« Je suis si rapide que la nuit dernière, quand j’ai éteint la lumière dans ma chambre d’hôtel, j’étais déjà au lit avant qu’il fasse noir dans la pièce. »
« J’ai innové pour ce combat. J’ai lutté avec un alligator. Je me suis battu avec une baleine. J’ai mis les menottes à un éclair, j’ai jeté le tonnerre en prison. Rien que la semaine dernière, j’ai tué un rocher, blessé une pierre, envoyé une brique à l’hôpital. Je suis si méchant que je rends la médecine malade ! Je peux courir à travers un ouragan sans me faire mouiller. Quand George Foreman va me rencontrer, il va payer sa dette. »
Mohamed Ali s’est éteint à l’âge de 74 ans, vendredi à Phoenix, en Arizona. Champion du monde à trois reprises, il aura régné sur l’âge d’or des poids lourds et forgé sa légende par ses luttes en dehors du ring.
L’immense champion de boxe Mohamed Ali est décédé vendredi soir à Phoenix, à l’âge de 74 ans, selon NBC, citant un porte-parole de la famille. Hospitalisé depuis jeudi pour des problèmes respiratoires, l’ancien triple champion du monde de boxe a succombé à des problèmes respiratoires. Sa famille avait annoncé précédemment que le traitement de son état était rendu plus difficile par la maladie de Parkinson dont il souffrait depuis trois décennies.
À la croisée du mythe et du scénario hollywoodien, la vie de Cassius Clay – le nom d’origine de Mohamed Ali – bascule sur un banal larcin. Et qui sait, celle-ci aurait été sans doute radicalement différente si, cet après-midi d’automne 1954, parti s’empiffrer de pop-corn, l’étourdi n’avait pas laissé son vélo tout neuf à la merci du premier voleur de passage. Vexé, le jeune Clay veut en découdre et se rend dans une salle de boxe. Douze ans, quarante kilos tout mouillé, mais déjà plein d’aplomb. « Ce gars est foutu, je vais le terminer à la première reprise », prédit-il à la gazette locale avant son premier combat.
Fils d’une famille modeste, Clay grandit à Louisville, cité industrielle du Kentucky déchirée par la ségrégation raciale. Plus à l’aise sur les rings que sur les bancs de l’école, il remporte, en 1959, le prestigieux tournoi des Golden Gloves. À Rome, l’année suivante, il surpasse sa peur de l’avion pour s’adjuger l’or olympique, chez les mi-lourds. Après une centaine de rencontres amateurs, le phénomène passe professionnel à 18 ans sous la tutelle d’Angelo Dundee, son homme de coin de toujours.
Spectaculaire, par son jeu de jambes et ses esquives d’un temps nouveau, Clay monte rapidement dans la hiérarchie des poids lourds. À peine quatre combats à son actif, il ridiculise Ingemar Johansson, ex-roi de la catégorie, lors d’une séance de sparring. Insolent, il déclame, parfois en vers, des odes à son talent devant la presse qui se délecte. En 1962, il envoie au tapis Archie Moore, ancien champion du monde des mi-lourds. Un an plus tard, il triomphe d’Henry Cooper à Wembley et s’offre une chance mondiale face à Sonny Liston.
De Cassius Clay à Mohamed Ali
« Tout le monde pensait que Sonny lui fermerait sa grande gueule et le renverrait à Louisville dans un linceul », résume Nigel Collins, journaliste américain, cité par Frédéric Roux dans Alias Ali. Trop jeune, trop tendre, les bookmakers donnent Clay perdant à 7 contre 1 ; même L’Équipe parle du « championnat du monde le plus commercial » jamais mis sur pied.
Ce 25 février 1964, le sacre de Clay est escorté par la controverse : Liston, invoquant une blessure à l’épaule, abandonne sur son tabouret. « Je suis le plus grand... J’ai choqué le monde ! », s’exclame alors le vainqueur, hystérique face à la presse. Des archives du FBI déclassifiées en 2014 tendent à accréditer les suspicions de fraude. Les mêmes doutes naîtront de la revanche, remportée par Clay un an plus tard sur une droite anodine, le tristement célèbre « coup de poing fantôme ».
Fort de son titre, Clay annonce sa conversion à l’islam et prend le nom de Mohamed Ali. Il s’affiche au coté de Malcom X et Elijah Muhammad, leaders de la Nation de l’Islam, un groupuscule sectaire afro-américain qui prêche la haine des Blancs et la séparation des races. Dès lors, plus qu’il n’amuse, Ali divise et cristallise les peurs de l’Amérique blanche. Sa déclaration sur le Vietnam, alors que les États-Unis y sont en guerre – « je n’ai rien contre le Vietcong, aucun Vietnamien ne m’a jamais traité de nègre » – lui vaut l’opprobre des patriotes. Le fossé avec le public se creuse, ses victoires ne font plus recette. Le refus de son incorporation, en 1967, entraîne la perte de son titre. Le début d’un exil de trois ans et demi loin des rings.
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