Les 6 et 9 août 1945, Hiroshima et Nagasaki sont la cible des deux premiers bombardements nucléaires de l’histoire. Presque partout dans le monde, la curiosité et la fascination l’emportent sur l’effroi… Mais plus de 200 000 morts et un cortège de graves pathologies frappant les blessés autorisent enfin, dans les mois qui suivent, des questions sur la nécessité de recourir à ces armes dévastatrices face à un ennemi déjà exsangue. Pour autant, les décisionnaires américains étaient-ils pleinement conscients de disposer d’un instrument de guerre aussi destructeur qu’immoral ?
Après le test réussi de la première bombe le 16 juillet 1945, le président Truman ne jugea pas utile d’attendre les analyses des retombées radioactives. Pourtant, les troupeaux qui paissaient à proximité ne tardèrent pas à perdre leur pelage et à décliner ; était-ce suffisant pour décourager l’usage d’une arme qui devait "seulement" détruire une énième ville ? Dresde et Hambourg, en Allemagne, et beaucoup d’agglomérations japonaises n’avaient-elles pas déjà subi l’apocalypse ? Sans doute.
Mais l’absence – volontaire – d’interrogation américaine sur les conséquences sanitaires de la bombe a généré la conviction de ne pas violer les lois de la guerre. Le 25 juillet, Truman lui-même voulut se convaincre, dans son journal, que "l’objectif n’était que militaire".
L’historien Nicolas Bernard explique :
"On peut se demander pourquoi les décideurs américains n’ont pas cherché à éviter l’emploi de la bombe atomique, alors que d’autres options existaient. Mais, aux États-Unis, la population était lasse du conflit, enfin gagné en Europe. Truman entendait donc en finir au plus vite. Le débarquement au Japon laissait craindre des pertes importantes, même si les stratèges américains les ont largement surévaluées. En bref, les Etats-Unis ont employé la bombe parce qu’ils le pouvaient."