Sonia est cette rafraîchissante brunette – par rapport au sombre Patrick Liste Noire Cohen – qui a pris sur France Inter le créneau de l’analyse média-média. Un peu comme la police des polices qui enquête sur les petits accidents de la police. L’analyse médiatico-médiatique reste en de bonnes mains : Sonia pense bien, et à l’image de tous les journalistes bien-pensants, elle a pris sa claque le 9 novembre 2016 au petit matin, lorsque Trump a raflé les 20 grands électeurs de Pennsylvanie. Le 10, elle invitait le petit-fils Mendès France, Tristan, pour parler du poids du complotisme instillé par les réseaux sociaux dans l’opinion des innocents électeurs. L’autocritique, elle repassera !
Selon Sonia, ce ne sont pas les journalistes du Système qui sont responsables de la propagande et donc du rejet de la propagande par le peuple, qu’il soit américain ou français, mais les réseaux sociaux, qui sont désormais le premier vecteur d’information pour les gens. Facebook et ses algorithmes prendraient une place déterminante dans la formation et la déformation de l’opinion politique des internautes. En face, le New York Times et ses analyses, ses vérifications et ses enquêtes, pèse peu. En réalité, Sonia oublie que le NYT, cet instrument à la fois de Wall Street et des lobbies (militaire, grand industriel, communautaire) a travaillé sans relâche pour Hillary Clinton, au mépris des tendances que certains journalistes honnêtes relevaient dans la population.
Tendances qui sont, on le rappelle pour les absents : rejet de l’élite, de ses choix, constatation que la multi-crise (économique, monétaire, migratoire, terroriste) n’est peut-être pas tombée du ciel, mais constitue une véritable stratégie de l’élite contre le peuple. Une stratégie de contrôle, de domination, d’écrasement.
Sonia invite Tristan Mendès-France, le petit-fils de Pierre, qui fut président du Conseil en 1954-1955. Tristan enseigne au Celsa (la communication à La Sorbonne), et s’est spécialisé dans « les usages numériques ». Il avance que « 44% des Américains qui se sont intéressés à la campagne se sont informés exclusivement sur les réseaux sociaux ». La démonstration que Trump a été élu par des complotistes tend le bout de son nez. Tristan finira d’ailleurs sur un « Trump est devenu une machine à complots lui-même », peu digne d’un universitaire. Mais laissons parler les spécialistes.
Le sujet Trump-complotisme commence à 6’50 :
Si Tristan connaît bien la mécanique américaine des réseaux sociaux, et son impact sur la politique, nous ne sommes pas d’accord avec son assertion :
« Lui [Trump] n’arrêtait pas de dire qu’il a un ennemi, c’est les médias, alors que c’est les médias qui l’ont évidemment aidé »
- Pour Tristan Mendès-France Inter, Trump est une machine à complots
Les médias n’ont parlé de Trump que pour le démolir, Fox News mise à part. Se mettant ainsi en porte-à-faux avec les internautes, pour qui les médias ne sont que le relais du pouvoir oligarchique. On rappelle que 168 millions d’Américains sont connectés sur Facebook. Alors on accuse les algorithmes. Pour Sonia, ceux qui s’informent par les RS sont « enfermés dans une bulle ». Sonia et Tristan nous expliquent que les nouveaux informés par les RS se font manipuler, et par l’algorithme (qui privilégie une tendance politique ou affective au détriment de ses éventuels contradicteurs), et par l’enfermement idéologique constitué par leur bulle d’amis. Or il n’y a là aucune différence avec le bon père de famille qui était abonné au Figaro, qui en parlait avec son voisin (son semblable sociologique) et qui ne lisait pas Libération. Simple changement formel.
Tristan : « Moi je ne fais pas le procès des médias traditionnels qui ont fait un travail extraordinaire pendant toute la campagne, ils ont débunké [désintoxiqué, NDLR], ils ont décodé, ils ont essayé de désintoxiquer tout le poison qui était diffusé ! »
Sonia : « Chuis archi d’accord avec vous, chuis archi d’accord avec vous ! »
Illustration du fait que Sonia n’a archi rien compris au phénomène en cours :
« On peut peut-être rappeler que le “New York Times” ou CNN ont des audiences colossales sur le Web, colossales à côté du “Monde”, de TF1 ou de France 2 en France et pourtant ça ne fait pas le poids, le problème n’est pas l’audience, le problème est la façon dont l’information circule sur le réseau »
- L’air de rien, Sonia fait le signe du Diable dans le studio de la radio de propagande socialo-sioniste
Hélas, non. Tout ce qui est estampillé dominance est disqualifié d’avance par un nombre grandissant de personnes, chère Sonia, et France Inter en fait partie. Cela explique le déni persistant de la chroniqueuse, et sa recherche désespérée de raisons extérieures, recherche qui n’aboutira pas. Le « tunnel cognitif » dont Tristan qualifie les réseaux sociaux, n’est évidemment que l’image de l’enfermement idéologique que produit la propagande.
Pour bien enfoncer le clou de la démonstration claudicante, Sonia envoie un sonore d’Alex Jones, un conspirationniste qui a un succès fou sur les réseaux sociaux (à 13’40). Une entreprise de décrédibilisation du travail informatif de fond que les journalistes non-alignés ont produit sur le Net, que ce soit ou pas au profit de Trump. En tous les cas, ça a desservi Clinton, qui s’est présentée, erreur fatale, comme la candidate des marchés et des lobbies. Un suicide électoral réussi. Soudain, la contre-information devient complotisme et conspirationnisme dans la bouche de Sonia, vecteur de la propagande du socialo-sionisme au pouvoir.
Le plus drôle, dans ce concours d’inversions de la part de cette paire de représentants 2.0 du Système, qui sont les gardiens inconscients du mensonge oligarchique, c’est qu’ils ne comprennent pas pourquoi la vérité buzze mille fois plus que le mensonge. Oyez comment Tristan parle de la vérité et du mensonge :
« C’est ça qui est effectivement assez inquiétant, c’est que le poison est plus fort que l’antidote. Je peux vous dire par exemple lorsque Trump dit que Obama a financé Daech, ça fait un buzz planétaire ! Le contre-argumentaire pour dire non c’est faux, c’est du délire ce genre de propos-là, a moins d’audience, fait moins de buzz ! Donc mécaniquement, tout simplement, les fausses informations spectaculaires ont mécaniquement plus d’information que l’antidote qui peut être diffusé par la suite et qui en plus n’atteindra pas forcément ceux qui ont été touchés par le poison. »
Et un magnifique lapsus pour finir !