Laissez-nous une chance de nous expliquer avant de nous exécuter d’un « encore un truc pour faire du flux ». Ce n’est pas du tout ça, et ça l’est d’une certaine façon. Nous sommes tombés sur cette vidéo qui montre un couple de Français plongé en Australie dans une fosse infestée par un seul crocodile de mer, mais quel crocodile : Burt, 5 mètres, une tonne !
Burt ne serait pas contre manger de l’homme, nous explique la voix off. Maintenant, tout le monde a vu les 3’53 avec Burt et le jeune couple de Français. Rien ne vous saute aux yeux ?
On s’adresse plus particulièrement aux hommes. Certes Burt est une sacrée bestiole, et les mecs ont une tendresse pour les prédateurs. On préfère voir un docu sur un croco assassin (nous on n’a pas le droit, c’est peut-être pour ça, ça doit réveiller un instinct enfoui sous la couche de civilisation) que sur Bambi et sa maman qui broutent dans la forêt. Les filles préfèrent les mamans pandas avec leurs bébés, les koalas mignons (ils sont pourtant supercons), surtout pas de sang, pas de conflit. Il y a une différence des goûts et inclinations basée sur la différence des sexes, c’est évident. Même Najat Belkacem accepterait difficilement que sa fille veuille changer de sexe à 11 ans, histoire de faire comme les LGBT le professent.
On repose la question : à part Burt, quelque chose vous a-t-il marqué dans ce court reportage ?
Soudain, inexplicablement, le message se brouille, le reportage bascule
Non ? Oui ? Oui, les seins de la brune (à 2’20). L’opulente poitrine de la jolie brune. On clique pour voir du croco partir à la guerre, si possible avec une bonne « go to war music » comme disent les Marine’s qui écoutent du Motorhead en Afghanistan, et on tombe sur une brune bien bustée (BBB) qui fait comme si de rien n’était. Et alors ? Tout ça pour faire du flux ? Pas du tout. Ne zappez pas, on va monter d’un cran dans l’intelligence des choses.
Voilà une excellente métaphore de l’information, de la propagande et de l’Internet. Le reportage est comme un message de propagande, par lequel l’oligarchie veut que le public focalise sur le croco. C’est normal, le croco fascine, c’est rare et dangereux, et le public est rapidement captif. Mais, au milieu de cette séquence de captation/capture du public, surgit un élément imprévu qui détourne l’attention.
Le combat Burt/BAGS
C’est le dérapage de cognition, ou biais cognitif. La brune-à-gros-seins (BAGS) prend le pas sur le croco-tueur. Si tout le monde voit la brune, une partie s’y arrête, et cette partie du public fait à son corps défendant du reportage initial un reportage sur BAGS. Le message dominant prend un sens inattendu, déviant, qui est aussi sinon plus réel que le premier. L’attention d’une partie du public change de route et passe de « croco » à « BAGS ». Le message initial a été détruit par le nouveau.
Cependant, ceux chez qui le message prend un autre sens, et un sens supérieur, ne sont pas à l’aise avec cette déviance. Ils ne le crient pas sur les toits car pour la majorité, il s’agit d’un reportage sur Burt, et pas BAGS. On peut le voir jusque dans les coms : il faut une douzaine d’intervenants normaux ou normés – c’est-à-dire qui vont dans le sens du message dominant – pour qu’un spectateur remarque BAGS : c’est celui qui parle des « boobs ». Son message dérange, il paraît incongru, son auteur lui-même devient incongru, et pourtant il a indubitablement raison. Il éprouve de la gêne sociale, une gêne induite par le rapport des masses entre les croyants (à la version Burt) et les incroyants (à la version BAGS). Des incroyants qui sont de fait de nouveaux croyants.
La vérité est le message porté par BAGS, et le mensonge ou fausse vérité celui porté par Burt. La vérité affleure, mais ne domine pas. Elle est comme une mauvaise herbe, surgit quand on ne l’attend pas, et elle est difficile à éradiquer.
Vérité impure contre pure vérité
Burt contre BAGS, c’est exactement ce que vivent ceux qui s’abreuvent à l’information non conventionnelle (de convention, ce qui est établi par consensus, mais un consensus établi par le haut) sur l’Internet. Ils se sentent décalés par rapport à la vérité officielle, qui n’est qu’une fausse vérité, celle qui arrange les organisateurs de la vérité officielle. Il est difficile de s’arracher à cette vérité apprise, enfoncée chaque jour que Dieu fait dans la tête de tous. Le Système met tout son poids dans cette vérité – c’est une fabrication – et c’est sa pondération et non la qualité de son message qui fait qu’elle emporte le morceau.
De la même façon, on croit plus facilement le mensonge du riche que la vérité du mendiant. En politique, l’habit fait le moine. La démocratie, finalement, n’est qu’un rapport de forces et de masses. En face, la pondération est faible pour un message fort, du coup la pure vérité est largement dominée par sa contrefaçon. Mais c’est oublier la foi.
La seule contre-pondération possible pour la vérité est la foi. Et on constate que vérité et foi vont toujours ensemble. C’est la foi qui fait pièce à la pondération du message du Système. La foi est donc la force opposée à la pression médiatique, une pression qui affecte la psychologie de ses victimes, qui les affaiblit mentalement à dessein. Cette pression officielle est mesurable, mais elle a beau être intense, elle ne peut détruire la foi, puisque la foi se nourrit de ses obstacles, de sa persécution.
Les vrais résistants sont donc des dominés qui ont la foi.
Ceux qui ne l’ont pas sont déjà morts.