Les récents incidents survenus en marge de certaines manifestations contre la reconnaissance par Donald Trump de Jérusalem comme capitale d’Israël ont poussé le gouvernement allemand à plancher sur la création d’un commissaire à l’antisémitisme.
Le ministre fédéral allemand de l’Intérieur, Thomas de Maizière, issu de l’Union chrétienne démocrate (CDU, droite conservatrice), a appelé le 17 octobre 2017 à la création d’un poste de commissaire dont la mission première serait de lutter contre l’antisémitisme. Un projet justifié, selon lui, par de multiples dérapages visant les citoyens de confession juive. « L’antisémitisme ne doit jamais reprendre le dessus en Allemagne », a-t-il déclaré, déplorant l’augmentation des « propos désobligeants, des plaisanteries inappropriées et des comportements discriminatoires à l’encontre [des] citoyens juifs ».
Les Verts, le Conseil central des juifs d’Allemagne, ainsi que le groupe parlementaire de la CDU ont appuyé cette démarche. Si cette idée fait consensus au sein de la classe politique allemande, certains veulent aller plus loin. L’élu CDU Armin Schuster a soumis une proposition permettant l’expulsion immédiate des étrangers ayant brûlé le drapeau israélien. Hormis le parti anti-immigration Alternative pour l’Allemagne (AfD), la totalité des formations politiques allemandes a rejeté cette recommandation. Il demeure, selon eux, impossible de savoir si les brûleurs de drapeaux étaient ou non de nationalité allemande.
L’histoire de l’Holocauste en toile de fond
Si le débat actuel porte sur la politique que doit mener l’Allemagne contre l’antisémitisme, il a rapidement pris une tournure plus historique. Le Président de la république, Frank-Walter Steinmeir, membre du Parti social-démocrate (SDP), a souligné la responsabilité de l’Allemagne de lutter contre l’antisémitisme en apprenant « les leçons des deux guerres mondiales, les leçons de l’Holocauste, la responsabilité pour la sécurité d’Israël, le rejet de toutes formes de racisme et d’antisémitisme ».
Le ministre allemand de la Justice, Heiko Maas (SPD), a quant à lui souhaité que l’histoire de l’Holocauste soit enseignée lors des cours d’instruction civique et d’apprentissage de la langue allemande dispensés aux migrants, ainsi qu’aux demandeurs d’asile, afin de faciliter leur intégration. Dans une interview accordée le 15 décembre 2017 au site du Spiegel, Heiko Mass avait affirmé que de nombreux migrants étaient originaires « de pays où de puissantes élites alimentent d’une manière intentionnelle la haine des juifs et d’Israël, et où l’antisémitisme est pratiqué presque comme allant de soi ». Il a en outre ajouté que « l’antisémitisme importé par les migrants » était tout aussi intolérable que celui qui prévalait chez certains citoyens allemands.
Le son de cloche est radicalement différent du côté de l’AfD. Certains membres du parti dénoncent l’établissement d’un lien entre la situation actuelle et l’histoire de l’Allemagne. Le 18 janvier 2017 un cadre était allé plus loin, déplorant l’existence à Berlin d’un mémorial « de la honte » rappelant l’Holocauste. Il avait aussi appelé le pays à cesser de se focaliser sur son passé nazi. Ce dérapage avait suscité l’indignation dans le pays.