Le Mexique a perdu la guerre contre ses cartels de la drogue. Les narcotrafiquants mexicains sont devenus les plus importants fournisseurs d’héroïne, de métamphétamines, de cocaïne, d’héroïne ainsi que de Fentanyl, un opioïde synthétique plus puissant que l’héroïne, du continent nord-américain.
La cocaïne, produite en Bolivie, en Colombie et au Pérou, transite également, en toute sécurité, par le Mexique. Les dizaines de milliards de dollars que cela rapporte aux cartels, chaque année, leur ouvrent toutes les portes au nord et au sud du Rio Grande, le fleuve-frontière entre le Mexique et les États-Unis.
Le plus grand cartel actuel reste Sinaloa, l’organisation « historique », anciennement dirigée par le célèbre « El Chapo » Guzman, arrêté et extradé aux États-Unis. L’organisation conserve des réseaux internationaux puissants. Les autres cartels sont celui de Jalisco, le challenger qui monte, Juarez, le cartel rival de longue date de Sinaloa, basé dans l’état central de Chihuahua, à la frontière du Nouveau-Mexique et du Texas, le cartel de Tamaulipas, celui de Los Zetas ou l’Organisation Beltran-Leyva. De tous ces cartels peuvent sortir de nouveaux dirigeants plus ambitieux, plus cruels, prêts à paver de cadavres leur ascension vers le pouvoir.
Les cartels ont arrosé les juges, la police, les politiciens et les fonctionnaires pour neutraliser toutes les mesures officielles décidées par les gouvernements successifs à leur encontre. Rien n’a marché. Dès la fin des années 80, les gangs mexicains ont pu remplacer les gangs antillais, sévèrement touchés par les opérations de police, pour introduire la cocaïne colombienne aux États-Unis.
Le président Calderon avait déclaré la guerre aux cartels en 2006. Au cours de ses six ans de mandat, il a fait appel à l’armée pour remplacer les forces de police locales corrompues. Vingt-cinq des trente-sept chefs de gangs les plus recherchés au Mexique ont été neutralisés. Mais cette stratégie n’a fait que faire muter les organisations de trafiquants. Elles se sont multipliées, émiettées, sont devenues plus difficiles à identifier. Les rivalités entre ces nouveaux gangs se sont traduites par une violence accrue dans la rue. Les organisations criminelles ayant recours aux enlèvements pour compléter leurs revenus, une centaine de maires a été tuée en seulement dix ans, de 2006 et 2016.
Le président Pena Nieto, qui a pris ses fonctions en 2012, n’a eu d’autre choix que de continuer à recourir à l’armée mexicaine, faute de pouvoir purger les forces de police. Quarante-trois étudiants ont disparu dans la Ville d’Iguala, en 2014, dans l’état de Guerrero. C’était la police locale, elle-même, qui les avait livrés aux trafiquants de drogue, sur l’ordre du maire corrompu par le gang ! Le scandale, mettant en lumière la corruption généralisée des politiques et des policiers, a déclenché des manifestations dans tout le pays. Les paysans ont mis en place des milices d’auto-défense, les Todefensas, pour faire le travail à la place de la police en rétablissant l’ordre dans les villes. Ces milices sont devenues irremplaçables dans plusieurs états, comme le Guerrero, le Oaxaca ou le Michoacan. Mais leur glissement vers le crime organisé inquiète les observateurs.
Les États-Unis, comme à leur habitude, ont beaucoup communiqué sur leurs actions, dépensant des millions de dollars dans des programmes plus inefficaces les uns que les autres. Ils ont envoyé des drones et des agents de la CIA pour former une police fédérale mexicaine hautement corruptible... Maintenant, avec le président Donald Trump, ils vont recourir à leur tactique habituelle : le repli. Ayant fait de l’immigration et de la sécurité frontalière sa priorité, Donald Trump va arrêter de dépenser l’argent de ses contribuables, mettre en place une frontière de plus en plus hermétique, laissant le Mexique et les Mexicains se débrouiller. C’est bien, d ’ailleurs, la meilleure chose qui puisse arriver au Mexique.