Un forum enseignant a sondé ses fidèles sur leurs intentions de vote ce dimanche - et, sans doute, à plus longue portée, étant bien entendu que les élections départementales auront un sens plus purement politique que strictement local.
Le fait même que ce sondage soit lancé implique que les résultats n’étaient pas évidents. On croit volontiers, à droite, que les enseignants votent à gauche : c’est une idée héritée des années Mitterrand, où cela était globalement vrai. Les syndicats enseignants majoritaires d’alors hésitaient entre obédience au PS et tentations communistes. À ne prendre en considération que le syndicalisme enseignant, cela reste vrai : le Snalc (Syndicat national des lycées et collèges) même, "classé à droite" par une presse un peu paresseuse, rassemble toutes les tendances "républicaines" et grouille d’ex-chevènementistes.
Mais nombre d’enseignants (la majorité en fait) ne sont pas syndiqués. Et les syndicats peuvent bien faire part de leurs préférences, leurs adhérents ont leur idée sur la question.
Confirmation des tendances antérieures
Le "sondage" de Néoprofs nous apprend ce que nous savions depuis 2007, où 20 % des enseignants ont voté Sarkozy au second tour : la droite, sans être plébiscitée (en additionnant FN, UMP, UDI, MoDem et Divers droite, on arrive à 23 %), a fait une percée significative dans une forteresse que l’on croyait un bastion inexpugnable de la gauche. L’institut de sondages Ifop a analysé en détail les tendances successives du vote enseignant de 2002 à 2012 : on trouvera ces analyses ici.
Ce qui est bien plus significatif, c’est l’érosion - il vaudrait mieux parler de glissement de terrain - du vote socialiste. L’addition PS + EELV + PRG ne s’élève qu’à 16 % - c’est dire la cote d’amour de l’actuelle majorité, minoritaire dans le corps enseignant comme dans le reste du pays.
Plus significative enfin, l’attraction du Front de gauche (20 %). Non que la personnalité de Jean-Luc Mélenchon enthousiasme tout le monde, mais il existe ici ce que j’appellerais la tentation Syriza/Podemos, qui me paraît un révélateur sûr des tentations profondes de l’électorat français, dégoûté des partis traditionnels, écoeuré par l’Europe des banquiers et des technocrates, et dégustant de face la politique d’austérité.