En guise de prologue, ce petit portrait de l’intéressée par Faits & Documents :
Yaël Braun-Pivet est sur la sellette. Le Figaro n’a pas manqué d’épingler celle qui affirmait haut et fort qu’elle maîtrisait la complexité de la fonction. Le 31 juillet, le quotidien de droite titrait « Yaël Braun-Pivet, acculée par les critiques de toutes parts ». Et attaquait, dans le paragraphe Une novice en politique :
« Pourtant, Yaël Braun-Pivet est devenue le symbole des tensions nouées entre l’opposition et la majorité autour de l’affaire Benalla. En se hissant l’été dernier à la tête la commission des lois, à 46 ans, la néo-élue des Yvelines, “tombeuse” du turbulent député LR Jacques Myard, a dû affronter d’autres procès en illégitimité. Pour la première fois, une novice en politique, l’un de ces nouveaux visages promis par Emmanuel Macron, devenait présidente de l’un des plus prestigieux des huit groupes de travail de l’Assemblée, chargé de questions sensibles, comme les institutions, la justice, la sécurité et l’immigration. Un poste d’habitude occupé par de vieux briscards. »
Il est vrai que gérer la tentaculaire affaire Benalla, qu’elle soit ou pas déclenchée par le pouvoir profond pour « tenir » le président, qui commençait à n’en faire qu’à sa tête – trumpisme, poutinisme, assadisme... –, n’est pas de tout repos. C’est là où l’on comprend qu’un exécutif a besoin de vieux briscards à la peau dure pour le protéger. Mais ça veut dire partager le pouvoir...
« Après une année de travail législatif, Jean-Christophe Lagarde (UDI) voit toujours en Yaël Braun-Pivet une “présidente inexpérimentée, toujours sur la défensive, se sentant agressée à la moindre question”. Mais l’intéressée assure que son assise n’est “pas du tout” affaiblie face aux critiques de l’opposition. “C’est une commission où je fais régner le pluralisme absolu et qui marche de façon très démocratique”, garantit-elle en pleine tempête. »
Où l’on, comprend que démocratique est le synonyme de bordélique...
Si Macron a voulu s’entourer d’une garde rapprochée exécutive serrée (Kohler et compagnie), il a joué le jeu démocratique en castant à la Chambre des nouveaux venus qui n’avaient aucune expérience, histoire de ne pas gêner les décisions stratégiques et surtout, de ne rien y comprendre. Les députés godillots de LReM sont parfaits pour jouer au théâtre de la démocratie participative, tout en n’ayant aucun pouvoir. C’est pourquoi on oscille avec eux entre le comique et le tragique.
La presse de droite fait ses gorges chaudes de ces canetons boiteux. Ci-joint l’article de Valeurs actuelles daté du 12 juillet sur cette amatrice que le président n’a pas placée là par hasard...
La présidente de la commission des Lois ne sait pas ce qu’est un décret
« L’élue novice affiche son ignorance dans les couloirs du palais Bourbon, rapporte Le Canard enchaîné, ce mercredi.
“Je ne suis pas constitutionnaliste, a-t-elle ainsi lancé à des fonctionnaires de la commission. Pouvez-vous me dire comment il faut présenter le texte sur l’état d’urgence ? Et, surtout, quand vote-t-on les décrets ?”
Ses interlocuteurs ont dû expliquer à cette avocate de formation que les décrets ne sont pas votés mais pris par le gouvernement. »
Ça n’a pas loupé, devant la violence des attaques verbales et des questions légitimes, YBP a déposé plainte pour « injures et menaces ». L’Internet a bon dos quand on est le dos au mur... C’est Le Figaro du 31 juillet qui explique :
« Depuis plusieurs jours, Yaël Braun-Pivet, corapporteure LaREM de la commission d’enquête sur l’affaire Benalla à l’Assemblée, est victime d’injures. Des dizaines de messages “abjects à caractère sexiste et antisémite, ainsi que de menaces à mon encontre et à celle de ma famille”, parfois reçus sur Twitter. Dans un communiqué celle qui est également présidente de la commission des Lois de l’Assemblée s’indigne : “Rien ne justifie une telle violence. Elle est intolérable. C’est pourquoi j’ai porté plainte pour injures et menaces aujourd’hui auprès du commissariat du VIIe arrondissement de Paris”. »
Voilà que la corapporteure se retrouve victime, à cause de (ou grâce à) ceux qui postent des messages nauséabonds sur les réseaux sociaux...
Depuis le début des travaux conduits par la @AN_ComLois, je suis destinataire de dizaines de messages de menaces et d’injures à caractère sexiste et antisémite. Rien ne justifie une telle violence. Elle est intolérable. C’est pourquoi j’ai déposé plainte aujourd’hui. pic.twitter.com/QfQeddZ47J
— Yaël BRAUN-PIVET (@YaelBRAUNPIVET) 30 juillet 2018
Il est vrai que ces accusations, si elles sont avérées, n’élèvent pas le débat politique. On espère juste qu’il ne s’agit pas de tweets envoyés par des petits manipulateurs LReM, tout est possible aujourd’hui. On avait déjà au début de l’année douté de la réalité des insultes proférées à l’encontre de la députée LReM Laetitia Avia, qui était alors elle aussi dans la tourmente (elle avait mordu un chauffeur de taxi) et soudain, une lettre méchamment raciste avait transformé l’agresseuse en victime. Un miracle !
Mais ne voyons pas le mal partout, et espérons que Yaël retrouvera tous ses esprits après l’épisode Benalla, qui l’a visiblement bousculée intérieurement. Mais qui n’est pas prêt de s’éteindre, tant se joue autour de ce personnage le rapport de force actuel entre pouvoir visible et pouvoir profond.