Avant-propos de Mark Weber
Pour les Allemands, 1932 était l’année du chômage de masse, de la paralysie économique, et d’un système politique en panne. La crise économique mondiale connue aux USA sous le nom de « Grande dépression » avait réduit en miettes la production et la vie économique. C’était aussi une année électorale intense avec quatre élections nationales farouchement disputées – deux pour le Reichstag ou Parlement, et la campagne présidentielle à deux tours.
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Lors de la campagne présidentielle de 1932, les partis de l’establishment de l’Allemagne, y compris ceux de la gauche Sociale-démocrate et les partis du centre soutenaient Paul von Hindenburg, le sortant âgé de 84 ans qui occupait la fonction de Reichspräsident depuis 1925. Son adversaire le plus redoutable était Adolf Hitler alors âgé de 43 ans et chef de file des nationaux-socialistes. Lors de l’élection du 13 mars, aucun candidat ne reçut de majorité claire même si 30% votèrent pour Hitler et 13 % pour les communistes. Ceci enclencha une nouvelle fiévreuse campagne électorale pour le second tour fixé au 10 avril qui vit Hindenburg l’emporter avec 53 % des votes, ce qui lui permit de rester Président.
Pour suivre cet épuisant début d’année électorale, il y eut les confrontations pour les mandatures des Länder. Lors de l’élection du 24 avril, dans plusieurs Länder, les nationaux-socialistes émergèrent comme le parti le plus populaire. La victoire du mouvement d’Hitler était la plus nette en Prusse – de loin le plus peuplé des Land avec trois cinquièmes de la population.
Lors de la féroce compétition pour l’élection du Reichstag du 31 juillet qui vit une participation record de 84 %, les nationaux-socialistes apparurent comme étant, de loin, le plus grand parti avec 37 % des suffrages. Les sociaux-démocrates arrivèrent seconds avec 22 % suivis par le parti communiste à 15 %. À la suite de la dure bataille pour l’élection pour le Reichstag du 6 novembre, les nationaux-socialistes sortirent une nouvelle fois vainqueurs avec 33 % des votes. Les sociaux-démocrates étaient à la traîne avec 20 %, suivis des communistes à 17 %.
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« Grâce aux extraordinaires talents de son chef, la forte attractivité de sa propagande, et le succès de ses stratagèmes pour approcher des organisations de la Mittelstand [la classe moyenne] », note l’historien Gordon Craig, « Le parti national socialiste dégageait de la force et de la confiance… »
L’élément déterminant de l’attractivité du parti résidait dans son appel solennel pour l’unité nationale et pour un dévouement désintéressé au bien commun. C’était peu courant à l’époque.
« En contraste avec presque tous les autres partis de la période de Weimar » remarque le Professeur Craig, « Le Parti national-socialiste ne dirige pas sa propagande en direction d’une seule classe sociale ou économique ou groupe d’intérêt. »
En s’adressant consciencieusement à tous les Allemands – sans considération de classe, de région ou de religion – le mouvement d’Hitler devint le premier parti « moderne » du pays.
Hitler travaillait aussi plus que n’importe quel autre leader politique. Il sillonnait le pays en avion (le premier homme politique à la faire au monde) pour tenir de grands meetings, parfois plusieurs par jour. Durant l’année 1932, il fit 209 discours en public. Pour la seule journée du 27 juillet, Hitler assista à un rassemblement de 60 000 personnes à Brandebourg, puis à presque autant à Potsdam, et le soir il s’adressa à une audience de 120 000 personnes réunies dans un grand stade à Berlin, tandis que 100 000 autres pouvaient entendre sa voix à l’extérieur par des haut-parleurs. Le 20 juillet, le mauvais temps retarda son arrivée par avion et voiture pour assister au rassemblement de masse de Stralsund, qui devait se tenir à 9 heures du soir. À minuit, il a été annoncé au public du rassemblement en plein air, 20 000 personnes, que Hitler arriverait à 1h30 du matin. Ils patientèrent et ce ne fut finalement qu’à 2h30 du matin que la foule put l’entendre.
La capacité d’une rare qualité chez Hitler à présenter ces vues clairement et de manière convaincante aussi bien à des individus qu’à de vastes audiences, et la capacité de gagner la confiance et la fidélité d’hommes d’exceptionnelle valeur et de s’adjoindre leur collaboration, auront été décisives pour construire et maintenir une grande organisation nationale, dirigée avec professionnalisme.
