Morceaux choisis de l’entretien donné par le PDG d’Universal Music France au quotidien l’Opinion le 28 décembre 2015. Il est principalement question d’argent, et aussi un peu de musique.
Cela fait 20 ans que Pascal Nègre préside (en partie) aux hautes destinées de l’industrie du disque en France. En 1994, il prend la tête de Polygram, qui devient Universal Music France en 1998. Arrivé alors que le secteur vivait une période dorée, il a depuis traversé une crise sans précédent, due à l’évolution des usages mais aussi au piratage. Alors que le marché semble retrouver des couleurs, l’Opinion a proposé au très médiatique président de faire le point sur l’état du marché.
Dans quel état est l’industrie du disque ?
Je suis arrivé lorsque le vinyle disparaissait et que la cassette était sur le point de tuer le business. Soudainement le CD est arrivé et j’ai eu la chance de prendre la présidence au moment où ce nouveau format a explosé. Le marché a progressé jusqu’en 2003, où la crise nous a fait perdre depuis 70% de notre chiffre d’affaires. Mais l’industrie n’est pas morte. L’artiste a besoin d’être entouré, il a besoin d’un producteur, qui va le pousser à aller le plus loin possible dans sa création artistique, puis fera en sorte de le médiatiser et le monétiser.
À l’heure d’Internet, ce rôle d’accompagnateur est-il toujours aussi important ?
Oui car le buzz ne suffit pas. Les artistes ont besoin d’être diffusés en radio et en télé. Ils doivent également tourner des clips qui tiennent la route et qui ne peuvent se faire qu’avec des apports financiers. Et puis, il y a la nécessité de travailler chaque pays de manière différente.
En septembre, un de vos groupes, U2, a signé un partenariat avec Apple pour distribuer gratuitement son album aux clients iTunes. Avec le recul, ce coup marketing était-il une bonne idée ?
Je ne sais pas si c’était bien ou pas bien. Ils ont choisi de faire et nous les avons suivis. iTunes nous a évidemment payés. En outre, ce qui intéressait U2, c’était la médiatisation grâce à une gigantesque campagne de publicité à la télévision dans le monde entier avec un de leurs titres. C’était leur choix.
Auriez-vous eu le choix de vous opposer à cette méthode ?
Le choix, on l’a toujours. Vous avez la vision d’une maison de disques qui formate tout, décide de tout, mais c’est faux ! L’artiste crée et nous l’accompagnons en lui donnant des idées. C’est que ce que nous avons fait dans ce cas-là. Quelque 80 millions de personnes ont écouté leur album, est-ce qu’autant l’auraient acheté ? C’est une vraie question.