Le message est clair : vous avez du temps, de l’argent, vous êtes généreux, votre petit cœur saute quand vous voyez les reportages (trafiqués) où de grands bateaux occidentaux sauvent des centaines de migrants à la limite de la noyade en mer alors que tout est arrangé depuis le départ ? Vous êtes mûr(e) pour héberger, aider, « tisser des liens quasi-familiaux » avec plusieurs migrants de votre choix. Mais surtout ceux qui arrangent l’oligarchie.
C’est le bonheur qui est arrivé à Simone, institutrice à la retraite, veuve et bénévole au Secours populaire (communiste). Non seulement elle a « aidé 4 migrants à trouver le bonheur dans la Creuse » (amateurs de jeux de mots s’abstenir), mais en plus elle a écrit l’article pour L’Obs, ce qui évite d’avoir à rémunérer un journaliste professionnel. On sent bien là la patte sociéto-libérale des trois actionnaires !
Tous les quatre sont passés par la jungle de Calais et se sont rencontrés pour la première fois dans le bus qui les amenait dans la Creuse. Progressivement, ils se sont confiés, ils m’ont parlé de ce qu’ils avaient vécu et de leur périple. De mon côté, j’ai lu des livres et des articles pour en savoir davantage sur les Kurdes d’Irak. La violence, les affrontements, les camps, la persécution, je n’avais aucune idée de ce qu’impliquait vivre dans un monde en guerre.
En plus, les migrants que Simone aide sont des Kurdes : parfait, exactement dans la ligne de mire de BHL, qui souhaite faire passer dans les médias français à sa botte l’idée d’un Kurdistan, histoire d’établir une base américano-israélienne antisyrienne et anti-iranienne au Proche-Orient. Et couper l’axe Moscou-Téhéran-Damas. Une base de 15 millions d’habitants qui permettrait de déléguer le sale boulot de gendarme de la région qui échoit à Israël et qui coûte tant en image à ce petit pays si détesté par ses voisins.
Eh oui, un Kurdistan comprenant le nord de la Syrie et le nord de l’Irak, nourri par les réserves de pétrole et de matières premières de Mosssoul et sa région, et nanti d’une armée aguerrie par plusieurs décennies de conflits, c’est bien l’objectif de la coalition occidentale. Depuis 1990 et la « libération » du Koweït, mais surtout depuis 2003 et l’écrasement de l’Irak, les Anglo-américains ont sanctifié cette même zone avec leur aviation. Pas touche au nord de l’Irak ! Prise de guerre en vue du plan Grand Moyen-Orient !
Alors Simone, du haut de ses 71 ans de bons et loyaux services d’institutrice, avec ses petites mains qui s’offrent au Secours populaire local, ne peut pas envisager le plan d’ensemble, the Big Picture. Simone, elle est nourrie à la presse de gauche, bien menteuse, bien manichéenne, bien occupée, bien manipulée. Elle obéit aux injonctions qu’y glissent les vrais formateurs de la pensée déguisés en journalistes.
Tous ont leur propre histoire. Il y a Abbas, 32 ans, diplômé d’économie et ingénieur, parlant parfaitement l’anglais et qui au fil des mois s’est investi dans la vie associative de Guéret. En ce moment, il se prépare pour réaliser un marathon. Dans quelques semaines, je l’accompagnerai à l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) pour qu’il obtienne son statut de réfugié.
Et puis, j’ai aussi fait la connaissance de Pasha, un jeune de 23 ans, à la recherche d’une formation ou d’un emploi. Zana, 24 ans, lui, apprend le français. Tout comme Khalid, avec qui j’ai un peu perdu le contact, mais qui me donne régulièrement de ses nouvelles.
Actuellement, ils vivent tous dans un appartement à Guéret où ils disposent de leur propre chambre.
Le bénévolat de Simone n’est pas en cause. Son élan de solidarité vers ses frères, ou plutôt son élan de maternité vers ses « fils » humains est honorable. Cependant, et c’est le symbole de la France d’aujourd’hui, sa générosité chrétienne (Simone est de gauche mais les valeurs sont un peu les mêmes) est détournée par les rois de l’ingénierie sociale. Tout notre pays est en proie à la même pathologie : il ne décide pas de son destin, de ses frontières, de sa parole. Une autre entité parle à notre place, décide à notre place, et recompose le pays à notre place.