« De toutes les figures proéminentes de la période Weimar », explique le Professeur Craig de l’université Stanford, « il |Hitler] est le seul dont on puisse dire qu’il possédait le génie politique. »
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Deux semaines avant l’élection de juillet 1932 pour le Reichstag, le Parti national-socialiste édita un enregistrement phonographique de son leader. Quelque 50 000 disques comportant ce « discours souche » d’Hitler intitulé « Appel à la nation », ont été pressés et distribués. Cet effort était d’autant plus indispensable que le gouvernement allemand qui contrôlait le réseau de radiodiffusion avait pris soin d’interdire la voix d’Hitler à la radio.
Ce message, d’une longueur d’un peu plus de huit minutes, est la seule allocution enregistrée par Hitler pour la campagne électorale de 1932. Il s’y exprime avec emphase mais clairement, remettant l’accent sur des points qu’il avait abordés dans de nombreux autres discours cette année. Il ne ménage pas ses critiques envers les autres partis pour leur échec dans la lutte contre les plaies économiques de la nation ainsi que pour leurs perspectives étroites et antagonistes. Seuls les nationaux-socialistes, insiste-t-il, s’engagent corps et âmes pour le bien-être de tous les Allemands.
Voici la traduction de texte complet d’Hitler pour la campagne électorale de 1932 « Appel à la Nation » :
Plus de 13 années ont été allouées par le destin pour tester et évaluer ceux qui sont au pouvoir aujourd’hui. Mais eux-mêmes ont rendu le verdict le plus sévère possible en reconnaissant dans leur propre propagande l’échec de leurs efforts. Ils voulaient autrefois gouverner l’Allemagne mieux que par le passé. Aujourd’hui, cependant, le seul résultat réel de leur style de gouvernement est simplement de constater que l’Allemagne et le peuple allemand vivent toujours. Pendant les jours de novembre 1918 [quand une république démocratique libérale remplaça la monarchie], ils s’engagèrent solennellement à conduire notre peuple, et en particulier le travailleur allemand, vers un meilleur avenir économique. Aujourd’hui, après avoir eu près de 14 ans pour tenir leurs promesses, ils ne sont pas en mesure prendre à témoin le bien-être d’une seule classe sociale allemande pour attester de la qualité de leurs efforts.
L’agriculteur allemand est appauvri. La classe moyenne est ruinée. Les espoirs sociaux de plusieurs millions ont été détruits. Un tiers des hommes et des femmes allemands en âge de travailler sont au chômage et donc sans revenu. Le gouvernement national, les municipalités et les États sont lourdement endettés, les finances sont dans un désordre général et toutes les caisses sont vides.
Que pouvaient-ils avoir détruit de plus ? Le pire, cependant, est la destruction de la foi en notre pays, l’élimination de tout espoir et de toute confiance. En 13 ans, ils n’ont pas réussi à mobiliser les forces qui sommeillent en notre peuple. Au contraire ! Parce qu’ils craignent un réveil de la nation, ils ont joué un groupe de personnes contre un autre : la ville contre la campagne, les salariés contre les fonctionnaires, ceux qui travaillent avec les mains contre ceux qui travaillent avec la tête, les Bavarois contre les Prussiens, les catholiques contre les Protestants, etc., et inversement.
L’énergie de notre peuple a été épuisée au plan national. Quant au plan international, tout ce qui reste sont des chimères : de vaines espérances en la conscience morale d’une humanité civilisée, le droit international, une conscience mondiale, des conférences d’ambassadeurs, la Ligue des Nations, la Seconde Internationale, la Troisième Internationale, la solidarité prolétarienne et ainsi de suite –, et le monde nous a traités en conséquence.
C’est ainsi que l’Allemagne a lentement décliné et seul un fou peut espérer que les forces qui sont à l’origine de ce déclin peuvent maintenant conduire à sa résurrection. Si les partis politiques en place veulent sérieusement sauver l’Allemagne, pourquoi ne l’ont-ils pas déjà fait ? S’ils voulaient vraiment sauver l’Allemagne, pourquoi cela ne s’est-il pas produit ? Si les dirigeants de ces partis avaient des intentions honnêtes, alors c’est que leurs programmes devaient être déficients. Si, par contre, leurs programmes étaient corrects, alors soit leurs intentions n’étaient pas sincères, soit ils étaient trop ignorants ou trop faibles.
