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Clandestins : l’Autriche se dit prête à fermer sa frontière avec l’Italie

Ça devrait être fait depuis longtemps

À deux mois des législatives autrichiennes, la crise migratoire fait monter la tension avec Rome.

Les relations se tendent entre l’Autriche et l’Italie. Il y a quelques semaines, l’annonce par le ministre autrichien de la Défense, le social-démocrate Hans Peter Doskozil, que son pays s’apprêtait à protéger sa frontière en cas de mouvement migratoire massif en provenance du Sud a provoqué un tollé politique en Italie. Quatre véhicules blindés et 750 soldats sont désormais déployables en quarante-huit heures au col du Brenner, considéré comme le nœud stratégique entre le nord et le sud des Alpes. Une barrière et un poste de contrôle en préfabriqués sont également prêts à être activés. Simples manœuvres électorales en vue des législatives ? Force est de constater que sur le terrain, les contrôles s’accentuent.

Escortée par des Alpinis, ces militaires italiens bien identifiables à leurs chapeaux à plumes, une femme noire, avec poussette et enfants, sort de la gare du Brenner, au fond du col qui marque la frontière entre l’Italie et l’Autriche. En s’éloignant vers le poste de police, le groupe passe devant un stand de saucisses. « Ils n’ont pas le droit de fermer la frontière au sein de l’espace Schengen, mais il y a déjà des contrôles mobiles », fait remarquer le patron en servant des hot-dogs à des touristes.

À quelques centaines de mètres, l’ancienne guérite des douaniers est vide depuis l’adhésion de l’Autriche à l’Union européenne, il y a 22 ans. Mais les forces de l’ordre peuvent toujours intercepter des véhicules en amont et en aval de la frontière. Côté autrichien, une centaine de policiers est ainsi affectée à la zone frontalière. Ponctuellement, ils opèrent des contrôles à des points stratégiques de l’autoroute A13 qui mène à Innsbruck et, 40 kilomètres plus loin, à l’Allemagne. Des patrouilles internationales parcourent aussi les trains qui transitent dans l’étroit col du Brenner. Une dizaine de clandestins sont ainsi interpellés chaque jour.

 

Mesures de précaution

À moins de deux kilomètres, côté autrichien, un chantier a débuté mardi dernier. « Ici, nous construisons une station de contrôle qui servira surtout pour les trains de marchandise », explique Marius Meisinger, directeur adjoint de la police de l’immigration tyrolienne. Il s’agit d’optimiser les procédures de contrôle et d’en assurer la sécurité – à la fin de 2016, un jeune Erythréen est mort sur les rails en essayant de passer illégalement en Autriche. Mais, ici non plus, pas question de contrôles systématiques… pour l’instant.

« Il s’agit de mesures de précaution. Si la route migratoire de l’Italie n’est pas réduite, alors la pression sera telle avec les contrôles côté allemand que tous les migrants se retrouveront ici, dans le Tyrol », explique le président du parlement du Land, le conservateur Herwig van Staa. « Or, nous avons déjà, en proportion, cinq fois plus de demandeurs d’asile ici que dans le Tyrol italien ! » Herwig van Staa considère que les menaces de fermeture sont « un appel à l’Union européenne », qui devrait tenir ses frontières extérieures hermétiques et organiser une répartition équitable des réfugiés entre les pays membres.

Les responsables autrichiens craignent que Rome, confrontée à des arrivées nombreuses dans la Méditerranée, ne laisse passer davantage de migrants vers le nord. « Actuellement, les chiffres sont en recul grâce aux contrôles que l’Italie effectue de son côté », constate quand même le policier Marius Meisinger. « Aucun indice ne laisse à penser que la situation pourrait se retourner », ajoute-t-il.

 

Motivations électorales

Sentiment partagé à Innsbruck. Le battage autour d’une éventuelle fermeture de la frontière agace Jürgen Gschnell, de l’association Caritas. « Si c’est nécessaire, on le fera, dit-il, d’autres le font bien… » Mais pour l’instant, tout est calme du côté humanitaire : « Rien à voir avec 2015-2016. » Mais alors pourquoi brandir la menace d’un nouvel afflux migratoire ? Si l’arrivée d’une vague de migrants est des plus incertaines, la tenue d’une élection législative, elle, est bel et bien avérée le 15 octobre prochain (voir ci-dessous). L’occasion de se saisir des frustrations de nombre de Tyroliens, qui ressentent comme un étau les insuffisances de la politique européenne de l’asile.

 

Le gouvernement sur la ligne du FPÖ

Préparation de contrôles aux frontières, réduction des allocations familiales pour les étrangers, protectionnisme sur le marché de l’emploi, interdiction du voile intégral… La politique autrichienne de l’immigration poursuit sur sa lancée restrictive, amorcée en 2016. Selon le politologue Anton Pelinka, le gouvernement formé par les sociaux-démocrates et les conservateurs agirait en « FPÖ light ». De fait, ces mesures ressemblent fort aux revendications du Parti de la liberté d’Autriche, la formation d’extrême droite.

Les deux nouveaux chefs des partis gouvernementaux semblent vouloir se positionner fermement sur l’immigration, thème qui préoccupe la population. Le but ? Couper l’herbe sous le pied du FPÖ pour les élections législatives du 15 octobre. La stratégie s’avère surtout payante pour le ministre des Affaires étrangères conservateur, Sebastian Kurz, désormais en tête des sondages devant l’extrême droite.

Le FPÖ a-t-il du souci à se faire ? Pas vraiment, estime Oliver Gruber, politologue à l’université de Vienne. Selon lui, le parti ne devrait pas souffrir de la perte de ces quelques voix. Car l’omniprésence médiatique des thèmes migratoires ne fait qu’augmente ses chances de figurer en bonne place au sein de la prochaine coalition gouvernementale, dans laquelle il semble actuellement assuré de siéger. « Ce qui est déjà une assez grande réussite pour le FPÖ », ajoute Oliver Gruber.

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