Dans sa grande générosité, la ministre de la Culture veut élargir l’attribution de fonds publics à de nouveaux journaux. Mais elle a trouvé une astuce pour que la mesure ne bénéficie pas à des titres très à droite.
Charlie Hebdo, Le Monde diplomatique, Society ou encore Le 1 : ces titres ne touchent pas de fonds publics au titre des aides au pluralisme de la presse, contrairement à leurs confrères des quotidiens L’Humanité, La Croix ou Libération. Une anomalie pour Fleur Pellerin, qui a lancé une réforme destinée à élargir l’attribution de ces subsides, qui représentaient un total de 9 millions d’euros en 2014. Mais la ministre de la Culture veut filtrer. Pas question d’être accusée de financer des hebdomadaires comme le très droitier Valeurs actuelles ou l’extrémiste Rivarol.
Pour cela, Fleur Pellerin a un plan. Elle l’a livré succinctement le 2 novembre, au détour d’une intervention devant la commission des affaires culturelles de l’Assemblée nationale, comme l’a relevé la Correspondance de la presse. Evoquant l’extension des aides au pluralisme aux périodiques, Fleur Pellerin a indiqué que cette réforme serait « mise en œuvre avec une condition qui est l’absence de condamnation pénale pour incitation à la haine raciale » – contacté pour des précisions, son cabinet n’a pas encore répondu à nos sollicitations.
Pour comprendre cette décision, il faut se plonger dans l’usine à gaz des aides à la presse. Celles-ci sont de deux types : indirectes et directes. Les aides indirectes ne sont en réalité pas de l’argent versé aux journaux, mais des remboursements auprès de La Poste, qui accorde en échange des tarifs réduits aux titres de presse pour leur diffusion. Les aides directes sont, elles, attribuées aux journaux « à faibles ressources publicitaires ». Or, seuls les quotidiens en bénéficient jusqu’alors, ce qui explique pourquoi un titre comme Charlie Hebdo en est privé. Fleur Pellerin souhaite donc élargir le cercle, mais en excluant les journaux condamnés.