Maintenant, après 13 années au cours desquelles ils ont tout détruit en Allemagne, le moment est enfin venu pour leur élimination. Que les actuels partis politiques parlementaires survivent ou non n’est pourtant pas ce qui importe. L’essentiel est de s’assurer que la nation allemande ne soit pas complètement détruite.
Chasser ces partis est donc un devoir – car, pour assurer leur propre existence, ils doivent déchirer et déchirer encore la nation. Pendant des années, ils ont essayé de persuader le travailleur allemand que lui seul pouvait se sauver. Pendant des années, on a dit à l’agriculteur que seule son organisation pouvait l’aider. La classe moyenne devait être arrachée aux griffes de la ruine par les partis de la classe moyenne et l’économie par les parties du monde des affaires. Le catholique devait chercher refuge auprès du parti du Centre et le protestant au service populaire chrétien-socialiste. En fin de compte, même les propriétaires ont eu leur propre représentation politique, tout comme les locataires, les salariés et les fonctionnaires. Ces efforts visant à diviser la nation en classes, en couches sociales, en groupes professionnels et en croyances religieuses, menant ainsi progressivement vers un avenir de bonheur économique, ont toutefois complètement échoué.
Dès le jour de la fondation de notre mouvement national-socialiste, nous étions convaincus que le destin de l’individu allemand était indissociable du destin de la nation tout entière. Lorsque l’Allemagne déclinera, le travailleur ne s’épanouira pas dans le bien-être social, pas plus que l’entrepreneur. Les fermiers ou la classe moyenne ne pourront pas non plus se sauver eux-mêmes.
Non, la ruine du Reich, le déclin de la nation, signifie la ruine et le déclin de tous ! Et aucune faction religieuse et aucun groupe ethnique allemand ne pourront échapper au destin commun.
Dès le jour de la fondation de notre mouvement national-socialiste, nous avions déjà compris depuis longtemps que le prolétariat ne serait pas le vainqueur de la bourgeoisie et que la bourgeoisie ne serait pas le vainqueur du prolétariat, mais plutôt que de cette confrontation seule la haute finance internationale sortirait vainqueur. Et c’est ce qui est arrivé !
Reconnaissant ce déclin, il y a 13 ans, une poignée de personnes et moi avons organisé un nouveau mouvement qui, en son nom même, [national-socialiste] proclame la nouvelle communauté nationale. Il n’y a pas de socialisme possible sans le soutien d’une volonté directrice ni de bien-être social qui ne trouve sa garantie et même ses prérequis dans le pouvoir de la nation. Et il n’existe rien de tel qu’une nation – et par conséquent rien de tel que le nationalisme – si l’armée des millions qui travaillent avec leur cerveau n’est pas rejointe par l’armée des millions qui travaillent avec leurs mains et par l’armée des millions d’agriculteurs.
Tant que le nationalisme et le socialisme avanceront comme des idées séparées, elles seront vaincues par leurs opposants unis. Le jour où les deux idées seront fusionnées, elles seront invincibles !
[...]
Il y a treize ans, nous, les nationaux-socialistes étions moqués et tournés en ridicule. Aujourd’hui, nos adversaires ne rient plus. Une communauté de personnes loyales est née pour surmonter progressivement la folie des préjugés de classe et le snobisme du statut social. Une communauté de gens fidèles qui est résolue à se battre pour la préservation de notre peuple, non pas parce qu’elle est composée de Bavarois ou de Prussiens, de Württemberg ou de Saxe, ni parce qu’ils sont catholiques ou protestants, travailleurs ou fonctionnaires, bourgeois ou salariés, etc., mais parce qu’ils sont tous Allemands.
[...]
Le Tout-Puissant, qui jusqu’à présent nous a permis de passer de sept à 13 millions d’hommes en 13 ans, permettra à ces 13 millions de redevenir un peuple allemand. C’est en ce peuple que nous croyons, pour ce peuple que nous combattons ; et c’est pour ce peuple que nous sommes disposés, comme des milliers de camarades avant nous, si nécessaire, à nous engager corps et âme.
Si la nation fait son devoir, alors viendra inévitablement le jour qui nous restituera un Reich dans l’honneur et dans la liberté, avec du travail et du pain !