L’archevêque de Lyon a été reconnu coupable de non-dénonciation d’atteintes sexuelles et condamné à six mois de prison avec sursis, le 7 mars. Le pape veut attendre le jugement en appel.
Le cardinal Philippe Barbarin demeure finalement archevêque de Lyon. Le pape François, à qui il a présenté sa démission lundi 18 mars, à Rome, l’a refusée « en invoquant la présomption d’innocence », comme l’a précisé le prélat dans un communiqué publié par le site de son diocèse, mardi.
Prise dans l’attente que l’appel de la condamnation du primat des Gaules soit jugé, cette décision du pontife argentin risque d’accroître le désarroi des catholiques français face à une affaire qui dure depuis déjà trois ans et demi, et d’entretenir le doute sur la résolution de l’Église catholique à appliquer une politique de tolérance zéro contre les pédocriminels et les évêques qui les protègent.
Le cardinal Barbarin avait annoncé son intention de demander à être relevé de sa charge épiscopale après avoir été condamné à six mois d’emprisonnement avec sursis pour non-dénonciation d’atteintes sexuelles sur mineurs de quinze ans par le tribunal correctionnel de Lyon, le 7 mars. Il avait été renvoyé devant ce tribunal à la suite d’une plainte déposée par des membres de l’association La Parole libérée, fondée par des victimes du prêtre Bernard Preynat, mis en examen pour des agressions sexuelles commises dans les années 1970 et 1980 sur de jeunes scouts de Sainte-Foy-lès-Lyon (Rhône).
« L’erreur de trop »
La référence au respect de la présomption d’innocence signifie que le pape François a tenu compte de la décision du cardinal Barbarin de faire appel de sa condamnation, qui n’est donc pas encore définitive. Mardi soir, sur la chaîne KTO, le prélat français a confirmé que ses avocats avaient rédigé une note à l’attention du pape sur les perspectives de l’appel. « Je n’allais pas refuser de la remettre [au pape] », a-t-il glissé.
Dans cette affaire, le pontife argentin avait déjà exprimé sa volonté de laisser la procédure judiciaire aller à son terme. Interrogé sur une éventuelle démission de l’archevêque de Lyon par le quotidien La Croix en mai 2016, François avait répondu : « Non, ce serait un contresens, une imprudence. On verra après la conclusion du procès. Mais maintenant, ce serait se dire coupable. » À la tête d’une Église universelle, le pape doit aussi adopter une « politique » applicable dans tous les pays où elle est implantée, y compris là où les garanties d’indépendance de la justice sont limitées.
Mais en France, cet argument aura sans doute du mal à convaincre. Du côté des victimes, c’est évident. François Devaux, cofondateur de l’association La Parole libérée, a qualifié cette décision du pape comme « l’erreur de trop ». « Je crois que cet homme-là [le pape] va réussir à tuer l’Église », a-il déclaré à l’AFP.