Grâce à la vague de bombardements menés par la Russie mercredi, l’armée syrienne a pu lancer une vaste offensive terrestre dans l’ouest du pays. Une opération qui en dit long sur la priorité militaire de Moscou en Syrie. Explication avec Wassim Nasr.
L’intervention de Moscou en Syrie est entrée, mercredi 7 octobre, dans une nouvelle phase avec le début d’une "vaste offensive terrestre" menée par l’armée syrienne dans "le nord de la province de Hama", avec le soutien de l’aviation et, désormais, de la marine russe.
Cette forte implication de la Russie a redonné de l’élan au régime de Bachar al-Assad, qui avait accumulé les revers militaires ces derniers mois face aux forces rebelles et au groupe jihadiste État islamique (EI). Après une semaine de raids aériens menés sur 112 cibles dans le pays, le président Vladimir Poutine a annoncé que son armée allait intensifier ses opérations.
Pour la première fois depuis leur intervention, les forces russes ont lancé des frappes depuis des croiseurs de la flottille de la mer Caspienne. Quatre d’entre eux ont, selon Moscou, tiré 26 missiles de croisière sur 11 cibles de l’EI. Selon des sources sur le terrain, l’engagement russe se traduirait également par une présence d’hommes au sol.
Reste que pour les rebelles syriens et leurs soutiens en Occident, la Russie vise surtout d’autres groupes que l’EI, ceci dans le but de défendre le régime plutôt que de lutter contre l’organisation jihadiste. Pour Wassim Nasr, journaliste de France 24, spécialiste des milieux jihadistes, Moscou répond à des "impératifs militaires" qui contredisent sa "parole politique". Explications.
Wassim Nasr : Les Russes mènent principalement leurs frappes contre les positions rebelles du centre de la Syrie, dans la région d’Idlib et de Hama. Or il faut rappeler que l’EI n’est présent ni dans la zone d’Idlib, ni dans la zone visée à l’ouest de Hama depuis janvier 2014.
De fait, les frappes russes se concentrent dans ces zones tenues par les rebelles pour la simple raison que c’est là que se situe la plus grande menace pour le régime d’Assad. Le but est de sécuriser ce qu’on pourrait appeler "la Syrie utile", c’est-à-dire l’axe Damas-Homs-Lattaquié, et d’y créer une sorte de no man’s land entre les zones rebelles et les zones contrôlées par l’armée syrienne afin de faciliter les opérations militaires du régime et affaiblir l’insurrection. C’est une priorité militaire. Pour la Russie, le discours politique acceptable est de dire qu’elle frappe l’EI, mais les impératifs militaires font que ce sont les rebelles, aidés par l’Occident, qui sont in fine visés en premier lieu.