Deux ans après l’ouverture de la salle de shoot, située dans le 10ème arrondissement de Paris, les commerçants du quartier dénoncent « un préjudice économique ». À cause de l’insécurité, certains ont mis la clé sous la porte tandis que d’autres songent à partir.
« Je suis à deux doigts de déposer le bilan ». Pierre, un restaurateur d’une quarantaine d’années, en a gros sur le cœur. Comme lui, de nombreux commerçants situés dans le quartier de la salle de shoot, près de l’hôpital Lariboisière et de la gare du Nord (Paris 10ème), sont excédés. Trafics de drogue, bagarres, toxicomanes qui se droguent en pleine rue, vols ou encore menaces font partie de leur quotidien.
Dans une lettre envoyée fin mai au ministère de la Santé et restée sans réponse, une trentaine de commerçants du quartier dénonçaient des « nuisances quotidiennes » et « un préjudice économique et commercial » engendré par la salle de shoot. Ouverte depuis octobre 2016, cette salle permet aux toxicomanes de faire leurs injections par voies intraveineuses dans de bonnes conditions sanitaires. « On nous a mis cette salle de shoot sans concertation et on se retrouve avec des toxicomanes ingérables. C’est de pire en pire », déplorent les commerçants et les riverains. Ils estiment vivre dans « un quartier sacrifié » et se sentent abandonnés par les pouvoirs publics.
Passionné par la gastronomie, Pierre a investi toutes ses économies dans son restaurant. Et son affaire marchait bien jusqu’à l’ouverture de la salle de shoot. « Entre 2011 et 2016, mon chiffre d’affaires a augmenté de 300 %. Entre 2016 et 2018, il a diminué de 40 % », détaille-t-il. Avant de poursuivre : « Nous étions cinq employés et nous ne sommes plus que trois. Je ne me verse plus de salaire depuis deux ans ».
« Beaucoup de clients nous disent qu’ils ne reviendront plus dans notre restaurant à cause de l’insécurité », détaille Julie, qui travaille avec Pierre. Elle raconte que « des mecs défoncés entrent parfois dans le restaurant pour demander des clopes ». Sans compter les bagarres quotidiennes sur le trottoir. « On ne peut plus travailler le soir, c’est impossible de mettre des gens en terrasse », conclut Pierre, qui a été menacé de mort plusieurs fois. Son restaurant, dont la valeur a baissé de 100 000 euros depuis son ouverture en 2011, est aujourd’hui au bord de la faillite. Les images filmées par le collectif « Riverains Lariboisière Gare du Nord » – des résidents du quartier de la salle de shoot – permettent de se faire une idée de la situation.
Ras le bol ! 5/09 De bon matin rue St Vincent de Paul, riverains,passants & commerçants obligés de supporter des scènes d’agressivité entre toxicomanes autour de la #salledeshoot #scmr #Paris10 Quand ce quartier va-t’il retrouver de la sérénité ? @ACORDEBARD @annesouyris @m6info pic.twitter.com/wXHdmuh30v
— Riverains Lariboisière Gare du Nord (@LariboisiereGDN) 5 septembre 2018