille mecs dans un stade « contre la faim dans le monde », etc. C’est très joli, c’est très spectaculaire. On a l’impression d’être une force. En réalité, on n’est rien. Alors que par contre, une fraternelle discrète mais efficace de gens qui appartiennent tous au même truc, avec la même vision du monde, très calmement, qui sont des surdiplômés qui ont des postes clés. Voyez, le truc de. Il suffit pour diriger le monde. Comme je dis dans mon bouquin, c’est un pour cent des gens qui en commande 99 %. Toujours. Et c’est simplement d’être placé où il faut. C’est très discret, très efficace. Et les autres, ils gueulent : « Hou ! ». Et ça ne donne rien.
Et c’est ça la sociologie du pouvoir. Et comme vous le remarquez – ce n’est pas un hasard –, ce n’est enseigné nulle part. La sociologie de la puissance des réseaux, c’est une discipline qui n’existe pas ni en sociologie, ni en économie, ni rien. Parce qu’on ne vous apprend pas comment dominer. Voyez. C’est un truc. Comme par hasard, c’est ésotérique, initiatique et parrainé, les trucs de réseaux, toujours ; donc fondamentalement antidémocratique. Ésotérique, initiatique et par parrainage.
Ce qui veut dire que le vrai truc du pouvoir fonctionne sur un système totalement contraire à l’universalisme démocratique. C’est-à-dire qu’on ne vous l’apprendra pas, il faut que vous le découvriez, il faut que vous soyez parrainé, et c’est entièrement codé. Rien ne veut dire ce que ça veut dire. C’est totalement l’inverse du baratin démocratico-médiatique. Et c’est pour ça que c’est le pouvoir.
Public (m) – Pour donner un exemple très québécois de ce qu’est un réseau, on peut donner par exemple, ici, au Québec, l’exemple de l’affaire Michaud [Yves Michaud], où est ce qu’un ancien ambassadeur, un ancien haut-commissaire du Québec à Paris, un ancien diplomate, un ancien ministre du gouvernement Lévesque à l’époque, à la retraite, a été condamné unanimement un matin, subitement par l’Assemblée nationale du Québec, presque unanimement moins une personne, pour avoir tenu des propos inacceptables envers la communauté juive.
Alain Soral – Oui, oui, ben, c’est.
Public (m) – Mais personne n’avait entendu ces propos. Personne ne savait quels étaient ces propos-là. Et puis, on a vu avec le temps, etc., que le ballon s’est dégonflé.
Alain Soral – Oui, oui, c’est la puissance du lobby.
Public (m) – Et ça, c’est un très bon exemple de réseau, comment le pouvoir s’exerce.
Alain Soral – Pour être sur des sujets moins dangereux, l’Internationale socialiste. Comprendre par exemple, le fonctionnement de l’Afrique à travers l’Internationale socialiste et la franc-maçonnerie africaine. Vous voyez que tous les dignitaires africains sont membres de maçonneries et souvent membres de l’Internationale socialiste, même s’ils n’ont rien de socialiste, etc. On comprend ces réseaux.
On le comprend aussi à travers un petit peu, quand on étudie le gaullisme, puisqu’il a disparu : les réseaux Foccart, le SAC [Service d’action civique], et ce que de Gaulle avait réussi, qui sont des tout petits réseaux qui lui ont permis de tenir à peu près la France difficilement, entre 1958 et 1969. C’est très peu. Parce qu’il avait ces réseaux issus de la résistance : la Françafrique, machin, Hersant, enfin ces petits trucs-là.
En général, les réseaux qu’on montre du doigt sont toujours des réseaux minuscules et qu’on découvre quand ils s’effondrent. Voyez. On vous montre aujourd’hui l’Opus Dei parce que, on vous parle des jésuites, parce qu’ils se sont effondrés.
En réalité, les réseaux puissants, c’est ceux qu’on ne peut pas nommer, ceux qu’on n’ose pas nommer, et ceux qu’on n’identifie pas parce qu’ils vous éblouissent par leur pouvoir, d’une certaine manière. Et on est très capables, en fait, de faire de la sociologie et de l’histoire sur les réseaux morts. Mais le réseau de domination actuel, c’est par définition celui qui n’est. Moi, je dis : le pouvoir, c’est ce à quoi on n’a pas le droit de s’attaquer. C’est comme ça qu’on le définit. C’est ce à quoi il est dangereux de s’attaquer.
Donc, regardez. Vous vous moquez des curés, il ne vous arrive rien. Vous vous moquez de l’armée, il ne vous arrive rien. Vous vous moquez des musulmans, il ne vous arrive rien, en réalité. De quoi est-il dangereux de se moquer ?
Je n’ai même pas besoin de vous donner la réponse. Vous le vérifiez [par vous-mêmes]. Donc, le pouvoir est là. Je rejoins ce que vous venez de dire [dans le public, supra, noté Public (m)]. Et puis c’est tout. Et ça, c’est très pratique comme démonstration. De quoi avez-vous peur ? Parce que, ça aussi, pareil. Je dis ça aux gauchistes. De quoi as-tu peur ?
T’as peur de faire un dérapage antisémite. Tu n’as peur de rien d’autre. Donc, réfléchis à ce que ça veut dire. Ça veut dire que la sacralité, elle est là. Tu vois. Le blasphème, il est là, le risque de châtiment est là. Tout, le reste, tu peux.
Et ça, il faut un énorme travail sur soi-même pour admettre que c’est comme ça que. C’est de la sociologie pratique. C’est bien la preuve que le pouvoir est là. On peut faire des films sur la mafia sicilienne. Ça s’appelle Le Parrain. Le mec qui a fait le film, il n’est pas mort. Essayez de faire un film sur une autre mafia bien plus puissante et qui a fait Las Vegas, etc. Je parle de vraies mafia, ce n’est même pas un terme métaphorique.
Arrivez à Hollywood avec un scénario et dites : je vais faire un film exactement comme Le Parrain, mais sur la mafia juive. Essayez de le produire. D’un seul coup, vous allez voir ce qui va vous arriver. Regardez Oliver Stone, chaque fois qu’il a dit une phrase de travers dans un débat.
Public – Mel Gibson, Mel Gibson.
Alain Soral – Mais Oliver Stone aussi. Il a dit. Oliver Stone dans un débat en Angleterre, sur une radio périphérique, parce qu’il y a Internet, il a dit que quand on réfléchissait bien, les vrais victimes de la Deuxième Guerre mondiale, c’est le peuple allemand. Il a dit ça. Je ne vous dis pas le lendemain ce qui lui est arrivé. Tu vois. Et qui est monté au créneau. Et il s’est excusé platement, comme tous les mecs qui ont pété de travers. Sauf Mel Gibson, peut-être.
[Interruption de la vidéo]
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