« Tout de suite dans Les Pieds sur terre, c’est une histoire de ce genre, bien de chez nous, en moins imaginatif peut-être, mais nettement plus perverse, un homme toxique, menteur, manipulateur, dangereux, raconté par une victime, courageuse. »
C’est l’intro de France Cul, sur l’image troublante d’un homme, probablement blanc, qui menace une femme, probablement noire, mais on peut se tromper, car tout est à contre-jour.
La pleurniche féministe fondée sur la diabolisation de l’homme est pour nous une occasion permanente de rire, un vrai plaisir de sales gosses. Quelque part, c’est rassurant d’être érigés en monstres par un troupeau de cruches, qui, à l’arrivée, ne font de mal qu’à elles-mêmes : un, elles voient le mal partout dans le mâle (les fameux 30 points qui définissent un PN) ; deux, elles ne peuvent plus faire couple, et sont parties pour souffrir de solitude éternelle. Autant dire qu’elles se condamnent toutes seules. Les pleureuses (et on se moque des pleureuses orientales ?) payent doublement leur ignorance.
Toujours à l’affût d’une souffrance féminine et d’un sadisme masculin, France Cul a donc retenu l’histoire de Léa, qui témoigne à voix découverte : elle a vécu une relation toxique !
L’histoire de la toxicité de Jérôme est surtout l’histoire de la sottise de Léa, car un prédateur aussi grossier ne peut que matcher avec une herbivore aussi grossière. Au début de la relation, idéale, Léa se fait acheter, on va le voir, car Jérôme n’est pas son genre de mec. Le baratin a fonctionné. Mais un baratineur ne peut pas exister sans une baratinable.
À homme toxique, femme toxico !
Léa se fait corrompre par faiblesse. Jérôme sait flatter la vanité et la cupidité de la femme : la victime se fait acheter avec un week-end en Italie où Jérôme paye tout. Léa est gênée mais elle accepte, ravie en son for intérieur d’être traitée comme une princesse, alors que Jérôme a tout simplement un fonctionnement de mac.
Le réel, c’est souvent tout con : Léa est féministe, ou l’est devenue après son trauma, mais on l’achète comme une future fille de joie. Jérôme, ce prédateur ordinaire (n’importe quelle femme intelligente verrait venir l’escroc à douze kilomètres), a senti le potentiel de crédulité de la femelle. Et il l’exploite progressivement : au début, il sème, il investit, et après, il ramasse la mise. C’est dans l’ordre naturel des choses, celui de la relation prédateur-proie. Évidemment, pour la proie, qui va se faire bouffer, ça dégénère : Léa ne connaît pas encore le principe de l’entropie. Comme quoi, la connaissance, ça sert, des fois.
« Je me rends compte qu’il est hyper jaloux et hyper étouffant, mais en même temps chuis heureuse quand même, pasque, euh, on vit tous les deux, il a fini par venir, donc ça me rassure aussi, mais dès que je reçois un message, “mais qui c’est ?, pourquoi il t’écrit, mais qui c’est qu’t’as vu aujourd’hui ?, tu m’as dit qu’t’étais là mais j’ai pas vu ta voiture”, enfin vraiment, il a une jalousie excessive. Et ça empirait, ça empirait. »
L’homme toxique, c’est le trophée de la féministe
On comprend que cette histoire – au fond affreusement banale d’une connasse amoureuse d’un connard –, pour Léa, c’est l’histoire de sa vie, qu’elle a dû raconter cent fois à toutes ses copines et à sa psy, comme un joyau, un trésor, une distinction, la légion d’honneur de la souffrance féminine ! C’est le marqueur de son existence, sa singularité, sa supériorité sur les autres femmes car elle, elle a vécu avec le diable, elle a vécu l’enfer, elle revient de l’enfer et elle témoigne, comme une survivante, une déportée.
Ouais, là on est dans la victimisation la plus pure, on touche aux fondamentaux de la victimisation.
Naturellement, la vie de Léa est suffisamment creuse pour qu’on puisse y fourrer n’importe quoi, et qu’un petit malin s’y fourre entièrement. Léa incarne cette ouverture, ce manque de vie et de contenu. Le vide féminin, c’est la chair du prédateur !
La jalousie excessive de cet homme qui la domine et l’emprisonne la rassure paradoxalement, cela la rend fière et unique. Même si ce qui était autrefois merveilleux s’est transformé en cauchemar. Une femme prisonnière d’un homme comme une princesse dans un donjon (en l’occurrence un peu SM), quelle meilleure preuve d’amour fou ? Le discours féministe, après coup, vient faire de cette gourde une repentie, alors qu’elle a dû être flattée d’avoir, une fois dans sa vie, pris autant d’importance pour quelqu’un. Elle est devenue précieuse, elle a pris une valeur inestimable pour l’homme qui l’a enlevée. Un salaud, oui, mais qui d’autre ferait ça pour elle ?
C’est bien là le nœud du problème : un mec normal – non toxique – qui vivrait avec elle sans devenir son geôlier, qui la laisserait libre de ses mouvements, ne lui donnerait pas la valeur que Jérôme lui a donnée. Ce grand amour (provisoire) a un prix. Tout se paye.
Moralité
Jérôme a donné une bonne leçon de vie à Léa, qui est ressortie un peu secouée, mais plus riche, plus consciente de la relation, donc d’elle-même. Elle en a appris un bout sur elle, et c’était pas gagné. Elle peut donc remercier Jérôme, qui l’a révélée.
Léa, si elle se refait, comme au poker, va évidemment s’ennuyer avec son nouveau mec, qu’elle aura choisi non étouffant, féministe, peut-être soumis. D’où notre définition de l’homme toxique : celui qui soumet la femme. Celui qui remplit les cruches pour les vider ensuite. Pour rassurer celles qui nous lisent, cette soumission, si elle est faite intelligemment, peut être très agréable pour les deux parties.
Ce sont les connes qui tombent sur les mecs toxiques. Elles peuvent leur dire merci.