En règle générale, dans les cas de crime flagrant ou de délit flagrant puni d’une peine d’emprisonnement, toute personne a qualité pour en appréhender l’auteur et le conduire devant l’officier de police judiciaire le plus proche (article 73 du code de procédure pénale). L’entrée irrégulière de l’étranger qui n’est pas ressortissant d’un État membre de l’Union européenne est punie d’une peine d’emprisonnement d’un an et d’une amende de 3 750 € (article L 621-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile). Est qualifié crime ou délit flagrant le crime ou le délit qui se commet actuellement, ou qui vient de se commettre. Il y a aussi crime ou délit flagrant lorsque, dans un temps très voisin de l’action, la personne soupçonnée est poursuivie par la clameur publique, ou est trouvée en possession d’objets, ou présente des traces ou indices, laissant penser qu’elle a participé au crime ou au délit (article 53 du code de procédure pénale).
Dans les Hautes-Alpes, les militants de Génération identitaire
sont passibles de poursuites
Le ministère de la Justice a rappelé l’existence de deux infractions « visant les comportements hostiles à la circulation des migrants ».
C’est un rappel de la loi qui a relancé la polémique. Le procureur de Gap a été amené à révéler, vendredi 11 mai, de révéler l’existence de plusieurs procédures à l’encontre du groupe Génération identitiaire (GI) après la publication, le 4 mai, d’une circulaire du ministère de la Justice, dont le contenu a été révélé par Mediapart mercredi et consulté par Le Monde vendredi. Le ministère y rappelait à tous les procureurs de France l’existence d’infractions « visant les comportements hostiles à la circulation des migrants ».
Une semaine plus tôt, le procureur de Gap avait classé sans suite une enquête ouverte après que des militants du mouvement Defend Europe, lié au groupe d’extrême droite Génération identitaire (GI), s’étaient enorgueillis d’avoir « raccompagné » des migrants à la frontière franco-italienne dans la nuit du 26 au 27 avril. Ils faisaient alors déjà parler d’eux depuis le 21 avril, date à laquelle ils avaient bloqué un col des Hautes-Alpes à l’aide de grillages en plastique pour empêcher des migrants d’entrer sur le sol français.
Le parquet n’avait alors établi « aucune infraction pénale susceptible d’être reprochée à l’encontre de quiconque », provoquant la colère des associations d’aide aux migrants.
Il en existe pourtant, selon le ministère, qui se défend toutefois d’avoir voulu intervenir dans cette affaire. « Suite à plusieurs incidents en lien avec des passages à la frontière de migrants, plusieurs procureurs avaient interrogé la Chancellerie par l’intermédiaire des procureurs généraux, explique Rémy Heitz, auteur de la circulaire et directeur des affaires criminelles et des grâces au ministère. Ces textes sont rarement appliqués, notre objectif était de rappeler l’état du droit afin que l’État puisse apporter une réponse coordonnée. »
La circulaire – qui rappelle également les délits dont sont passibles les personnes qui viennent en aide aux migrants et les immunités dont elles peuvent bénéficier – fait référence à deux infractions du chapitre « De l’usurpation de fonctions » du code pénal qui permettraient de poursuivre les militants identitaires.
La première, « l’immixtion dans une fonction publique », est passible de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende (article 433-12 du code pénal). « Le contrôle du respect des frontières, par la surveillance visuelle ou l’édification d’obstacles, par des personnes hostiles à la circulation des migrants (notamment des militants se revendiquant de la mouvance identitaire) » sont susceptibles de caractériser ce délit, tout comme « la reconduite à la frontière des migrants par ces mêmes personnes, y compris sans violence ».