Lettre ouverte à Monsieur le Directeur de la Rédaction du Monde diplomatique [Serge Halimi, photo ci-contre, NDLR]
Par Guy Martin
Objet : traitement de l’affaire syrienne par Le Monde diplomatique
Monsieur le Directeur,
J’ai reçu il y a quelques jours ma convocation à l’assemblée générale des Amis du Monde diplomatique qui se tiendra le 27 juin 2015, et je souhaite expliquer à la rédaction du journal pourquoi je ne m’y rendrai pas.
Depuis mars 2011 en effet, j’attends vainement d’un journal dont c’est la raison d’être un dossier de fond, une analyse objective, historique, sociologique, géostratégique, d’une affaire internationale qui constitue sans doute le problème diplomatique le plus important de ces dernières années – puisqu’il a vu, entre autres, les flottes américaine et russe à deux doigts de s’affronter directement en Méditerranée, et la manifestation la plus démonstrative de la situation géostratégique internationale en ce début de XXIème siècle.
Le Monde diplomatique a plusieurs fois, depuis 2011, expliqué comment les États-Unis d’Amérique agissent sur la scène internationale. Comment ce pays, corrompu par les intérêts militaro-pétroliers ou de l’agro-alimentaire, fomente depuis des années une nouvelle forme de coups d’État « populaires ». Ce mois de juin, Le Monde diplomatique révèle encore les agissements de « La main noire de Washington de Santiago à Caracas ». En août 2014, Maurice Lemoine expliquait comment est advenue « En Amérique latine, l’ère des coups d’État en douce » ; comment de faux policiers, de faux manifestants tirent dans une foule pour déclencher une émeute sanglante et déstabiliser un État indocile.
Mais pour l’indocile Syrie, en mars 2011, la dérive sanglante des manifestations aurait été « normale » ? La question n’a pas même été posée par Le Monde diplomatique. Alors que Le Canard enchaîné publie régulièrement depuis quatre ans des informations mettant en évidence le jeu des vassaux américains sous la scène syrienne, au premier rang desquels le Qatar, Le Monde diplomatique est resté étrangement taisant. Il est vrai que, quelques mois à peine après le début de ce qui présente les caractéristiques d’un « coup d’État en douce » en Syrie (coup d’État qui aurait pu se dérouler en Bolivie, en Équateur ou au Venezuela), Le Monde diplomatique accueillait, en septembre 2011, tout un supplément publi-rédactionnel sur « La diversification au Qatar ». Est-ce que cette manne publicitaire était bienvenue étant donné son origine et à ce moment-là ? Il ne me semble pas, en tout cas, avoir lu par la suite un développement sur la peine de prison à vie infligée le 29 novembre 2011 par le régime qatari à un écrivain, Ibn al-Dhib, pour un simple poème. Pas un mot sur les sources de financement des extrémistes que combattent les soldats français au Mali…
Ni sur la tentative de manipulation relative à l’usage d’armes chimiques par l’armée nationale syrienne, démasquée par la procureure Carla Del Ponte, ni sur le prétendu bombardement du camp palestinien de Lattakié par des canonnières syriennes. Pas un mot sur les prétendues manifestations de masse anti-Bachar et les chiffres fantaisistes qui ont été publiés à ce sujet – par Le Monde notamment, d’ailleurs.
Lire la suite de la lettre sur arretsurinfo.ch
Revoir l’analyse d’Alain Soral sur Serge Halimi et Le Monde diplomatique (extrait de l’entretien d’octobre 2013) :