Arthur Sapaudia pour E&R : Antoine Martin, vous avez publié aux éditions Kontre Kulture, à ce jour, deux ouvrages. Pouvez-vous nous rappeler la thèse du Chant dans la fournaise, et celle de sa suite, La Chute des astres ?
Antoine Martin : Dans Le Chant dans la fournaise, j’ai essayé de démontrer que notre société occidentale n’est pas athée. Elle a seulement changé de religion, en prétendant faire de l’homme une divinité, et supplanter ainsi le Dieu du christianisme. Laïcité, transsexualisme, transhumanisme, culture de l’avortement, capitalisme financier... Autant de lieux où, pour qui sait y regarder, s’incarne cette spiritualité de l’homme devenu Dieu. Spiritualité délétère, spiritualité vouée à l’échec : vouloir se transfigurer en divinité autonome constitue le plus sûr moyen de se défigurer pour de bon.
La Chute des astres se présente comme le prolongement de cette réflexion. Ayant constaté que de nombreux promoteurs de cette religion centrée sur l’homme étaient de confession juive, j’ai d’abord voulu voir en quoi le judaïsme pouvait en être le vecteur. La dernière partie du livre se concentre sur la situation française et sur la question suivante : comment la fille aînée de l’Église a-t-elle pu devenir le pays des droits de l’homme ?
Dans votre conférence donnée à Genève le 2 mars 2019 intitulée L’Homme : un dieu ou une bête ? – Menaces sur l’anthropologie chrétienne, vous abordiez ce qui, dans la société, tend à faire de l’homme soit un dieu, soit une bête. Citons par exemple le développement personnel, le transsexualisme, les nouvelles formes d’éducation et le transhumanisme d’un côté, et au contraire, le véganisme, la dépopulation, les GINKs (Green Inclination No Kid) et l’« écosexualité » de l’autre. Est-ce que d’autres faits de société visant à diviniser ou « animaliser » l’homme sont apparus depuis bientôt trois ans et plus particulièrement avec la pandémie fantôme du Covid-19 ?
Effectivement, notre société est ballottée entre deux tendances apparemment contradictoires : diviniser l’homme ou le rabaisser au rang des bêtes, voire plus bas que ces dernières. Cependant, la contradiction disparaît si on considère ces deux tendances comme les deux mâchoires d’un même étau dialectique, poursuivant en fait le même but : prendre en tenaille l’anthropologie chrétienne afin de l’attaquer plus sûrement. En effet, selon cette dernière, Dieu a créé l’homme inférieur à lui, mais supérieur au reste de la création (ce qui implique bien sûr une responsabilité). Cette hiérarchie, nous la trouvons admirablement rappelée dans le huitième psaume de la Bible :
À voir ton ciel, ouvrage de tes doigts, la lune et les étoiles que tu fixas, qu’est-ce que l’homme pour que tu penses à lui, le fils d’un homme, que tu en prennes souci ? Tu l’as voulu un peu moindre qu’un dieu, le couronnant de gloire et d’honneur ; tu l’établis sur les œuvres de tes mains, tu mets toute chose à ses pieds : les troupeaux de bœufs et de brebis, et même les bêtes sauvages, les oiseaux du ciel et les poissons de la mer, tout ce qui va son chemin dans les eaux.
Ceci rappelé, il me semble qu’avec le covid, c’est le versant anti-humain de cette attaque qui s’est le plus exprimé. De toute évidence, la divinisation n’est désormais réservée qu’à une toute petite élite, qui, elle, prétend gérer le commun des mortels comme un vaste troupeau. D’un côté les dieux, de l’autre les inutiles, comme dirait Laurent Alexandre ! Quotidiennement, nous nous voyons ainsi sommés d’accepter une injection expérimentale, dont nous ne savons pas encore si elle vise à nous pucer, à nous stériliser ou à nous supprimer. Sans parler de cette muselière d’un nouveau genre qu’est le masque...
