Pour Alain Minc, passerelle numéro un entre le gros business, la haute banque et le gratin politique, le Grand débat national est « une porte qui s’ouvre » dont il faut profiter pour « décorseter » les institutions. Exactement les éléments de langage du président, repris à l’identique par les journalistes de cour : Martichoux de RTL, Lapix de France 2, la liste est longue des redevables. Nous sommes sur RTL, première radio de France, mardi 15 janvier de l’an 1 des Gilets jaunes. Yves Calvi réputé puncheur lourd de l’interview, devrait défoncer le poids mouche Minc. Sauf s’il s’agit d’un combat truqué.
- Minc déstabilisé à mort par le puncheur Calvi
L’homme d’affaires, conseiller et essayiste publie un roman, pardon, un livre chez Grasset, la maison d’édition où sévit BHL. Ses multiples casquettes laissent à Minc le temps d’écrire un livre par an (avec un record de 5 ouvrages en 1994 !) – c’est donc un surhomme – et son dernier opus, s’il n’a pas été écrit par une bande de nègres, s’intitule Voyage au centre du Système. On va apprendre des choses sur les élites consanguines qui nous emmènent dans le mur, pense-t-on. L’animateur attaque sur le Grand débat qui est censé intéresser les Français.
Calvi : « On attend définitivement la liste des 5 garants qui doit être officialisée, quelle est votre perception de ce cadre ? »
Minc : « Dans une société transparente comme la nôtre, il n’y a aucune chance de pouvoir biaiser. »
Ça commence mal, le roi des réseaux plus ou moins occultes ose parler de société transparente… D’après le conseiller des princes et de leurs sponsors (ou maîtres), le débat national qui s’étale du 15 janvier au 15 mars « va jaillir de lui-même » et concerner « des millions de gens ». Avant de sortir ce genre de prono chimérique, il faudrait que ce petit homme du Haut fasse un petit tour dans la France du Bas.
À 2’10, l’animateur prend soudain un risque avec la vie.
Calvi : « C’est quoi le Système Alain Minc ? »
Minc : « Moi je dis que je suis à l’angle de quatre systèmes, c’est-à-dire la politique, l’économie, la vie intellectuelle, les médias. Le Système, c’est comment fonctionnent les sociétés hiérarchiques. Le problème ce n’est pas qu’il y ait des élites – il n’y a pas de société sans élites –, la seule vraie question devant laquelle nous sommes aujourd’hui c’est “est-ce que ces élites sont représentatives”, c’est-à-dire est-ce que la méritocratie qui permettait à peu près à tout le monde qui était doué d’entrer dans ces élites fonctionne encore. Et la réponse là-dessus est clairement “nous avons régressé”. »
Tout à fait d’accord. On attend la révélation d’Alain (Minc) sur la surreprésentation de certaines communautés dans nos élites qui explique la décadence politique et économique actuelle.
Minc : « Quand il y a 50 ans j’étais en classe de préparation aux grandes écoles, il y avait 4 fois plus de fils d’ouvriers et d’étudiants issus des catégories modestes qui entraient dans les grandes écoles et en particulier à l’“X”. »
Déception ! On pensait qu’Alain allait aller au bout de sa pensée, pas seulement de la nôtre, et dénoncer le bunker très fermé des élites sionisantes françaises. À la place, le sempiternel « il faut plus de fils d’ouvriers dans les prépas », ce qui constitue une diversion pour imbéciles.
- Pendant l’interview Gentille, Calvi-la-prudence fait des signes kabbalistiques mystérieux
Ne comptons pas sur Calvi pour reprendre le premier lobbyiste de France de volée, il en est incapable : RTL, ça paye bien, très bien, plus de 50 patates par mois, un million d’euros par an tout compris (théoriquement pour payer son équipe). Profitant de l’apathie du gentil journaliste, Minc s’en prend alors à « notre système éducatif ». C’était donc ça, le méchant Système…
Minc : « Contrairement à ce que disent beaucoup de gens, ça n’est pas la mondialisation, c’est tout simplement que notre système éducatif qui est là pour compenser les inégalités nées du système économique fonctionne de moins en moins. Que nous régressions dans le classement PISA ça n’a rien à voir avec le libre-échange. »
Ben tiens ! Et qui c’est qui tient le système économique ? En d’autres termes, qui augmente les inégalités sociales en créant une super-élite qui sort de supers-écoles face à une armée de mômes décervelés par un enseignement public en décomposition programmée par un gauchisme complice du Capital ? Naturellement, Calvi ne bronche pas. C’est un passeur de plats, pas un journaliste de réflexion ou d’investigation.
Vient la phrase magique à 3’43 quand on aborde le chapitre des Gilets jaunes :
Minc : « Ce que je n’aime pas dans le mouvement des Gilets jaunes c’est qu’ils disent “nous sommes le peuple” et ça, c’est une escroquerie intellectuelle. »
Comme est une escroquerie intellectuelle la tentative de faire croire que le Système merde à cause de l’école alors qu’il est bloqué par des élites illégitimes qui se cooptent entre elles sur des critères qui ne sont plus vraiment la compétence ou le courage personnel mais le réseau, le tribalisme, la communauté. À escroc, escroc et demi ! Naturellement, Calvi fait le mort.
Reconnaissons qu’ensuite Alain-le-Petit dit un truc pas idiot : la fin du cumul des mandats pour les élus a soustrait pas mal de rémunération et donc de motivation aux candidats à la politique, du coup il ne reste plus que des « riches » et des « ascètes » pour en faire. On confirme à 100% !
Quant aux adeptes du RIC, ils apprécieront la précision suivante : « d’abord il est prévu par la Constitution avec un certain nombre de verrous ». Traduction : ceux qui manifestent pour un référendum d’initiative populaire sont des imbéciles qui ne lisent pas la Consti de 58 jusqu’au bout.
Le second risque que Calvi prend avec la vie se situe à 6’12 quand il révèle la première (et la dernière) info gênante sur Alain-le-petit, d’ailleurs il se plante dans son calcul (du moment que c’est pas ses émoluments), comme la plupart des animateurs qui ne touchent pas un calot en maths :
Calvi : « Vous êtes président de la SANEF, c’est une des trois principales sociétés autoroutières. La hausse du 1er février, moins 1,8%, aura-t-elle lieu et pensez-vous qu’elle soit nécessaire ? »
- Les Gilets jaunes vous casquez, moi j’encaisse
Et là, les experts en morphopsychologie décèleront une pétrification fugace du visage de l’invité. Dont la réponse vaut son pesant de shekels : quand on touche au grisbi, adieu la transparence. Calvi n’insiste pas, il ne fait pas le poids, il ne fait pas partie de la communauté du Culot.
Calvi démission !
La preuve, quand Alain-le-Petit s’essaye à la vanne de polytechnicien avec sa « superficialité profonde », un oxymore lamentable, ce pauvre Calvi se met à rire comme un bouc hystérique. Un effet rétro de la peur, dirait un psychologue.
Or il n’y a rien de drôle à recevoir un type qui raconte des salades en public et qui en privé rackette des Français déjà en colère de 2% de plus sur les tarifs d’autoroutes privatisées par des élites politiques corrompues au profit d’élites économiques corruptrices ! Ce sont bien les intermédiaires entre ces pouvoirs qui incarnent la perversion de ce Système.