Bruno Le Maire et Édouard Philippe ont tous deux récemment parlé « d’addiction française à la dépense publique ». Pour Coralie Delaume, cette interprétation de la situation financière du pays est très largement contestable.
Coralie Delaume est essayiste, co-auteur de La fin de l’Union européenne (Michalon, 2017) et animatrice du site L’arène nue.
« Il y a une addiction française à la dépense publique (…). Comme toute addiction, elle nécessitera de la volonté et du courage pour s’en désintoxiquer », déclarait le premier ministre Édouard Philippe lors de son discours de politique générale. Il faisait écho au ministre de l’économie Bruno Le Maire, lequel affirmait quelques jours auparavant « Depuis 30 ans, la France est droguée aux dépenses publiques. Oui, il faut les réduire : c’est une question de souveraineté nationale. »
On se demande bien en quoi le fait de tout faire pour respecter des « critères de convergence » arbitraires tel celui des 3 % de déficit imposé par l’appartenance à l’Union européenne ( quand il ne s’agit pas de « faire des réformes pour regagner la confiance de l’Allemagne » ) au détriment du bon fonctionnement de nos administrations et de la pérennité de nos services publics serait bon pour la souveraineté nationale. Ne serait-ce pas précisément l’inverse ?
En réalité, tout cela ne sert qu’à introduire la batterie de mesures austéritaires qui seront annoncées en septembre lors de la présentation du projet de Loi de finances 2018. La Cour des comptes les a rendu plus inévitables encore avec la publication de son rapport « accablant » du 29 juin mais elles seraient intervenues quoiqu’il arrive pour satisfaire Bruxelles. Passons donc sur cette aberration qui consiste à affirmer que la souveraineté nationale consiste à chérir le carcan supranational.
Car une autre erreur se trouve à l’origine des allégations d’Édouard Philippe et de Bruno Le Maire. Une erreur commune, qui consiste à considérer que la France dépense trop non seulement au regard de ses engagements européens, mais aussi « en général » puisque ses dépenses publiques représentent 56 % de son PIB.