Depuis plusieurs années déjà, un certain discours écologiste prétend faire de l’homme le gêneur de ce monde. Mais ces propos ont encore pris de l’ampleur avec la « pandémie » : lors du premier confinement, on a pu voir des gens nous expliquer que la planète respirait mieux depuis que tout le monde était enfermé chez soi !
Et voici un autre exemple dans le domaine de la culture populaire : début mars 2020, il était encore difficile de savoir avec certitude si le coronavirus était ou non une maladie grave. C’est pourtant ce moment précis que le groupe de métal symphonique Nightwish a choisi pour publier son clip Harvest. On y voit une nature magnifique, vierge de toute trace humaine, hormis ici et là quelques pierres tombales. Sur une musique joyeuse, le refrain nous invite gentiment à nous « rendre à la terre » et à inspirer nos enfants dans ce sens...
Face à cette crise du covid, entre mensonges du gouvernement, expérimentations à échelle mondiale, mise au ban des non-injectés, hypnose collective, Great Reset pour tous… Quelle est la réaction catholique adéquate ?
Pas celle indiquée par la hiérarchie catholique, en tout cas ! L’épiscopat français, dans son immense majorité, répond aux mesures liberticides par un silence assourdissant. Quant au pape François, il appelle tous les fidèles à se faire vacciner : il s’agirait, selon lui, d’un acte d’amour ! Ce à quoi Sara Cunial, une députée italienne, a très justement répondu qu’un acte d’amour effectué sans consentement et sous contrainte s’appelait plutôt un viol.
Heureusement, quelques voix courageuses se sont levées dans une frange marginalisée de l’épiscopat : celle de Mgr Carlo Maria Viganò et du Cardinal Müller, qui ont tous deux fermement dénoncé le coup d’État mondial en cours. Au niveau des laïcs catholiques, les engagements sont très divers et se mêlent souvent à des initiatives non spécifiquement catholiques : combats juridiques, manifestations, pétitions, entraide...
Je voudrais cependant souligner deux domaines où une réponse spécifiquement catholique a été apportée. Tout d’abord, beaucoup de fidèles ne refusent pas l’injection seulement à cause du danger qu’elle représente pour la santé et pour la liberté, mais encore pour une autre raison : l’utilisation, dans la conception de ce « vaccin », de cultures de cellules issues d’embryons avortés. Beaucoup de catholiques estiment avec raison qu’accepter en connaissance de cause un tel « remède », c’est cautionner l’industrie de l’avortement et le trafic d’organes qui l’accompagne.
Enfin, on a vu ces derniers jours une initiative inédite, appelée La France prie. Des milliers de catholiques, souvent sans demander l’autorisation ni à leur préfet ni à leur curé, se réunissent en plein air, dans des lieux publics, pour prier le chapelet. À mal public, prière publique ! Compte tenu du fait que les catholiques français avaient largement intégré la laïcité comme norme de comportement, une telle initiative mérite d’être signalée.
Selon vous, sommes-nous rentrés dans la fin de temps, annoncée par les écritures ?
Selon l’auteur de la lettre aux Hébreux dans le Nouveau Testament (I, 2), nous sommes dans les derniers temps depuis la venue du Christ ! Cependant, il est indéniable que l’époque actuelle a comme un goût d’Apocalypse. Avec le pass vaccinal, le « vaccin » anti-covid s’apparente de plus en plus au chiffre de la Bête, sans lequel il sera impossible d’acheter ou de vendre (Apocalypse XIII, 17). Quant au pape François, il ressemble à s’y méprendre au faux prophète, décrit par saint Jean comme une Bête qui avait deux cornes comme un agneau, mais qui parlait comme un dragon (Apocalypse XIII, 11).
Vivons-nous pour autant exactement les événements annoncés dans l’Apocalypse, ou bien faut-il parler de simples préfigurations d’autres événements encore à venir ? Bien adroit qui pourra l’affirmer avec certitude ! Déjà à son époque, saint Jean déclarait :
Petits enfants, voici venue la dernière heure. Vous avez ouï dire que l’Antichrist doit venir ; et déjà maintenant, beaucoup d’antichrists sont survenus : à quoi nous reconnaissons que la dernière heure est là. (I Jean II, 18)