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Ces témoignages risquent de scandaliser encore un peu plus les familles de ceux qui ont donné leur corps à la science, et à l’université Paris-Descartes. Elles avaient déjà été choquées d’apprendre, lors de la publication d’une enquête dans L’Express, le 27 novembre 2019, que des dépouilles avaient pu faire l’objet d’une « marchandisation ».
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Plusieurs témoins affirment que des corps ont été sortis illégalement du CDC, notamment le week-end. "J’ai fait des rencontres tout à fait dingues dans l’ascenseur, raconte le Pr Alexandre Mignon […]. J’ai rencontré des personnes qui sortaient des corps de l’université et qui partaient en ville ! J’ai posé des questions : mais qu’est-ce que vous allez faire dehors avec des corps ? Je ne sais pas où allaient ces corps qui partaient dans des voitures publiques, avec des personnes qui n’étaient pas du tout habilitées. En fait, il y avait surtout des ’demi-corps’ ou des troncs. […]
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[…] « Dès le premier jour, j’ai compris pour le trafic, nous confie Ludovic [Les prénoms ont été modifiés]. Il y avait de grandes portes de bois puis un petit réduit avec du matériel, notamment des scies, des marteaux et des Kärcher©. Sur un brûleur à gaz se trouvait une grande marmite dans laquelle ils faisaient bouillir des têtes. Au début, j’ai cru que c’était pour les cours d’ostéologie [science des os et du squelette]. J’ai demandé : pourquoi vous blanchissez les os ? On m’a répondu : "Ça ne te concerne pas". Sans faire de jeu de mots, ils faisaient leur cuisine et récupéraient les crânes. C’est là que j’ai su que ce n’était pas pour de l’enseignement. J’ai vu les crânes partir dans des sacs à dos. »
Jacques, un autre ancien préparateur de corps à l’université Paris-Descartes confirme : « Il y avait des ventes d’ossements de crânes ou de squelettes complets sous le manteau. Je me suis rendu compte que des corps disparaissaient. Mes collègues "faisaient" les squelettes le week-end. » Son récit fait froid dans le dos : « Il y en a un qui faisait des préparations de rochers [os situés sur la partie latérale du crâne juste au niveau de l’oreille] qu’il envoyait en Israël et en Égypte. »
Ludovic garde en tête des visions d’horreurs de son passage au CDC : « Avant le départ des corps pour l’incinération, l’un des préparateurs avait aussi l’habitude de vider les cercueils avant que les policiers ne viennent poser les scellés. Il prenait tout ce qui était monnayable. Essentiellement les têtes. Un crâne pouvait être revendu 500 euros. Imaginez si vous en vendiez six ou sept en un seul week-end ! »
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[…] Plusieurs experts, notamment des antiquaires, nous répondent qu’un crâne d’une personne récemment décédée a « peu de valeur marchande », car il n’aurait pas d’intérêt historique, rituel ou scientifique. Pourtant, il existe bien des collectionneurs. Nous l’avons constaté en nous rendant dans les allées du marché aux puces de Saint-Ouen, le 7 mars 2020 : des crânes de couleur très claire, ce qui signifie qu’ils sont récents, sont mis en vente. Le prix affiché : 600 euros.
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