En 1990, après la chute du mur de Berlin, du communisme et de l’Union soviétique, les néoconservateurs américains qui tenaient l’État profond, à savoir le triumvirat Rumsfeld-Cheney-Wolfowitz, estimèrent qu’ils disposaient de 10 ans pour faire tout ce que l’Amérique n’avait pas pu faire du temps de l’équilibre des hyperpuissances.
Ce qui fut appliqué sans attendre : l’invasion du Koweït par un Saddam Hussein trop confiant sonna le glas du régime irakien, dont le pays sera battu en 1990, envahi en 2003, et enfin totalement disloqué à partir de 2011, lors du départ des Américains, qui laissèrent derrière eux un radicalisme islamiste à leur solde et un pays en ruines. De l’art de déléguer le sale boulot.
Le retour de la Grande Russie, symbolisée par la prise de pouvoir de Poutine en 1999, a quelque peu corrigé les ambitions américaines. Ce qui explique, en dehors du terrain proche-oriental, la stratégie d’étouffement de la Russie à travers ses ex-satellites, qui tombent l’un après l’autre dans l’escarcelle de l’OTAN. Qui n’est autre que l’armée US en Europe. Une Europe qui n’a toujours pas d’armée.
Et comme la diplomatie recouvre toujours un rapport de forces militaire, le retour de la Russie sur la scène géopolitique mondiale est symbolisé par l’armement « avancé » qu’elle fournit à ses alliés : on pense aux batteries anti-aériennes S-300 à l’Iran (et peut-être S-400), destinés à tenir la très agressive flotte aérienne d’Israël en respect, et plus récemment, la nouvelle version du chasseur Sukhoï (SU-30), l’avion « qui fait de la marche arrière ».
Un petit reportage de la chaîne RT sur le Sukhoï :
En face, car l’opposition américano-russe n’est plus contestable, on laisse de l’armement de guérilla aux factions mercenaires qui ont pour fonction de détruire ou déstabiliser les pays qui intéressent géopolitiquement les Américains. Qui font d’une pierre deux coups, suivant la méthode saoudienne éprouvée : exporter son islamisme dangereux, s’en servir contre les nations arabes nationalistes ou par trop laïques, en tous les cas non-alignées (sur les USA et Israël), et laisser les armées régulières éliminer ce même danger djihadiste.
Ainsi, depuis le début de l’agression internationale contre la Syrie, 50 000 djihadistes – en majorité étrangers – sont morts, ainsi que 57 000 soldats de l’Armée arabe syrienne. Sur les 95 000 djihadistes impliqués, un sur deux a été tué sur les champs de bataille. Une armée mercenaire qui s’auto-dissout, un tueur qui finit tué... le rêve de l’Empire, qui ne risque plus ses propres soldats au sol, pour des raisons de politique intérieure.
Ces données chiffrées sont issues d’une source unique, l’OSDH (Observatoire syrien des droits de l’homme), très contestée, puisqu’elle est financée par le Qatar et l’Union européenne. Raison pour laquelle on la suppose favorable aux Frères musulmans, dont le Qatar est le principal sponsor. Le problème est que chaque communication provenant de l’OSDH est considérée comme une information par les agences de presse occidentales. Ce qui a expliqué l’intense brouillage des deux premières années de guerre en Syrie (2011-2013).
Aujourd’hui, depuis la résistance inattendue de l’armée de Bachar al-Assad, le soutien de la Russie, et le revirement possible de la Turquie, les journalistes des médias dominants occidentaux, qui avaient tous parié sur un effondrement du « régime de Damas » en 2013, commencent – seulement – à composer avec la réalité. Sans les armes russes, cela aurait-il été possible ?